Vu les procédures suivantes :
Procédures contentieuses antérieures :
I. La SELARL François Boron, Alain Pierrat et Marie-Anne Boron, par une demande enregistrée sous le n° 1802209, a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler, à hauteur de 1 866,65 euros, le titre de perception, d'un montant de 8 016,65 euros, émis à son encontre le 22 février 2018 par le directeur départemental des finances publiques du Territoire de Belfort correspondant aux sommes dues en application de la convention signée le 30 juin 2016 au titre du premier semestre de l'année 2016 et de la décharger de l'obligation de payer la somme de 1 866,65 euros.
II. La SELARL François Boron, Alain Pierrat et Marie-Anne Boron, par une demande enregistrée sous le n° 1900162, a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les deux titres de perception émis à son encontre le 1er juin 2018 par le directeur départemental des finances publiques du Territoire de Belfort, d'une part, d'un montant de 4 057,21 euros, correspondant aux sommes dues au titre de l'année 2014 et, d'autre part, d'un montant de 4 423,39 euros, correspondant aux sommes dues au titre du premier semestre de l'année 2015. La SELARL François Boron, Alain Pierrat et Marie-Anne Boron a également demandé au tribunal administratif de Besançon de la décharger de l'obligation de payer la somme de 8 480,60 euros.
III. La SELARL François Boron, Alain Pierrat et Marie-Anne Boron, par une demande enregistrée sous le n° 1901448, a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler le titre de perception émis à son encontre le 14 novembre 2018 par le directeur départemental des finances publiques de Meurthe et Moselle d'un montant de 495,98 euros correspondant aux sommes dues au titre du second semestre de l'année 2016. La société François Boron, Alain Pierrat et Marie-Anne Boron a également demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler, respectivement à hauteur de 2 049,55 et 5 141,16 euros, les deux titres de perception émis à son encontre le 14 novembre 2018 par le directeur départemental des finances publiques de Meurthe et Moselle, d'un montants de 4 099,10 euros et de 10 282,32 euros correspondants aux sommes dues, d'une part, au titre du second semestre de l'année 2016, et, d'autre part, au titre de la période allant du 1er janvier au 10 mai 2017. La SELARL François Boron, Alain Pierrat et Marie-Anne Boron a également demandé de la décharger de l'obligation de payer la somme de 7 686,69 euros.
Par un jugement nos 1802209, 1900162 et 1901448 du 18 mars 2021, le tribunal administratif de Besançon a :
- donné acte du désistement des demandes de la société tendant à la décharge de l'obligation de payer une somme de 495,98 euros et à l'annulation du titre de perception du 14 novembre 2018 d'un montant de 495,98 euros ;
- annulé partiellement les cinq titres de perception émis à l'encontre de la société Boron, Alain Pierrat et Marie-Anne Boron les 22 février, 1er juin et 14 novembre 2018, en tant qu'ils excédaient respectivement les sommes de 2 130,17 euros, 2 482,40 euros, 7 133,66 euros, 3 635,81 euros et 9 682,16 euros ;
- déchargé cette société de son obligation de payer les sommes de 1 927,04 euros, 1 940,99 euros, 882,99 euros, 463,29 euros et 600,16 euros, au titre des charges réclamées au titre des périodes respectives des années 2014 et 2015, du premier semestre 2016, du second trimestre 2016 et enfin du 1er janvier au 10 mai 2017 ;
- mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à cette société au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 mai 2021 et 26 octobre 2023, la SELARL François Boron, Alain Pierrat et Marie-Anne Boron, représentée par Me Ohana de la Selarl Avocats Dsob, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 18 mars 2021 en tant qu'il n'a pas fait droit au surplus de ses conclusions ;
2°) de déclarer nulle la convention du 30 juin 2016 ;
3°) de prononcer la décharge de son obligation de payer les sommes restantes à sa charge en application des cinq titres de perception émis à son encontre les 22 février, 1er juin et 14 novembre 2018 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable ;
- en méconnaissance du principe du contradictoire prévu aux articles L. 5 et L. 611-1 du code de justice administrative, le jugement est irrégulier en tant que la décomposition des prix globale et forfaitaire des sociétés " Cofely " et " Vinci " ne lui a pas été communiquée alors que le secret des affaires n'était pas opposable ; le jugement n'a pas précisé les critères ayant conduit à estimer que le secret des affaires avait été invoqué à raison ;
- en raison de l'absence d'information sur l'existence des conventions conclues avec les sociétés Cofely et Vinci, le principe de bonne foi et d'équité résultant des articles 1134 et 1135 du code civil a été méconnu ; par voie de conséquence, la convention du 30 juin 2016, qui est affectée d'un vice d'une particulière gravité, est nulle ;
