Vu la procédure suivante :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 14 janvier 2013 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de lui communiquer la copie de la décision référencée 48 portant retrait de deux points sur son permis de conduire et d'enjoindre au ministre de lui communiquer ce document. Par un jugement n° 1303647/5-1 du 11 décembre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un pourvoi, enregistré le 17 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la route ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Lionel Collet, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. B...;
Vu la note en délibéré produite par le ministre de l'intérieur, enregistrée le 16 décembre 2016.
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, le 21 décembre 2012, M. B...a demandé au ministre de l'intérieur de lui communiquer copie d'une décision retirant deux points de son permis de conduire ; que, par une décision du 14 janvier 2013, le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande au motif que le courrier référencé 48 informant le titulaire d'un permis de conduire d'un retrait de points est édité en un seul exemplaire expédié à l'adresse de l'intéressé et que l'administration n'est pas en mesure d'en délivrer une copie ; que la commission d'accès aux documents administratifs, saisie par M. B..., a émis le 21 février 2013 un avis favorable à la communication de la décision en cause, en relevant que rien ne paraissait s'opposer à l'édition d'une copie de celle-ci à l'aide d'un traitement automatisé d'usage courant ; que, par le jugement du 11 décembre 2014 contre lequel M. B...se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Paris a toutefois rejeté la demande d'annulation du refus de communication du 14 janvier 2013 ;
2. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, applicable à la date de la décision attaquée et aujourd'hui codifié à l'article L. 300-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Sont considérés comme documents administratifs (...) les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat (...). Constituent de tels document notamment les (...) décisions " ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi, aujourd'hui codifié aux articles L. 311-1 et suivant du même code : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les autorités mentionnées à l'article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande./ Le droit à communication ne s'applique qu'aux documents achevés./ (...) / Le droit à communication ne s'exerce plus lorsque les documents font l'objet d'une diffusion publique. (...) " ; qu'enfin, l'article 6 de la loi énumère, d'une part, au I, la liste des documents non communicables, aujourd'hui reprise à l'article L. 311-5 du code, d'autre part, au II, la liste des documents communicables uniquement à l'intéressé, aujourd'hui reprise à l'article L. 311-6 du code ; qu'il résulte de ces dispositions que, sauf impossibilité matérielle ou technique, lorsqu'une décision achevée et non rendue publique ne figure pas parmi les documents non communicables énumérés au I de l'article 6 de la loi, elle est communicable de plein droit à toute personne à laquelle le II de cet article n'interdit pas d'en obtenir communication ;
3. Considérant que, pour refuser d'annuler la décision du 14 janvier 2013, le tribunal administratif a notamment retenu que l'administration n'était pas en mesure de communiquer aux intéressés une copie des décisions portant retrait de points d'un permis de conduire ; qu'il ressort toutefois du dossier qui lui était soumis que, dans ses observations en défense, le ministre de l'intérieur s'était borné à alléguer une impossibilité matérielle, sans faire état d'aucun élément relatif aux modalités techniques d'édition des courriers référencé 48 de nature à en apporter la démonstration et sans fournir aucune précision ; qu'en l'état du dossier qui lui était soumis, le tribunal administratif n'a pu, sans entacher son jugement de dénaturation, tenir pour établie la réalité de l'impossibilité invoquée par le ministre ;
4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
5. Considérant qu'avant de statuer sur la demande de M.B..., il y a lieu d'inviter le ministre de l'intérieur, dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle la présente décision lui sera notifiée, à communiquer au Conseil d'Etat tous éléments utiles relatifs à l'édition des courriers référencés 48 relatifs au retrait de points du permis de conduire, ainsi que des courriers 48 SI relatifs à la perte de validité du permis pour solde de points nul, de nature à établir, en l'état du système informatique gérant les permis de conduire, l'impossibilité technique dont il a fait état d'éditer des copies de ces décisions ou les difficultés particulières que cette opération comporterait ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 11 décembre 2014 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : Le ministre de l'intérieur est invité à communiquer au Conseil d'Etat, dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle la présente décision lui sera notifiée, tous éléments utiles relatifs à l'édition des courriers référencés 48 relatifs au retrait de points du permis de conduire, ainsi que des courriers 48 SI relatifs à la perte de validité du permis pour solde de points nul, de nature à établir, en l'état du système informatique gérant les permis de conduire, l'impossibilité technique dont il a fait état d'éditer des copies de ces décisions ou les difficultés particulières que cette opération comporterait.
Article 3 : Dans l'attente de la réponse à cette mesure d'instruction, il est sursis à statuer sur la demande de M.B....
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.