Vu la procédure suivante :
La société HSBC Bank PLC - Paris Branch a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution partielle des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt qu'elle a acquittées au titre de l'exercice clos en 2010. Par un jugement n° 1906106 du 14 janvier 2021, ce tribunal a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 21PA01399 du 20 octobre 2023, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société HSBC Bank PLC - Paris Branch contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 décembre 2023, 15 mars 2024, 10 juillet 2024 et 23 août 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société HSBC Bank PLC - Paris Branch demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République populaire de Chine en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu signé le 30 mai 1984 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie Prévot, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de la société HSBC Bank PLC - Paris Branch ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 septembre 2024, présentée par la société HSBC Bank PLC - Paris Branch ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'établissement stable en France de la société de droit britannique HSBC Bank PLC (" société HSBC Bank PLC - Paris Branch ") s'est, en application de l'article 223 A du code général des impôts, constitué seul redevable de l'impôt sur les sociétés dû en France sur le résultat d'ensemble du groupe que celui-ci forme avec les filiales françaises de cette société britannique. Il a demandé, par réclamation du 25 octobre 2017, la restitution de la fraction des cotisations d'impôt sur les sociétés acquittées au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2010, correspondant aux erreurs qu'il estime avoir commises dans les modalités d'imputation et la détermination du montant de crédits d'impôt attachés, en application du b et du c du 2 de l'article 22 de la convention fiscale franco-chinoise du 30 mai 1984, aux loyers de source chinoise, rémunérant des opérations de crédit-bail, perçus par vingt-trois de ces filiales. L'administration a rejeté cette réclamation pour tardiveté. Par un jugement du 14 janvier 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de la société HSBC Bank PLC - Paris Branch tendant à obtenir la restitution de ces mêmes impositions. La société se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 20 octobre 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.
2. D'une part, aux termes de l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales : " Dans le cas où un contribuable fait l'objet d'une procédure de reprise ou de rectification de la part de l'administration des impôts, il dispose d'un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses propres réclamations. ". Aux termes de l'article L. 169 du même livre : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification, par la déclaration ou la notification d'un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un contribuable qui a fait l'objet d'une procédure de reprise ou de rectification dispose, pour présenter ses propres réclamations, d'un délai égal à celui fixé à l'administration pour établir l'impôt, lequel expire, s'agissant de l'impôt sur les sociétés, le 31 décembre de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la proposition de rectification lui a été régulièrement notifiée.
3. D'autre part, en vertu de l'article 223 A du code général des impôts, si la société mère d'un groupe fiscalement intégré peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur le résultat d'ensemble déterminé par la somme algébrique des résultats des sociétés du groupe, celles-ci restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats et c'est avec ces dernières que l'administration fiscale mène les procédures de vérification de comptabilité et de rectification, dans les conditions prévues aux articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales. Il résulte de ces dispositions, combinées avec celles des articles L. 169 et L. 189 de ce livre, que la notification régulière à une société membre d'un groupe fiscalement intégré des rehaussements apportés à son bénéfice imposable interrompt la prescription à l'égard de la société mère, en tant que redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur le résultat d'ensemble du groupe, pour les seules impositions correspondant au résultat individuel de la société membre du groupe ayant fait l'objet d'une procédure de reprise.
4. Dans une telle hypothèse, la société mère, en tant que redevable de l'impôt sur les sociétés de l'ensemble du groupe fiscalement intégré, ne peut se prévaloir du délai spécial de réclamation prévu à l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales pour solliciter la correction de cet impôt d'ensemble à raison de la correction d'éléments concourant à sa détermination, propres à l'activité ou aux résultats de sociétés membres de ce groupe autres que la société ayant fait l'objet de la procédure de vérification et de rectification. Il en va notamment ainsi lorsque la correction demandée porte sur la détermination du montant des crédits d'impôts, attachés aux produits reçus ou dépenses exposées par ces autres sociétés, imputables, en application de l'article 223 O du code général des impôts, sur le montant de l'impôt d'ensemble dont la société mère est redevable.
5. Pour juger tardive la réclamation présentée le 25 octobre 2017 par la société HSBC Bank PLC - Paris Branch, tendant à la restitution d'une fraction des cotisations primitives d'impôt sur les sociétés qu'elle avait acquittées au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2010, la cour administrative d'appel de Paris s'est fondée sur ce que la proposition de rectification notifiée le 22 avril 2014 à sa filiale, la société HSBC France, portant uniquement sur le résultat individuel de cette dernière, ne lui ouvrait pas, en application de l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales, un nouveau délai pour demander la correction du montant, imputable sur le résultat d'ensemble du groupe, des crédits d'impôt forfaitaires attachés aux redevances de source chinoise perçues par vingt-trois autres de ses filiales. En statuant ainsi, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt, n'a pas commis d'erreur de droit. Par suite, la société HSBC Bank PLC - Paris Branch n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la société HSBC Bank PLC - Paris Branch est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société HSBC Bank PLC - Paris Branch, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au Ministre auprès du Premier ministre, chargé du Budget et des Comptes publics.
Délibéré à l'issue de la séance du 12 septembre 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, M. Thomas Andrieu, présidents de chambre ; M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Philippe Ranquet, Mme Sylvie Pellissier, Mme Catherine Fischer-Hirtz, conseillers d'Etat et Mme Marie Prévot, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 9 octobre 2024.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
La rapporteure :
Signé : Mme Marie Prévot
La secrétaire :
Signé : Mme Magali Méaulle