LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 3 février 2021
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 115 F-D
Pourvoi n° U 18-16.856
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 3 FÉVRIER 2021
La société MJS Partners, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [...] , en la personne de M. K... T..., agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Lov'air aviation, dont le siège est [...] ,
a formé le pourvoi n° U 18-16.856 contre l'arrêt rendu le 19 mars 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Lixxbail, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Natixis Lease, société anonyme, dont le siège est [...] ,
3°/ à M. R... M..., domicilié [...] (Maroc), pris en qualité de liquidateur de la société Berly's aviation,
4°/ à Mme E... P..., domiciliée Etude [...], [...] (Luxembourg), prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Pamix,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ortscheidt, avocat de la société MJS Partners, en qualité de liquidateur de la société Lov'air aviation, de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société Lixxbail, de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. M..., en qualité de liquidateur de la société Berly's aviation, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 décembre 2020 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Reprise d'instance
1. Il est donné acte à la société MJS Partners de ce qu'elle reprend l'instance en qualité de liquidateur de la société Lov'air aviation et à M. M... de ce qu'il reprend l'instance en qualité de liquidateur de la société Berly's aviation.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 mars 2018), le 7 mai 2007, la société Berly's aviation, qui, en exécution d'un contrat de crédit-bail, avec option d'achat, consenti par la société Lixxbail, avait acquis un aéronef, a cédé celui-ci à la société Pamix, laquelle l'a vendu, par un contrat du même jour, à la société Lov'air aviation (la société Lov'air). L'acquisition de l'aéronef par la société Lov'air a été financée par la société GCE bail, laquelle, par un contrat de crédit-bail du 10 septembre 2007, le lui a donné en location pour une durée de 60 mois. La société Lov'air a signé une attestation de réception de l'aéronef le 15 octobre 2007.
3. Après avoir levé l'option d'achat le 9 octobre 2012, la société Lov'air a assigné les sociétés Pamix, Berly's aviation, Lixxbail et Natixis lease, venue aux droits de la société GCE bail, en résolution de la vente et en paiement de dommages-intérêts, en faisant valoir que la documentation technique afférente à l'aéronef ne lui avait jamais été remise.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. La société Lov'air fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de vente du 7 mai 2007, conclu avec la société Pamix, et en conséquence, de rejeter sa demande de condamnation in solidum des sociétés Pamix, Lixxbail, Berly's aviation à lui verser la somme de 4 906 600 euros au titre de la restitution du prix de cession de l'aéronef, une somme de 11 200 000 euros au titre de dommages-intérêts consécutifs au préjudice d'exploitation et une somme de 1 753 787,30 euros à titre de dommages-intérêts consécutifs aux travaux à perte réalisés par elle, alors :
« 1°/ que la délivrance, qui consiste en la remise matérielle de la chose entre les mains de l'acheteur, s'opère par la tradition réelle ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motifs pris qu'il "n'est pas contesté, s'agissant de la documentation technique et administrative d'un aéronef, qu'une partie reste à terre entre les mains de la société chargée de l'entretien de l'appareil" et que "la documentation technique et administrative qui se trouvait dans les locaux de Uni air a bien été délivrée à la société Lov'air Aviation", par des motifs impropres à établir que le vendeur, la société Pamix, avait bien matériellement remis la documentation technique et administrative de l'aéronef restée à terre entre les mains de la société Lov'air, et non pas uniquement de la société Uni air, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1606 du code civil ;
2°/ qu'en se prononçant comme elle l'a fait, sans constater que la société Lov'air avait consenti à ce que la délivrance par la société Pamix de la documentation technique et administrative de l'aéronef restée à terre s'opère entre les mains de la société Uni air et sans caractériser aucun lien entre les sociétés Lov'air et Uni air, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1606 du code civil ;
3°/ que le juge doit se prononcer sur tous les éléments de preuve soumis aux débats par les parties ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, sans analyser fût-ce sommairement l'attestation établie le 23 avril 2014 par M. Q..., ancien directeur général de la société Uni air, qui précisait que sur la demande de la société Lov'air, la société Uni air, après des recherches, avait conclu qu'elle ne disposait pas de la documentation de l'aéronef immatriculé [...], qui ne lui avait jamais été remise, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. La délivrance des effets mobiliers s'opère soit par la remise de la chose, soit par la remise des clefs des bâtiments qui les contiennent, soit même par le seul consentement des parties, si le transport ne peut pas s'en faire au moment de la vente, ou si l'acheteur les avait déjà en son pouvoir à un autre titre.
