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28/05/2025 | FRANCE | N°12500352

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 28 mai 2025, 12500352


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 1


LM






COUR DE CASSATION
______________________




Arrêt du 28 mai 2025








Cassation partielle




Mme CHAMPALAUNE, président






Arrêt n° 352 F-D


Pourvoi n° Q 23-19.356






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_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2025


1°/ la société Will, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],


2°/ M. [W] [E], domicilié [Adresse 1],


ont formé le pourvoi n° Q 23-1...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Arrêt du 28 mai 2025

Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 352 F-D

Pourvoi n° Q 23-19.356

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2025

1°/ la société Will, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ M. [W] [E], domicilié [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° Q 23-19.356 contre l'arrêt rendu le 4 mai 2023 par la cour d'appel de Douai (chambre 8, section 1), dans le litige les opposant à la société Banque CIC Nord Ouest, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Peyregne-Wable, conseiller, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Will et de M. [E], de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société Banque CIC Nord Ouest, après débats en l'audience publique du 1er avril 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Peyregne-Wable, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 mai 2023), le 2 juillet 2011, la société Banque CIC Nord Ouest (la banque) a consenti à la société Will (l'emprunteuse) un prêt d'un certain montant, qui a été remboursé le 13 janvier 2015.

2. Le 11 août 2016, la banque a consenti à l'emprunteuse deux crédits de trésorerie.

3. L'emprunteuse a en outre ouvert un compte professionnel auprès de la banque.

4. Le 14 mars 2014, la banque a obtenu, en garantie des engagements pris par l'emprunteuse, le cautionnement solidaire de MM. [G] et [W] [E] (les cautions) dans la limite de 60 000 euros.

5. Les 27 et 28 septembre 2017, à la suite d'impayés, la banque a assigné en paiement l'emprunteuse et les cautions.

6. Le 29 septembre 2017, l'emprunteuse a assigné la banque en responsabilité et indemnisation.

7. Les instances ont été jointes par jugement du 27 novembre 2018.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

8. M. [W] [E] et l'emprunteuse font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande tendant à voir déclarer le cautionnement de M. [W] [E] inopposable à la banque s'agissant d'une demande nouvelle présentée pour la première fois en cause d'appel, alors « que doit être jugée recevable en cause d'appel la prétention nouvelle dès lors qu'elle tend à faire écarter les prétentions adverses ; qu'en l'espèce, pour juger irrecevable la demande tendant à voir déclarer inopposable à la banque le cautionnement consenti par M. [W] [E] pour disproportion manifeste, la cour d'appel s'est bornée à juger qu'il était incontestable que cette demande était présentée pour la première fois en cause d'appel et qu'elle ne constituait pas l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des demandes soumises au premier juge ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, même d'office comme il le lui incombait, si cette demande ne lui était pas soumise en vue de voir écarter la demande en paiement formée à son encontre par la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 564 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 564 du code de procédure civile :

9. Aux termes de cet article, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

10. Pour déclarer irrecevable la demande tendant à voir dire inopposable à la banque l'engagement de M. [W] [E], l'arrêt retient qu'il est incontestable que cette demande est présentée pour la première fois en cause d'appel, et que cette prétention ne constitue pas l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des demandes soumises au premier juge.

11. En se déterminant ainsi, sans rechercher, même d'office, comme il lui incombait, si la demande tendant à l'inopposabilité de l'engagement de la caution ne lui était pas soumise pour faire écarter la demande en paiement formée contre celle-ci par la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Et sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

12. M. [W] [E] et l'emprunteuse font grief à l'arrêt de constater la prescription de l'action en responsabilité s'agissant du paiement anticipé de la somme de 30 000 euros du 11 septembre 2012, alors « que tout jugement doit être motivé ; qu'en l'espèce, il est constant que l'emprunteuse a agi en responsabilité contre la banque le 29 septembre 2017 afin de contester l'appréhension de la somme de 30 000 euros correspondant au produit de la vente d'une partie du bien financé en violation des stipulations du contrat de prêt ; qu'afin de juger cette action prescrite, la cour d'appel s'est contentée d'affirmer par motifs adoptés que le notaire a nécessairement informé l'emprunteuse avant de se dessaisir du chèque auprès de la banque, de sorte qu'elle ne pouvait ignorer le 11 septembre 2012 que la banque allait percevoir le produit de cette vente ; qu'en se déterminant ainsi par voie de simple affirmation et sans préciser sur quel élément de preuve elle tenait ce fait pour acquis, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

13. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.

