Vu la procédure suivante :
Mme D... C... a porté plainte contre Mme A... B... devant le conseil départemental de La Réunion de l'ordre des médecins qui a transmis sa plainte à la chambre disciplinaire de première instance de La Réunion-Mayotte de l'ordre des médecins sans s'y associer. Par une décision du 9 mars 2023, la chambre disciplinaire de première instance a rejeté sa plainte.
Par une ordonnance du 20 juin 2023, la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a rejeté l'appel formé par Mme C... contre cette décision.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 21 août et 21 novembre 2023 et le 15 mai 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre solidairement à la charge de Mme B... et du conseil départemental de La Réunion de l'ordre des médecins la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Thalia Breton, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Buk Lament - Robillot, avocat de Mme C... et à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat du Conseil national de l'ordre des médecins ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis à la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins que Mme D... C... a porté plainte contre Mme A... B..., médecin spécialiste, qualifiée en médecine générale, devant la chambre disciplinaire de première instance de La Réunion-Mayotte de l'ordre des médecins. Par une décision du 9 mars 2023, la chambre disciplinaire de première instance a rejeté sa plainte. Par une ordonnance du 20 juin 2023, la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a rejeté l'appel formé par Mme C... contre cette décision.
2. Sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires, telles les dispositions relatives à la contestation des élections politiques ou celles prévoyant des délais exprimés en heures ou expirant à un horaire qu'elles précisent, la date à prendre en considération pour apprécier si un recours contentieux adressé à une juridiction administrative par voie postale a été formé dans le délai de recours contentieux est celle de l'expédition du recours, le cachet de la poste faisant foi.
3. En l'espèce, aux termes de l'article R. 4126-44 du code de la santé publique, applicable aux requêtes d'appel formées devant les chambres disciplinaires nationales des ordres des professions médicales, notamment celle de l'ordre des médecins : " Le délai d'appel est de trente jours à compter de la notification de la décision. / Les délais supplémentaires de distance s'ajoutent au délai prévu à l'alinéa précédent, conformément aux dispositions des articles 643 et 644 du code de procédure civile. / Le défaut de mention, dans la notification de la décision de la chambre disciplinaire de première instance, du délai d'appel de trente jours emporte application du délai de deux mois. (...) ". Aux termes de l'article R. 4126-45 du même code : " L'appel doit être déposé ou adressé par voie postale au greffe de la chambre disciplinaire nationale. / (...) ". Aux termes de l'article 643 du code de procédure civile : " Lorsque la demande est portée devant une juridiction qui a son siège en France métropolitaine, les délais (...) d'appel (...) sont augmentés de : / 1. Un mois pour les personnes qui demeurent (...) à La Réunion (...) ".
4. Il ressort des termes de l'ordonnance attaquée que, pour rejeter la requête d'appel de Mme C... comme tardive au regard du délai imparti pour faire appel résultant des dispositions citées au point 3 et, par suite, irrecevable, la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a pris en considération la date à laquelle cette requête a été enregistrée au greffe de la juridiction. En statuant ainsi, alors que, ainsi qu'il a été dit au point 2, il convenait de prendre en considération la date d'expédition de cette requête, la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a entaché son ordonnance d'erreur de droit.
5. Il résulte de ce qui précède que l'ordonnance de la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins doit être annulée. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... et, en tout état de cause, du conseil départemental de La Réunion de l'ordre des médecins, la somme que demande Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 20 juin 2023 de la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins.
Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme D... C... et à Mme A... B....
Copie en sera adressée au Conseil national de l'ordre des médecins.
Délibéré à l'issue de la séance du 5 juillet 2024 où siégeaient : Mme Catherine Brouard-Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire, présidant ; M. Laurent Cabrera, conseiller d'Etat et Mme Thalia Breton, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 27 août 2024.
La présidente :
Signé : Mme Catherine Brouard-Gallet
La rapporteure :
Signé : Mme Thalia Breton
La secrétaire :
Signé : Mme Anna Bahnini