Vu la procédure suivante :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur du centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie (Yvelines) a rejeté sa demande tendant au versement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif à compter du 1er janvier 2014 et à la conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018, et, d'autre part, de condamner cet établissement à lui verser la somme de 24 905,79 euros, à ce titre, assortie des intérêts à compter de la date de sa demande préalable et de la capitalisation de ces intérêts. Par un jugement n° 1903270 du 1er juin 2021, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 21VE02298 du 12 septembre 2023, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur appel formé par Mme A..., dit n'y avoir lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision rejetant sa demande de conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018, et rejeté le surplus des conclusions.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 13 novembre 2023 et le 13 février 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel dans cette mesure ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- l'arrêté interministériel du 8 juin 2000 relatif à l'indemnité d'engagement de service public exclusif ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Carole Hentzgen, auditrice,
- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de Mme A... et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat du centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 18 décembre 2024, présentée par Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A..., praticienne hospitalière titulaire au centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie (Yvelines), a fait l'objet d'une mesure de suspension prise le 11 décembre 2013 par le directeur du centre hospitalier sur le fondement de l'article L. 6143-7 du code de la santé publique. Cette décision a été annulée par un jugement du tribunal de Versailles du 17 avril 2018. Par une réclamation préalable du 28 décembre 2018, alors qu'elle avait été réintégrée au sein du centre hospitalier depuis le 19 octobre, Mme A... a demandé au directeur de cet établissement de lui permettre de conclure un nouveau contrat d'engagement de service public exclusif et de lui verser l'indemnité d'engagement de service public exclusif à laquelle elle estimait avoir droit depuis le 1er janvier 2014 sur la base du contrat qu'elle avait précédemment conclu avant sa suspension. Un nouveau contrat d'engagement a ainsi été conclu le 22 août 2019 avec un effet rétroactif au 1er avril 2018. Mme A... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 12 septembre 2023 en tant que la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du jugement du 1er juin 2021 du tribunal administratif de Versailles et à la condamnation du centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie à lui verser la somme de 24 905,79 euros représentant le montant de l'indemnité d'engagement de service public exclusif pour la période du 1er janvier 2014 au 1er avril 2018.
2. Il résulte des termes de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel s'est prononcée sur des conclusions de plein contentieux tendant au versement d'une somme dont la requérante estimait qu'elle lui était légalement due en application des dispositions du code de la santé publique et non sur un recours indemnitaire tendant à la réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi en raison de l'illégalité de la décision de suspension dont elle avait fait l'objet. Il n'est pas argué que la cour se serait, ce faisant, méprise sur la portée des écritures de la requérante.
3. Aux termes de l'article R. 6152-77 du code de la santé publique : " Dans l'intérêt du service, le praticien qui fait l'objet d'une procédure disciplinaire peut être immédiatement suspendu par le directeur général du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière pour une durée maximale de six mois. Le praticien suspendu conserve les émoluments mentionnés au 1° de l'article R. 6152-23. " Aux termes de l'article R. 6152-23 du même code : " Les praticiens perçoivent, après service fait, (...) : / 1° Des émoluments mensuels variant selon l'échelon des intéressés, au prorata des obligations de service hebdomadaires. (...) ; / 2° Des indemnités et allocations dont la liste est fixée par décret ". Aux termes de l'article D. 6152-23-1 du même code : " Les indemnités et allocations mentionnées au 2° de l'article R. 6152-23 sont : (...) / 6° Une indemnité d'engagement de service public exclusif versée aux praticiens qui s'engagent, pour une période de trois ans renouvelable, à ne pas exercer une activité libérale telle que prévue à l'article L. 6154-1 (...) ". Les dispositions précitées de l'article R. 6152-77 doivent être regardées comme également applicables aux praticiens suspendus par le directeur d'un établissement de santé, sur le fondement de l'article L. 6143-7 du code de la santé publique.
4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le praticien faisant l'objet d'une mesure de suspension ne peut prétendre qu'au versement des émoluments prévus au 1° de l'article R. 6152-23 du code de la santé publique, à l'exclusion des indemnités prévues au 2°, au nombre desquelles figure l'indemnité d'engagement de service public exclusif. Mme A... ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir de l'illégalité de la mesure de suspension dont elle a fait l'objet pour soutenir qu'elle était en droit de percevoir cette indemnité entre le 1er janvier 2014 et le 1er avril 2018, en l'absence de service fait durant cette période. Ce motif qui avait été opposé à la requérante par le jugement du tribunal administratif de Versailles et dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif retenu par l'arrêt attaqué dont il justifie le dispositif. Par suite, le pourvoi de Mme A... doit être rejetée.
Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge du centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par le centre hospitalier.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie
Délibéré à l'issue de la séance du 17 décembre 2024 où siégeaient : M. Alain Seban, assesseur, présidant ; Mme Laurence Helmlinger, conseillère d'Etat et Mme Carole Hentzgen, auditrice-rapporteure.
Rendu le 27 décembre 2024.
Le président :
Signé : M. Alain Seban
La rapporteure :
Signé : Mme Carole Hentzgen
La secrétaire :
Signé : Mme Nathalie Pilet