La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/07/2024 | FRANCE | N°487996

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 24 juillet 2024, 487996


Vu la procédure suivante :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 16 juillet 2018 par laquelle le ministre de l'éducation nationale l'a licenciée pour insuffisance professionnelle. Par un jugement n° 1808553 du 22 février 2022, le tribunal administratif a rejeté sa demande.



Par un arrêt n° 22NT01179 du 4 juillet 2023, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de Mme B..., annulé ce jugement et la décision du 16 juillet 2018 du ministre de l'édu

cation nationale.



Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregist...

Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 16 juillet 2018 par laquelle le ministre de l'éducation nationale l'a licenciée pour insuffisance professionnelle. Par un jugement n° 1808553 du 22 février 2022, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 22NT01179 du 4 juillet 2023, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de Mme B..., annulé ce jugement et la décision du 16 juillet 2018 du ministre de l'éducation nationale.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés le 5 septembre 2023 et le 6 février 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de Mme B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code général de la fonction publique ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Camille Belloc, auditrice,

- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B..., titularisée dans le grade de professeur certifié en italien à compter du 1er septembre 2003, a été notamment affectée au collège Benjamin Delessert de Saumur (Maine-et-Loire) puis, à la suite de la fermeture de la classe d'italien de cet établissement, au collège Joachim du Bellay de Cholet (Maine-et-Loire). Par une décision du 16 juillet 2018, le ministre de l'éducation nationale l'a licenciée pour insuffisance professionnelle. Par un jugement du 22 février 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de cette décision. Le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 juillet 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de Mme B..., annulé ce jugement et cette décision.

2. Le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public ne peut être fondé que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé, s'agissant d'un agent contractuel, ou correspondant à son grade, s'agissant d'un fonctionnaire, et non sur une carence ponctuelle dans l'exercice de ces fonctions. Une évaluation portant sur la manière dont le fonctionnaire a exercé ses fonctions durant une période suffisante et révélant son inaptitude à un exercice normal de ses fonctions est de nature à justifier légalement son licenciement.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme B... a fait l'objet de visites d'inspection le 18 mars 2011, le 15 avril 2013, le 28 janvier 2014 et le 14 décembre 2016 à l'occasion desquelles l'inspecteur d'académie - inspecteur pédagogique régional a relevé chez l'intéressée d'importantes difficultés dans sa gestion de classe ainsi que des carences pédagogiques, corroborées par des rapports adressés le 2 avril 2015, le 4 décembre 2015 et le 1er mars 2017 au recteur d'académie de Nantes par les principaux des collèges Benjamin Delessert de Saumur et Joachim du Bellay de Cholet dans lesquels Mme B... a été respectivement affectée à titre principal, et que ces difficultés ont persisté malgré la mise en place, par l'administration, d'un accompagnement personnalisé entre 2011 et 2016 sous la forme notamment d'un tutorat et de formations à la gestion de classe, ainsi que de la division par deux, au cours de l'année 2015, des effectifs de sa classe de troisième. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les collègues de l'intéressée, affectés dans les mêmes établissements, auraient rencontré des difficultés similaires, ni que Mme B... n'aurait pas bénéficié du soutien de sa hiérarchie. Par suite, la cour administrative d'appel de Nantes a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant qu'ils n'étaient pas de nature à justifier son licenciement pour insuffisance professionnelle, quelle qu'ait été l'appréciation portée par l'administration sur la manière de servir de Mme B... au titre des années 2003 à 2010 soit pendant une période antérieure à celle prise en compte par la décision du ministre de l'éducation nationale.

4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, que le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 4 juillet 2023 de la cour administrative d'appel de Nantes est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et à Mme A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 10 juillet 2024 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; Mme Catherine Brouard-Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire et Mme Camille Belloc, auditrice-rapporteure.

Rendu le 24 juillet 2024.

La présidente :

Signé : Mme Maud Vialettes

La rapporteure :

Signé : Mme Camille Belloc

Le secrétaire :

Signé : M. Jean-Marie Baune


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 487996
Date de la décision : 24/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 24 jui. 2024, n° 487996
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Camille Belloc
Rapporteur public ?: M. Jean-François de Montgolfier
Avocat(s) : SCP MELKA-PRIGENT-DRUSCH

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:487996.20240724
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award