6. Après avoir constaté que l'attestation de réception de l'appareil, signée le 15 octobre 2007, par M. X... pour le compte de la société Lov'air, mentionnait : « l'acheteur reconnaît avoir inspecté l'avion, tous les documents et livres de bord de l'appareil à son entière satisfaction (...). Il reconnaît que l'avion est conforme aux spécifications techniques annexées au contrat du 07 mai 2007 », la cour d'appel a relevé que cette attestation reprend les termes exacts du modèle d'attestation de réception figurant en annexe IV du contrat de vente de l'aéronef. Elle a également retenu qu'une partie de la documentation technique et administrative d'un aéronef reste à terre entre les mains de la société chargée de l'entretien de l'appareil. Et elle a relevé que, par une attestation du 29 septembre 2014, M. X... avait relaté que le technicien de la société Uni air, qui suivait l'entretien de l'appareil depuis plusieurs années, disposait d'une pièce dans laquelle étaient remisés du matériel sensible et toute la documentation technique de l'appareil dans des cantines en fer, qu'en avançant dans la révision de l'appareil, des problèmes de corrosion et d'autres problèmes mécaniques étaient apparus, pour lesquels il avait fallu consulter la documentation technique, et qu'il avait mentionné : « c'est pour cette raison que je puis affirmer solennellement et certifier que durant la période écoulée de juillet 2007 jusqu'à ce que je sois remplacé par M. G..., le 7 décembre 2007, l'intégralité de la documentation, c'est-à-dire tout l'historique, les livrets, les carnets, les manuels, les certificats, les documents administratifs etc, enfin tout ce qui est attaché à un appareil était présent dans ces malles entreposées dans cette pièce chez Uni air ».
7. Par ces constatations, dont elle a déduit que la documentation technique et administrative qui se trouvait dans les locaux de la société Uni air avait été délivrée à la société Lov'air, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui n'était pas demandée ni de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, a légalement justifié sa décision.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
Et sur le second moyen
Enoncé du moyen
9. La société Lov'air fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande contre les sociétés Berly's aviation et Lixxbail sur un fondement contractuel, alors « que le maître de l'ouvrage, comme le sous-acquéreur, jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur et dispose à cet effet d'une action contractuelle directe contre le vendeur de son cocontractant, fondée sur la non-conformité de la chose livrée ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, aux motifs inopérants que la société Lov'air n'avait pas procédé à l'inscription de la mutation au registre français des immatriculations, de sorte qu'elle "ne peut se prévaloir de la qualité de sous-acquéreur à l'encontre des sociétés Berly's aviation et Lixxbail auxquelles la vente est inopposable" et qu'elle est "irrecevable en ses demandes sur un fondement contractuel contre celles-ci", la cour d'appel a violé les articles 1604 et 1615 du code civil. »
Réponse au moyen
10. La société Lov'air soutenait qu'aucune des sociétés Lixxbail, Berly's aviation et Pamix, propriétaires successifs de l'aéronef, n'avait transmis la documentation technique et administrative afférente à celui-ci, ce dont elle déduisait que tant son propre vendeur, la société Pamix, que les deux vendeurs antérieurs avaient manqué à leur obligation de délivrance. La cour d'appel ayant, au contraire, retenu, par les motifs vainement critiqués par le premier moyen, que la documentation litigieuse avait été remise à la société Lov'air, de sorte que l'obligation de délivrance avait été exécutée à son égard, l'action directe fondée sur le manquement à cette obligation, qu'elle a exercée, en qualité de sous-acquéreur, contre les sociétés Lixxbail et Berly's, s'est trouvée privée de tout fondement.