- subsidiairement, concernant les prestations de maintenance refacturées, il a été mis à sa charge des prestations dont elle ne bénéficie pas ; il y a lieu d'exclure les charges résultant de ces contrats de maintenance ;
- par exemple, il ne pouvait lui être réclamé le paiement du sandow anti-panique ;
- les surfaces retenues dans les conventions successives sont erronées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- à titre principal, la requête d'appel est irrecevable dans la mesure où la copie du jugement attaqué n'a pas été produite ;
- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denizot, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Michel, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 15 décembre 2008, le premier président de la cour d'appel de Besançon et la procureure générale près cette cour ont conclu avec la SELARL François Boron, Alain Pierrat et Marie-Anne Boron (ci-après Boron et Pierrat), ayant la qualité de titulaire de l'office de greffier du tribunal de commerce de Besançon en application de l'article L. 743-29 du code de commerce, une convention ayant pour objet la détermination et la liquidation des charges afférentes aux locaux affectés aux services du greffe du tribunal de commerce installés dans le palais de justice de Besançon. Le 30 juin 2016, les parties ont décidé de conclure, pour une durée de quatre ans, une nouvelle convention prenant effet au 1er janvier 2014. Le 11 mai 2017, la société Boron et Pierrat, contestant le montant des charges, a décidé de dénoncer cette convention.
2. Le 22 février 2018, le directeur départemental des finances publiques du Territoire de Belfort a pris en charge un titre de perception émis à l'encontre de la société Boron et Pierrat, d'un montant de 8 016,65 euros, au titre des charges restant dues pour le premier semestre de l'année 2016. Le 1er juin 2018, deux autres titres de perception, de montants respectifs de 4 057,21 euros et de 4 423,39 euros, ont été pris en charge au titre des charges restant dues pour, d'une part, l'année 2014, d'autre part, l'année 2015. Le 14 novembre 2018, le directeur départemental des finances publiques de Meurthe et Moselle a pris en charge un titre de perception émis à l'encontre de la société Boron et Pierrat d'un montant de 4 099,10 euros, au titre des charges restant dues pour le second semestre de l'année 2016. La société Boron et Pierrat a payé la somme de 2 049,55 euros correspondant au montant des charges qu'elle estimait devoir second semestre de l'année 2016. Le même jour, la même autorité a pris en charge deux titres de perception émis à l'encontre de la société Boron et Pierrat d'un montant de 495,98 euros et de 10 282,32 euros au titre respectivement des charges du second semestre de l'année 2016 et de celles restant dues au titre de la période allant du 1er janvier au 10 mai 2017.
3. Par un jugement du 18 mars 2021, le tribunal administratif de Besançon a donné acte du désistement des demandes de la société Boron et Pierrat tendant à la décharge de son obligation de payer une somme de 495,98 euros et à l'annulation du titre de perception correspondant. Par le même jugement, le tribunal administratif de Besançon a annulé partiellement les cinq titres de perception émis à l'encontre de la société Boron et Pierrat les 22 février, 1er juin et 14 novembre 2018, en tant que ces titres de perception excédaient respectivement les sommes de 2 130,17 euros, 2 482,40 euros, 7 133,66 euros, 3 635,81 euros et 9 682,16 euros. Enfin, le tribunal administratif de Besançon a, par voie de conséquence des annulations partielles prononcées, déchargé la société Boron et Pierrat de son obligation de payer les sommes de 1 927,04 euros, 1 940,99 euros, 882,99 euros, 463,29 euros et 600,16 euros, au titre des charges réclamées pour les périodes respectives de l'année 2014, 2015, du premier semestre 2016, du second trimestre 2016 et enfin du 1er janvier au 10 mai 2017. La société Boron et Pierrat relève appel de ce jugement.
Sur la fin de recevoir opposée à la requête d'appel :
4. Aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l'acte attaqué (...) ".
5. Contrairement à ce que soutient le garde des sceaux, ministre de la justice, la société Boron-Pierrat a produit, à l'appui de sa requête d'appel, la copie du jugement attaqué. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de l'absence de production de la copie du jugement attaqué doit être écartée comme manquant en fait.
Sur la régularité du jugement attaqué :
6. D'une part, aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence, du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes ". L'article L. 611-1 du même code dispose que : " Les exigences de la contradiction mentionnées à l'article L. 5 du présent code sont adaptées à celles de la protection du secret des affaires répondant aux conditions prévues au chapitre Ier du titre V du livre Ier du code de commerce ".
