Vu la procédure suivante :
L'association " collectif Non au téléski nautique-restaurant ", M. et Mme B...G..., M. H...C..., M. et Mme E...F...et M. et Mme D...I...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté en date du 8 avril 2016 par lequel le maire de Plessé (Loire-Atlantique) a accordé à M. J... A...un permis d'aménager portant sur la création d'un téléski nautique, d'un local destiné à l'accueil et à l'équipement des skieurs et d'un local destiné à la restauration sur un terrain situé au lieu-dit " Etang de Buhel ", sur le territoire de cette commune. Par une ordonnance n° 1603031 du 3 mai 2016, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire et quatre mémoires complémentaires, enregistrés les 18 mai, 30 mai, 8 août, 24 octobre 2016 et le 25 janvier 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " collectif non au téléski nautique-restaurant au lac de Buhel de Plessé " et M. et Mme G...demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande de suspension ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Plessé et de M. A...une somme globale de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de l'Association " collectif non au téléski nautique-restaurant " et de M. et MmeG..., à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la commune de Plessé, et à la SCP Didier, Pinet, avocat de M. A...;
1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par arrêté du 8 avril 2016, le maire de la commune de Plessé a délivré à M. A...un permis d'aménager, en vue de la réalisation sur l'étang de Buhel d'un téléski nautique, comprenant cinq pylônes de dix à douze mètres implantés dans l'étang, avec haubanages par câbles d'aciers implantés sur les berges par ancrage au sol, de la création d'un pôle d'activité de téléski-nautique avec aménagement de pontons en bois fixes et construction d'un accueil, de vestiaires et d'un espace de stockage et, enfin, de la mise en place d'un ponton flottant et de la création d'un local de restauration ;
3. Considérant que, par ordonnance du 3 mai 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de l'association " collectif non au téléski nautique-restaurant " et de M. et Mme G...tendant, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, à la suspension de l'exécution de cette décision au motif qu'en l'état de l'instruction, aucun des moyens invoqués n'était de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; que, par suite, ces requérants ont un intérêt à se pourvoir en cassation contre cette ordonnance ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que certains travaux, en particulier les travaux de construction du local destiné à la restauration, ne sont pas achevés ; que, dès lors, le pourvoi n'a pas perdu son objet ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-19 du code de l'urbanisme : " Doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager : (...) g) L'aménagement d'un terrain pour la pratique des sports ou loisirs motorisés ; (...) h) L'aménagement d'un parc d'attractions ou d'une aire de jeux et de sports d'une superficie supérieure à deux hectares " ; qu'aux termes de l'article L. 441-2 du même code : " Lorsque les travaux d'aménagement impliquent, de façon accessoire, la réalisation par l'aménageur de constructions et d'installations diverses sur le terrain aménagé, la demande de permis d'aménager peut porter à la fois sur l'aménagement du terrain et sur le projet de construction (...) " ; que l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Plessé, applicable à la zone NL, prévoit que, les constructions et installations non nécessaires aux activités de sport et loisirs de plein air ou aux services publics ou d'intérêt collectif sont interdites, l'article N2 de ce règlement énonçant quant à lui que, dans cette zone, les constructions et installations sont autorisées sous réserve d'être nécessaires aux activités de sport, loisirs de plein air et activités culturelles ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le terrain d'assiette du projet est situé en zone NL du plan local d'urbanisme de la commune de Plessé ; que le " local destiné à la restauration " autorisé par l'arrêté du 8 avril 2016 consiste en un projet de restaurant comportant, outre une salle de restauration, un espace " bar et snack " et une terrasse, l'ensemble ayant une capacité supérieure à cent couverts ; qu'un tel établissement de restauration ne peut être regardé ni comme un équipement nécessaire, au sens du règlement du plan local d'urbanisme, à l'activité de téléski nautique, pour laquelle est en outre prévue la création de locaux et d'équipements spécifiquement dédiés à l'accueil des pratiquants de ce loisir, ni une construction accessoire aux installations destinées à la pratique du téléski nautique ; qu'ainsi, pour juger que le moyen tiré de la violation du règlement du plan local d'urbanisme et des dispositions de l'article L. 441-2 du code de l'urbanisme n'était pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée, le juge des référés du tribunal administratif a dénaturé les faits de l'espèce ; que, par suite, les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par l'association " collectif non au téléski nautique-restaurant" et M. et MmeG..., en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Sur la recevabilité de la demande d'annulation du permis de construire litigieux :
