La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/10/2023 | FRANCE | N°21MA01722

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 05 octobre 2023, 21MA01722


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SMEF Azur a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et majorations, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014.

Par un jugement n° 1906412 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 7 mai 2021, 10 mars 2023 et 15 septembre 2023, l

a société SMEF Azur, représentée par Me Dugas, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SMEF Azur a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et majorations, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014.

Par un jugement n° 1906412 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 7 mai 2021, 10 mars 2023 et 15 septembre 2023, la société SMEF Azur, représentée par Me Dugas, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1906412 du 9 mars 2021 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge demandée au tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a été privée de débat oral et contradictoire ;

- la proposition de rectification n'est pas motivée ;

- l'administration invoque un fondement juridique erroné, ce qui prive de fondement légal la motivation de la proposition de rectification ;

- l'administration a mis en œuvre la procédure de l'abus de droit sans lui accorder les garanties correspondantes ;

- ces irrégularités entraînent une décharge sur le fondement de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;

- les prestations de services facturées par la société D... ne font pas double emploi, aussi bien en ce qui concerne les fonctions de direction que les prestations d'assistance ; l'administration n'apporte pas la preuve de l'absence de réalisation de ces prestations et du caractère excessif de la rémunération versée à la société D....

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 février 2022 et 31 mai 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par la société SMEF Azur ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Platillero,

- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société SMEF Azur, qui a pour activité la réalisation de travaux d'installation d'équipements thermiques et de climatisation d'importance, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, au terme de laquelle une proposition de rectification du 21 novembre 2016 lui a été notifiée. Au terme de la procédure, elle a notamment été assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, assortis des intérêts de retard. La société SMEF Azur relève appel du jugement du 9 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et majorations, de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, dans le cas où la vérification de comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat. Lorsqu'après la fin des opérations de contrôle sur place, le vérificateur obtient des pièces nouvelles, celles-ci sont présumées ne pas avoir fait l'objet d'un débat oral et contradictoire, sauf preuve contraire rapportée par l'administration. L'absence de débat, dans une telle hypothèse, n'est en principe pas de nature à affecter la régularité de la procédure d'imposition, sauf s'il apparaît que les pièces recueillies après la fin des opérations de vérification, en raison de leur teneur, de leur portée et de l'usage qui en a été fait par l'administration, impliquaient la réouverture du débat oral et contradictoire sur la comptabilité de l'entreprise.

3. Il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la société SMEF Azur a été effectuée dans les locaux de cette société. Six interventions ont eu lieu, les 10 et 18 décembre 2015, et les 13 janvier, 4 février, 30 juin et 15 septembre 2016, avant une réunion de synthèse qui s'est tenue le 19 octobre 2016. Selon les mentions non contredites de la proposition de rectification, dès le 11 juillet 2016, le vérificateur a adressé à la société une demande écrite afin de justifier de la réalité, de la nature et de l'importance des prestations objets d'une convention du 19 décembre 1995 modifiée par avenants successifs conclue avec la société D..., en précisant la teneur des éléments attendus, sans que soit apportée de réponse précise, le conseil de la société ayant indiqué lors du débat oral et contradictoire que les différents contrats qui avaient été produits étaient suffisants. La proposition de rectification mentionne également que lors du débat oral et contradictoire, la société SMEF Azur a été interrogée sur l'existence d'un personnel employé par d'autres sociétés liées par conventions, ce que confirment un courriel de la vérificatrice du 26 septembre 2016 indiquant que les conventions en cause ont été examinées lors de l'entrevue du 15 septembre 2016, ainsi que le courrier de réponse du conseil de la société du 29 septembre 2016 mentionnant explicitement que la nature des relations entre les sociétés SMEF Azur et D... a été évoquée lors de cette entrevue. Pour contester la réalité du débat oral et contradictoire, la société SMEF Azur se prévaut du courriel du 26 septembre 2016 par lequel la vérificatrice a demandé la production de la liste du personnel détaché de sociétés tierces et des fonctions exercées, produite par courriel du 28 septembre, ainsi que d'un courriel du 4 octobre 2016 par lequel la vérificatrice a demandé à la société si son dirigeant avait signé un contrat de travail et, dans l'affirmative, de produire ce contrat. Toutefois, à supposer même qu'aucun débat oral et contradictoire n'ait eu lieu au cours de la réunion du 19 octobre 2016 sur les pièces et informations ainsi produites, compte tenu de l'existence d'un tel débat au cours des précédentes interventions sur place s'agissant des prestations facturées par la société D..., ces éléments, en raison de leur teneur, de leur portée et de l'usage qui en a été fait par l'administration laquelle s'est bornée à confirmer le points déjà débattus contradictoirement, n'impliquaient pas la réouverture d'un tel débat.

