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07/02/2025 | FRANCE | N°474032

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 07 février 2025, 474032


Vu la procédure suivante :



Par une ordonnance du 10 mai 2023, enregistrée le 11 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête, enregistrée le 5 janvier 2023 au greffe de ce tribunal, présentée par M. A... B....



Par cette requête, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler la décision du 4 janvier 2023 par laquelle l

a Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentiel...

Vu la procédure suivante :

Par une ordonnance du 10 mai 2023, enregistrée le 11 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête, enregistrée le 5 janvier 2023 au greffe de ce tribunal, présentée par M. A... B....

Par cette requête, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 4 janvier 2023 par laquelle la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle (CNCCEP) a refusé de lui communiquer :

- les correspondances, sous forme papier ou électronique, adressées à la CNCCEP, ayant conduit cette dernière à signaler à Mediapart des contenus que ses services considèrent comme contraires aux dispositions du code électoral, à communiquer ce signalement sur son compte officiel Twitter et à saisir le réseau social Twitter pour obtenir la suppression de contenus ;

- les correspondances, sous forme papier ou électronique, entre la CNCCEP et les autorités publiques portant sur la préparation de cette décision ;

- les correspondances, sous forme papier ou électronique, entre la CNCCEP et Twitter, et le cas échéant avec d'autres organismes privés, portant sur la préparation de cette décision ;

- les échanges entre les membres de la CNCCEP, sous forme papier ou électronique, les instructions, notes de travail, avis, rapports, comptes rendus de réunions, procès-verbaux de la Commission ;

2°) d'enjoindre à la CNCCEP de lui communiquer ces documents dans un délai de dix jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 50 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- la loi organique n°62-1292 du 6 novembre 1962 ;

- l'ordonnance organique n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code électoral, notamment les articles L. 49 et L. 89 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2001-213 du 8 mars 2001 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Mahé, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes des dispositions du IV de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel : " Tous les candidats bénéficient, de la part de l'Etat, des mêmes facilités pour la campagne en vue de l'élection présidentielle ". Aux termes des deuxième et troisième alinéas de l'article 13 du décret du 8 mars 2001 pris pour l'application de cette loi : " Une Commission nationale de contrôle de la campagne électorale veille au respect desdites dispositions (...). Elle intervient, le cas échéant, auprès des autorités compétentes pour que soient prises toutes mesures susceptibles d'assurer l'égalité entre les candidats et l'observation des règles édictées au présent titre (...) / Cette commission comprend cinq membres : / - le vice-président du Conseil d'Etat, président ; / - le premier président de la Cour de cassation ; / - le premier président de la Cour des comptes ; / - deux membres en activité ou honoraires du Conseil d'Etat, de la Cour de cassation ou de la Cour des comptes, désignés par les trois membres de droit ". Aux termes de l'article 13-1 du même décret : " Les décisions de la Commission nationale de contrôle peuvent faire l'objet d'un recours devant le Conseil d'Etat ".

2. Il ressort des pièces du dossier que, le 9 avril 2022, veille du premier tour de l'élection présidentielle, la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle (CNCCEP) a signalé aux responsables du site d'information Mediapart qu'un texte publié ce même jour sur leur site était susceptible de contrevenir aux dispositions de l'article L. 49 du code électoral, rendu applicable à l'élection présidentielle par le II de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel, qui prohibe, à partir de la veille du scrutin à zéro heure, la diffusion par tout moyen de communication au public par voie électronique de tout message ayant le caractère de propagande électorale, et les a invités à procéder au retrait immédiat de ce contenu. La CNCCEP est également intervenue auprès du réseau social Twitter, devenu X, afin qu'il cesse d'afficher les messages de Mediapart ou de journalistes travaillant pour cette publication, qui renvoyaient à des textes critiquant l'action ou le programme de candidats. Elle a enfin elle-même publié sur le réseau Twitter un message indiquant qu'elle avait signalé à ce réseau et à Mediapart des contenus susceptibles de contrevenir à l'article L. 49 du code électoral. A la suite de ces signalements, M. B..., journaliste à Mediapart, a demandé à la CNCCEP de lui communiquer l'ensemble des documents externes et internes sur lesquels elle s'était appuyée pour les effectuer. Après le refus de la CNCCEP, M. B... a saisi la commission d'accès aux documents administratifs qui a rendu le 3 novembre 2022 un avis favorable à sa demande, sous certaines réserves. M. B... demande l'annulation de la décision du 4 janvier 2023 par laquelle la CNCCEP a confirmé son refus de transmettre les documents demandés.

