Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. D... E... et Mme F... E..., demandeurs, et l'association Collectif 43 du bassin de l'Auze, intervenante, ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 18 avril 2017 par lequel le préfet de la Haute-Loire a délivré un permis de construire à la SAS Gefa pour la construction d'une microcentrale hydroélectrique sur le terrain dénommé " les Bois du Fraisse ", sur le territoire de la commune d'Yssingeaux ainsi que d'annuler la décision implicite du préfet de la Haute-Loire portant rejet de leur recours gracieux formé le 16 juin 2017 à l'encontre de l'arrêté du 18 avril 2017.
Par un jugement n° 1701906 du 15 septembre 2021, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, après avoir admis l'intervention de l'association Collectif 43 du bassin de l'Auze dans un article 1er, rejeté leur demande dans un article 2.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 novembre 2021 et 30 mars 2023, M. et Mme E..., requérants, et l'association Collectif 43 du bassin de l'Auze, intervenante, représentés par Me Tête, demandent à la cour :
1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du 15 septembre 2021 ainsi que les décisions susvisées ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le projet comporte un barrage et une conduite forcée qui n'ont pas été mentionnés dans le dossier de demande ; ce projet aurait dû faire l'objet d'un permis de construire unique en vertu de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme dès lors que ces éléments forment avec la microcentrale autorisée un ensemble indivisible ;
- le dossier de demande de permis de construire remis par le pétitionnaire est incomplet au regard des articles R. 431-8 à R. 431-10 du code de l'urbanisme sur le volet architectural ; les données relatives aux surfaces présentées sont incohérentes ; le dossier ne permet pas d'apprécier correctement l'impact visuel du projet et son insertion paysagère et présente des contradictions sur la surface du projet ;
- le projet n'aurait pas dû être autorisé au regard des dispositions de l'article N 2 du plan local d'urbanisme d'Yssingeaux dès lors qu'il se situe sur une parcelle classée en zone naturelle ; la construction ne peut être qualifiée d'ouvrage public ni ne peut être regardée comme participant au service public de production d'électricité eu égard à la puissance de l'installation ;
- le projet méconnaît l'article N 10 du plan local d'urbanisme sur la hauteur des constructions alors que ces dispositions sont applicables puisqu'il ne s'agit pas d'un équipement d'intérêt collectif ou de service public qui en sont exclus ;
- les dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme ainsi que de l'article N 3 du règlement du plan local d'urbanisme ont été méconnus ; aucune information n'est donnée sur les excavations, l'acheminement des matériaux et les visites de contrôle ; la voie interne créée ne permet pas l'accès aux véhicules de secours en cas d'incendie ; les normes de sécurité incendie ne sont pas respectées ;
- les dispositions de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme ont été méconnues dès lors que le préfet aurait dû solliciter l'avis de la commune en cas de création ou modification d'un accès à une voie publique ;
- le projet porte atteinte à l'environnement.
Deux mémoires en défense, enregistrés les 28 janvier 2022 et 22 mars 2023, ont été produits par la SAS Gefa.
Par courrier du 28 janvier 2022, le greffe de la cour a demandé à la SAS Gefa de régulariser dans les quinze jours son mémoire au regard des exigences de l'article R. 811-7 du code de justice administrative s'agissant de la représentation par ministère d'avocat.