11. Le moyen est donc inopérant.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société MJS Partners, en qualité de liquidateur de la société Lov'air aviation, aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société MJS Partners, en qualité de liquidateur de la société Lov'air aviation.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de la société Lov'Air tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de vente du 7 mai 2007, conclu entre les sociétés Lov'Air et Pamix, et en conséquence, d'avoir rejeté sa demande de condamnation in solidum des sociétés Pamix, Lixxbail, Berly's Aviation à lui verser la somme de 4.906.600 euros au titre de la restitution du prix de cession de l'aéronef immatriculé [...], une somme de 11.200.000 euros au titre de dommages et intérêts consécutifs au préjudice d'exploitation et une somme de 1.753.787,30 euros à titre de dommages et intérêts consécutifs aux travaux à perte réalisés par la société Lov'Air ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'attestation de réception de l'appareil, signée le 15 octobre 2007, par M. Y... X... pour le compte de la société Lov'air Aviation, mentionne que "l'acheteur reconnaît avoir inspecté l'avion, tous les documents et livres de bord de l'appareil à son entière satisfaction" et encore "il reconnaît que l'avion est conforme aux spécifications techniques annexées au contrat du 07 mai 2007". Pour contester la valeur probante de cette attestation quant à la remise de la documentation technique de l'aéronef, la société Lov'air Aviation soutient que :- le terme aéronef n'y est jamais employé alors que dans le contrat de vente, ce terme est défini comme étant : l'aéronef, la documentation de bord et les documents techniques et de maintenance couvrant l'historique de la cellule APU et des moteurs depuis la sortie d'usine de l'appareil, - la désignation de la machine dans l'attestation ne saurait donc inclure la documentation qui en est l'accessoire, - l'attestation ne vise que les documents et livrets de bord, et non pas la documentation qui reste à terre, seule en cause en l'espèce,- le procès-verbal de réception du 10 octobre 2017 est une clause de style dont la portée doit être appréciée au regard des modalités de livraison insérées dans le contrat de vente, lesquelles prévoyaient que la livraison devait intervenir sous réserve de l'obtention du financement par l'acquéreur, et on ne peut en déduire la remise de la documentation technique,- l'attestation caractérise le délit de faux et usage de faux en ce qu'elle a été signée par M. Y... X... auquel aucun pouvoir n'a été donné pour ce faire.L'appelante ajoute qu'elle n'a jamais reçu "physiquement" la documentation technique et fait valoir en ce sens que :- par courriel du 6 novembre 2007, M. Y... X... a demandé à la société Berly's Aviation de faire le nécessaire auprès de Ameridair, gestionnaire de l'appareil pour Berly's, afin que la documentation technique soit restituée à Lov'air dans les meilleurs délais,- M. Y... X... atteste maintenant que pendant la période de juillet à décembre 2007, l'intégralité de la documentation se trouvait dans des malles entreposées chez Uni Air, qui déclare ne l'avoir jamais vu,- l'attestation rédigée par M. X..., qui avait un intérêt personnel et financier à l'interposition de la société Pamix dans la vente, n'offre pas la moindre garantie d'objectivité et n'a donc pas de valeur probante,- M. G..., qui a succédé à M. X... dans la gestion et le suivi technique, atteste avoir constaté, avec les services techniques d'Uni Air, que l'essentiel de la documentation technique n'avait pas été fourni par le précédent gestionnaire, M. I..., gérant d'Ameridair et représentant de Berly's,- les vols purement techniques réalisés par l'avion postérieurement à l'expiration de son certificat de navigation ne démontrent pas d'avantage que Lov'air aurait disposé de la documentation technique,- la société Uni Air est désignée à tort par la société Berly'Aviation comme détentrice de la documentation manquante alors que cette société a confirmé à plusieurs reprises qu'elle ne la détenait pas,- la société CS Aviation, à laquelle elle a fait appel pour assurer la gestion du maintien de la navigabilité a réalisé une enquête et confirmé qu'aucun des intervenants techniques n'avait jamais détenu la documentation,- l'évaluation réalisée le 27 avril 2007, avant la vente, ne prouve pas que Lov'air aurait disposé de la documentation technique. Mais