Sur la régularité de la décision attaquée :

3. Il ressort de la décision contestée du 4 janvier 2023 qu'elle est suffisamment motivée. Est par ailleurs dépourvue d'incidence sur sa légalité la circonstance, à la supposer établie, que la demande de retrait de contenus adressée par la Commission aux responsables du site Mediapart ne l'aurait pas été.

Sur le caractère administratif des documents dont la communication est demandée :

4. Aux termes de l'article L. 300-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Le droit de toute personne à l'information est précisé et garanti par les dispositions des titres Ier, III et IV du présent livre en ce qui concerne la liberté d'accès aux documents administratifs. " Aux termes de l'article L. 300-2 du même code : " Sont considérés comme documents administratifs, (...) quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes sources et décisions ".

5. Les documents relatifs à la procédure par laquelle la CNCCEP intervient en vue qu'il soit mis fin à une situation qu'elle estime de nature à porter atteinte à l'égalité entre les candidats, qu'il s'agisse des documents qu'elle reçoit de tiers, de ceux qu'elle adresse à des personnes extérieures ou de ceux qu'elle élabore pour son propre fonctionnement, sont produits ou reçus par elle dans l'exercice de la mission de service public qui lui est confiée par les dispositions précitées de l'article 13 du décret du 8 mars 2001 aux fins de garantir le bon déroulement de la campagne électorale. Quand bien même les faits auxquels se rapporte cette procédure seraient susceptibles de constituer des infractions pénales ou pourraient venir au soutien des motifs de la décision par laquelle le Conseil constitutionnel arrête et proclame les résultats de l'élection présidentielle, de tels documents ne revêtent pas un caractère juridictionnel. Ils constituent ainsi des documents administratifs entrant, à défaut de dispositions législatives particulières, dans le champ des articles L. 300-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration.

Sur le caractère communicable des documents demandés :

6. Aux termes de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, les administrations mentionnées à l'article L. 300-2 sont tenues de publier en ligne ou de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre ". Aux termes de son article L. 311-5 : " Ne sont pas communicables :(...) 2° Les (...) documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte : a) au secret des délibérations du Gouvernement et des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif ; / (...) g) à la recherche et à la prévention, par les services compétents, d'infractions de toute nature ; ... h) ou (...) aux autres secrets protégés par la loi ". Aux termes de son article L. 311-6 : " Ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs : / 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée (...) / 3° Faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice ". Enfin, aux termes de son article L. 311-7 : " Lorsque la demande porte sur un document comportant des mentions qui ne sont pas communicables en application des articles L. 311-5 et L. 311-6 mais qu'il est possible d'occulter ou de disjoindre, le document est communiqué au demandeur après occultation ou disjonction de ces mentions ".

7. Il résulte de sa composition, telle que fixée par les dispositions citées au point 1, que la CNCCEP exerce en toute indépendance la mission qui lui est confiée. Elle ne saurait par suite être regardée, alors même qu'elle ne constitue pas une personne morale distincte de l'Etat, comme étant au nombre " des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif " mentionnées au a) du 2° de l'article L. 311-5 du code des relations entre le public et l'administration.

8. Il ressort par ailleurs des documents en litige, produits à l'instance sans être soumis au débat contradictoire en application de l'article R. 412-2-1 du code de justice administrative, lesquels sont constitués de courriels adressés à la CNCCEP par des particuliers et par la cellule de veille du ministère de l'intérieur, de correspondances entre la CNCCEP et la plateforme Twitter ainsi que de divers échanges internes à la commission, que leur consultation ou leur communication n'est pas de nature à porter atteinte, en l'espèce, à la recherche et à la prévention d'infractions de toute nature. Il en résulte que les dispositions du g) du 2° de l'article L. 311-5 précité ne font pas obstacle à ce que soient transmis à M. B... les documents qu'il demande.

9. Enfin, les documents produits ou reçus par la CNCCEP dans le cadre de la mission de service public mentionnée au point 5 ne sont, par eux-mêmes, couverts par aucun secret protégé par la loi, de sorte que les dispositions du h) du 2° du même article ne font pas davantage obstacle à la communication des pièces demandées.