Par un mémoire, enregistré le 5 mai 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Une ordonnance du 12 juin 2023 a reporté la clôture de l'instruction initialement fixée au 12 mai 2023 au 27 juin 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'énergie ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ;
- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Tête pour M. et Mme E....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 18 avril 2017, le préfet de la Haute-Loire a délivré un permis de construire à la SAS Gefa pour la construction d'une microcentrale hydroélectrique sur le terrain dénommé " les Bois du Fraisse ", sur le territoire de la commune d'Yssingeaux. M. et Mme E..., voisins de la construction litigieuse, ont formé un recours gracieux contre cet arrêté le 16 juin 2017 qui a été rejeté par une décision implicite. Par un jugement du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, faisant application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, après avoir estimé que le vice tiré de l'absence de précision sur l'organisation et le traitement des accès au terrain, affectant la légalité du permis de construire du 18 avril 2017, était susceptible d'être régularisé, a sursis à statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dans l'attente de cette régularisation, constaté que les autres moyens de la requête de M. et Mme E... n'étaient pas fondés et sursis à statuer sur cette requête jusqu'à l'expiration du délai de quatre mois imparti à la SAS Gefa pour justifier de la délivrance d'un permis de construire régularisant l'autorisation contestée. Par un arrêté du 13 octobre 2020, le préfet de la Haute-Loire a, pour l'exécution de ce jugement avant-dire droit, délivré à la SAS Gefa un permis de construire modificatif. Par l'article 2 du jugement dont M. et Mme E... relèvent appel, le tribunal a rejeté leur demande.
Sur la recevabilité des mémoires de la SAS Gefa :
2. Les mémoires présentés par la SAS Gefa, enregistrés les 28 janvier 2022 et 22 mars 2023, ont, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 811-7 du code de justice administrative, été présentés sans ministère d'avocat. La SAS Gefa s'est abstenue de régulariser ces productions dans le délai qui lui était imparti par la demande de régularisation qui lui a été adressée, à peine d'irrecevabilité, par un courrier du greffe du 28 janvier 2022, reçu le même jour. Il en résulte que ces mémoires sont irrecevables.
Sur l'intervention volontaire de l'association Collectif 43 du bassin de l'Auze :
3. L'association Collectif 43 du bassin de l'Auze, dont l'objet social est de protéger la biodiversité du bassin de l'Auze pour les générations futures ainsi que la qualité de vie des habitants du même bassin justifie, eu égard à la nature et à l'objet du litige, d'un intérêt à l'annulation des permis de construire délivrés par le préfet de la Haute-Loire à la SAS Gefa pour la construction d'une microcentrale hydroélectrique au droit de la rivière de l'Auze. Par suite, son intervention doit être admise.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique. (...) ". Une construction constituée de plusieurs éléments formant, en raison des liens physiques ou fonctionnels entre eux, un ensemble immobilier unique, doit en principe faire l'objet d'un seul permis de construire.
5. Aux termes de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme : " Un décret en Conseil d'Etat arrête la liste des constructions, aménagements, installations et travaux qui, par dérogation aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4, sont dispensés de toute formalité au titre du présent code en raison : (...) d) Du fait que leur contrôle est exclusivement assuré par une autre autorisation ou une autre législation ; (...). " L'article R. 421-3 du même code indique : " Sont dispensés de toute formalité au titre du présent code, en raison de leur nature, sauf lorsqu'ils sont implantés dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques : (...) b) Tous les ouvrages d'infrastructure terrestre, maritime, fluviale, portuaire ou aéroportuaire (...). "
6. Le permis de construire et l'autorisation des ouvrages utilisant l'énergie hydraulique sont accordés en vertu de législations distinctes et selon des procédures indépendantes. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le barrage à partir duquel sera captée la force de l'eau pour faire fonctionner la microcentrale hydroélectrique, ainsi que la conduite forcée indissociable de celui-ci pour permettre la dérivation des eaux constituent des ouvrages d'infrastructure fluviale au sens des dispositions du b) de l'article R. 421-3 du code de l'urbanisme. Ils ont été autorisés par le préfet de la Haute-Loire par arrêté du 17 juillet 2019 portant autorisation d'exploitation et règlement d'eau des aménagements hydroélectriques du Pont du Fraysse sur l'Auze en application des articles L. 214-1 à L. 214-6 du code de l'environnement et de l'article L. 521-2 du code de l'énergie. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le barrage et la conduite forcée, même indispensables au fonctionnement de l'installation hydraulique autorisée, auraient dû être mentionnés dans le dossier de demande et que le projet aurait dû faire l'objet d'un permis de construire unique.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : / a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ".