il apparaît que M. X... est intervenu pour le compte de la société Lov'air Aviation afin de négocier l'acquisition de l'aéronef par celle-ci et qu'il disposait du cachet humide de la société Lov'air, éléments laissant croire légitimement à ses interlocuteurs qu'il était le mandataire de cette société. Le procès-verbal de réception du matériel du 10 octobre 2007, sur lequel M. X... a apposé sa signature et le cachet humide de la société Lov air'Aviation pour le compte de celle-ci, a été régulièrement établi au regard des stipulations du contrat de crédit- bail. L'attestation de réception de l'appareil du 15 octobre 2007, sur laquelle M. X... a apposé sa signature et le cachet humide de la société Lov'air Aviation pour le compte de celle-ci, reprend les termes exacts du modèle d'attestation de réception figurant en annexe IV du contrat de vente Pamix/Lov'air Aviation. La société Lov'air Aviation ne démontre en aucune façon que M. X... aurait excédé ses pouvoirs en signant ces deux documents ou agi dans son seul intérêt personnel. Il n'est pas contesté, s'agissant de la documentation technique et administrative d'un aéronef, qu'une partie reste à terre entre les mains de la société chargée de l'entretien de l'appareilPar attestation délivrée le 29 septembre 2014, M. X... relate notamment les faits suivants :- début 2007, le gérant de Lov'air aviation, lui a demandé de voir avec les représentants de Berlys'aéro, auprès desquels il avait déjà acquis un appareil précédemment par son intermédiaire, s'il pouvait acquérir l'appareil immatriculé [...] qu'il souhaitait faire relooker par un décorateur et le revendre très cher compte tenu du fait qu'il avait appartenu à C... O...,- il a obtenu du vendeur l'autorisation de procéder, avant la vente, à des travaux de révision générale, a négocié avec Uni Air les conditions relatives à ces travaux et signé un devis les 12 ou 13 juillet 2007 pour lancer la grande visite de l'aéronef,- le technicien d'Uni Air, qui suivait l'entretien de l'appareil depuis plusieurs années, disposait d'une pièce dans laquelle étaient remisés du matériel sensible et toute la documentation technique de l'appareil dans des cantines en fer,- en avançant dans la révision de l'appareil, des problèmes de corrosion et d'autres problèmes mécaniques sont apparus pour lesquels il a fallu consulter la documentation technique.Il précise : "c'est pour cette raison que je puis affirmer solennellement et certifier que durant la période écoulée de juillet 2007 jusqu'à ce que je sois remplacé par M. G..., le 7 décembre 2007, l'intégralité de la documentation, c'est à dire tout l'historique, les livrets, les carnets, les manuels, les certificats, les documents administratifs etc, enfin tout ce qui est attaché à un appareil était présent dans ces malles entreposées dans cette pièce chez Uni Air".M. X... explique encore que s'il a réclamé la documentation technique par courriel du 6 novembre à Berly'aéro, c'est parce que celle-ci qui devait payer la pose de deux instruments de bord à Uni Air ne l'avait pas fait, que Uni Air avait, d'une part fait une tentative de saisie entre les mains de Me D..., d'autre part menacé de démonter le matériel tout en refusant la remise de la documentation technique et des certificats techniques relatifs à ces instruments de bord, et exerçait un droit de rétention sur la totalité de la documentation technique de l'appareil; il précise que Uni Air ayant été réglé dans les jours qui ont suivi par Berly's aéro, l'ensemble de la documentation technique de l'appareil a ainsi été restituée. La société Lov'air Aviation n'a déposé aucune plainte pénale contre M. X... pour faux et usage de faux, ni pour fausse attestation ou faux témoignage ; les dires de celui-si sont d'ailleurs confortés en partie par une lettre du 16 juillet 2007 dans laquelle la société Uni Air a informé M. X... qu'elle prenait en charge l'appareil pour commencer les travaux de la visite C et par les devis établis par la société Uni Air les 27 juillet 2007, 29 octobre 2007 et 9 novembre 2007.Dans une attestation délivrée le 28 novembre 2014, M. G..., qui a succédé à M. X... dans la gestion de l'appareil, réfute les propos contenus dans l'attestation de M. X... et déclare : "je me réserve la faculté de poursuivre contre ce témoignage qui me met à tort en cause sur des éléments mensongers" ; il convient de constater qu'aucune plainte n'a été déposée par lui contre M. X.... Il résulte de l'ensemble de ces éléments