10. Toutefois, en premier lieu, les courriers ou documents adressés à la CNCCEP par des particuliers en vue de l'informer de l'existence d'une situation de nature à porter atteinte à l'égalité entre les candidats doivent être regardés, au sens et pour l'application du 3° de l'article L. 311-6 du code des relations entre le public et l'administration, comme faisant apparaître un comportement de ces personnes dont la divulgation pourrait leur porter préjudice, de sorte que ces courriers ou documents ne peuvent être communiqués qu'après occultation de toute mention permettant l'identification des personnes ayant procédé à cette information. Pour les mêmes motifs, doivent également être occultées, préalablement à la communication des documents concernés, eu égard au niveau hiérarchique des intéressés, les mentions permettant d'identifier nommément les agents du ministère de l'intérieur ayant attiré l'attention de la CNCCEP sur les publications mentionnées au point 2.

11. En deuxième lieu, les courriels échangés entre la CNCCEP et les salariés de la plateforme Twitter, devenue X, ne peuvent être communiqués qu'après occultation des noms et prénoms desdits salariés, la divulgation de ces informations étant susceptible de porter atteinte à la protection de leur vie privée, garantie par les dispositions précitées du 1° de l'article L. 311-6 du code des relations entre le public et l'administration. La protection de la vie privée impose également que soit occultée, sur l'ensemble des documents communiqués, l'adresse électronique personnelle de leur auteur ou de leur destinataire.

12. En troisième lieu, si les documents en litige contiennent des appréciations sur le comportement de Mediapart au regard des dispositions de l'article L. 49 du code électoral, ces appréciations ont déjà été rendues publiques du fait de la publicité donnée par la CNCCEP aux signalements qu'elle a opérés. La communication de ces documents à M. B... ne saurait ainsi, dans les circonstances de l'espèce, être regardée comme entraînant par elle-même une divulgation du comportement de Mediapart susceptible de lui porter préjudice, au sens des dispositions précitées de l'article L. 311-6. Il y a lieu, en revanche, en application de ces dispositions, d'occulter, dans celui de ces documents qui évoque des manquements à l'article L. 49 du code électoral commis par d'autres personnes que Mediapart, les mentions permettant l'identification de ces personnes.

13. Il résulte de tout ce qui précède qu'alors même qu'il ne produit aucun mandat du directeur de la publication de Mediapart, ni ne soutient être l'auteur des articles signalés, M. B... est fondé à demander l'annulation de la décision du 4 janvier 2023 du président de la CNCCEP en tant qu'elle lui a refusé la communication des documents qu'il demande dans les conditions précisées aux points 10 à 12 de la présente décision.

Sur les conclusions à fin d'injonction et les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". Il y a lieu, en application de ces dispositions, d'enjoindre à la CNCCEP de transmettre à M. B... les documents qu'il demande dans les conditions précisées dans la présente décision. Il n'y a en revanche pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

15. La CNCCEP n'ayant pas de personnalité juridique distincte de celle de l'Etat, les conclusions de M. B... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être regardées comme dirigées contre l'Etat. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 50 euros que M. B... demande en application de cet article.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 4 janvier 2023 du président de la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle est annulée en tant qu'elle a refusé à M. B... la communication des documents qu'il demande dans les conditions précisées aux points 10 à 12 de la présente décision.

Article 2 : Il est enjoint à la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle de procéder à la communication des documents demandés dans les conditions précisées aux points 10 à 12 de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 50 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et à la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle.

Copie en sera adressée au Premier ministre.

Délibéré à l'issue de la séance du 13 janvier 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, M. Thomas Andrieu, présidents de chambre ; M. Jonathan Bosredon, Mme Emilie Bokdam-Tognetti, M. Philippe Ranquet, Mme Sylvie Pellissier, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat, et M. Vincent Mahé, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 7 février 2025.

Le président :

Signé : M. Pierre Collin

Le rapporteur :

Signé : M. Vincent Mahé

La secrétaire :

Signé : Mme Magali Méaulle


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 474032
Date de la décision : 07/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ACCÈS AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS - ACCÈS AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS AU TITRE DE LA LOI DU 17 JUILLET 1978 - DOCUMENTS PRODUITS OU REÇUS PAR LA CNCCEP AU TITRE DE SA MISSION TENDANT À GARANTIR LE BON DÉROULEMENT DE LA CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE – 1) NATURE – DOCUMENTS ADMINISTRATIFS (ART - L - 300-2 DU CRPA) – EXISTENCE [RJ1] – 2) DOCUMENTS EXTERNES ET INTERNES SUR LESQUELS LA COMMISSION S’EST APPUYÉE POUR EFFECTUER DES SIGNALEMENTS PORTANT SUR UNE PUBLICATION SUSCEPTIBLE DE CONTREVENIR À L'ARTICLE L - 49 DU CODE ÉLECTORAL – COMMUNICABILITÉ – EXISTENCE – CONDITION – OCCULTATION DE TOUTE MENTION PERMETTANT L’IDENTIFICATION – A) DES PARTICULIERS ET AGENTS PUBLICS AYANT SIGNALÉ LES PUBLICATIONS EN CAUSE – B) DES SALARIÉS D’UN RÉSEAU SOCIAL AYANT ÉCHANGÉ AVEC LA COMMISSION – C) DE PERSONNES AUTRES QUE CELLE AYANT COMMIS LE MANQUEMENT EN CAUSE.