8. Les insuffisances ou omissions entachant un dossier de demande de permis de construire ne sont, en principe, susceptibles de vicier la décision prise, compte tenu des autres pièces figurant dans ce dossier, que si elles ont été de nature à affecter l'appréciation à laquelle se sont livrées les autorités chargées de l'examen de cette demande.
9. Il ressort des pièces du dossier que le dossier de permis de construire initial du 13 janvier 2017 mentionne une surface de plancher créée de 39 m² ainsi que la demande de permis de construire modificatif datée du 5 août 2020 et les permis délivrés les 18 avril 2017 et 13 octobre 2020. Par suite, l'autorité compétente pour instruire la demande de permis n'a pas été induite en erreur sur la surface de plancher créée par le projet, quand bien même un plan au 1/50ème figurant au dossier de demande mentionne une surface de " 6,64 x 7,14 m = 47,40 m² " et que le document PC4 " notice décrivant le terrain " mentionne à tort un volume de 47 m² au lieu de 47 m3.
10. S'agissant de la hauteur de la construction, les documents PC3 et PC6 figurant au dossier mentionne une hauteur de la construction hors-sol de 5,60 m. C... des mentions erronées ont pu figurer dans le dossier de demande présenté aux services de la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), de telles erreurs sont sans incidence sur la légalité du permis en litige et n'ont pas pu induire en erreur les services instructeurs.
11. Les requérants font valoir que le dossier de demande ne permet pas d'apprécier correctement l'impact visuel et l'insertion paysagère du projet. Toutefois, si le schéma figurant en pièce PC3 du dossier de demande comprend bien une erreur au regard de l'échelle utilisée, d'autres plans et photos joints au dossier de demande, précisément le plan de situation ainsi que le plan de masse accompagné de photographies, ont pu permettre aux services instructeurs d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement proche et plus lointain. Par suite, le moyen tiré de ce que le dossier de demande comporterait des insuffisances ou omissions au regard des dispositions précitées doit être écarté, dans toutes ses branches.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article N 1 du règlement du plan local d'urbanisme " occupations et utilisations du sol interdites " dans sa rédaction applicable à la date du 18 avril 2017, date de délivrance du permis de construire initial : " Sont interdites : / toutes constructions nouvelles, occupations et utilisations du sol autres que celles énoncées à l'article N 2 à l'exception des installations, aménagements ou ouvrages techniques nécessaires aux services publics. " L'article N 2 du même règlement " occupations et utilisations du sol soumises à des conditions particulières " énonce : " Les aménagements et constructions strictement liés à l'activité forestière. / Le changement de destination et la réhabilitation des bâtiments existants sont autorisés, sous réserve qu'ils n'aient pas pour objet un changement de destination incompatible avec le statut de la zone. "
13. Les requérants se prévalent de la méconnaissance des dispositions des articles N 1 et N 2 dans leur rédaction postérieure à celle applicable à la date de l'arrêté délivré le 18 avril 2017 lequel était soumis pour l'examen du dossier de demande aux règles contenues dans le plan local d'urbanisme de la commune, approuvé le 17 mai 2013 et révisé en dernier lieu le 26 juin 2015. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions dans leur rédaction applicable postérieurement à la date d'édiction de l'arrêté en litige doit être écarté comme inopérant. En outre, la circonstance que le tribunal n'ait pas répondu à l'argument soulevé à l'appui de ce moyen inopérant tiré de ce que le projet ne pouvait être qualifié d'ouvrage d'intérêt collectif au regard de sa capacité et des seuils visés par le code de l'énergie n'entache pas d'irrégularité le jugement attaqué.