4. Dans ces conditions, la société SMEF Azur n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée de débat oral et contradictoire en ce qui concerne la rectification en litige, relative à la remise en cause de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée que lui a facturée la société D..., holding du groupe, sur le fondement d'une convention du 19 décembre 1995 modifiée par avenants successifs, aux motifs que les prestations de direction facturées étaient assurées par le dirigeant de la société SMEF Azur, que les autres prestations étaient rendues par d'autres sociétés et que, plus généralement, la réalité de prestations qui auraient été exécutées par la société D... n'avait pas été justifiée.

5. A cet égard, la société SMEF Azur n'est en tout état de cause pas fondée à se prévaloir de la réponse ministérielle à M. C..., député, du 1er juin 1987 et de l'interprétation administrative référencée BOI-CF-PRG-20-20 n° 170 du 12 septembre 2012, relatives à la procédure d'imposition.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". L'article R. 57-1 du même livre dispose que " la proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

7. La proposition de rectification du 21 novembre 2016 mentionne les dispositions légales applicables en matière de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée et l'ensemble des motifs de droit et de fait qui justifient la rectification en litige, dont le montant est détaillé au regard des écritures comptables de la société, les années d'imposition étant également précisées. Elle est ainsi suffisamment motivée, sans que la société SMEF Azur ne puisse utilement contester sa motivation en matière d'impôt sur les sociétés, qui n'est pas en litige, ainsi que le bien-fondé des motifs retenus par l'administration pour justifier le rappel de taxe sur la valeur ajoutée en cause.

8. A cet égard, la société SMEF Azur n'est en tout état de cause pas fondée à se prévaloir de l'interprétation administrative référencée BOI-CF-IR-10 n° 20 et BOI-CF-IOR-10-40 n° 190, relative à la procédure d'imposition.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal (...) ".

10. Il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient la société SMEF Azur, l'administration n'a à aucun moment écarté comme ne lui étant pas opposable la convention du 19 décembre 1995 modifiée par ses avenants successifs, au motif qu'elle aurait été fictive ou aurait eu pour but exclusif d'éluder ou de réduire la base d'imposition, mais a seulement estimé que la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux prestations facturées par la société D...sur le fondement de cette convention, dont une partie faisait double emploi avec les fonctions de dirigeant de la société SMEF Azur et l'autre partie avait été réalisée par des sociétés sœurs, n'était pas déductible en application de l'article 271, du 4 de l'article 283 et du 2 de l'article 272 du code général des impôts. Dans ces conditions, la société SMEF Azur n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait commis un détournement de procédure, en invoquant implicitement l'existence d'un abus de droit sans lui accorder les garanties résultant de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales.

11. En quatrième lieu, compte tenu de ce qui précède, en l'absence d'irrégularité dans la procédure d'imposition, la société SMEF Azur n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

12. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; / (...) ". Aux termes de l'article 272 du même code : " (...) / 2. La taxe sur la valeur ajoutée facturée dans les conditions définies au 4 de l'article 283 ne peut faire l'objet d'aucune déduction par celui qui a reçu la facture. / (...) ". Aux termes du 4 de cet article 283 : " Lorsque la facture ne correspond pas à la livraison d'une marchandise ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur, la taxe est due par la personne qui l'a facturée ".

13. Il résulte de ces dispositions qu'un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services. Dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance. Si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération.