que lors de la livraison de l'appareil, qui était soumise à l'obtention du financement pour l'acheteur - devenu effectif par le contrat de crédit-bail du 10 septembre 2017 - et lors de l'établissement des procès-verbaux de réception des 10 et 15 octobre 2007, la documentation technique et administrative qui se trouvait dans les locaux de Uni Air a bien été délivrée à la société Lov' air Aviation ; les circonstances postérieures alléguées par la société Lov'air Aviation ne sont pas de nature à remettre en question la bonne exécution de l'obligation de délivrance. Aucune faute contractuelle n'est démontrée à l'encontre de la société Pamix et aucune faute quasi-délictuelle ne l'est à l'encontre des sociétés Berly's Aviation et Lixxbail ; en conséquence, toutes les demandes de la société Lov'air Aviation seront rejetées ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE c'est au visa des articles 1134, 1603 et suivants, 1610 et 1383 du code civil que LOV'AIR fonde ses demandes ; Que l'article 1134 dispose que les « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi » ; Que l'article 1603 dispose que le vendeur « a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend » ; Que l'article 1610 dispose que d si le vendeur manque à faire la délivrance dans le temps convenu entre les parties, l'acquéreur pourra, à son choix, demander la résolution de la vente, ou sa mise en possession, si le retard ne vient que du fait du vendeur ; Qu'il résulte des dispositions de l'article 1383 « que chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence » ; Qu'il convient donc au regard des faits de la cause d'établir si LOVAIR est fondée à réclamer la résolution de la vente d'un aéronef de type FALCON 20 F 5 BR numéro de série 341 immatriculé [...] qu'elle a conclu avec la société PAMIX (et elle-même, le même jour de BERLYS) suivant contrat de vente du 7 mal 2007 au motif qu'il y aurait eu défaut de livraison de la documentation technique accompagnant l'avion, ne permettant pas à celui-ci de voter, ce à quoi il est destiné ; Qu'il est à relever que cette acquisition s'inscrit dans le cadre d'une opération de défiscalisation dans laquelle interviennent des intermédiaires, des vendeurs successifs dont le siège social est situé au Luxembourg et un tiers séquestre à Genève. Que ce montage complexe, tel qu'il a été présenté, n'a pas facilité la clarté des débats et qu'il est à noter que les parties sont restées muettes quand elles ont été interrogées sur l'état de la procédure qui aurait été diligentée en Suisse dans le cadre du présent litige ; qu'il ressort de la chronologie des faits et des pièces produites que le contrat de vente a été signé le 7 mai 2007; Que l'article 1 du dit contrat précise que le terme « Aéronef » s'entend de l'aéronef de type FALCON 20 F — 5BR, numéro de série 341, immatriculé [...], tel que décrit à l'annexe 1 du présent contrat, ainsi que des documents techniques et de maintenance couvrant l'historique de la cellule l'APU et des moteurs depuis la sortie d'usine ; Que l'article 4 indique « l'acheteur confirme avoir fait procéder par son expert à une expertise technique de l'aéronef en date du 27 avril 2007 et confirme avoir trouvé l'aéronef en conformité avec la description de l'annexe 1 du présent contrat et l'accepter en l'état et sans aucune réserve » ; Qu'il ressort par ailleurs de l'article 6 de la convention de séquestre (pièce 11 du demandeur) signée entre le vendeur, PAMIX, l'acheteur LOV'AIR et le tiers séquestre , Maitre D..., que la libération du prix de vente était soumise à la présentation au tiers séquestre de l'attestation de réception visée à l'article 5.1.2.3 du contrat de vente ; Que la dite attestation datée du 15 octobre 2007 est fournie aux débats (pièce 6 du défendeur) revêtue de la signature du vendeur et de l'acheteur et du cachet commercial de LOV'AIR et mentionne a l'acheteur reconnaît avoir inspecté l'avion, tous les documents el livres de bord de l'appareil à son entière satisfaction » et « reconnaît que l'avion est conforme aux spécifications techniques annexées au contrat du 07 mai 2007 » ; Que ce document qui a déclenché le paiement du prix est libératoire de toute contestation et tend à établir que la vente est parfaite ; Qu'à contrario LOV'AIR ne verse aucun élément aux débats qui permettrait d'établir que la documentation technique aurait été manquante puisque le contrat lui-même prévoyait que le terme aéronef devait s'entendre documentation