7. D'autre part, l'article R. 412-2-1 du code de justice administrative prévoit que : " Lorsque la loi prévoit que la juridiction statue sans soumettre certaines pièces ou informations au débat contradictoire ou lorsque le refus de communication de ces pièces ou informations est l'objet du litige, la partie qui produit de telles pièces ou informations mentionne, dans un mémoire distinct, les motifs fondant le refus de transmission aux autres parties, en joignant, le cas échéant, une version non confidentielle desdites pièces après occultation des éléments soustraits au contradictoire. Le mémoire distinct et, le cas échéant, la version non confidentielle desdites pièces, sont communiqués aux autres parties. / Les pièces ou informations soustraites au contradictoire ne sont pas transmises au moyen des applications informatiques mentionnées aux articles R. 414-1 et R. 414-2 mais sont communiquées au greffe de la juridiction sous une double enveloppe, l'enveloppe intérieure portant le numéro de l'affaire ainsi que la mention : " pièces soustraites au contradictoire-Article R. 412-2-1 du code de justice administrative ". / Si la juridiction estime que ces pièces ou informations ne se rattachent pas à la catégorie de celles qui peuvent être soustraites au contradictoire, elle les renvoie à la partie qui les a produites et veille à la destruction de toute copie qui en aurait été faite. Elle peut, si elle estime que ces pièces ou informations sont utiles à la solution du litige, inviter la partie concernée à les verser dans la procédure contradictoire, le cas échéant au moyen des applications informatiques mentionnées aux articles R. 414-1 et R. 414-2. Si la partie ne donne pas suite à cette invitation, la juridiction décide des conséquences à tirer de ce refus et statue sans tenir compte des éléments non soumis au contradictoire. / Lorsque des pièces ou informations mentionnées au premier alinéa sont jointes au dossier papier, celui-ci porte de manière visible une mention signalant la présence de pièces soustraites au contradictoire. Ces pièces sont jointes au dossier sous une enveloppe portant la mention : " pièces soustraites au contradictoire-Article R. 412-2-1 du code de justice administrative ". / Lorsqu'un dossier comportant des pièces ou informations soustraites au contradictoire est transmis à une autre juridiction, la présence de telles pièces ou informations est mentionnée de manière visible sur le bordereau de transmission ".
8. Au regard des règles de la commande publique, doivent ainsi être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l'ensemble des pièces du marché. Dans cette mesure, si notamment l'acte d'engagement, le prix global de l'offre et les prestations proposées par l'entreprise attributaire sont en principe communicables, le bordereau des prix unitaires de l'entreprise attributaire, en ce qu'il reflète la stratégie commerciale de l'entreprise opérant dans un secteur d'activité, n'est quant à lui, en principe, pas communicable.
9. En premier lieu, le garde des sceaux, ministre de la justice, a dans le cadre de la procédure prévue par l'article R. 412-2-1 du code de justice administrative précité, adressé au tribunal administratif de Besançon une enveloppe contenant la décomposition du prix global et forfaitaire (DPGF) des contrats de maintenance multi-technique attribués aux sociétés Engie Cofely et Vinci Facilities. En l'espèce, les DPGF en cause comportaient des informations détaillées sur le coût des moyens humains affectés, le taux d'encadrement, les taux horaires de rémunération, la proportion de recours à la sous-traitance, les volumes et les prix de fournitures et de consommables. L'ensemble de ces données financières reflètent la stratégie commerciale des sociétés Engie Cofely et Vinci Facilities. Par suite, contrairement à ce que soutient la société Boron et Pierrat, ces DPGF ne pouvaient, sans entraîner une violation du secret des affaires, être communiquées dans le cadre des instances introduites devant le tribunal administratif de Besançon. Ainsi, statuant au vu de ces pièces non communiquées, le jugement attaqué n'a pas méconnu le principe du contradictoire en l'adaptant aux exigences du secret des affaires et n'a pas recouru à tort à la procédure prévue par l'article R. 412-2-1 du code de justice administrative.
10. En second lieu, le tribunal administratif de Besançon a, sans dévoiler les informations protégées par le secret des affaires, suffisamment motivé son jugement pour indiquer pour quel motif les DPGF des sociétés Engie Cofely et Vinci Facilities ne devaient pas être soumises au principe du contradictoire.
11. Il résulte de ce qui précède que la société Boron et Pierrat n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité.
