Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.
Par jugement n° 2111945 du 7 avril 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 mai 2022, M. B..., représenté par Me Besse, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2111945 du 7 avril 2022 du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) à titre principal, d'annuler la décision contenue dans l'arrêté du 29 juillet 2021 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour et d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision portant obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté en litige et d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation personnelle dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement attaqué :
- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de l'erreur de droit commise par le préfet dès lors qu'il ne représente pas une menace à l'ordre public ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
- la décision lui refusant le renouvellement de son titre de séjour est entachée d'une erreur d'appréciation et d'une erreur de droit dès lors que sa présence en France n'est pas constitutive d'une menace à l'ordre public ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle et familiale ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle et professionnelle ainsi qu'au regard de ses conséquences sur sa situation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Collet,
- et les observations de Me Landoulsi, avocat de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain né le 28 juin 1989, déclare être entré en France en décembre 2011. Il a obtenu, le 24 octobre 2019, une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " valable pour une durée d'un an. Le 21 octobre 2020, il a sollicité auprès des services de la préfecture de la Seine-Saint-Denis le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 29 juillet 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné à l'expiration de ce délai.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ".
3. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de renouveler le titre de séjour de M. B..., le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur la circonstance que " l'intéressé est connu des services de police pour des faits de violence avec usage ou menace d'une arme le 15 juillet 2018 et pour outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique et rébellion le 11 juillet 2018 " et que " ces faits permettent de regarder l'intéressé comme susceptible de constituer une menace à l'ordre public ". Toutefois, en se bornant à produire un extrait du fichier du traitement des antécédents judiciaires et à soutenir que le requérant est " connu des services de police " pour les faits précités sans faire état d'aucune condamnation pénale prononcée en conséquence à son encontre ni d'aucune précision sur la matérialité des faits qui lui sont reprochés, et alors que M. B... soutient, sans être contredit, que les faits de " violence avec usage ou menace d'une arme " ont été rapportés de manière inexacte par un voisin avec lequel il a un différend dans le seul but de lui nuire, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'établit pas la réalité de la menace pour l'ordre public que représente la présence sur le territoire de M. B..., alors qu'en outre, les faits reprochés, tous intervenus entre les 11 et 15 juillet 2018, doivent être regardés comme anciens et isolés au regard de la durée de présence du requérant sur le territoire. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur d'appréciation et une erreur de droit en se fondant sur les dispositions précitées de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour refuser le renouvellement de la carte de séjour du requérant.
4. Il ressort de la lecture de l'arrêté attaqué que si le préfet de Seine-Saint-Denis a également fait état, dans sa décision, des motifs pour lesquels il estimait qu'il n'était pas porté une atteinte excessive à la vie privée et familiale de M. B..., le refus opposé à sa demande de renouvellement du titre qui lui avait été accordé au titre de l'admission exceptionnelle au séjour par le travail repose sur la seule circonstance que M. B... représenterait une menace pour l'ordre public. Dès lors, il résulte de ce qui a été exposé au point précédent, que la décision portant refus de renouvellement de séjour contestée doit être annulée. Il en est de même, par voie de conséquence, des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ainsi privées de base légale.
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué et sur les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique seulement que le préfet de la Seine-Saint-Denis ou tout préfet territorialement compétent réexamine la situation administrative de M. B.... Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant ce réexamen. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2111945 du 7 avril 2022 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 29 juillet 2021 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis ou à tout préfet territorialement compétent de procéder à un nouvel examen de la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant ce réexamen.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.
Délibéré après l'audience du 11 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Menasseyre, présidente de chambre,
- M. Ho Si Fat, président-assesseur,
- Mme Collet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 décembre 2023.
La rapporteure,
A. COLLET
La présidente,
A. MENASSEYRE
La greffière,
N. COUTY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°22PA02195 2