comprise et que l'on comprend mal comment t'expertise technique qui a été diligentée par LOV'AIR le 27 avril 2007 aurait pu se faire sans la documentation technique de l'avion, ce qui est confirmé par le témoignage de Monsieur X..., mandataire de LOV'AIR et non valablement contredit par les éléments produits en demande ; Que surabondamment on s'interroge sur le fait que LOV'AIR ait attendu presque cinq ans pour diligenter son assignation, certes avant la prescription légale des faits ; Qu'on s'étonne qu'elle ne se soit inquiétée des dits documents qu'à compter du 7 juillet 2011 , date à laquelle elle adresse un courrier RAR à la société BERLY'S pour tes lui réclamer ; Que ce seul document ne saurait être suffisant pour démontrer une absence de livraison conforme ; En conséquence le tribunal déboutera LOV'AIR de l'ensemble de ses demandes formées de ce chef ;
1°) ALORS QUE la délivrance, qui consiste en la remise matérielle de la chose entre les mains de l'acheteur, s'opère par la tradition réelle ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motifs pris qu'il « n'est pas contesté, s'agissant de la documentation technique et administrative d'un aéronef, qu'une partie reste à terre entre les mains de la société chargée de l'entretien de l'appareil » (arrêt attaqué p. 9 § 6) et que « la documentation technique et administrative qui se trouvait dans les locaux de Uni Air a bien été délivrée à la société Lov'Air Aviation » (arrêt attaqué p. 10 § 5), par des motifs impropres à établir que le vendeur, la société Pamix, avait bien matériellement remis la documentation technique et administrative de l'aéronef restée à terre entre les mains de la société Lov'Air, et non pas uniquement de la société Uni Air, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1606 du code civil ;
2°) ALORS QU'en se prononçant comme elle l'a fait, sans constater que la société Lov'Air avait consenti à ce que la délivrance par la société Pamix de la documentation technique et administrative de l'aéronef restée à terre s'opère entre les mains de la société Uni Air et sans caractériser aucun lien entre les sociétés Lov'Air et Uni Air, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1606 du code civil ;
3°) ALORS QUE le juge doit se prononcer sur tous les éléments de pourev soumis aux débats par les parties ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, sans analyser fût-ce sommairement l'attestation établie le 23 avril 2014 par M. Q..., ancien directeur général de la société Uni Air, qui précisait que sur la demande de la société Lov'Air, la société Uni Air, après des recherches, avait conclu qu'elle ne disposait pas de la documentation de l'aéronef immatriculé [...], qui ne lui avait jamais été remise, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de la société Lov'Air Aviation contre les sociétés Berly's Aviation et Lixxbail sur un fondement contractuel ;
AUX MOTIFS QUE la société Berly's Aviation soulève l'irrecevabilité des demandes de la société Lov'air Aviation pour défaut de qualité à agir; elle fait valoir en ce sens que sur le dernier état du registre français d'immatriculation des aéronefs émanant de la DGCA le propriétaire de l'aéronef est la société GCE Bail, aucun locataire n'y apparaissant et que, faute d'inscription à ce registre, la cession de propriété de l'aéronef à la société Lov'air Aviation ne lui est pas opposable. La société Lixxbail conclut à l'irrecevabilité des demandes formées contre elle aux motifs :- que l'absence de délivrance des documents techniques et administratifs n'est pas constitutive d'un défaut de conformité mais, le cas échéant, d'un manquement à l'obligation de délivrance pour lequel l'acquéreur ne dispose de recours qu'à l'encontre de son propre vendeur, - que la société Lov'air Aviation ne dispose pas de la qualité de sous-acquéreur, n'ayant toujours pas au 30 mars 2017 accompli les formalités de mutation de la vente auprès de la DGAC et qu'elle ne justifie pas s'être trouvée dans l'impossibilité de procéder à la publication de la mutation, - que la société Lov'air Aviation ne peut agir en vertu du mandat donné par son crédit- bailleur, GCE bail devenu Natixis lease, ce crédit-bail ayant pris fin, - qu'en tout état de cause, le mandat donné par le crédit-bailleur ne permettait à la société Lov'air Aviation que d'exercer ses droits et actions au titre des garanties dues par "le constructeur, le fournisseur et l'installateur du bien loué" et non contre les