14. La société SMEF Azur et la société D..., holding d'un groupe informel, ont signé le 19 décembre 1995 une convention d'assistance technique, commerciale, administrative et financière, modifiée par des avenants des 1er septembre 2002, 30 juillet 2003, 30 septembre 2005 et 12 mars 2008, un cinquième avenant ayant été signé le 18 juin 2015, postérieurement à la période vérifiée. Les prestations définies par la convention sont relatives, dans le domaine financier, aux conseils et à l'assistance pour la gestion financière, la réalisation d'études financières et l'assistance dans les négociations, en matière administrative, à l'assistance dans les domaines de l'organisation, de la gestion et du contrôle, à l'assistance juridique, de contrôle et de procédures informatiques ou autres visant à assurer la gestion des opérations se rapportant à l'activité de la société SMEF Azur, en matière commerciale, à l'assistance et aux conseils dans la promotion des activités de cette société et à la détermination de la politique à court et moyen terme et stratégique, et, en matière technique, à des missions de bureau d'études, de développement, de formation, d'information, de qualité, d'assistance technique et d'expertise. L'avenant du 30 juillet 2003 prévoit l'externalisation de l'intégralité des services financiers de la société SMEF Azur et que la direction sera désormais assurée par la société D..., en précisant que la fonction du développement stratégique sera directement assurée au sein de la société SMEF Azur par M. C., qui était son président jusqu'au 28 octobre 2011. Par ailleurs, la société SMEF Azur a conclu avec d'autres sociétés du groupe diverses conventions. Elle a ainsi signé le 23 décembre 1999 une convention d'assistance avec la société Decadi, ayant pour objet de faciliter la mise à disposition de savoir-faire et de personnel dans les domaines, notamment, de l'assistance technique, informatique, administrative et en gestion. Elle a également signé le 29 mai 2000 une convention d'assistance avec la société Azur Développement Conseil (ADC) pour assurer les fonctions de secrétariat et de standard. Elle a enfin signé le 2 janvier 2006 une convention avec la société Hepcom, ayant pour objet de faciliter la mise à disposition de savoir-faire et de personnel dans les domaines, notamment, de l'assistance à l'organisation d'évènements, à l'élaboration de support de communication et à la mise en place de documents internes. A la suite de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la société SMEF Azur, l'administration a remis en cause la déduction en charges des honoraires facturés par la société D..., aux motifs que les prestations de direction facturées étaient en fait assurées par M. C. qui dirigeait la filiale et que les autres prestations facturées, que la société D... n'avait pas les moyens de réaliser, étaient rendues par les sociétés sœurs. Elle a également remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures correspondantes émises par la société D..., sur le fondement des dispositions précitées de l'article 271, du 4 de l'article 283 et du 2 de l'article 272 du code général des impôts.

15. Il résulte de l'instruction, d'une part, que l'administration a relevé que si la convention du 19 décembre 1995, modifiée par avenants, notamment celui du 30 juillet 2003, prévoyait des prestations se rattachant à la direction générale de la requérante et l'externalisation de l'intégralité des services financiers de la société SMEF Azur et que cette direction serait assurée par la société D..., elle stipulait expressément que la fonction de développement stratégique serait assurée directement par M. C., alors président de la société SMEF Azur, au sein de cette dernière société. Elle a ainsi relevé que les prestations de direction générale prévues de façon plus globale dans la convention étaient exercées par une même personne physique, M. C., exerçant en fait des fonctions de direction au sein de la holding et de la filiale et président de la société SMEF Azur jusqu'au 28 octobre 2011. D'autre part, l'administration a relevé que l'effectif salarié de la société D..., composé d'un à deux salariés, dont M. C., au cours de la période vérifiée, ne lui permettait pas de réaliser les autres prestations d'assistance prévue par la convention du 19 décembre 1995 modifiée par avenants, alors que les conventions conclues par la société SMEF Azur avec les sociétés E... et ADC prévoyaient la réalisation de prestations déjà mentionnées dans la convention précitée. En outre, il n'est pas contesté qu'interrogée sur la présence dans ses locaux d'un personnel employé par les autres sociétés liées par conventions, la société SMEF Azur, qui employait par ailleurs directement des chargés d'affaires, des ingénieurs et des techniciens et avait également recours à la sous-traitance notamment pour des missions d'expertise, a adressé au vérificateur une liste faisant mention de salariés de la société Decadi affectés à des fonctions de comptabilité et de commerce, d'un salarié de la société ADC en tant qu'agent d'accueil et standardiste et de salariés de la société Hepcom chargés de la communication. Ainsi, l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que les prestations en litige facturées par la société D... ne correspondaient pas à des opérations réelles et il appartient à la société SMEF Azur d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de ces opérations.

