Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2022 par lequel la préfète des Vosges lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2203307 du 7 février 2023, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 2 mars 2023, Mme C..., représentée par Me Kilinç, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 7 février 2023 du tribunal administratif de Nancy ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2022 par lequel la préfète des Vosges lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre à la préfète des Vosges de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
Elle soutient que l'arrêté attaqué méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile telles qu'éclairées par la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'Intérieur.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 avril 2023, la préfète des Vosges conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme C... n'est fondé.
Mme C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 22 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bauer,
- et les observations de Me Kilinc pour Mme C....
Considérant ce qui suit :
Mme C..., ressortissante turque née le 17 mai 1986, est entrée en France le 29 septembre 2015, accompagnée de son époux et de leur fils mineur. Elle a été mise en possession d'un titre de séjour spécial délivré par le ministre des affaires étrangères en raison de l'activité en France de son époux, qui était chargé d'une mission éducative au consulat général de la République de Turquie à Strasbourg. A l'issue de cette mission, l'époux de Mme C... est retourné en Turquie et cette dernière a sollicité le 1er juillet 2022 son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 19 octobre 2022, le préfet des Vosges a refusé de faire droit à cette demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite. Par jugement du 7 février 2023, dont l'intéressée relève appel, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de ces décisions.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
1. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
2. Si Mme C... se prévaut de sa présence en France depuis 7 ans à la date de la décision attaquée, il est constant que la durée de son séjour est liée à la mission consulaire effectuée en France par son époux et qui a pris fin le 30 juin 2022. Or il ressort des pièces du dossier que ce dernier est retourné en Turquie à la fin de sa mission. Si la requérante allègue être séparée de son époux, elle ne produit aucun élément de nature à l'établir, alors au demeurant que les attestations de témoins produites concomitamment à sa demande d'admission exceptionnelle au séjour en juillet 2022 se réfèrent au couple formé avec son époux. Il ne peut dès lors être considéré que la cellule familiale ne pourra se reformer en Turquie, où les enfants mineurs de l'intéressée pourront poursuivre leur scolarité, alors au surplus que Mme C... ne démontre pas y avoir rompu tout lien familial ou personnel. Dès lors, les seules circonstances que la requérante soit bien intégrée, parle le français et bénéficie d'une promesse d'embauche, au demeurant non assortie d'une autorisation de travail, ne sauraient suffire à caractériser une atteinte disproportionnée à son droit au respect de vie privée et familiale. C'est donc à bon droit que le tribunal a considéré que l'arrêté en litige n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
3. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 7 février 2023, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles à fin d'injonction et tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... épouse C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète des Vosges.
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Wurtz, président,
- Mme Bauer, présidente assesseure,
- M. Meisse, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2023.
La rapporteure,
Signé : S. BAUER
Le président,
Signé : Ch. WURTZ Le greffier,
Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
F. LORRAIN
N° 23NC00712 2