vendeurs successifs. La société Lov'air Aviation réplique qu'elle a la qualité de sous-acquéreur de l'aéronef pour les trois raisons suivantes : - l'article L 6111-1 du code des transports dispose qu'un aéronef ne peut circuler que s'il est immatriculé, que l'immatriculation d'un aéronef est fonction de sa navigabilité, qu'il résulte de l'extrait du registre des immatriculations des aéronefs au 30 mars 2017 que l'aéronef a fait l'objet d'une radiation le 11 décembre 2013, radiation inéluctable puisque la navigabilité de l'appareil n'est plus assurée faute de documentation technique et historique et qu'il est désormais impossible de pouvoir à nouveau le faire immatriculer . - en l'état, l'aéronef, qui se trouve hors d'état de navigabilité, est un bien meuble qui échappe aux dispositions de l'article L 6121-2 du code des transports, - elle est recevable à agir au titre du mandat d'ester inclus dans le contrat de crédit-bail qu'elle a conclu avec GCE Bail, son assignation ayant été délivrée le 27 mars 2012, soit avant la levée d'option qui a pris effet le 11 décembre 2012, et elle se trouve subrogée dans les droits que le crédit-bailleur tient du vendeur, notamment le droit d'agir dont celui-ci disposait à l'égard de son propre vendeur, - en tout état de cause, la société Berly's Aviation ne peut sérieusement soutenir qu'elle est un tiers à la vente, les négociations ayant été conduites par M. Y... X... pour son compte à elle et les cessions de la société Berly's Aviation à la société Pamix puis de la société Pamix à elle-même s'étant faites simultanément. Ceci étant exposé, il convient de rappeler les dispositions de l'article L 6121-2 du code des transports qui précisent : "L'aéronef constitue un bien meuble pour l'application des règles fixées par le code civil. Toutefois, la cession de propriété est constatée par un écrit et ne produit d'effet à l'égard des tiers que par son inscription au registre français d'immatriculation". L'article L 6121-1 du code des transports dispose quant à lui : "L'inscription au registre français d'immatriculation vaut titre de propriété. Le registre est public et toute personne peut en obtenir copie conforme". Or, l'état du registre français des immatriculations levé au 7 mai 2014 montre qu'à cette date GCE bail, devenu Natixix lease, est toujours inscrite comme dernier propriétaire de l'aéronef; celui levé le 5 janvier 2018 révèle qu'après GCE Bail aucun droit n'a été inscrit sur l'aéronef La radiation demandée le 9 octobre 2012 par GCE Bail n'est intervenue que le 11 décembre 2013, ce qui laissait plus d'une année à la société Lov'air Aviation pour inscrire le transfert de propriété de l'aéronef à son nom; c'est en vain que l'appelante se réfère à l'article D 121-3 al.2 du code de l'aviation civile qui prévoit que l'immatriculation est subordonnée à la délivrance d'un certificat de navigabilité; en effet, à la date du transfert de propriété à son profit, l'aéronef était immatriculé et disposait d'un certificat de navigabilité valable jusqu'au 26 septembre 2009, comme indiqué dans le rapport Aiclaims; elle ne justifie en rien de l'impossibilité dans laquelle elle se serait trouvée pour procéder à l'inscription de la mutation au registre français des immatriculations. C'est encore en vain que la société Love'air Aviation invoque la quasi simultanéité des cessions, la société Berly's Aviation demeurant tiers à la vente consentie par la société Pamix. Par conséquent, l'appelante qui ne peut se prévaloir de la qualité de sous-acquéreur à l'encontre des sociétés Berly's Aviation et Lixxbail, auxquels la vente est inopposable, est irrecevable en ses demandes sur un fondement contractuel contre celles-ci ;
ALORS QUE le maitre de l'ouvrage, comme le sous-acquéreur, jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur et dispose à cet effet d'une action contractuelle directe contre le vendeur de son cocontractant, fondée sur la non-conformité de la chose livrée ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, aux motifs inopérants que la société Lov'Air n'avait pas procédé à l'inscription de la mutation au registre français des immatriculation, de sorte qu'elle « ne peut se prévaloir de la qualité de sous-acquéreur à l'encontre des sociétés Berly's Aviation et Lixxbail auxquelles la vente est inopposable » et qu'elle est « irrecevable en ses demandes sur un fondement contractuel contre celles-ci », la cour d'appel a violé les articles 1604 et 1615 du code civil.