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03/10/2024 | FRANCE | N°22BX01757

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 03 octobre 2024, 22BX01757


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme C... et D... E... ont demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler la décision implicite par laquelle la collectivité de Saint-Barthélemy a rejeté leur demande tendant à ce qu'il soit constaté la caducité du permis de construire n° PC 9711231600141 dont la société Sireto est titulaire sur la parcelle AH 923 à Anse les Cayes à Saint-Barthélemy.



Par un jugement n°2100005 du 17 mai 2022, le tribunal administratif de Saint-

Barthélemy a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... et D... E... ont demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler la décision implicite par laquelle la collectivité de Saint-Barthélemy a rejeté leur demande tendant à ce qu'il soit constaté la caducité du permis de construire n° PC 9711231600141 dont la société Sireto est titulaire sur la parcelle AH 923 à Anse les Cayes à Saint-Barthélemy.

Par un jugement n°2100005 du 17 mai 2022, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 juin 2022, M. et Mme E..., représentés par Me Cheneval, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Saint-Barthélemy du 17 mai 2022 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle la collectivité de Saint-Barthélemy a rejeté leur demande tendant à ce qu'il soit constaté la caducité du permis de construire n° PC 9711231600141 ;

3°) d'enjoindre à la collectivité de Saint-Barthélemy de réexaminer leur demande et de constater la péremption du permis de construire n° PC 9711231600141 ;

4°) de mettre à la charge de la collectivité de Saint-Barthélemy une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les seuls travaux de débroussaillage de la parcelle et de reprofilage de la roche ne sauraient, à eux seuls, être suffisants pour interrompre le délai de péremption du permis de construire litigieux ;

- la parcelle cadastrée AH n°923 ne présente pas de caractéristiques topographiques ou géographiques particulières ; les travaux entrepris sur la parcelle cadastrée section AH n°923, à supposer qu'ils aient été suffisants pour constituer un commencement de travaux, ont été interrompus pendant un délai supérieur à un an.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2022, la SA Sireto, représentée par Me Ladaoui, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 mars 2023, la collectivité de Saint-Barthélemy, représentée par Me Destarac, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable, dès lors que la demande de M. et Mme E... devant le tribunal administratif de Saint-Barthélemy était elle-même irrecevable faute d'être dirigée contre une décision ; les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite par laquelle la collectivité de Saint-Barthélemy aurait refusé de constater la péremption du permis de construire accordé le 18 août 2016, présentées dans un mémoire du 9 décembre 2021, sont tardives ; si dans un mémoire présenté le 9 avril 2021, M. et Mme E... ont demandé au tribunal de constater la caducité du permis de construire délivré sur la parcelle cadastrée section AH n°923, de telles conclusions tendant à ce que le juge administratif constate directement la caducité d'une autorisation d'urbanisme sont également irrecevables et n'ont, en tout état de cause, pas été reprises dans la requête d'appel ;

- le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier au motif qu'il serait entaché d'une erreur de droit quant à la computation du délai de péremption du permis de construire litigieux est inopérant et, en tout état de cause, n'est pas fondé ;

- il incombe à celui qui sollicite la constatation de la péremption d'un permis de construire

de rapporter la preuve matérielle et datée d'une absence de travaux dans les délais prévus par la réglementation applicable ;

- les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 12 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 13 juillet 2023 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo,

- les conclusions de M. Michaël Kauffmann, rapporteur public,

- et les observations de Me Cheneval, représentant M. et Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 7 juillet 2016, le conseil exécutif de Saint-Barthélemy a accordé à M. A... B... un permis de construire sur les parcelles cadastrées section AH n°922 et 1054 en vue de l'édification d'une villa de cinq chambres avec piscine, dénommée " villa Marcel ". Par une délibération du 18 août 2016, le conseil exécutif de Saint-Barthélemy a accordé à la SARL Eole Caraïbe Charter, représentée par M. A... B..., un permis de construire sur la parcelle cadastrée section AH n° 923, voisine de la parcelle AH 922, en vue de l'édification d'une villa de location de trois chambres avec piscine, dénommée " Villa Edith ". Par deux délibérations du 1er mars 2018, le conseil exécutif de Saint-Barthélemy a transféré les permis de construire délivrés les 7 juillet et 18 août 2016 à la société anonyme (SA) Sireto. Par un jugement du 17 mai 2022, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté la requête de M. et Mme E..., formée en leur qualité de voisins immédiats de la parcelle AH n° 923, aux fins d'annulation de la décision par laquelle la collectivité de Saint-Barthélemy a implicitement rejeté leur demande tendant à ce qu'il soit constaté la caducité du permis de construire délivré le 18 août 2016. Par la présente requête, M. et Mme E... relèvent appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 82 de l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy, applicable lors de la délivrance du permis de construire n° PC 9711236000141 en date du 18 août 2016 et demeurant applicable aux autorisations d'urbanisme déposées avant le 1er juillet 2019 conformément à l'article 5 de la délibération n°2019-012 CT du 13 mars 2019 : " Le permis de construire est périmé si les constructions ne sont pas entreprises dans le délai de deux ans à compter de la notification visée à l'article 81 ou de la délivrance tacite du permis de construire. Il en est de même si les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. ". En vertu de l'article 6 de la délibération 2017-079 CT du 11 décembre 2017 prise suite à l'ouragan Irma, la durée de validité des permis en cours de validité le 5 septembre 2017 a été prorogé de six mois. Il en résulte qu'en application des dispositions précitées, le permis de construire n° PC 9711236000141 délivré le 18 août 2016, et notifié au pétitionnaire le 16 septembre 2016, perdait sa validité le 17 mars 2019.