14. Pour dire prescrite l'action de l'emprunteuse s'agissant de la somme de 30 000 euros adressée le 11 septembre 2012 à la banque, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que le notaire a nécessairement avant de s'être dessaisi de cette somme informé sa cliente, et qu'ainsi l'emprunteuse ne pouvait ignorer à cette date que la banque allait percevoir le produit de cette vente.

15. En statuant ainsi, par voie de simple affirmation et sans préciser sur quel élément du dossier elle s'appuyait pour tenir cette information, contestée par l'emprunteuse, pour acquise, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Et sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

16. M. [W] [E] et l'emprunteuse font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à la reconnaissance de la responsabilité de la banque et leurs demandes indemnitaires, alors « que le contrat de prêt conditionnait la déchéance du terme en cas de vente du bien financé à l'avertissement par écrit de l'emprunteur ; qu'en l'espèce, afin de juger que la banque n'avait commis aucune faute au titre des remboursements anticipés exigés sur les prix de vente, la cour d'appel s'est bornée, par motifs adoptés des premiers juges, à juger que la banque était titulaire du privilège de prêteur de deniers et qu'aucun accord préalable sur la vente du bien n'avait été obtenu par l'emprunteuse ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher comme elle y était expressément invitée si la banque avait bien procédé à l'avertissement préalable par écrit de l'emprunteur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

17. Aux termes de cet article, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

18. Pour rejeter les demandes de M. [W] [E] et de l'emprunteuse tendant à la reconnaissance de la responsabilité de la banque et à sa condamnation en paiement de dommages et intérêts, l'arrêt retient, par motifs adoptés, d'abord, que l'offre de prêt immobilier souscrite par l'emprunteuse mentionne le privilège de prêteur de deniers de la banque, que ce privilège a fait l'objet d'une inscription à la Conservation des hypothèques, que les clauses contractuelles du prêt prévoient en outre l'exigibilité immédiate de plein droit des sommes dues en cas de vente des biens financés sans accord préalable du prêteur, et que pour se prévaloir de cette exigibilité anticipée, le prêteur en avertira l'emprunteur par écrit.

19. Il relève, ensuite, qu'aucun accord préalable sur la vente d'une parcelle et des deux premiers logements n'a été obtenue par l'emprunteuse et que compte tenu des dispositions contractuelles et de l'absence d'un tel accord, celle-ci pouvait obtenir la totalité des prix de vente jusqu'à concurrence du solde de son prêt, sans qu'aucune faute puisse être retenue contre elle du fait des remboursements anticipés exigés sur les prix de vente.

20. En se déterminant ainsi, sans rechercher comme il le lui était demandé, si la banque avait procédé à l'avertissement préalable par écrit de l'emprunteur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit irrecevable la demande de la société Will et de M. [W] [E] tendant à l'inopposabilité à la société Banque CIC Nord Ouest du cautionnement de M. [W] [E], constate la prescription s'agissant du paiement anticipé de la somme de 30 000 euros le 11 septembre 2011 (lire 2012), et rejette les demandes de M. [W] [E] et de la société Will tendant à la reconnaissance de la responsabilité de la banque et leurs demandes indemnitaires, l'arrêt rendu le 4 mai 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne la société Banque CIC Nord Ouest aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Banque CIC Nord Ouest et la condamne à payer à M. [W] [E] et la société Will la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-huit mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12500352
Date de la décision : 28/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 04 mai 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 28 mai. 2025, pourvoi n°12500352


Composition du Tribunal
Président : Mme Champalaune (président)
Avocat(s) : SARL Le Prado - Gilbert, SCP Alain Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 03/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:12500352
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