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05/06/2025 | FRANCE | N°24MA02402

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 1ère chambre, 05 juin 2025, 24MA02402


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société à responsabilité limitée (SARL) Saint-Germain a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 13 février 2023 par lequel le maire de la commune de La Celle a refusé de lui délivrer un permis de construire portant sur la réalisation de 39 logements, d'un parc paysager et d'un parc de stationnement et la division en 126 lots des parcelles cadastrées section B nos 996, 997, 2169, 2170, 2353, 2354 et 2764, situées à l'Allée sur le territoire

communal.



Par un jugement n° 2301074 du 9 juillet 2024, le tribunal administr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Saint-Germain a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 13 février 2023 par lequel le maire de la commune de La Celle a refusé de lui délivrer un permis de construire portant sur la réalisation de 39 logements, d'un parc paysager et d'un parc de stationnement et la division en 126 lots des parcelles cadastrées section B nos 996, 997, 2169, 2170, 2353, 2354 et 2764, situées à l'Allée sur le territoire communal.

Par un jugement n° 2301074 du 9 juillet 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 septembre 2024 et 8 janvier 2025, la SARL Saint-Germain, représentée par Me Garry, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de La Celle du 13 février 2023 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de La Celle la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les motifs de refus retenus dans l'arrêté du 13 février 2023 s'inscrivent dans un rapport de conformité et non de compatibilité avec l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) n° 1 de l'Allée ;

- c'est à bon droit que le tribunal a estimé que le projet n'était pas incompatible avec l'objectif de densité global d'environ 25 logements par hectare prévu par cette OAP ;

- le motif de l'arrêté tiré de ce que le projet, en ce qu'il est composé de 19 villas réparties sur des terrains de superficies comprises entre 158 et 217 m2, a une densité trop importante par rapport aux objectifs de l'OAP est illégal, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal ; le secteur résidentiel sud, d'une superficie de 5 016 m2, ne peut accueillir 15 logements individuels sur des parcelles de 300 m2, compte tenu de la nécessité de créer également des voiries, cheminements piétons, places de stationnement et aménagements paysagers ; en prévoyant une superficie moyenne de 207 m2 par logement pour les lots destinés à accueillir les 13 maisons, dont 6 comportent deux logements, le projet est compatible avec l'OAP, d'autant qu'il répond au principe d'aménagement consistant à former une transition douce entre le front bâti ancien du village et l'arrière-plan paysager ;

- comme l'a relevé le tribunal administratif, le motif de refus tiré de ce que le sud du secteur urbain accueille des logements individuels et non des logements collectifs comme prévu par l'OAP est illégal, le projet n'étant pas incompatible avec l'OAP sur ce point.

Par des mémoires, enregistrés les 7 novembre 2024 et 24 janvier 2025, la commune de La Celle, représentée par Me Kozan, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la SARL Saint-Germain la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- au surplus, les deux autres motifs du refus de permis de construire, tirés de la méconnaissance du seuil de logements et de la typologie de logements prévus par l'OAP ne sont pas illégaux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Courbon, présidente assesseure ;

