Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... et D... B... ont demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler l'arrêté du 15 avril 2021 par lequel le maire de Saint-Joseph les a mis en demeure d'interrompre immédiatement des travaux réalisés en infraction, sur la parcelle cadastrée section C n°152, sur le fondement de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme.
Par un jugement n°2100382 du 12 mai 2022, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 août 2022 et 16 octobre 2023, M. et Mme B..., représentés par Me Rouget, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 12 mai 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Saint-Joseph du 15 avril 2021 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Joseph une somme de 1 500 euros à verser à leur conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Ils soutiennent que :
- ils ont reçu le courrier du maire de Saint-Joseph le 12 avril 2021 et disposaient d'un délai de cinq jours pour présenter leurs observations, soit jusqu'au 17 avril 2021 ; le tribunal a donc commis une erreur en écartant comme inopérant le moyen tiré de la méconnaissance du principe de contradictoire alors que la commune de Saint-Joseph a reconnu lors de l'audience au tribunal administratif avoir reçu les observations des consorts B... avant le 17 avril 2021 ;
- dans la mesure où ils n'ont pas été mis en mesure de se prononcer sur l'arrêté que le maire de la commune de Saint-Joseph envisageait d'édicter, cet arrêté est entaché d'un vice de procédure ; ils ont à ce titre été privés d'une garantie ;
- il est insuffisamment motivé ;
- cet arrêté, en tant qu'il indique qu'ils n'ont pas présenté leurs observations en réponse au courrier du 24 mars 2021, est entaché d'une erreur de fait ;
- les travaux effectués par M. B... ont bien été des travaux d'urgence qui ont permis de garantir la sécurité des biens et des personnes.
Par des mémoires, enregistrés les 15 juillet et 23 août 2023, la commune de Saint-Joseph, représentée par Me Especel, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2500 euros soit mise à la charge de M. et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;
- par un jugement du 9 mai 2023 du tribunal correctionnel de Fort-de-France, M. B... a été condamné au paiement d'une amende et à la remise en conformité des lieux dans un délai d'un an sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 17 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 12 décembre 2023.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 juillet 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo,
- les conclusions de M. Michaël Kauffmann, rapporteur public,
- et les observations de Me Rouget, représentant M. et Mme B... et C..., représentant la commune de Saint-Joseph.
Considérant ce qui suit :
1. Par procès-verbal du 3 mars 2021, des agents de la direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DEAL) de la Martinique ont constaté, sur la parcelle cadastrée section C n°142 située quartier Rivière Monsieur, sur le territoire de la commune de Saint-Joseph (Martinique), des travaux sur deux bâtiments distincts, non autorisés par un permis de construire, et réalisés en infraction avec les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) et du plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN) au regard, respectivement, de la situation de la parcelle en zone naturelle (N2) du PLU où ce type de construction est interdit, et en zone " orange bleu " du PPRN correspondant à une exposition de niveau fort à l'aléa de mouvement de terrain où une étude de sol aurait dû être réalisée. Par un arrêté du 15 avril 2021, pris sur le fondement de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme, le maire de Saint-Joseph a mis en demeure M. et Mme B... d'interrompre immédiatement les travaux entrepris. Par un jugement du 12 mai 2022, dont M. et Mme B... relèvent appel, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme : " Les infractions aux dispositions des titres Ier, II, III, IV et VI du présent livre sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l'Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l'urbanisme suivant l'autorité dont ils relèvent et assermentés. Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu'à preuve du contraire. / (...) Lorsque l'autorité administrative et, au cas où il est compétent pour délivrer les autorisations, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ont connaissance d'une infraction de la nature de celles que prévoient les articles L. 480-4 et L. 610-1, ils sont tenus d'en faire dresser procès-verbal. / Copie du procès-verbal constatant une infraction est transmise sans délai au ministère public. (...) ". Aux termes de l'alinéa 10 de l'article L. 480-2 du même code : " Dans le cas de constructions sans permis de construire ou d'aménagement sans permis d'aménager, ou de constructions ou d'aménagement poursuivis malgré une décision de la juridiction administrative suspendant le permis de construire ou le permis d'aménager, le maire prescrira par arrêté l'interruption des travaux ainsi que, le cas échéant, l'exécution, aux frais du constructeur, des mesures nécessaires à la sécurité des personnes ou des biens ; copie de l'arrêté du maire est transmise sans délai au ministère public. Dans tous les cas où il n'y serait pas pourvu par le maire et après une mise en demeure adressée à celui-ci et restée sans résultat à l'expiration d'un délai de vingt-quatre heures, le représentant de l'Etat dans le département prescrira ces mesures et l'interruption des travaux par un arrêté dont copie sera transmise sans délai au ministère public. ".
3. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'il a connaissance d'une infraction résultant de l'exécution de travaux en l'absence du permis ou de la déclaration requise, le maire est tenu de dresser un procès-verbal et de prescrire par arrêté l'interruption des travaux en cours.
4. Il ressort du procès-verbal dressé le 3 mars 2021 à la suite de la visite sur place d'agents de la DEAL de la Martinique, et n'est pas contesté par les requérants, que les travaux entrepris par M. et Mme B... sur la parcelle cadastrée section C n°142 de la commune de Saint-Joseph, qui consistent notamment en des travaux de construction d'un bâtiment de trois niveaux, des fouilles pour une piscine, et l'édification d'un mur de soutènement, n'ont fait l'objet d'aucune autorisation ou déclaration préalable au titre du code de l'urbanisme. Il ressort également de ce procès-verbal, qui constate la présence d'une bétonnière et de sable pour les travaux de chantier en cours, que lesdits travaux n'étaient pas terminés à la date de l'arrêté attaqué. Par application des dispositions précitées du code de l'urbanisme, le maire de Saint-Jospeh était dès lors tenu d'en prescrire l'interruption. Par suite, les moyens soulevés par les requérants, tirés de ce que l'arrêté du 15 avril 2021 ne serait pas suffisamment motivé et n'aurait pas été précédé d'une procédure contradictoire préalable, en méconnaissance des articles L. 121-2 et L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, sont inopérants. La circonstance, à la supposer établie, que l'arrêté contesté indique à tort que les requérants n'ont pas fait suite au courrier de demande d'observations du 24 mars 2021 n'a pas davantage d'incidence sur la légalité de cet arrêté, qui est uniquement fondé sur la constatation de la réalisation de travaux sans obtention d'un permis de construire.
5. En second lieu, la circonstance alléguée par M. et Mme B... selon laquelle les travaux ont été effectués en urgence afin de garantir la sécurité des biens et des personnes ne les dispensaient pas de solliciter un permis de construire auprès de la commune de Saint-Joseph. Par suite, ce moyen est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Joseph, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme B... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. et Mme B... le versement à la commune de Saint-Joseph de la somme qu'elle demande sur le fondement de ces dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Joseph tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Mme D... B..., à la commune de Saint-Joseph et au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Fort-de-France et au préfet de la Martinique.
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
Mme Molina-Andreo, présidente-assesseure,
Mme Kolia Gallier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.
La rapporteure,
Béatrice Molina-Andréo
La présidente,
Evelyne Balzamo
La greffière,
Séphanie Larrue
La République mande et ordonne au préfet de la Martinique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 22BX02230