Vu la procédure suivante :
La fondation Jérôme Lejeune a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 8 avril 2019 par laquelle la directrice générale de l'Agence de la biomédecine a délivré une autorisation d'importation de cellules embryonnaires à des fins de recherche en application des dispositions de l'article L. 2151-6 du code de la santé publique. Par un jugement n° 1908494 du 9 avril 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 21PA03028 du 30 janvier 2023, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la fondation Jérôme Lejeune contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 29 mars et 29 juin 2023 et le 30 juillet 2024, la fondation Jérôme Lejeune demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Agence de la biomédecine la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Anne Redondo, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de la Fondation Jérôme Lejeune et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'Agence de la biomédecine ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 octobre 2024, présentée par l'Agence de la biomédecine ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la directrice générale de l'Agence de la biomédecine a délivré, le 8 avril 2019, à la société Goliver Therapeutics une autorisation d'importation d'une lignée de cellules souches embryonnaires humaines à des fins de recherche en provenance de la société Biotime, localisée aux Etats-Unis. Par un jugement du 9 avril 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de la fondation Jérôme Lejeune tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cette autorisation. La fondation Jérôme Lejeune se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 30 janvier 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel contre ce jugement.
2. L'article L. 2151-6 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à la date de l'autorisation en litige, soumet l'importation de cellules souches embryonnaires humaines à des fins de recherche à l'autorisation préalable de l'Agence de la biomédecine. Aux termes de l'article R. 2151-15 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Le directeur général de l'Agence de la biomédecine autorise l'importation et l'exportation de cellules souches embryonnaires à des fins de recherche (...). Cette autorisation (...) comporte les informations mentionnées à l'article R. 2151-16. (...) ". Aux termes de l'article R. 2151-16 de ce code, dans sa rédaction alors applicable : " Toute opération d'importation ou d'exportation à des fins de recherche (...) de cellules souches embryonnaires est subordonnée à l'apposition sur le conditionnement extérieur des informations suivantes : / (...) 4° Pour l'importation, le nom et l'adresse de l'organisme étranger fournisseur, de l'organisme autorisé à importer et du destinataire (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions combinées que la décision du directeur général de l'Agence de la biomédecine autorisant l'importation de cellules souches embryonnaires humaines doit comporter l'adresse de l'organisme étranger fournisseur de ces cellules. Pour juger que l'autorisation en litige, qui mentionnait seulement l'Etat dans lequel l'organisme étranger fournisseur était situé, n'était pas en l'espèce intervenue en méconnaissance de ces dispositions, la cour s'est fondée sur le fait que cette adresse figurait dans le dossier de demande d'autorisation d'importation. Eu égard à l'objet des dispositions citées au point 2, qui est d'assurer que l'autorisation comporte les informations permettant une identification dépourvue de toute ambiguïté de l'organisme étranger fournisseur des cellules souches embryonnaires humaines qui pourront être importées, la cour a, ce faisant, commis une erreur de droit.
4. Dès lors, la fondation Jérôme Lejeune est fondée à demander, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
5. En application de l'article L. 1418-3 du code de la santé publique, les décisions prises par le directeur général de l'Agence de la biomédecine énumérées au 10° de l'article L. 1418-1 du même code, qui incluent, dans sa rédaction en vigueur, les décisions d'importation de cellules souches embryonnaires humaines, le sont au nom de l'État. Par suite, les conclusions de la fondation Jérôme Lejeune tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de cette agence au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont mal dirigées et ne peuvent qu'être rejetées. Ces dispositions font également obstacle à ce que la somme demandée au même titre par l'Agence de la biomédecine lui soit versée.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 30 janvier 2023 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : Les conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la fondation Jérôme Lejeune et à l'Agence de la biomédecine.