8. Considérant que les statuts de l'association " collectif non au téléski nautique-restaurant " prévoient qu'elle a pour but d'exiger le retrait de la délibération autorisant l'occupation du domaine public en vue de l'installation d'un téléski nautique et d'un restaurant à l'étang de Buhel, d'effectuer les actions en justice qui s'avèreraient nécessaires et de proposer de nouveaux projets de nature à préserver la qualité environnementale et l'équilibre social du site ; qu'elle justifie donc d'un intérêt pour agir contre l'arrêté du maire de Plessé accordant un permis d'aménager à M. A...pour la réalisation de ce projet ; que M. et Mme G...sont propriétaires riverains du siège de l'opération dont la réalisation va produire des nuisances visuelles et sonores affectant les conditions de jouissance de leurs biens ; que, par suite, la commune de Plessé n'est pas fondée à soutenir qu'ils ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité pour demander l'annulation de l'arrêté litigieux ;
Sur l'urgence :
9. Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés, saisi d'une demande de suspension d'une décision accordant une autorisation d'urbanisme, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que la condition d'urgence doit en principe être constatée lorsque les travaux vont commencer ou ont déjà commencé sans être pour autant achevés ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, si M. A...soutient que les travaux sont achevés, ils ressort des pièces du dossier que les travaux de construction du restaurant ne sont pas terminés ; qu'ainsi, en l'espèce, la condition d'urgence au sens de l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie ;
Sur l'existence de moyens propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux :
10. Considérant, en premier lieu, que, ainsi qu'il a été dit au point 6, eu égard aux capacités d'accueil et aux prestations proposées par le " local de restauration " autorisé par le permis d'aménager, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 8 avril 2016 méconnaît les dispositions de l'article L. 441-2 du code de l'urbanisme ainsi que les articles N1 et N2 du règlement du PLU de la commune est, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux sur sa légalité ;
11. Considérant, en second lieu, qu'en vertu de l'article R. 441-6 du code de l'urbanisme, lorsque la demande de permis d'aménager prévoit l'édification de constructions à l'intérieur du périmètre du terrain à aménager, le dossier de demande doit être complété par la production de certaines pièces exigées pour l'instruction d'une autorisation de construire ; qu'en particulier, doivent être indiquées, conformément à l'article R. 431-9 du même code, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la demande d'aménagement prévoyait l'édification de plusieurs constructions à l'intérieur du périmètre du terrain à aménager ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande de permis d'aménager aurait comporté l'indication des modalités de raccordement de ces constructions au réseau public d'assainissement ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'arrêt accordant le permis d'aménager méconnaît ces dispositions est, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux sur la sa légalité ;
12. Considérant qu'en revanche, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les autres moyens soulevés par l'association " collectif non au téléski nautique-restaurant " et M. et MmeG..., tirés de ce que le projet aurait dû faire l'objet d'une concertation et d'une enquête publique, qu'il aurait dû être soumis à une étude d'impact et de la violation des article R. 111-2, R. 111-26 et R. 111-27 du code de l'urbanisme ne paraissent pas, en l'état de l'instruction, propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association " collectif non au téléski nautique-restaurant " et M. et MmeG... sont fondés à demander la suspension de l'exécution de l'arrêté du 8 avril 2016 par lequel le maire de Plessé a accordé un permis d'aménager à M. A...;
14. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune Plessé le versement d'une somme globale de 3 000 euros à l'association " collectif non au téléski nautique-restaurant " et à M. et Mme G...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les dispositions de cet article font, en revanche, obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune de Plessé et de M. A...tendant aux mêmes fins ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nantes du 3 mai 2016 est annulée.
Article 2 : L'exécution de l'arrêté du maire de Plessé du 8 avril 2016 est suspendue.
Article 3 : La commune de Plessé versera une somme globale de 3 000 euros au " collectif non au téléski nautique-restaurant" et à M. et Mme G...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'association " collectif non au téléski nautique-restaurant ", à M. et Mme B...G..., à la commune de Plessé et à M. J...A....