Vu la procédure suivante :
Par un jugement n° 1711076 du 6 novembre 2019, le tribunal administratif de Nantes a annulé, en tant qu'elle n'intégrait pas une dotation de consolidation, la décision du préfet de Maine-et-Loire fixant la dotation globale de fonctionnement de la commune nouvelle de Segré-en-Anjou Bleu au titre de l'année 2017, et enjoint au préfet de Maine-et-Loire de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, à un nouveau calcul de la dotation globale de fonctionnement de la commune nouvelle de Segré-en-Anjou Bleu pour l'année 2017, en y incluant une dotation de consolidation d'un montant égal à la dotation d'intercommunalité qui aurait été allouée à la communauté de communes du canton de Segré au titre de la même année si la commune nouvelle n'avait pas été créée, et de verser à la commune nouvelle de Segré-en-Anjou Bleu le solde résultant de la différence entre le montant ainsi recalculé et celui qui lui a été notifié le 19 juin 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 24 août 2017 et capitalisation annuelle de ces intérêts à compter du 24 août 2018.
Par un arrêt n° 19NT05052, n° 20NT01577 du 6 novembre 2020, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur l'appel du ministre de la cohésion territoriale et des relations territoriales, annulé ce jugement et rejeté les demandes de première instance de la commune.
Par une décision n° 447363 du 6 janvier 2023 le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 6 novembre 2020 et, statuant au fond, rejeté l'appel du ministre et prononcé une astreinte de 100 euros par jour à l'encontre de l'Etat s'il ne justifiait pas avoir, dans un délai de quatre mois suivant la notification de sa décision, exécuté le jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 novembre 2019.
La section du rapport et des études du Conseil d'Etat a exécuté les diligences qui lui incombent en vertu de l'article R. 931-7 du code de justice administrative.
Par deux courriers, enregistrés le 12 juin et le 31 juillet 2023 au secrétariat de la section du rapport et des études, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a indiqué que le jugement du tribunal administratif a été entièrement exécuté.
La commune de Segré-en-Anjou Bleu a présenté des observations par courrier du 22 juin 2023.
Par une note du 27 octobre 2023, la présidente de la section du rapport et des études a informé le président de la 3ème chambre de la section du contentieux qu'elle considérait que la décision du 6 janvier 2023 avait été entièrement exécutée et proposait de ne pas procéder à la liquidation de l'astreinte.
Par un mémoire, enregistré le 17 novembre 2023, la commune de Segré-en-Anjou Bleu conclut à la liquidation de l'astreinte. Elle soutient que sa dotation globale de fonctionnement pour 2017 n'a pas été recalculée comme le demandait le tribunal administratif et que l'Etat n'a pas procédé au versement des intérêts capitalisés.
Par un mémoire enregistré le 11 juillet 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a produit, en réponse à une mesure d'instruction, une fiche de calcul de la dotation d'intercommunalité qui aurait été due pour l'année 2017 à la communauté de communes du canton de Segré si elle n'avait pas été supprimée au 1er janvier 2017, et conclut à la complète exécution du jugement.
Par un mémoire, enregistré le 23 septembre 2024, la commune de Segré-en-Anjou Bleu persiste dans ses conclusions. Elle soutient, d'une part, qu'il n'y avait pas lieu au calcul d'une dotation de consolidation égale au montant de la dotation d'intercommunalité qui aurait été perçue par la communauté de communes du canton de Segré en 2017 en l'absence de création de la commune nouvelle, mais à reconduction pure et simple de la dotation d'intercommunalité perçue par cette communauté de communes en 2016, sans l'amputer de la contribution au redressement des finances publiques, d'autre part, qu'en procédant à un tel calcul, l'Etat n'a pas appliqué les modalités de calcul de la dotation globale de fonctionnement pour les communes nouvelles regroupant l'ensemble des communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale telles que prévues par la note de la direction générale des collectivités territoriales sur l'élaboration de la dotation globale de fonctionnement pour 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Nicole da Costa, conseillère d'Etat,
- les conclusions de M. Thomas Pez-Lavergne, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de la commune de Segré-en-Anjou Bleu ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée (...) ".
