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27/05/2025 | FRANCE | N°52500551

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 mai 2025, 52500551


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


JL10






COUR DE CASSATION
______________________




Arrêt du 27 mai 2025








Cassation partielle




Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 551 F-D


Pourvoi n° S 24-11.565




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
___________________

______




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MAI 2025


La société Mutualité française Sud-Rhône-Alpes, société mutualiste, dont le siège est [Adresse 3], venant aux droits de la mutuelle Aesio santé Su...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JL10

COUR DE CASSATION
______________________

Arrêt du 27 mai 2025

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 551 F-D

Pourvoi n° S 24-11.565

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MAI 2025

La société Mutualité française Sud-Rhône-Alpes, société mutualiste, dont le siège est [Adresse 3], venant aux droits de la mutuelle Aesio santé Sud-Rhône-Alpes, a formé le pourvoi n° S 24-11.565 contre l'arrêt rendu le 16 janvier 2024 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [J] [E], domiciliée [Adresse 2],

2°/ au syndicat CGT Aesio santé Sud-Rhône-Alpes, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Deltort, conseiller, les observations écrites de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Mutualité française Sud-Rhône-Alpes, de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme [E], après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Deltort, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 16 janvier 2024) et les productions, Mme [E] a été engagée en qualité d'agent à domicile par l'Union des mutuelles de la Drôme, devenue la Mutualité française Sud-Rhône-Alpes, suivant contrat de travail à temps partiel modulé du 30 mars 2007, la durée mensuelle de travail ayant été augmentée, suivant avenant, à compter du 1er janvier 2018.

2. Le 11 février 2021, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de demandes en requalification de son contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps complet et en paiement de diverses sommes, notamment à titre de rappel de salaire et de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

3. Le syndicat CGT Aesio Sud-Rhône-Alpes (le syndicat) est intervenu volontairement à l'instance.

Examen des moyens

Sur le moyen relevé d'office

4. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article L. 212-4-6 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005, et les articles 21, 26 et 5 de l'accord de branche du 30 mars 2006 relatif aux temps modulés dans la branche de l'aide à domicile :

5. Selon le premier de ces textes, une convention ou un accord collectif étendu ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire ou mensuelle peut varier dans certaines limites sur tout ou partie de l'année à condition que, sur un an, la durée hebdomadaire ou mensuelle n'excède pas en moyenne la durée stipulée au contrat de travail. Le contrat de travail mentionne la qualification du salarié, les éléments de sa rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle de référence.

6. Selon le deuxième, le contrat de travail à temps partiel modulé comporte les mentions relatives à la contrepartie des articles 24 et 26 de l'accord.

7. Aux termes du troisième, en contrepartie à la mise en place du temps partiel modulé, pourra être indiqué au contrat de travail du salarié le principe d'une plage de non-disponibilité du salarié, dans la limite d'une journée ouvrable par semaine. Si l'employeur demande au salarié de venir travailler pendant cette plage de non-disponibilité, le salarié est en droit de refuser l'intervention sans que lui soit opposable le nombre de refus indiqués à l'article 5 du présent accord.

8. Selon le quatrième, les horaires de travail sont précisés aux salariés par écrit lors de la notification du planning d'intervention pour le personnel d'intervention. La notification du planning a lieu selon une périodicité mensuelle, par remise en main propre au salarié ou par courrier. Les plannings sont notifiés au salarié au moins sept jours avant le premier jour de leur exécution. Afin de mieux répondre aux besoins des usagers, de faire face à la fluctuation des demandes inhérentes à l'activité, et d'assurer une continuité de service, les changements des horaires de travail peuvent être modifiés dans un délai inférieur à sept jours et dans la limite de quatre jours, sauf les cas d'urgence. En contrepartie d'un délai de prévenance inférieur à sept jours, le salarié à la possibilité de refuser quatre fois, par année de référence, la modification de ses horaires sans que ce refus ne constitue ni une faute, ni un motif de licenciement.

9. Pour requalifier le contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps complet et condamner l'employeur au paiement d'un rappel de salaire, l'arrêt relève qu'il résulte des dispositions de l'accord de branche que le contrat de travail à temps partiel modulé doit prévoir « une plage de non-disponibilité du salarié, dans la limite d'une journée ouvrable par semaine ». Il ajoute qu'il ne peut être retenu, malgré l'emploi du verbe « pouvoir » conjugué au futur, à l'article 26, que la détermination d'une plage d'indisponibilité dans le contrat de travail serait non pas une obligation mais une faculté laissée à l'employeur, une telle interprétation revenant à vider de sa substance le principe d'une contrepartie au travail à temps partiel modulé.

10. L'arrêt retient que lorsque le contrat de travail ne prévoit pas de plage d'indisponibilité, il est présumé être à temps complet et que, dans ce cas, il incombe à l'employeur de démontrer qu'il a prévu une plage d'indisponibilité dans les plannings mensuels et que cette plage était fixe d'un mois sur l'autre, sauf à justifier, en cas de modification de cette plage, de l'accord du salarié pour chacune de ces modifications. Il conclut qu'en l'absence de plage d'indisponibilité prévue dans le contrat de travail ou désignée comme telle dans les plannings remis au salarié, le salarié se tient en permanence à la disposition de l'employeur et que le contrat de travail doit être requalifié à temps plein.

11. Il constate que ni le contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel modulé du 30 mars 2007 à effet au 1er avril 2007 ni l'avenant au contrat de travail à temps partiel modulé du 7 mars 2018 à effet au 1er janvier 2018 n'ont déterminé de plage d'indisponibilité, contrairement à ce qu'exigeait l'article 21 de l'accord collectif et que par ailleurs, aucun des plannings versés aux débats ne mentionne une plage d'indisponibilité.

12. Il estime que l'employeur ne renverse pas la présomption de travail à temps complet.

13. En statuant ainsi, alors qu'elle n'avait pas constaté que le contrat de travail n'était pas conforme aux dispositions de l'article L. 212-4-6 du code du travail et que le défaut de mention dans le contrat de travail des plages d'indisponibilité de la salariée, prévues par l'accord de branche, ne permettait pas de présumer que le contrat était à temps complet, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

14. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif condamnant l'employeur au paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

15. Elle n'emporte pas, en revanche, cassation du chef de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur au paiement de dommages-intérêts pour atteinte à l'intérêt collectif de la profession justifié par le défaut de respect par l'employeur des dispositions conventionnelles relatives à l'indemnisation du temps inter-vacations retenu par des motifs non critiqués.

16. Elle n'emporte pas non plus cassation des chefs de dispositif condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il requalifie le contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps complet à compter du 1er février 2018 et en ce qu'il condamne la société Mutualité française Sud-Rhône-Alpes à payer à Mme [E] les sommes de 41 693,37 euros brut à titre de rappel de salaire au titre de la requalification du contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps plein pour la période du 1er février 2018 au 28 février 2023, de 4 169,33 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents et de 6 000 euros net à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, l'arrêt rendu le 16 janvier 2024, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;

Condamne Mme [E] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le vingt-sept mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52500551
Date de la décision : 27/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 16 janvier 2024


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 mai. 2025, pourvoi n°52500551


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 03/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:52500551
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