16. D'une part, la société SMEF Azur fait valoir que les fonctions de direction étaient effectivement réalisées par la société D..., à la suite de la démission de M. C. de ses fonctions de président constatée par un procès-verbal d'assemblée générale ordinaire du 28 octobre 2011, désignant la société D... comme présidente, M. C., par ailleurs directeur rémunéré du développement de l'activité de la société SMEF Azur, ayant ainsi agi en qualité de salarié de la holding, la société D... demeurant le dirigeant social au cours de la période vérifiée. Toutefois, si, compte tenu de la désignation de la société D... en tant que présidente de la société SMEF Azur, les dirigeants des sociétés parties à la convention du 19 décembre 1995 modifiée n'étaient pas les mêmes, il n'en demeure pas moins que les fonctions de direction ont été en fait réalisées par M. C., la convention précitée n'ayant d'ailleurs pas été modifiée à la suite de sa démission des fonctions de président en octobre 2011, M. C. exerçant alors les fonctions de directeur financier, contrôleur de gestion, direction commercial, directeur des ressources humaines et, plus généralement, les fonctions de directeur général d'une société par actions simplifiées. Et la société SMEF Azur n'apporte aucun élément justifiant que les sommes en litige auraient rémunéré des fonctions de direction et de représentation à l'égard des tiers effectivement exercées par la société D... au titre de la convention du 19 décembre 1995, rendues par M. C. en tant que salarié de cette société, ce qui ne résulte pas de la seule circonstance que la société SMEF Azur n'a comptabilisé aucune rémunération de direction au profit de M. C.

17. D'autre part, la société SMEF Azur se prévaut de la description des services prévues par les différentes conventions avec les sociétés sœurs pour soutenir que les prestations prévues par ces conventions sont distinctes de celles prévues par la convention du 19 décembre 1995. Toutefois, la convention avec la société Decadi prévoit une assistance en matière de bureau d'études, informatique, secrétariat, accueil et gestion, la convention avec la société Hepcom prévoit une assistance dans l'organisation d'évènements, de supports de communication et dans la mise en place de documentation interne, et la convention avec la société ADC prévoit une assistance pour le secrétariat et le standard. Et la société SMEF Azur n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations selon lesquelles les prestations d'assistance facturées par la société D... auraient été liées à des opérations réelles distinctes des prestations précédemment décrites, alors que la convention du 19 décembre 1995 prévoit de larges missions en matière technique, administrative et informationnelle. En effet, outre que la société SMEF Azur ne conteste pas les constats précédemment exposés quant aux salariés présents dans ses locaux, elle s'est bornée à produire un registre du personnel qui ne permet pas d'attester que la société D... aurait disposé du personnel nécessaire pour exécuter les missions facturées qui auraient résulté de la convention du 19 décembre 1995, ce qui ne résulte pas de la seule production des liasses fiscales et des extraits de comptes de la société. Par ailleurs, les différents éléments produits en réplique ne démontrent pas que les événements et prestations qui y sont mentionnés auraient effectivement été organisés par la société D... et non pas par d'autres sociétés du groupe, les pièces relatives aux échanges avec une banque mentionnant également l'intervention de M. C. et de sociétés autres que la société D.... Ainsi, la justification de la réalité des services rendus en matière de prestations d'assistance prévues par la convention du 19 décembre 1995, qui aurait pu résulter de la production des noms des salariés dédiés aux prestations, de feuilles de temps, de comptes-rendus d'activité ou même d'une définition précise des prestations en matière commerciale et technique, n'est pas apportée, aucune pièce ne permettant d'établir que la société D... aurait rendu des prestations spécifiques distinctes de fonctions afférentes au mandat social allégué dont se prévaut la société SMEF Azur, qui ne sont pas plus établies ainsi qu'il a été dit précédemment.

18. Il résulte de ce qui précède que la société SMEF Azur n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée en litige. A cet égard, dès lors qu'il est établi que les prestations facturées ne correspondent pas à des opérations réelles, la société SMEF Azur ne peut en tout état de cause utilement soutenir que l'administration n'apporte pas la preuve du caractère excessif du prix facturé.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la société SMEF Azur n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'annulation de ce jugement et de décharge, en droits et majorations, des impositions en litige doivent dès lors être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société SMEF Azur demande au titre des frais qu'elle a exposés.

D E C I D E :

Article 1 : La requête de la société SMEF Azur est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée SMEF Azur et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2023, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 octobre 2023.

2

N° 21MA01722


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01722
Date de la décision : 05/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03 Contributions et taxes. - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. - Taxe sur la valeur ajoutée. - Liquidation de la taxe. - Déductions.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : ARIA, SOCIÉTÉ D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-10-05;21ma01722 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award