14. En outre, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'énergie : " Le service public de l'électricité a pour objet de garantir, dans le respect de l'intérêt général, l'approvisionnement en électricité sur l'ensemble du territoire national. / Dans le cadre de la politique énergétique, il contribue à l'indépendance et à la sécurité d'approvisionnement, à la qualité de l'air et à la lutte contre l'effet de serre, à la gestion optimale et au développement des ressources nationales, à la maîtrise de la demande d'énergie, à la compétitivité de l'activité économique et à la maîtrise des choix technologiques d'avenir, comme à l'utilisation rationnelle de l'énergie. / Il concourt à la cohésion sociale, à la lutte contre les exclusions, au développement équilibré du territoire, dans le respect de l'environnement, à la recherche et au progrès technologique, ainsi qu'à la défense et à la sécurité publique. / Matérialisant le droit de tous à l'électricité, produit de première nécessité, le service public de l'électricité est géré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité et dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de coûts, de prix et d'efficacité économique, sociale et énergétique. "
15. Il ressort des pièces du dossier que le projet en cause tend à permettre de livrer l'énergie produite par l'installation autorisée sur le réseau Enedis et que la production en énergie de l'installation correspond à la consommation moyenne de 185 habitants. La qualification d'installation nécessaire au service public de l'électricité s'apprécie, dans le cadre de la délivrance d'une autorisation d'urbanisme et au sens de l'article N 1 du règlement du PLU précité, indépendamment de la puissance de l'installation. Ainsi, le projet, dont la destination principale est la production d'électricité et qui contribue à l'équilibre du système d'approvisionnement par la fourniture d'électricité produite à partir d'énergies renouvelables, constitue une installation nécessaire au service public d'électricité au sens de l'article N 1 du règlement précité. Les requérants ne peuvent donc utilement soutenir qu'un ouvrage hydroélectrique inférieur à " 4 500 kilowatts ", placé sous le régime de l'autorisation et non pas de la concession, ne participe pas au service public tel que défini par l'article L. 121-1 du code de l'énergie.
16. En quatrième lieu, aux termes de l'article N 10 relatif à la hauteur des constructions du règlement précité dans sa rédaction applicable : " La hauteur des constructions est mesurée verticalement à partir du sol existant jusqu'à l'égout de toiture du bâtiment, ouvrages techniques, cheminées et autres superstructures exclues. / La hauteur maximum des constructions ne pourra excéder la hauteur de la construction principale à laquelle elle est rattachée. / A l'égout de toiture, la hauteur des abris de jardin et des abris pour animaux est limitée à 2,50 m. / A... l'égout de toiture, la hauteur des garages non accolés à l'habitation est limitée à 4 M. / B... zone Nh : La hauteur des constructions nouvelles de l'égout de toiture au point le plus bas du terrain initial ne peut dépasser 7 mètres. Sur les terrains en pente, la hauteur doit être respectée en tout point du bâtiment. / Ces dispositions ne s'appliquent pas aux ouvrages spécifiques de transport d'énergie électrique. "
17. La microcentrale hydroélectrique en litige constituant un ouvrage technique au sens de ces dispositions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le projet aurait été octroyé en méconnaissance des règles de hauteur visées par les dispositions précitées dès lors que le projet n'y est pas soumis.
18. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent. En outre, l'article N 3 relatif à l'accès et aux voiries du règlement du PLU précise que : " Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique et apporter toutes garanties en matière de sécurité pour les usagers. / Les terrains doivent être desservis par une voie publique ou prive permettant l'accès des véhicules de secours. "
19. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section E n°1519, terrain d'assiette du projet litigieux, est desservie par la route départementale 7 qui débouche sur des voies communales longeant la partie sud de la parcelle. En outre, figure au dossier un avis du Service Départemental d'Incendie et de Secours (SDIS) du 13 janvier 2021 indiquant, concernant le projet, que l'accès au site est assuré par une piste forestière empierrée, constituée de matériaux compactés par couches qui permettront de supporter un trafic de véhicules poids lourds et qui dispose d'une aire de retournement. Cette piste est reliée à un chemin rural récemment goudronné. L'avis conclut que " les caractéristiques de cette piste ainsi que celles du chemin rural qui dessert le village de Rouchain sont de nature à permettre à tout engin sapeur-pompier de lutte contre les feux de forêt, d'accéder au site de la microcentrale et de pouvoir intervenir en cas de sinistre intéressant soit le bâtiment soit la végétation attenante. " Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les conditions d'accessibilité au terrain d'assiette du projet, notamment pour les véhicules de secours, ne seraient pas satisfaisantes.