- et les conclusions de M. Quenette, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Saint-Germain a déposé, le 1er juillet 2022, une demande de permis de construire valant division en vue de la création de 39 logements, d'un parc paysager et d'un parc de stationnement et de la division en 126 lots d'un tènement immobilier situé à l'Allée et composé des parcelles cadastrées section B nos 996, 997, 2169, 2170, 2353, 2354 et 2764. Par un arrêté du 13 février 2023, le maire de La Celle a refusé de faire droit à sa demande. La SARL Saint-Germain relève appel du jugement du 9 juillet 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. En vertu de l'article L. 151-2 du code de l'urbanisme, le plan local d'urbanisme comprend un rapport de présentation, un projet d'aménagement et de développement durables, des orientations d'aménagement et de programmation, un règlement et des annexes, chacun de ces éléments pouvant comprendre des documents graphiques. Aux termes de l'article L. 151-6 du même code : " Les orientations d'aménagement et de programmation comprennent, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, des dispositions portant sur l'aménagement, l'habitat, les transports, les déplacements et, en zone de montagne, sur les unités touristiques nouvelles. (...) ". L'article L. 151-7 de ce code dispose que : " I. - Les orientations d'aménagement et de programmation peuvent notamment : / 1° Définir les actions et opérations nécessaires pour mettre en valeur l'environnement, les paysages, les entrées de villes et le patrimoine, lutter contre l'insalubrité, permettre le renouvellement urbain, favoriser la densification et assurer le développement de la commune ; (...) 4° Porter sur des quartiers ou des secteurs à mettre en valeur, réhabiliter, renaturer, restructurer ou aménager ; (...) ". Enfin, l'article L. 152-1 de ce code prévoit que : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, et ouverture d'installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. / Ces travaux ou opérations sont, en outre, compatibles, lorsqu'elles existent, avec les orientations d'aménagement et de programmation. ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'une autorisation d'urbanisme ne peut être légalement délivrée si les travaux qu'elle prévoit sont incompatibles avec les orientations d'aménagement et de programmation d'un plan local d'urbanisme et, en particulier, en contrarient les objectifs. Cette compatibilité s'apprécie en procédant à une analyse globale des effets du projet sur l'objectif ou les différents objectifs d'une orientation d'aménagement et de programmation, à l'échelle de la zone à laquelle ils se rapportent.

4. Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire en litige porte sur un terrain situé dans le périmètre de l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) du secteur de l'Allée du plan local d'urbanisme de la commune de La Celle, approuvé le 8 novembre 2021, et qui correspond, selon les termes de cette OAP, à un " vaste espace représentant 1,5 hectares et stratégiquement situé au cœur du village (...) voué à recevoir une opération d'aménagement d'ensemble, en greffe villageoise où la mixité des fonctions et des formes urbaines sera favorisée. ". L'orientation n° 1 de cette OAP, qui vise à " proposer un nouveau quartier à l'interface entre le village et le quartier résidentiel de Sainte-Marthe ", prévoit que " La densité globale sera d'environ 25 logements/hectare " et un découpage du périmètre en deux zones, la première, au nord, en limite du centre du village, comprenant un parc paysager et un secteur dit " urbain " dans lequel " les logements seront répartis dans plusieurs petits immeubles collectifs dont la hauteur sera de 9 mètres maximum à l'égout du toit. La typologie des logements proposés permettra d'offrir une offre intermédiaire dans le parcours résidentiel des Cellois. ", et la seconde, au sud, en bordure de la zone pavillonnaire, composée d'un secteur dit " résidentiel " dans lequel " une quinzaine de maisons individuelles seront réparties sur des parcelles d'environ 300 m2 ".

5. Pour refuser l''autorisation sollicitée par la SARL Saint-Germain, le maire de La Celle s'est fondé sur l'incompatibilité du projet avec l'orientation n° 1 de l'OAP du secteur de l'Allée, en ce qu'il dépasse de 20 % la densité globale prévue, qu'il prévoit des logements individuels et non des logements collectifs au sud du secteur urbain et qu'il prévoit, dans le secteur résidentiel, 19 villas réparties sur des terrains de superficies comprises entre 158 et 217 m2, soit une densité bien supérieure à celle prévue.

6. Le projet de la SARL Saint-Germain porte sur la construction d'un ensemble immobilier de 39 logements avec un parc paysager, des aménagements de voirie, des cheminements piétons et des espaces de stationnement, sur un tènement immobilier d'une superficie de 13 848 m2. Il se divise en trois ensembles. Le premier, dénommé " Les jardins de Marie ", implanté à l'est du secteur urbain, compte 11 logements répartis sur quatre petits immeubles (trois bâtiments collectifs mitoyens en R+1 et R+2 comprenant 8 logements sociaux de type T2 et T3 et un bâtiment collectif en R+ 2 composé de trois logements de type T4). Le second ensemble, " Les jardins de Julie ", implanté au sud du secteur urbain, a vocation à accueillir neuf villas de type T4 regroupées par trois. Le dernier ensemble, appelé " Les villas de Manon " recouvre le secteur dit résidentiel et comprend 19 villas de type T4, dont certaines sont mitoyennes.

