Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de condamner le centre hospitalier intercommunal (CHI) André Grégoire à lui verser la somme totale de 1 108 440 euros en réparation des préjudices qu'il a subis à la suite de l'intervention chirurgicale du 19 décembre 2001.
Par un jugement n° 1411314 du 12 novembre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté les conclusions dirigées contre le CHI André Grégoire et condamné l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à verser à M. C..., d'une part, la somme de 106 408,31 euros et d'autre part, une rente annuelle de 14 400 euros, sous déduction des sommes versées par le département de la Seine-Saint-Denis au titre de la prestation de compensation du handicap.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, deux mémoires en réplique, un mémoire récapitulatif produit après l'invitation prévue par l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative et deux autres mémoires, enregistrés les 11 janvier 2016, 5 août 2016, 2 mai 2017, 8 juin 2018, 18 mars et 5 avril 2019, M. C..., représenté par Me B..., avocat, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1° de réformer le jugement en condamnant, à titre principal, le CHI André Grégoire et, à titre subsidiaire, l'ONIAM, à lui verser la somme de 1 674 872,42 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2011 et de leur capitalisation, en réparation des préjudices qu'il a subis ;
2° de réformer le jugement en ce qu'il l'a condamné à rembourser au département de la Seine-Saint-Denis des prestations perçues de la part de ce dernier pour un montant de 129 000 euros ;
3° de condamner le département de la Seine-Saint-Denis à lui restituer le montant de 142 796,58 euros au titre des remboursements et déduction des prestations de compensation du handicap ;
4° de déclarer l'arrêt commun à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis et à la caisse régionale d'assurance maladie d'Ile-de-France ;
5° de mettre à la charge des parties perdantes les dépens de l'instance dont distraction au profit de Me B... ;
6° de mettre à la charge des parties perdantes la somme de 30 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. C... soutient que :
- l'augmentation des montants qu'il demande est exclusivement due à l'application de l'actualisation du taux de l'euro de rente et à la demande d'intérêts ;
- les premiers juges ont omis d'indiquer les référentiels qu'ils ont utilisés pour évaluer ses préjudices ;
- le tribunal n'a communiqué aux parties ni le mémoire du département de la Seine-Saint-Denis, ni les justificatifs qui établissent la réalité de la somme de 129 000 euros prétendument versée à M. C... au titre de la tierce personne et de la compensation du handicap ;
- le CHI a commis diverses fautes, tant dans sa prise en charge médicale, qui compte tenu des conséquences disproportionnées de l'intervention qu'il a subie, doivent être présumées, qu'en manquant à son obligation d'informer le patient sur les risques de l'intervention et à celle de produire son dossier médical ;
- les conditions d'application de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique sont remplies ;
- ses préjudices doivent être réévalués.
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public,
- et les observations de Me B... pour M. C....
Considérant ce qui suit :
1. Le 19 décembre 2001, M. A... C..., alors âgé de 55 ans, s'est rendu au Centre hospitalier intercommunal (CHI) André Grégoire à Montreuil (Seine-Saint-Denis) en raison de douleurs dentaires. Il y a subi, le jour même, l'extraction de deux dents. Cette intervention a été immédiatement suivie de fortes douleurs et d'un arrêt de travail puis d'un placement en invalidité de deuxième catégorie par la Caisse régionale d'assurance maladie d'Ile-de-France (CRAMIF) à compter du 19 décembre 2004, d'une déclaration d'inaptitude définitive à tout poste de travail dans l'entreprise par le médecin du travail le 21 février 2006 et enfin d'une admission à la retraite anticipée le 31 décembre 2006. M. C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de condamner le CHI André Grégoire à lui verser la somme totale de 1 108 440 euros en réparation des préjudices qu'il a subis à la suite de l'intervention du 19 décembre 2001. Par un jugement n° 1411314 du 12 novembre 2015 dont le requérant relève appel, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté les conclusions dirigées contre le CHI André Grégoire et condamné l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à verser à M. C..., d'une part, la somme totale de 106 408,31 euros et d'autre part, une rente annuelle de 14 400 euros, sous déduction des sommes versées par le département de la Seine-Saint-Denis au titre de la prestation de compensation du handicap.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, il résulte des termes mêmes du jugement que le tribunal, qui n'était pas tenu d'indiquer le référentiel utilisé, a suffisamment détaillé l'évaluation des préjudices subis par M. C... lors de sa prise en charge médicale. Par suite, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé.
3. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que les pièces transmises par le département de la Seine-Saint-Denis au tribunal le 14 octobre 2015 ont été communiquées aux parties le 16 octobre suivant. M. C... n'est, par suite, pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient méconnu le principe du contradictoire.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par le CHI André Grégoire :
4. Devant le tribunal administratif, M. C... avait limité ses conclusions à un montant de 1 108 440 euros. Il ne se prévaut en appel d'aucune aggravation du préjudice subi ni d'une connaissance nouvelle de l'étendue de son dommage. Les conclusions présentées par l'intéressé devant la cour administrative d'appel tendant à ce que cette indemnité soit portée à la somme de 1 674 872,42 euros constituent ainsi, dans la mesure où elles excèdent le montant de 1 108 440 euros, une demande nouvelle et ne sont, dès lors, pas recevables. En revanche, M. C... est recevable à détailler devant le juge d'appel les conséquences dommageables du fait générateur invoqué en première instance, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont il n'aurait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces derniers se rattachent à ce même fait générateur et que ses prétentions demeurent dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance.
En ce qui concerne les conclusions aux fins de réformation du jugement pour avoir condamné le requérant à rembourser le département de la Seine-Saint-Denis et les conclusions aux fins de condamnation de ce dernier :
5. M. C... soutient que c'est à tort que le tribunal lui a ordonné de rembourser au département de la Seine-Saint-Denis la somme de 129 000 euros au titre de la prestation compensatrice du handicap et de l'assistance par tierce personne d'une part, et sollicite en cause d'appel la condamnation du département au versement de la somme de 142 796,85 euros ou, à titre subsidiaire, de la somme de 70 054,89 euros au titre des remboursements des prestations de compensation du handicap, d'autre part.
6. En premier lieu, il ressort des termes mêmes du jugement attaqué, et en particulier de son point 17, que les premiers juges n'ont fait que déduire des frais échus d'assistance par tierce personne d'un montant de 129 000 euros la somme de 72 741,69 euros correspondant aux sommes versées par le département de la Seine-Saint-Denis au titre de la prestation compensatrice du handicap, sans prononcer de condamnation à l'encontre du requérant.
7. En second lieu, les conclusions aux fins de condamnation du département de la Seine-Saint-Denis, nouvelles en appel, doivent être rejetées comme irrecevables.
En ce qui concerne la responsabilité du CHI André Grégoire :
8. Aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".
9. En premier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du 6 novembre 2012 qui s'est fondé sur les documents relatifs aux consultations médiales du requérant dans les jours qui ont suivi l'extraction dentaire, que celle-ci n'a donné lieu à aucune infection ni à aucune lésion organique hormis une légère inflammation n'excédant pas celle que ne manque pas de produire toute extraction dentaire. Il en résulte également que le dommage subi par le requérant résulte des douleurs neuropathiques survenues à cette occasion. Par conséquent, toute faute dans la réalisation de l'extraction dentaire doit être écartée. Il n'y a dès lors pas lieu de présumer une telle faute motif pris de la disproportion entre les conséquences auxquelles l'intervention a donné lieu et sa nature, à la supposer même établie, de geste courant à caractère bénin. Il en résulte également que l'incapacité du CHI André Grégoire de produire le dossier médical du requérant, pour regrettable qu'elle soit, n'a pas fait perdre à ce dernier une chance sérieuse d'établir l'origine de ses dommages, que l'expertise a permis de révéler. Il en résulte enfin que le manque de préparation de l'intervention, qui peut être tenu pour établi en l'absence de preuve de tout examen préalable, n'est pas à l'origine du dommage subi. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le CHI André Grégoire aurait commis une faute médicale de nature à engager sa responsabilité sur le fondement des dispositions précitées.
10. En second lieu, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé. Si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité, de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation.
11. Il résulte de l'instruction que M. C... ne pouvait être informé du risque de décompensation sur le mode neuropsychique avec dyskinésies faciales qui est à l'origine de son dommage, dès lors que ce risque était imprévisible, comme l'a retenu le rapport d'expertise. Par conséquent, le CHI André Grégoire ne peut être regardé comme ayant manqué à son obligation d'informer le requérant des risques connus d'invalidité liés à l'extraction dentaire.
