La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/07/2020 | FRANCE | N°18PA20737

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 21 juillet 2020, 18PA20737


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... a demandé au Tribunal administratif de la Martinique :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé sur sa demande d'annulation de la saisie à tiers détenteur du 30 avril 2015 ;

2°) d'annuler le titre de perception n° 00044 émis le 10 juin 2011 par le recteur de l'académie de la Martinique en vue de la répétition d'un indu de rémunération évalué, en dernier lieu, à 1 579,66 euros.

Par un jugement n° 1600066 du 12 décembre 2017, le Tribunal

administratif de la Martinique a rejeté la demande de Mme D....

Procédure devant la Cour :

Par un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... a demandé au Tribunal administratif de la Martinique :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé sur sa demande d'annulation de la saisie à tiers détenteur du 30 avril 2015 ;

2°) d'annuler le titre de perception n° 00044 émis le 10 juin 2011 par le recteur de l'académie de la Martinique en vue de la répétition d'un indu de rémunération évalué, en dernier lieu, à 1 579,66 euros.

Par un jugement n° 1600066 du 12 décembre 2017, le Tribunal administratif de la Martinique a rejeté la demande de Mme D....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 février 2018 au greffe de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, Mme D..., représentée par Me A..., a demandé à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de la Martinique du 12 décembre 2017 ;

2°) d'annuler le titre de perception n° 00044 émis le 10 juin 2011 pour un montant de 1 717,66 euros, ainsi que les actes subséquents, notamment le commandement de payer du 4 décembre 2012 et la saisie à tiers détenteur du 30 avril 2015 ;

3°) subsidiairement, de la décharger de l'obligation de payer la moitié de la somme réclamée ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif ne pouvait se fonder sur la mention des voies et délais de recours qui figurait sur le commandement de payer du 4 décembre 2012, pour rejeter comme tardives les conclusions de sa demande tendant à l'annulation du titre de perception du 10 juin 2011 et à la décharge de l'obligation de payer la somme de 1 579,66 euros ;

- le titre de perception du 10 juin 2011, le commandement de payer du 4 décembre 2012 et la saisie à tiers détenteur ne comportent pas l'indication des bases de la liquidation de la créance et ne satisfont pas aux exigences de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 ;

- l'indu allégué par l'administration n'existe pas ;

- subsidiairement, à supposer établie l'existence de cet indu, elle doit, compte tenu de la responsabilité de l'administration dans cette situation, être déchargée de l'obligation de payer la moitié de la somme réclamée.

Par une ordonnance du 1er mars 2019, le président de la section du contentieux du Conseil d'État a attribué à la Cour la requête présentée par Mme D....

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2019, le ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés ;

- sa demande devant le tribunal administratif n'a en tout état de cause pas été présentée dans un délai raisonnable à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance du titre de perception.

Par une ordonnance du 13 mai 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 juin 2019.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 7 juin 2019, Mme D... conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 92-1369 du 29 décembre 1992 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que Mme D... a été employée par l'université des Antilles et de la Guyane en qualité d'agent non titulaire pour exercer les fonctions d'assistante administrative à l'IUT de Kourou, du 1er septembre 2008 au 31 décembre 2009. Son contrat a été renouvelé dans les mêmes conditions pour la période comprise entre le 22 mars 2010 et le 21 juillet 2010, puis du 1er septembre au 31 décembre 2010. Elle a été informée, par un courrier du 17 mai 2011, de ce qu'il allait être procédé à la répétition d'un trop perçu sur sa rémunération du mois de mars 2010, pour un montant de 1 717,66 euros. Un titre de perception n° 00044 a par la suite été émis le 10 juin 2011. Un commandement de payer la somme de 1 579,66 euros lui a été adressé le 4 décembre 2012, suivi d'une lettre de relance le 24 mars 2014. La somme de 1 579,66 euros a finalement fait l'objet d'une saisie à tiers détenteur, ce dont Mme D... a été informée par un courrier du 30 avril 2015. Mme D... a fait opposition par deux courriers adressés le 26 mai 2015 à la direction régionale des finances publiques et le 25 juin 2015 au rectorat. Son opposition ayant été implicitement rejetée, Mme D... a demandé au Tribunal administratif de la Martinique d'annuler la procédure de saisie ainsi que le titre de perception du 10 juin 2011. Elle fait appel du jugement du 12 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article 7 du décret du 29 décembre 1992 visé ci-dessus, en vigueur à la date du titre de perception en litige : " Avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit, dans les délais fixés à l'article 8 ci-après, adresser sa réclamation appuyée de toutes justifications au comptable qui a pris en charge l'ordre de recette ". Aux termes de l'article 8 de ce décret : " La réclamation prévue à l'article précédent doit être déposée : 1° En cas d'opposition à l'exécution d'un titre de perception dans les deux mois qui suivent la notification de ce titre ou à défaut du premier acte de poursuite qui en procède. L'autorité compétente délivre reçu de la réclamation et statue dans un délai de six mois. A défaut d'une décision notifiée dans ce délai, la réclamation est considérée comme rejetée (...)". Aux termes de l'article 9 du même décret : " Le débiteur peut saisir la juridiction compétente dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la décision prise sur la réclamation ou, à défaut de cette notification, dans un délai de deux mois à compter de la date d'expiration des délais prévus, selon le cas, au 1° ou au 2° de l'article 8 ci-dessus ".

