AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 145-28 du Code de commerce et l'article 1147 du Code civil ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes qu'aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue et que, jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Tavim, qui avait donné à bail commercial divers locaux à la société Max tricots, a délivré congé à cette dernière avec refus de renouvellement et offre d'indemnité d'éviction ; que la société Tavim a été mise en liquidation judiciaire le 28 juillet 1992 ; que, le 17 juin 1998, la cour d'appel a confirmé le jugement qui avait déclaré éteinte la créance d'indemnité d'éviction, faute de déclaration, dit que la société Max tricots n'avait pas droit au renouvellement du bail ni au maintien dans les lieux et ordonné son expulsion des locaux devenus entre temps la propriété de la société Gestion et services ; qu'un pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté (3 chambre civile, 28 juin 2000, Bull. III n° 132) ; que, reprochant à son avocat, M. X..., de n'avoir pas déclaré la créance d'indemnité d'éviction, la société Max Tricots a engagé contre lui une action en responsabilité contractuelle ;
Attendu que pour débouter la société Max tricots de son action en responsabilité, l'arrêt retient, d'un côté, qu'à raison de l'insuffisance d'actif au regard du passif, la société Max tricots n'aurait pu percevoir dans la liquidation de son bailleur quelque somme que ce soit, la clôture pour insuffisance d'actif devant être prononcée sans possibilité de règlement des créanciers chirographaires, de sorte que la locataire, privée de toute action contre son débiteur, n'aurait pu prétendre au règlement de l'indemnité dont elle était créancier chirographaire, même si sa créance avait été admise, et de l'autre, que les conditions requises pour opposer au propriétaire du local loué son droit au maintien dans les lieux n'auraient plus été remplies, de sorte que la société Max tricots ne pouvait prétendre avoir perdu son droit à raison de la faute non contestée de son avocat qui a omis de déclarer utilement la créance d'indemnité d'éviction ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que par suite de l'extinction de la créance d'indemnité d'éviction non déclarée, la société Max tricots, déchue du droit de recevoir cette indemnité, ne pouvait plus se prévaloir du droit au maintien dans les lieux, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 octobre 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne M. X... et la compagnie Les Mutuelles du Mans assurances aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et de la compagnie Les Mutuelles du Mans assurances ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille cinq.