26-06-01 1) Les documents relatifs à la procédure par laquelle la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle (CNCCEP) intervient en vue qu’il soit mis fin à une situation qu’elle estime de nature à porter atteinte à l’égalité entre les candidats, qu’il s’agisse des documents qu’elle reçoit de tiers, de ceux qu’elle adresse à des personnes extérieures ou de ceux qu’elle élabore pour son propre fonctionnement, sont produits ou reçus par elle dans l’exercice de la mission de service public qui lui est confiée par l'article 13 du décret n° 2001-213 du 8 mars 2001 aux fins de garantir le bon déroulement de la campagne électorale. Quand bien même les faits auxquels se rapporte cette procédure seraient susceptibles de constituer des infractions pénales ou pourraient venir au soutien des motifs de la décision par laquelle le Conseil constitutionnel arrête et proclame les résultats de l’élection présidentielle, de tels documents ne revêtent pas un caractère juridictionnel. Ils constituent ainsi des documents administratifs entrant, à défaut de dispositions législatives particulières, dans le champ des articles L. 300-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration (CRPA)....2) Recours contre la décision par laquelle la CNCCEP a refusé de communiquer à un journaliste les documents externes et internes sur lesquels elle s’est appuyée pour signaler au site d’information pour lequel il travaille qu’un texte publié sur son site était susceptible de contrevenir aux dispositions de l'article L. 49 du code électoral, qui prohibe, à partir de la veille du scrutin à zéro heure, la diffusion par tout moyen de communication au public par voie électronique de tout message ayant le caractère de propagande électorale ....a) Les courriers ou documents adressés à la CNCCEP par des particuliers en vue de l’informer de l’existence d’une situation de nature à porter atteinte à l'égalité entre les candidats doivent être regardés, au sens et pour l’application du 3° de l’article L. 311-6 du CRPA, comme faisant apparaître un comportement de ces personnes dont la divulgation pourrait leur porter préjudice, de sorte que ces courriers ou documents ne peuvent être communiqués qu’après occultation de toute mention permettant l’identification des personnes ayant procédé à cette information. ...Pour les mêmes motifs, doivent également être occultées, préalablement à la communication des documents concernés, eu égard au niveau hiérarchique des intéressés, les mentions permettant d’identifier nommément les agents du ministère de l’intérieur ayant attiré l’attention de la CNCCEP sur les publications en cause....b) Les courriels échangés entre la CNCCEP et les salariés du réseau social où a été publié le texte en cause , ne peuvent être communiqués qu’après occultation des noms et prénoms de ces salariés, la divulgation de ces informations étant susceptible de porter atteinte à la protection de leur vie privée, garantie par le 1° de l'article L. 311-6 du CRPA. La protection de la vie privée impose également que soit occultée, sur l’ensemble des documents communiqués, l’adresse électronique personnelle de leur auteur ou de leur destinataire....c) Si les documents en litige contiennent des appréciations sur le comportement du journal en cause au regard de l'article L. 49 du code électoral, ces appréciations ont déjà été rendues publiques du fait de la publicité donnée par la CNCCEP aux signalements qu’elle a opérés. La communication de ces documents ne saurait ainsi, dans les circonstances de l’espèce , être regardée comme entraînant par elle-même une divulgation du comportement de ce journal susceptible de lui porter préjudice, au sens des dispositions de l'article L. 311-6. ...Il y a lieu, en revanche, en application de ces dispositions, d’occulter, dans celui de ces documents qui évoque des manquements à l’article L. 49 du code électoral commis par d’autres personnes que ce journal, les mentions permettant l’identification de ces personnes.