12. En l'absence de faute du CHI André Grégoire présentant un lien de causalité avec le dommage subi par le requérant, les conclusions tendant à la condamnation de ce dernier à en réparer les conséquences dommageables ne peuvent qu'être rejetées.
En ce qui concerne la mise en jeu de la solidarité nationale :
13. Aux termes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret ". Aux termes de l'article D. 1142-1 du même code, qui définit le seuil de gravité prévu par ces dispositions législatives : " Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l'article L.1142-1 est fixé à 24 %. (...) ".
14. L'ONIAM doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation de dommages résultant directement d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins à la condition qu'ils présentent un caractère d'anormalité au regard de l'état de santé du patient comme de l'évolution prévisible de cet état. La condition d'anormalité du dommage prévue par ces dispositions doit toujours être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement. Lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible.
15. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 9 novembre 2012, que les préjudices subis par M. C... sont directement imputables à l'intervention chirurgicale qu'il a subie au CHI André Grégoire le 19 décembre 2001. En outre, cette intervention est à l'origine d'un déficit fonctionnel permanent de 25% dont il demeure atteint et qui se manifeste par des douleurs buccales et des dyskinésies faciales provoquant un retentissement fonctionnel important sur la mastication et la phonation. Enfin, il résulte de cette même expertise que les conséquences de l'intervention sont anormalement graves dès lors que, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible, estimée à moins de 3%. Ainsi, les conditions de gravité et d'anormalité du dommage prévues par les dispositions précitées sont remplies. Il s'ensuit que l'indemnisation des préjudices subis par M. C... incombe, en application des dispositions précitées, à l'ONIAM, ce que ce dernier ne conteste au demeurant pas.
En ce qui concerne l'évaluation des préjudices :
16. Le rapport d'expertise du 6 novembre 2012 a fixé au 19 décembre 2004 la date de consolidation de l'état de santé de M. C..., qui n'est pas contestée.
S'agissant des préjudices à caractère patrimonial :
Frais divers :
17. M. C... sollicite l'octroi d'une somme de 5 273,28 euros au titre d'une part des frais d'expertise qu'il aurait exposés auprès d'un médecin et d'autre part des frais de transport exposés par lui-même et ses proches pendant ses hospitalisations et pour se rendre à des rendez-vous médicaux. Toutefois, il n'établit pas avoir exposé de tels frais, en l'absence de tout justificatif des frais d'expertise qu'il invoque et en l'absence de preuve de ce que les déplacements vers les lieux d'hospitalisation et de consultations médicales, dont il résulte de l'expertise qu'ils étaient tous situés à moins d'une vingtaine de kilomètres environ de son domicile de Villemomble (Seine-Saint-Denis), auraient engendré des frais de transport supplémentaires. La réalité de ces préjudices n'étant pas établie, le requérant n'est pas fondé à en demander l'indemnisation.
Perte de gains professionnels temporaires et permanents :
18. Les indemnités journalières mentionnées au 5° de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale et la pension d'invalidité prévue à l'article L. 341-1 du même code ont la nature de prestations ayant pour objet de compenser la perte de revenus. Il convient donc de les déduire de cette dernière pour évaluer le préjudice de perte de gains professionnels.
19. Il résulte de l'instruction, particulièrement des bulletins de paie produits par M. C... qu'avant l'accident, celui-ci percevait des salaires pour environ 604 euros par mois. Il ressort des attestations de paiement de prestations par la caisse primaire de l'assurance maladie (CPAM) de la Seine-Saint-Denis qu'après l'intervention du 19 décembre 2001, l'intéressé a perçu, d'abord, des indemnités journalières s'élevant à la somme totale de 28 518 euros pour la période allant du 19 décembre 2001 au 19 décembre 2004, ce qui revient en moyenne à 792 euros par mois, puis, à compter du 19 décembre 2004 et jusqu'à la date de son admission à la retraite, une pension d'invalidité d'un montant moyen de 692 euros par mois. Par conséquent, M. C... n'établit pas que la perte de gains professionnels n'aurait pas été entièrement compensée par les revenus de remplacement qu'il a perçus. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions tendant à l'indemnisation de ce poste de préjudice.