3. D'une part, la société Sireto produit deux factures de la société SN SBTBP datées des 30 septembre et 18 octobre 2018 concernant divers travaux réalisés sur la parcelle de la villa Edith, à savoir des travaux de terrassement pour démolition de roche, d'établissement des remblais sur les ouvrages (400m3), d'évacuation des remblais (800m3), et d'enrochement sur les jardins, étant précisé que ces factures indiquent que le terrassement en pleine masse pour plateforme a concerné 1325 m3. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des photographies produites par les appelants, que les travaux réalisés avant le 17 mars 2019 n'étaient que de simples travaux de débroussaillage de la parcelle et de reprofilage de la roche. Au contraire, ces photographies témoignent de travaux de démolition de la roche et de terrassement sur la parcelle AH 923, relativement conséquents. Dans ces conditions, et en dépit de l'absence de travaux de fondation, de ferraillage et de dallage avant le 17 mars 2019, les seuls travaux de démolition de la roche et de remblais sur la parcelle cadastrée section AH n°923 étaient suffisamment significatifs pour permettre d'interrompre le délai de caducité du permis de construire accordé.

4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier et en particulier des factures produites que la société SN SBTBP a procédé, entre les mois de mai et octobre 2019, à un perçage de la roche au compresseur, à une démolition de la roche à la pelle mécanique ainsi qu'au chargement et à l'évacuation de remblais. Il ressort également des pièces du dossier, que moins d'un an plus tard, entre les mois de juillet et novembre 2020, la société BTC, nouvellement chargée des travaux, a continué le terrassement et le percement de la roche pour la villa Edith. A ce titre, si M. et Mme E... font état d'un stockage de terres sur la parcelle cadastrée section AH n°923, provenant des travaux effectués sur une villa voisine entre les mois de juin 2019 et novembre 2020, cette seule circonstance n'est pas de nature à établir que des travaux de percement des roches ou de terrassement sur la parcelle litigieuse n'auraient techniquement pas pu être réalisés entre les mois de juillet et novembre 2020. D'ailleurs, l'attestation produite par les requérants émanant de la société MISB du 17 février 2021, qui évoque des retards importants, précise qu'" à aucun moment, le chantier de la villa Edith n'a été complètement stoppé ". Cette situation est confirmée par un constat d'huissier réalisé à la demande de la société Sireto le 11 février 2021, qui indique que " les travaux de terrassement sont visiblement bien avancés ", " que les mesures d'excavation sont en cours et se poursuivent " et " que plusieurs ouvriers sont présents ". Dans ces conditions, les travaux en cours sur la parcelle cadastrée section AH n°923 ne peuvent être regardés comme ayant été interrompus pendant un délai supérieur à une année.

5. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 4 que le permis de construire délivré à la société Sireto ne s'est pas trouvé frappé de péremption.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la collectivité de Saint-Barthélemy, que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté leur demande à fin d'annulation. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la collectivité de Saint-Barthélemy, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme E... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. et Mme E... le versement d'une somme de 1 000 euros à verser à la collectivité de Saint-Barthélemy et d'une somme du même montant à la SA Sireto, en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme E... verseront la somme de 1 000 euros à la collectivité de Saint-Barthélemy et la somme de 1 000 euros à la société Sireto au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et Mme D... E..., à la société anonyme Sireto et à la collectivité de Saint-Barthélemy.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,

Mme Kolia Gallier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2024.

La rapporteure,

Béatrice Molina-Andréo

La présidente,

Evelyne Balzamo

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet de Saint-Barthélémy et de Saint-Martin en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX01757


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01757
Date de la décision : 03/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Béatrice MOLINA-ANDREO
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : SELARL CLOIX & MENDES-GIL

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-03;22bx01757 ?
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