20. En outre, aucune disposition citée par les requérants ne prescrit l'obligation pour tout pétitionnaire d'apporter des précisions sur l'excavation, l'acheminement des matériaux et les visites de contrôle de l'installation, qui relèvent au demeurant des conditions d'exécution dudit permis, ni n'impose la présence permanente d'un gardien ou un stationnement pour les véhicules pour le type d'installation en cause, l'article N 12 du règlement du PLU d'Yssingeaux n'ayant pas pour objet d'imposer la création de places de stationnement.
21. Si les intéressés se prévalent également des dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme, ces dispositions ne sont applicables qu'en l'absence de documents d'urbanisme ce qui n'est pas le cas de la commune d'Yssingeaux.
22. En sixième lieu, ainsi que l'ont jugé les premiers juges, l'article N 3 du règlement du PLU précité concerne les voies d'accès au terrain d'assiette des constructions et non les voies internes à ce terrain. Si les requérants estiment que la voie interne à la parcelle en cause, qui a fait l'objet de la demande de permis de construire modificatif, ne sera pas réalisable en raison d'une pente de 17% sur une partie de celle-ci et ne respecte pas les prescriptions du règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie de Haute-Loire du 21 avril 2017, ce référentiel a trait à une législation distincte du droit de l'urbanisme et les prescriptions qu'il contient ne sont pas directement opposables aux autorisations d'urbanisme. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que la voie d'accès interne à la microcentrale hydroélectrique, telle qu'autorisée et présentée dans la demande de permis de construire modificatif, ne permettrait pas l'intervention des services d'incendie et de secours en cas d'incendie et ce d'autant qu'il a été rappelé que le SDIS a émis un avis favorable sur ce point. Il n'est en outre pas sérieusement contesté que la première habitation se situe à 140 mètres du projet, qu'elle est séparée de celui-ci par la rivière et que le risque de propagation d'un incendie est ainsi faible. Par suite, le moyen tiré de ce que le permis litigieux serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.
23. En septième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet aurait pour effet la création ou la modification de l'accès du terrain d'assiette à la voie communale le desservant et que le maire de la commune aurait dû être consulté sur ce point. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme doit être écarté.
24. En dernier lieu, il résulte de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ou encore à la conservation des perspectives monumentales, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Les dispositions de cet article excluent qu'il soit procédé, dans le second temps du raisonnement, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux mentionnés par cet article et, le cas échéant, par le plan local d'urbanisme de la commune.
25. Les développements présentés par M. et Mme E... tirés de ce que le projet porterait atteinte à l'environnement, pour lequel ils ne se prévalent de la méconnaissance d'aucune disposition législative ou réglementaire précise, ne sont pas assortis des précisions qui permettraient à la cour d'en apprécier le bien-fondé. Au demeurant, si, par l'incise " le projet est manifestement disproportionné par rapport à son utilité supposée ", les requérants se prévalent d'un bilan coûts/avantages défavorable du projet au regard de l'intérêt général, de l'atteinte à la biodiversité et de l'absence d'intérêt économique dudit projet, cette argumentation est inopérante au regard des principes énoncés au point 24.
26. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat le versement à M. et Mme E... de la somme qu'ils demandent en application de ces dispositions.
DECIDE :
Article 1er : L'intervention de l'association Collectif 43 du bassin de l'Auze est admise.
Article 2 : La requête de M. et Mme E... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et Mme F... E..., à l'association Collectif 43 du bassin de l'Auze, à la SAS Gefa et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Loire.
Délibéré après l'audience du 9 novembre 2023 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 novembre 2023.
La rapporteure,
V. Rémy-Néris
Le président,
F. Bourrachot
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N°21LY03665
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