Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 5 avril 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays dont il a la nationalité comme pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1904359 du 21 octobre 2019, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toulouse a renvoyé l'examen des conclusions à fin d'annulation de la décision portant refus d'admission au séjour devant une formation collégiale du tribunal, a annulé l'arrêté préfectoral du 5 avril 2019 en tant qu'il oblige M. A... à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixe le pays de renvoi et a enjoint au préfet du Tarn de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir et de lui délivrer dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.
Par un autre jugement n° 1904359 du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 avril 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 juin 2020, un mémoire enregistré le 26 novembre 2020 et un mémoire en production de pièce enregistré le même jour, M. A... représenté par Me H..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 mars 2020 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Tarn du 5 avril 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, subsidiairement de lui délivrer un titre de séjour mention " salarié " ou " travailleur temporaire " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et infiniment subsidiairement de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de Me H... par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que la décision de refus de séjour :
- est insuffisamment motivée et ne procède pas d'un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- est entachée d'erreur de droit et d'erreur de fait au regard des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article L. 111-6 du même code, de l'article 47 du code civil et de l'article 1er du décret du 24 décembre 2015 n° 2015-1710 ;
- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 octobre 2020, le préfet du Tarn conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérant ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 5 octobre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 27 novembre 2020 à 12h00.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 6 mai 2020 du bureau de l'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code des relations entre le public et l'administration,
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique,
- le décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. F... G....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant malien, né selon ses déclarations en mars 2001, est entré en France le 7 mars 2017 et a été pris en charge en qualité de mineur par les services de l'aide sociale à l'enfance du Tarn le 25 avril 2017. Le 20 février 2019, M. A... a déposé une demande de titre de séjour en qualité d'étudiant ou de salarié auprès des services préfectoraux. Par un arrêté du 5 avril 2019, le préfet du Tarn lui a refusé la délivrance du titre sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays dont il a la nationalité comme pays de destination de la mesure d'éloignement. Par un jugement du 21 octobre 2019, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toulouse a renvoyé l'examen des conclusions à fin d'annulation de la décision portant refus d'admission au séjour devant une formation collégiale du tribunal, annulé l'arrêté préfectoral du 5 avril 2019 en tant qu'il oblige M. A... à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixe le pays de renvoi et a enjoint au préfet du Tarn de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir et de lui délivrer dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler. M. A... relève appel du jugement du 5 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 avril 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
2. En premier lieu, le requérant reprend en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux ni de critiques utiles du jugement, les moyens tirés de ce que la décision attaquée est insuffisamment motivée et de ce que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation. Pour écarter ce moyen les premiers juges ont relevé que " la décision attaquée, qui vise les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et fait état, après avoir notamment relevé que l'intéressé avait présenté un acte de naissance et un jugement supplétif présentant des irrégularités et que son passeport biométrique avait été obtenu indûment, de ce que M. A... a bénéficié de prestations sociales indues de l'aide sociale à l'enfance et que son comportement constituait donc une menace pour l'ordre public. ". Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
3. En deuxième lieu et d'une part, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. ". Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de "salarié" ou "travailleur temporaire", présentée sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public.
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". L'article 47 du code civil dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". Enfin, aux termes de l'article 1 du décret du 24 décembre 2015 : " Lorsque, en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger, l'autorité administrative saisie d'une demande d'établissement ou de délivrance d'un acte ou de titre procède ou fait procéder, en application de l'article 47 du code civil, aux vérifications utiles auprès de l'autorité étrangère compétente, le silence gardé pendant huit mois vaut décision de rejet. / Dans le délai prévu à l'article L. 231-4 du code des relations entre le public et l'administration, l'autorité administrative informe par tout moyen l'intéressé de l'engagement de ces vérifications. ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger et pour écarter la présomption d'authenticité dont bénéficie un tel acte, l'autorité administrative procède aux vérifications utiles ou y fait procéder auprès de l'autorité étrangère compétente. L'article 47 du code civil précité pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays. Il incombe donc à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question. En revanche, l'administration française n'est pas tenue de solliciter nécessairement et systématiquement les autorités d'un autre Etat afin d'établir qu'un acte d'état civil présenté comme émanant de cet Etat est dépourvu d'authenticité, en particulier lorsque l'acte est, compte tenu de sa forme et des informations dont dispose l'administration française sur la forme habituelle du document en question, manifestement falsifié.
5. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de sa demande de titre de séjour, le requérant a produit un acte de naissance malien établi le 9 mars 2001, un jugement supplétif d'acte de naissance de la cour d'appel de Bamako daté du 20 mars 2001, une copie de son acte de naissance daté du 1er mars 2001 et un passeport biométrique. Pour contester l'authenticité de ces documents, le préfet du Tarn se prévaut de la fiche " Numéro d'identification nationale " dite NINA délivrée par le consulat D... en France selon laquelle la date de naissance du 1er mars 2011 est fausse et de l'analyse menée par la cellule fraude de la direction interdépartementale de la police aux frontières (DIDPAF) de Toulouse en date du 26 février 2019 selon laquelle l'acte de naissance et le jugement supplétif ont été obtenus pas fraude dès lors, notamment, que les numéros des actes sont inscrits dans le registre 05 qui ne correspond pas au standard de délivrance des actes de naissance malien et que le jugement supplétif a été délivré le 28 mars 2001 alors que la déclaration de naissance a été faite dans le délai légal à savoir le 9 mars 2001 si bien qu'un tel jugement n'a pu être délivré par un tribunal selon les articles 158 et 133 du code de la famille D.... Ces éléments tendent à démontrer que les actes d'état civil produits par M. A... à l'appui de sa demande ne sont pas authentiques et ce dernier n'infirme pas ce constat en se bornant à indiquer, sans l'établir, que les conditions de délivrance des actes d'état civil et du jugement supplétif qu'il produit sont compatibles avec la législation malienne, que le passeport qui lui a été délivré justifie à lui seul sa date de naissance alors pourtant que ce passeport n'a été délivré que sur la base des faux documents précités et qu'il a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance. Dans ces conditions, le préfet du Tarn apporte la preuve que M. A... ne pouvait être regardé comme mineur lorsqu'il a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance et pouvait donc, pour ce seul motif, sans examiner le critère tenant au caractère réel et sérieux du suivi de la formation, refuser de délivrer à l'intéressé un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". En application de ces stipulations, il appartient à l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France d'apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
7. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., célibataire et sans enfant qui ne résidait en France que depuis 2 ans à la date de l'arrêté attaqué, n'établit pas qu'il est isolé dans son pays d'origine. La circonstance qu'il ait été pris en charge en charge à son arrivée en France par les services de l'aide sociale, au demeurant sur la base d'une fausse déclaration de minorité, que son contrat d'accueil provisoire jeune majeur ait été renouvelé jusqu'au 1er septembre 2020 et qu'il poursuive réellement et sérieusement des études en vue de la délivrance d'un CAP " installateur thermique " n'est pas de nature à démontrer, eu égard à ses conditions de séjour, que l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'il soit entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'il emporte sur sa situation personnelle.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Moussa A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Tarn.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme E... C..., présidente,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. F... G..., premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 janvier 2021.
La présidente
Evelyne C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX01842