3. Aux termes de l'article 118 du décret du 12 novembre 2012 visé ci-dessus, dans sa rédaction applicable à la date de la saisie à tiers détenteur litigieuse : " Avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit adresser une réclamation appuyée de toutes justifications utiles au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer. La réclamation doit être déposée, sous peine de nullité : 1° En cas d'opposition à l'exécution d'un titre de perception, dans les deux mois qui suivent la notification de ce titre ou du premier acte de poursuite qui procède du titre en cause ; 2° En cas d'opposition à poursuites, dans les deux mois qui suivent la notification de l'acte de poursuite. L'autorité compétente délivre un reçu de la réclamation, précisant la date de réception de cette réclamation. Elle statue dans un délai de six mois dans le cas prévu au 1° et dans un délai de deux mois dans le cas prévu au 2°. / A défaut d'une décision notifiée dans ces délais, la réclamation est considérée comme rejetée ". Aux termes de l'article 119 de ce décret, dans sa rédaction alors applicable : " Le débiteur peut saisir la juridiction compétente dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la décision prise sur sa réclamation ou, à défaut de cette notification, dans un délai de deux mois à compter de la date d'expiration des délais prévus à l'article 118 ".

4. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". La méconnaissance de l'obligation d'informer le débiteur sur les voies et les délais de recours, prévue par l'article R. 421-5 du code de justice administrative, ou l'absence de preuve qu'une telle information a été fournie, est de nature à faire obstacle à ce que les délais prévus par les dispositions citées ci-dessus lui soient opposables.

5. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. Dans une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours ou l'absence de preuve qu'une telle information a été fournie ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par les textes applicables, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. Sauf circonstances particulières dont se prévaudrait son destinataire, ce délai ne saurait excéder un an à compter de la date à laquelle le titre exécutoire ou, à défaut, le premier acte procédant de ce titre ou un acte de poursuite a été notifié au débiteur ou porté à sa connaissance.

6. En l'espèce, s'il est vrai que le titre de perception émis à l'encontre de Mme D... le 10 juin 2011 ne comportait pas la mention des voies et délais de recours, elle ne conteste pas avoir eu connaissance de ce titre à l'encontre duquel elle a saisi la direction régionale des finances publiques d'une réclamation le 30 juin 2011. En l'absence de circonstance particulière, elle ne pouvait donc contester le bien-fondé de la créance du rectorat, en application des dispositions citées ci-dessus du décret du 29 décembre 1992, au-delà d'un délai raisonnable d'un an courant à compter de cette date. Il s'ensuit qu'elle n'était plus recevable le 17 février 2016, date à laquelle elle a saisi le tribunal administratif, à contester le bien-fondé de la créance du rectorat faisant l'objet de la saisie à tiers détenteur litigieuse.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est en tout état de cause pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Copie en sera adressée pour information au ministre délégué chargé des comptes publics et au ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. C..., président-assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 juillet 2020.

Le rapporteur,

J-C. C...Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

T. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 18PA20737


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA20737
Date de la décision : 21/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement - Procédure - État exécutoire.

Comptabilité publique et budget - Règles de procédure contentieuse spéciales à la comptabilité publique - Introduction de l'instance - Délai.

Procédure - Introduction de l'instance - Délais.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : BEHR ALIN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-07-21;18pa20737 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award