Sur la nullité de la convention du 30 juin 2016 :
12. Lorsqu'une partie à un contrat administratif soumet au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel.
13. En premier lieu, l'article 6 de la convention de répartition des charges pour le greffe du tribunal de commerce de Besançon du 8 décembre 2011 a fixé une durée de trois années à compter du 1er janvier 2011 et a prévu un renouvellement par décision expresse des deux parties. Il est constant que, à son expiration, cette convention n'a pas été renouvelée et que le greffe du tribunal de commerce de Besançon a continué à occuper des locaux au sein du palais de justice de Besançon postérieurement à la date de fin de la convention de décembre 2011. Par suite, en prévoyant une prise d'effet rétroactive au 1er janvier 2014, la convention de répartition des charges du 30 juin 2016 n'a fait que régulariser une période d'occupation du palais de justice par la société Boron et Pierrat qui n'avait fait l'objet d'aucun contrat. Dès lors, la société Boron et Pierrat n'est pas fondée à soutenir que l'effet rétroactif de la convention du 30 juin 2016 caractériserait un vice du consentement.
14. En second lieu, d'une part, la convention du 8 décembre 2011, avait, sur la base du rapport entre les surfaces utiles totales occupées par le greffe du tribunal de commerce et celles du palais de justice dans sa totalité, fixé une quote-part de participation aux charges de 1,68 %. Dans la convention du 30 juin 2016, la quote-part a été portée à 2,37 % correspondant au rapport entre la " surface utile nette " affectée aux locaux occupés par les services du greffe du tribunal de commerce, qui a été fixée à 289,62 m2, et la " surface utile brute " du palais de justice, déterminée à 12 236,12 m2. Le garde des sceaux, ministre de la justice, indique, sans être contredit, que la référence à ce ratio entre surface utile nette et surface utile brute résulte d'une préconisation d'une note de la direction générale des finances publiques du 19 février 2010.
15. D'autre part, il résulte de l'instruction que, dès l'année 2011, ainsi que le révèlent les stipulations de l'article 7 de la convention du 8 décembre 2011, la société Boron et Pierrat ne pouvait ignorer l'existence d'un contrat d'assistance multi-technique conclu avec une société tierce, en l'occurrence la société Cofely Services. Par ailleurs, dans ses écritures, le garde des sceaux, ministre de la justice, indique, sans être utilement contredit sur ce point, que le choix d'un prestataire externe, la société Cofely, ainsi que le choix d'un nouveau prestataire, la société Vinci, en 2016, résultaient d'une nécessité de bonne gestion des deniers publics. Il ne résulte aucunement de l'instruction que les conséquences financières relatives à la conclusion de ces contrats d'assistance multi-technique auraient été sciemment dissimulées à la société Boron et Pierrat lors de la conclusion de la convention le 30 juin 2016.
16. Dès lors, la circonstance que, au moment de la conclusion de la convention du 30 juin 2016, la société Boron et Pierrat ignorait avec exactitude le montant des charges ne saurait révéler, par elle-même, que cette incertitude affectait également les qualités essentielles du contrat.
17. Enfin et en tout état de cause, une erreur portant uniquement sur le prix et non sur les qualités substantielles du contrat ne constitue pas un vice d'une particulière gravité justifiant que le litige ne soit pas réglé sur un terrain contractuel.
18. Par conséquent, il ne résulte pas de l'instruction que les conditions dans lesquelles le contrat du 30 juin 2016 a été conclu révèleraient un vice du consentement et/ou affecteraient cette convention d'un vice d'une particulière gravité. Il n'y a en conséquence pas lieu d'écarter ce contrat pour trancher le présent litige.
Sur la légalité des titres de perception contestés :
19. En premier lieu, l'article 7 de la convention du 30 juin 2016 stipule que : " Le Greffe du tribunal de commerce participe au paiement des charges découlant des prestations dont il bénéficie dans ses locaux. / A ce titre, les charges récupérables concernent : / - le chauffage, l'éclairage / - la consommation de fluides (électricité, gaz, eau), sauf si le greffe du tribunal de commerce bénéficiait d'abonnements distincts avec des facturations indépendantes ; / - le nettoyage des locaux (dont le nettoyage des vitrages, la désinfection, la dératisation, la désinsectisation) sauf si cette prestation est prise en charge directement par le Greffe du tribunal de commerce ; / - les charges d'exploitation et de maintenance technique et les contrôles réglementaires relatifs aux locaux occupés par le Greffe du tribunal de commerce ; / - les charges induites par la sécurité incendie (extincteurs, détecteurs, etc...) ; / les frais de communication (téléphone, internet, etc.), sauf si le Greffe du tribunal de commerce bénéficie d'abonnements distincts avec des facturations indépendantes / En revanche, le Greffe du tribunal de commerce n'est pas tenu de participer à l'entretien des parties communes du palais de justice, non plus qu'aux dépenses d'éclairage ou de chauffage de ces parties communes, ni aux dépenses de sûreté (gardiennage et équipements spécifiques) ".