2. La décision du Conseil d'Etat dont l'exécution est demandée a enjoint à l'Etat d'exécuter le jugement du tribunal administratif de Nantes ordonnant au préfet de Maine-et-Loire de procéder à un nouveau calcul de la dotation générale de fonctionnement de la commune nouvelle de Segré-en-Anjou Bleu pour 2017 en y ajoutant une dotation de consolidation d'un montant égal à la dotation d'intercommunalité qui aurait été allouée à la communauté de communes du canton de Segré au titre de la même année si la commune nouvelle n'avait pas été créée.
3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, par un arrêté DRCL/BSLDE n° 2023-443 du 4 avril 2023 pris en exécution de la décision du Conseil d'Etat du 6 mars 2023, le préfet de Maine-et-Loire a alloué à la commune de Segré-en-Anjou Bleu, pour chaque année de 2017 à 2022, un complément de dotation globale de fonctionnement, au titre de la dotation de consolidation, d'un montant forfaitaire annuel de 314 523 euros. Il n'est pas contesté que la somme correspondante a été versée à la commune le 5 avril 2023. Il résulte par ailleurs du mémoire du ministre de l'intérieur et des outre-mer du 11 juillet 2024, et des fiches de calcul qu'il intègre, que la dotation d'intercommunalité qui aurait été due en 2017 à la communauté de communes du canton de Segré si elle n'avait pas disparu du fait de la création de la commune nouvelle se serait élevée à 211 993 euros, après déduction, à bon droit, de la contribution au redressement des finances publiques prévue par les dispositions alors applicables de l'article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales. La somme de 314 523 euros versée à la commune nouvelle au titre de l'année 2017 excède ainsi de 102 530 euros la dotation de consolidation de 211 993 euros qui devait lui être attribuée selon le jugement du tribunal administratif de Nantes dont l'exécution est en litige. Si l'Etat était également redevable à la commune nouvelle, en exécution de ce jugement, des intérêts au taux légal sur cette somme de 211 993 euros pour la période du 24 août 2017 jusqu'à son versement le 5 avril 2023, et de leur capitalisation annuelle à cinq reprises du 24 août 2018 au 24 août 2022, il ne résulte pas de l'instruction, et n'est au demeurant pas soutenu, que le total de ces intérêts capitalisés excèderait ce montant de 102 530 euros.
4. En second lieu, eu égard aux termes du jugement dont l'exécution a été ordonnée par la décision du Conseil d'Etat, la commune de Segré-en-Anjou Bleu ne peut utilement soutenir, pour contester la somme totale qui lui a été versée, que le préfet devait se borner à lui verser, en plus de la dotation globale de fonctionnement attribuée à la commune nouvelle en 2017, le montant de la dotation d'intercommunalité perçue par l'ancienne communauté de communes au titre de l'année 2016 assorti des intérêts capitalisés.
5. Il résulte de ce qui précède que le jugement du tribunal administratif de Nantes pour l'exécution duquel le Conseil d'Etat a prononcé une astreinte par sa décision du 6 janvier 2023 doit être regardé comme ayant été entièrement exécuté le 5 avril 2023. Par suite, il n'y a pas lieu de procéder à la liquidation de l'astreinte prononcée à l'encontre de l'Etat.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte prononcée à l'encontre de l'Etat.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de Segré-en-Anjou Bleu, à la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la section des études, de la prospective et de la coopération du Conseil d'Etat.
Délibéré à l'issue de la séance du 26 septembre 2024 où siégeaient : M. Stéphane Verclytte, président de chambre, présidant ; Mme Sylvie Pellissier, conseillère d'Etat et Mme Nicole da Costa, conseillère d'Etat-rapporteure.
Rendu le 10 octobre 2024.
Le président :
Signé : M. Stéphane Verclytte
La rapporteure :
Signé : Mme Nicole da Costa
La secrétaire :
Signé : Mme Nathalie Martinez-Casanova