La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/02/2025 | FRANCE | N°24MA01624

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 1ère chambre, 13 février 2025, 24MA01624


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée (SAS) L'Immobilière Groupe Casino (IGC) a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive, pour des montants respectifs de 102 479 et 5 466 euros.



Par une ordonnance n° 2402981 du 14 juin 2024, le président de la 2ème chambre du trib

unal administratif de Nice a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) L'Immobilière Groupe Casino (IGC) a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive, pour des montants respectifs de 102 479 et 5 466 euros.

Par une ordonnance n° 2402981 du 14 juin 2024, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 25 juin et 2 octobre 2024, la société par actions simplifiée (SAS) L'Immobilière Groupe Casino (IGC), représentée par Me Decombe, doit être regardée comme demandant à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 14 juin 2024 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision implicite du préfet des Alpes-Maritimes ;

3°) de procéder à la restitution de la taxe d'aménagement, pour un montant de 102 479 euros ;

4°) de procéder à la restitution de la redevance d'archéologie préventive, pour un montant de 5 466 euros ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'ordonnance attaquée est irrégulière, dans la mesure où la notion de délai raisonnable ne trouve pas à s'appliquer dans le cadre d'un contentieux d'assiette.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 septembre 2024, la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- la Cour est incompétente, en application des dispositions de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, pour connaître des conclusions relatives à la taxe d'aménagement ;

- la requête de première instance était irrecevable, d'une part, pour cause de tardiveté, et, d'autre part, en l'absence d'exercice du recours administratif préalable obligatoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code du patrimoine ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Portail, président ;

- et les conclusions de M. Quenette, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 4 mai 2015, le maire de Mandelieu-la-Napoule a délivré à la société par actions simplifiée (SAS) L'Immobilière Groupe Casino (IGC) un permis de construire comprenant des démolitions, tendant à la restructuration d'une galerie marchande sise Route de Fréjus sur le territoire communal. Deux permis de construire modificatifs, relatifs à des modifications mineures apportées au projet initial, ont été délivrés à la SAS IGC les 28 février 2017 et 30 octobre 2018. Chacun de ces permis de construire a donné lieu à des titres de perception relatifs à la taxe d'aménagement et à la redevance d'archéologie préventive, émis les 12 avril 2017, 24 mai 2017 et 9 février 2021. Par une réclamation du 19 août 2021, la SAS IGC a demandé la restitution d'une partie des sommes versées, suite aux titres de perception émis le 9 février 2021, lesquels ont mis à sa charge la taxe d'aménagement pour un montant de 91 204 euros et la redevance d'archéologie préventive pour un montant de 4 864 euros. La SAS IGC relève appel de l'ordonnance par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive, pour des montants respectifs de 102 479 et 5 466 euros.

Sur les conclusions relatives à la taxe d'aménagement :

2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, dans sa version en vigueur à la date de la décision contestée : " (...) le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) 4° Sur les litiges relatifs aux impôts locaux et à la contribution à l'audiovisuel public, à l'exception des litiges relatifs à la contribution économique territoriale (...) ". Selon l'article R. 351-4 de ce même code : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une de ces juridictions administratives, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance, pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions ou pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste de la demande de première instance ".

3. La taxe d'aménagement étant perçue, en vertu de l'article L. 331-33 du code de l'urbanisme, au profit des collectivités territoriales, elle constitue un impôt local au sens du 4° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. L'ordonnance attaquée a donc été rendue en premier et dernier ressort en tant qu'elle a statué sur la demande de la SAS IGC tendant à la restitution de la somme de 102 479 euros au titre de la taxe d'aménagement. Il s'ensuit que les conclusions tendant à l'annulation de cette ordonnance en tant qu'elle a statué sur cette demande de la SAS IGC relèvent de la compétence du Conseil d'Etat, juge de cassation. Il y a lieu, dès lors, de les transmettre au Conseil d'Etat.

Sur les conclusions relatives à la redevance d'archéologie préventive :