20. Si le requérant invoque un préjudice de carrière consistant dans la perte de primes et autres avantages dont il prétend qu'il les aurait perçus s'il avait continué de travailler et ainsi d'acquérir de l'ancienneté dans son entreprise, il n'apporte aucun élément au soutien de cette affirmation. Faute de présenter un caractère certain, ce préjudice ne peut donc pas être indemnisé.
21. Si M. C... soutient que sa mise à la retraite anticipée à l'âge de 60 ans ne lui a pas permis de bénéficier d'une retraite à taux plein, faute de pouvoir réunir le nombre de trimestres de cotisations nécessaires, il résulte de l'instruction, particulièrement d'un courrier du 28 juillet 2014 d'évaluation de la retraite de la caisse de retraite, qu'en sa qualité de bénéficiaire d'une pension d'invalidité de catégorie 2, le requérant bénéfice d'une retraite à taux plein indépendamment du nombre de trimestres de cotisations. Par conséquent, le requérant n'établit pas avoir subi de perte de droits à pension en raison de son admission à la retraite dès l'âge de 60 ans.
Frais d'assistance par tierce personne :
22. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 6 novembre 2012, que l'état de santé de M. C... a nécessité, dès les suites de l'intervention et avant comme après la consolidation, l'assistance d'une tierce personne, assurée par son épouse, à raison de 3 heures par jour. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi en l'indemnisant sur la base d'un taux horaire moyen de rémunération, tenant compte des charges patronales et des majorations de rémunération pour travail du dimanche, fixé à 13 euros. Afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés prévus par l'article L. 3133-1 du code du travail, il y a lieu, ainsi d'ailleurs que le prévoit le référentiel de l'ONIAM, de calculer l'indemnisation sur la base d'une année de 412 jours. Les frais d'assistance à tierce personne doivent donc être évalués à 16 068 euros par an, soit 1 339 euros par mois. A la date du présent arrêt, dix-huit années se sont écoulées depuis l'intervention du 19 décembre 2001, ce qui correspond à 216 mois dont il convient de déduire un mois au titre des périodes d'hospitalisation de l'intéressé, pendant lesquelles ce dernier n'a pas exposé de frais d'assistance par tierce personne. Le montant des frais exposés par le requérant peut donc être évalué à 287 885 euros.
23. Il convient toutefois de déduire de ce montant toute prestation sociale dont l'objet est identique à l'indemnisation des frais d'assistance par tierce personne et qui présente un caractère non récupérable. Il résulte de l'instruction, particulièrement du courrier du département de la Seine-Saint-Denis du 5 mars 2019, que le requérant perçoit l'allocation compensatrice tierce personne depuis le 1er juin 2004. Il résulte des dispositions, aujourd'hui abrogées, de l'article R. 245-4 du code de l'action sociale et des familles qui régissaient cette prestation que celle-ci a pour objet exclusif de couvrir les frais d'assistance par tierce personne, par l'effectivité desquels elle est d'ailleurs conditionnée. Il résulte des dispositions, également abrogées aujourd'hui, de l'article L. 245-6 du même code que cette prestation présente un caractère non récupérable.
24. Il résulte de l'instruction, à savoir du courrier du département de la Seine-Saint-Denis déjà mentionné, que le requérant a perçu, au titre de l'allocation compensatrice tierce personne sur la période allant du 1er juin 2004 et au 28 février 2019, soit 177 mois, un montant total de 99 331 euros, soit en moyenne 561 euros par mois. Le requérant doit donc être regardé comme ayant perçu, entre le 1er juin 2004 et la date du présent arrêt, soit sur une période de 186 mois, un montant total d'environ 104 000 euros. En application du principe rappelé au point 23 du présent arrêt, il convient de déduire ce montant des frais exposés s'élevant à 287 885 euros déterminé au point 22 du présent arrêt. Il convient donc d'évaluer le préjudice de frais d'assistance par tierce personne exposés à la date du présent arrêt à 183 885 euros.