7. Si le projet prévoit, avec 39 logements pour une surface globale de 13 848 m2, une densité d'un peu plus de 28 logements à l'hectare, excédant celle de 25 logements prévue dans l'orientation n° 1 de l'OAP, cette circonstance ne saurait traduire en elle-même une incompatibilité avec l'OAP, dont l'orientation n° 2 indique par ailleurs que " le projet comprendra environ 40 logements, dont 20 % de logements sociaux ", sans que la commune puisse utilement soutenir qu'il convient de raisonner, pour apprécier la densité globale, par rapport à la seule surface urbanisée de la zone couverte par l'OAP. En revanche, il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit l'implantation, en secteur urbain, destiné selon l'orientation n° 1 de l'OAP, à accueillir de petits immeubles collectifs d'une hauteur maximale de 9 mètres, de villas individuelles mitoyennes par trois et, dans le secteur résidentiel, qui a vocation, selon cette même orientation, à accueillir une quinzaine de maisons individuelles réparties sur des parcelles d'environ 300 m2, de 19 villas (correspondants aux lots 1 à 15 et 16 à 20) sur des parcelles de terrain d'une superficie, allant de 158 m2 pour la plus petite à 310 m2 pour la plus grande, avec une moyenne de 207 m2 par lot. Alors que le projet est conçu, aux termes de l'OAP, comme devant constituer une transition progressive entre le cœur du village et le quartier résidentiel de Sainte-Marthe, constitué de maison individuelles implantées sur de grandes parcelles, le projet, en limitant la part de l'habitat collectif dans la partie prévue à cet effet, à proximité du centre du village, au profit de villas individuelles, même mitoyennes, et en prévoyant, dans la partie résidentielle, un habitat trop dense, contrarie cet objectif majeur, qui, pour être atteint, implique nécessairement une densité plus importante du secteur urbain, comme souhaité par les auteurs du PLU, permettant, de fait, en cohérence avec l'objectif de densité globale, la préservation, également souhaitée, du caractère aéré du secteur résidentiel. A cet égard, la SARL Saint-Germain ne saurait utilement se prévaloir de l'insuffisance de foncier disponible dans la partie résidentielle de l'OAP pour y implanter une quinzaine de villas compte tenu de la nécessité d'aménager, par ailleurs, des voiries et des espaces de stationnement, dès lors, d'une part, que le plan de l'OAP exclut les aménagements communs des zones à urbaniser et, d'autre part, que son projet prévoit non pas 15, mais 19 villas dans ce secteur. Par suite, en estimant que le projet de la SARL Saint-Germain était incompatible avec l'OAP du secteur de l'Allée et en refusant, pour ce motif, le permis de construire sollicité, le maire de la Celle n'a pas commis d'erreur d'appréciation.

8. Il résulte de ce qui précède que la SARL Saint-Germain n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 février 2023 par lequel le maire de La Celle a refusé de lui délivrer un permis de construire valant division.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de La Celle, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la SARL Saint-Germain au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 2 000 euros au titre des frais de même nature exposés par la commune de La Celle.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Saint-Germain est rejetée.

Article 2 : La SARL Saint-Germain versera une somme de 2 000 euros à la commune de La Celle au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Saint-Germain et à la commune de La Celle.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2025, où siégeaient :

- M. Duchon-Doris, président,

- Mme Courbon, présidente assesseure,

- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juin 2025.

2

N° 24MA02402


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24MA02402
Date de la décision : 05/06/2025

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision. - Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: Mme Audrey COURBON
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : KOZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-05;24ma02402 ?
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