4. D'une part, aux termes de l'article L. 524-15 du code du patrimoine, dans sa version en vigueur à la date de délivrance du permis de construire modificatif du 30 octobre 2018, fait générateur de la redevance litigieuse : " Les réclamations concernant la redevance d'archéologie préventive sont présentées, instruites et jugées dans les conditions prévues aux articles L. 331-30 à L. 331-32 du code de l'urbanisme ". Selon l'article L. 331-31 du code de l'urbanisme, dans sa version en vigueur à cette même date : " En matière d'assiette, les réclamations concernant la taxe d'aménagement sont recevables jusqu'au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'émission du premier titre de perception ou du titre unique. (...) Les réclamations concernant la taxe d'aménagement sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables en matière d'impôts directs locaux ". Aux termes de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales, dans sa version en vigueur à cette même date : " Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial, selon le cas, de la direction générale des finances publiques ou de la direction générale des douanes et droits indirects dont dépend le lieu de l'imposition. (...) ". Selon l'article R. 199-1 de ce même livre : " L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur la réclamation, que cette notification soit faite avant ou après l'expiration du délai de six mois prévu à l'article R. 198-10. / Toutefois, le contribuable qui n'a pas reçu la décision de l'administration dans un délai de six mois mentionné au premier alinéa peut saisir le tribunal dès l'expiration de ce délai. / L'administration peut soumettre d'office au tribunal la réclamation présentée par un contribuable. Elle doit en informer ce dernier ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

5. Il résulte des dispositions de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales que seule la notification au contribuable d'une décision expresse de rejet de sa réclamation assortie de la mention des voies et délais de recours a pour effet de faire courir le délai de deux mois qui lui est imparti pour saisir le tribunal administratif du litige qui l'oppose à l'administration fiscale, l'absence d'une telle mention lui permettant de saisir le tribunal dans un délai ne pouvant, sauf circonstance exceptionnelle, excéder un an à compter de la date à laquelle il a eu connaissance de la décision. En revanche si, en cas de silence gardé par l'administration sur la réclamation, le contribuable peut soumettre le litige au tribunal administratif à l'issue d'un délai de six mois, aucun délai de recours contentieux ne peut courir à son encontre, tant qu'une décision expresse de rejet de sa réclamation ne lui a pas été régulièrement notifiée.

6. Il résulte de l'instruction que la société requérante conteste l'assiette de la redevance d'archéologie préventive à laquelle elle a été soumise, au titre du permis de construire modificatif susmentionné du 30 octobre 2018, par un titre de perception émis le 9 février 2021 pour un montant de 4 864 euros. En application des dispositions précitées de l'article L. 331-31 du code de l'urbanisme, dans leur version alors en vigueur, la SAS IGC disposait, pour effectuer une réclamation relative à cette assiette, d'un délai expirant le 31 décembre 2023. Contrairement à ce que soutient en défense la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, la réclamation adressée par cette société à la direction départementales des territoires et de la mer (DDTM) des Alpes-Maritimes le 19 août 2021 constitue le recours administratif préalable obligatoire prévu par les dispositions précitées de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales. A cet égard, l'accusé de réception produit par la société requérante permet d'établir que cette réclamation a été effectivement réceptionnée par les services de la DDTM des Alpes-Maritimes le 23 août 2021. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que l'autorité administrative aurait apporté à la SAS IGC une réponse à cette réclamation. Dès lors, en application des règles rappelées au point 5, aucun délai de recours n'a pu courir à son encontre, et sa demande présentée devant le tribunal administratif de Nice le 3 juin 2024 ne pouvait, dans ces conditions, être regardée comme tardive.

7. Il résulte de ce qui précède que la SAS IGC est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Nice a rejeté comme irrecevable sa demande relative à la restitution de la redevance d'archéologie préventive.

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire, dans cette mesure, devant le tribunal administratif de Nice.

Sur les frais liés au litige :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Les conclusions de la SAS IGC dirigées contre l'ordonnance n° 2402981 du 14 juin 2024 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Nice en tant qu'elle a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe d'aménagement à laquelle elle a été assujettie en conséquence de la délivrance du permis de construire modificatif du 30 octobre 2018 sont transmises au Conseil d'Etat.

Article 2 : L'ordonnance n° 2402981 du 14 juin 2024 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Nice est annulée en tant qu'elle a rejeté la demande de la SAS IGC tendant à la restitution de la redevance d'archéologie préventive à laquelle elle a été assujettie en conséquence de la délivrance du permis de construire modificatif du 30 octobre 2018.

Article 3 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure indiquée à l'article 2, devant le tribunal administratif de Nice.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée (SAS) L'Immobilière Groupe Casino (IGC), au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, à la Direction régionale des finances publiques Provence-Alpes-Côte d'Azur et à la Préfecture des Alpes Maritimes.

Délibéré après l'audience du 30 janvier 2025, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- Mme Courbon, présidente assesseure,

- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2025

2

N° 24MA01624

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01624
Date de la décision : 13/02/2025

Analyses

19-03-05-02 Contributions et taxes. - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. - Taxes assimilées. - Taxe locale d'équipement.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : SOCIÉTÉ D’AVOCATS DU PARC MONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-13;24ma01624 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award