20. D'une part, il résulte de l'instruction que les charges d'exploitation et de maintenance technique et les contrôles réglementaires qui sont contractuellement supportés par l'Etat au titre des deux marchés de maintenance sont répartis entre le palais de justice et le conseil de prud'hommes à hauteur de respectivement 97 % et 3 %. Par suite, la société Boron et Pierrat, qui ne conteste pas sérieusement les motifs du jugement attaqué, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon, qui a expressément exclu du montant des charges dues la part revenant au conseil de prud'hommes de Besançon, aurait mis à sa charge des prestations exécutées sur un autre lieu que le palais de justice de Besançon.
21. D'autre part, par une facture n° 2015056P00143 d'un montant de 379,20 euros TTC, la société Cofely a réclamé le paiement d'une prestation correspondant " au remplacement du sandow anti panique sur la porte automatique du Tribunal de commerce ". Il résulte de l'instruction que ce montant a été inclus, en totalité, dans le calcul des charges du tribunal de commerce pour l'année 2015. Toutefois, l'article 7 de la convention de répartition des charges excluait formellement que la société Boron et Pierrat doive s'acquitter des dépenses de sûreté dont le gardiennage et les équipements spécifiques. Par suite, sur le fondement de cette stipulation, la société Boron et Pierrat ne devait pas payer la somme de 379,20 euros TTC. Dès lors, cette somme ne pouvait être incluse dans le titre de perception du 1er juin 2018, d'un montant de 4 423,39 euros, correspondant au reste à payer des charges de l'année 2015.
22. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment des plans du palais de justice, que le greffe du tribunal de commerce ne bénéficierait pas de la climatisation ou d'accès aux sanitaires. Par ailleurs, ainsi que l'ont estimé les premiers juges dont les motifs ne sont pas sérieusement contestés, il résulte des stipulations de la convention du 30 juin 2016 que les charges relatives aux ascenseurs et portes automatiques ne devaient pas être supportées par la société Boron et Pierrat. Ainsi, ce n'est pas à tort, que dans le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a exclu ces charges relatives aux ascenseurs et portes automatiques des montants dus par la société Boron et Pierrat.
23. En second lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment, en l'absence de vice d'une particulière gravité, le litige entre le garde des sceaux, ministre de la justice, et la société Boron et Pierrat ne peut être réglé que sur un terrain contractuel. Dès lors, compte tenu de la circonstance que la surface utile nette de 289,69 m2 a été arrêtée conventionnellement, la société Boron et Pierrat ne saurait utilement remettre en cause les modalités de calcul de cette superficie.
24. Il résulte de tout de ce qui précède que la société Boron et Pierrat est uniquement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé le titre de perception d'un montant de 4 423,39 euros en tant qu'il excède la somme de 2 482,40 euros et l'a déchargée de son obligation de payer à hauteur d'un montant de 1 940,99 euros. Il convient en conséquence d'annuler ce titre de perception en tant qu'il excède la somme de 2 103,20 euros et de porter le montant de la décharge à la somme de 2 320,19 euros.
Sur les frais liés à l'instance :
25. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Boron et Pierrat présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Le titre de perception, d'un montant de 4 423,39 euros émis à l'encontre de la société Boron et Pierrat pris en charge par le directeur départemental des finances publiques du Territoire de Belfort le 1er juin 2018 est annulé en tant qu'il excède la somme de 2 103,20 euros.
Article 2 : L'obligation de payer la somme de 1 940,99 euros que la société Boron et Pierrat a été déchargée par le jugement du 18 mars 2021 du tribunal administratif de Besançon est portée à la somme de 2 320,19 euros.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 18 mars 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL François Boron, Alain Pierrat et Marie-Anne Boron et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Copie en sera adressée aux directeurs départementaux des finances publiques de Meurthe et Moselle et du Territoire de Belfort.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Ghisu-Deparis, présidente,
- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,
- M. Denizot, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2023.
Le rapporteur,
Signé : A. DenizotLa présidente,
Signé : V. Ghisu-Deparis
La greffière,
Signé : N. Basso
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N. Basso
2
N° 21NC01379