25. Il convient d'allouer à M. C..., au titre des frais d'assistance par tierce personne futurs, une rente d'un montant annuel de 16 068 euros sous déduction du montant de l'allocation compensatrice tierce personne perçue au titre de la même année et qui, dès lors qu'elle est calculée sur la base d'une rémunération dont le taux est supérieur à celui du salaire minimum interprofessionnel de croissance, sera revalorisé par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.
S'agissant des préjudices à caractère extrapatrimonial :
Préjudices temporaires :
26. Il ressort du rapport d'expertise qu'entre le 19 décembre 2001 et le 19 décembre 2004, date de la consolidation, M. C... a subi un déficit fonctionnel évalué à 100% pendant 34 jours correspondant à des périodes d'hospitalisation, puis un déficit fonctionnel évalué à 25% pour les autres périodes. Il y a lieu d'indemniser ce préjudice sur la base d'un montant de 400 euros par mois pour un déficit fonctionnel temporaire total et ainsi d'accorder au titre du préjudice subi une indemnisation de 3 900 euros.
27. Le rapport d'expertise a évalué les souffrances endurées par M. C... jusqu'à la consolidation de son état de santé à 4 sur une échelle de 7. Il convient d'accorder au titre de ce préjudice un montant de 7 200 euros.
28. Il ne résulte pas de l'instruction que M. C... aurait subi un préjudice esthétique temporaire distinct de son préjudice définitif, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges. Il n'y a pas lieu, par suite, de lui allouer une réparation au titre de ce poste de préjudice.
Préjudices permanents :
29. Il résulte du rapport d'expertise que les préjudices esthétiques temporaire et permanent, évalués à 3 sur une échelle de 7 sont identiques et consistent en l'absence de possible appareillage dentaire avec une forte diminution de l'étage inférieur de la face et une dégradation de l'image au regard des tiers. En accordant la somme de 4 000 euros, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce préjudice.
30. Le rapport d'expertise a évalué à 25% le déficit fonctionnel permanent. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en l'évaluant à 34 200 euros.
31. Si M. C... demande l'indemnisation d'un préjudice d'agrément consistant dans son inactivité totale et sa perte d'identité sociale, ces conséquences sont réparées au titre du déficit fonctionnel permanent mentionné au point 30 du présent arrêt. S'il soutient par ailleurs avoir dû renoncer à toute vie associative, en particulier au sein de la communauté malienne, il n'apporte aucun élément pour établir qu'il exerçait une telle activité avant l'accident médical qu'il a subi. Le requérant n'est donc pas fondé à demander l'indemnisation de ce chef de préjudice, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges.
32. Enfin, il résulte de l'instruction que M. C... subit un préjudice sexuel, justement évalué à 1 500 euros par les premiers juges.
33. Il résulte de tout ce qui précède que l'ONIAM doit être condamné à verser une somme totale de 234 685 euros ainsi qu'une rente annuelle d'un montant de 16 068 euros au titre de l'assistance par tierce personne future, sous déduction des sommes versées par le département de la Seine-Saint-Denis au titre de l'allocation compensatrice tierce personne qui sera révisé par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.
Sur les intérêts et leur capitalisation :
34. M. C... a droit aux intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2011, date de sa demande indemnitaire préalable devant le CHI André Grégoire.
35. La capitalisation des intérêts a été demandée le 2 mai 2017. A cette date, il était dû au moins une année d'intérêts. Dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande.
Sur les dépens :
36. La présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens au sens de l'article
R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions formées par M. C... et l'ONIAM sur leur fondement doivent, en tout état de cause, être rejetées.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
37. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". Ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée par M. C... soit mise à la charge du CHI André Grégoire, qui n'est pas la partie perdante à l'instance. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 1 500 euros à verser à M. C... en application de ces dispositions.
DECIDE :
Article 1er : L'ONIAM versera à M. C... un montant de 234 685 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2011. Les intérêts échus à la date du 2 mai 2017 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : L'ONIAM versera à M. C... une rente annuelle d'un montant de 16 068 euros au titre de l'assistance par tierce personne future, sous déduction des sommes versées par le département de la Seine-Saint-Denis au titre de l'allocation compensatrice tierce personne. Le montant de cette rente sera révisé par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.
Article 3 : L'ONIAM versera à M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le jugement n° 1411314 du 12 novembre 2015 rendu par le Tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par les parties est rejeté.
N° 16VE00072 10