ÉLECTIONS ET RÉFÉRENDUM - ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES - CNCCEP – DOCUMENTS PRODUITS OU REÇUS AU TITRE DE SA MISSION TENDANT À GARANTIR LE BON DÉROULEMENT DE LA CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE– 1) NATURE – DOCUMENTS ADMINISTRATIFS (ART - L - 300-2 DU CRPA) – EXISTENCE [RJ1] – 2) DOCUMENTS EXTERNES ET INTERNES SUR LESQUELS LA COMMISSION S’EST APPUYÉE POUR EFFECTUER DES SIGNALEMENTS PORTANT SUR UNE PUBLICATION SUSCEPTIBLE DE CONTREVENIR À L'ARTICLE L - 49 DU CODE ÉLECTORAL – COMMUNICABILITÉ – EXISTENCE – CONDITION – OCCULTATION DE TOUTE MENTION PERMETTANT L’IDENTIFICATION – A) DES PARTICULIERS ET AGENTS PUBLICS AYANT SIGNALÉ LES PUBLICATIONS EN CAUSE À LA COMMISSION – B) DES SALARIÉS D’UN RÉSEAU SOCIAL AYANT ÉCHANGÉ AVEC LA COMMISSION – C) DE PERSONNES AUTRES QUE CELLE AYANT COMMIS LE MANQUEMENT EN CAUSE.

28-01 1) Les documents relatifs à la procédure par laquelle la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle (CNCCEP) intervient en vue qu’il soit mis fin à une situation qu’elle estime de nature à porter atteinte à l’égalité entre les candidats, qu’il s’agisse des documents qu’elle reçoit de tiers, de ceux qu’elle adresse à des personnes extérieures ou de ceux qu’elle élabore pour son propre fonctionnement, sont produits ou reçus par elle dans l’exercice de la mission de service public qui lui est confiée par l'article 13 du décret n° 2001-213 du 8 mars 2001 aux fins de garantir le bon déroulement de la campagne électorale. Quand bien même les faits auxquels se rapporte cette procédure seraient susceptibles de constituer des infractions pénales ou pourraient venir au soutien des motifs de la décision par laquelle le Conseil constitutionnel arrête et proclame les résultats de l’élection présidentielle, de tels documents ne revêtent pas un caractère juridictionnel. Ils constituent ainsi des documents administratifs entrant, à défaut de dispositions législatives particulières, dans le champ des articles L. 300-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration (CRPA)....2) Recours contre la décision par laquelle la CNCCEP a refusé de communiquer à un journaliste les documents externes et internes sur lesquels elle s’est appuyée pour signaler au site d’information pour lequel il travaille qu’un texte publié sur son site était susceptible de contrevenir aux dispositions de l'article L. 49 du code électoral, qui prohibe, à partir de la veille du scrutin à zéro heure, la diffusion par tout moyen de communication au public par voie électronique de tout message ayant le caractère de propagande électorale ....a) Les courriers ou documents adressés à la CNCCEP par des particuliers en vue de l’informer de l’existence d’une situation de nature à porter atteinte à l'égalité entre les candidats doivent être regardés, au sens et pour l’application du 3° de l’article L. 311-6 du CRPA, comme faisant apparaître un comportement de ces personnes dont la divulgation pourrait leur porter préjudice, de sorte que ces courriers ou documents ne peuvent être communiqués qu’après occultation de toute mention permettant l’identification des personnes ayant procédé à cette information. ...Pour les mêmes motifs, doivent également être occultées, préalablement à la communication des documents concernés, eu égard au niveau hiérarchique des intéressés, les mentions permettant d’identifier nommément les agents du ministère de l’intérieur ayant attiré l’attention de la CNCCEP sur les publications en cause....b) Les courriels échangés entre la CNCCEP et les salariés du réseau social où a été publié le texte en cause , ne peuvent être communiqués qu’après occultation des noms et prénoms de ces salariés, la divulgation de ces informations étant susceptible de porter atteinte à la protection de leur vie privée, garantie par le 1° de l'article L. 311-6 du CRPA. La protection de la vie privée impose également que soit occultée, sur l’ensemble des documents communiqués, l’adresse électronique personnelle de leur auteur ou de leur destinataire....c) Si les documents en litige contiennent des appréciations sur le comportement du journal en cause au regard de l'article L. 49 du code électoral, ces appréciations ont déjà été rendues publiques du fait de la publicité donnée par la CNCCEP aux signalements qu’elle a opérés. La communication de ces documents ne saurait ainsi, dans les circonstances de l’espèce , être regardée comme entraînant par elle-même une divulgation du comportement de ce journal susceptible de lui porter préjudice, au sens des dispositions de l'article L. 311-6. ...Il y a lieu, en revanche, en application de ces dispositions, d’occulter, dans celui de ces documents qui évoque des manquements à l’article L. 49 du code électoral commis par d’autres personnes que ce journal, les mentions permettant l’identification de ces personnes.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 fév. 2025, n° 474032
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Vincent Mahé
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:474032.20250207
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