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19/12/2024 | FRANCE | N°23BX02283

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 19 décembre 2024, 23BX02283


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SAS Nenistan Archi a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 22 mars 2021 par lequel le maire de Bruges a refusé de lui délivrer un permis de construire pour l'édification d'un ensemble de dix-neuf logements après démolition d'une maison individuelle sur la parcelle cadastrée section BI n° 24 située 3-5 allée du Bocage sur le territoire de cette commune.



Par un jugement n° 2102493 du 5 juillet 2023, le tribunal administ

ratif de Bordeaux a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requê...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Nenistan Archi a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 22 mars 2021 par lequel le maire de Bruges a refusé de lui délivrer un permis de construire pour l'édification d'un ensemble de dix-neuf logements après démolition d'une maison individuelle sur la parcelle cadastrée section BI n° 24 située 3-5 allée du Bocage sur le territoire de cette commune.

Par un jugement n° 2102493 du 5 juillet 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 août 2023, la SAS Nenistan Archi, représentée par

Me Franceschini, doit être regardée comme demandant à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Bruges du 22 mars 2021 :

3°) d'enjoindre au maire de Bruges de lui délivrer le permis de construire sollicité sans délai à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bruges une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que cinq des six motifs de l'arrêté attaqué sont illégaux ;

- en revanche, le tribunal a dénaturé le moyen soulevé et commis une erreur de droit en retenant que l'arrêté du 22 mars 2021 opposait à bon droit un motif tiré de ce que le projet ne permettrait pas l'évacuation des eaux pluviales conformément aux dispositions de l'article 3.3.2.1 du règlement de la zone UM8 du plan local d'urbanisme ; le projet prévoit une solution de rejet gravitaire des eaux de pluies vers le réseau d'eaux pluviales avec une profondeur suffisante et une pente de 1%, qui est supérieure à la pente recommandée par le document technique unique 60-11 ; en outre, un réseau d'eaux usées est situé au droit du terrain d'assiette du projet ce qui démontre la possibilité d'étendre sur ce même secteur un réseau d'évacuation des eaux pluviales contrairement à ce qu'a retenu la commune ; à supposer que la commune ne souhaite pas procéder à l'extension du réseau d'évacuation des eaux pluviales, la société pétitionnaire aurait pu solliciter et obtenir du maire de la commune la réalisation de cette extension à ses frais, comme le prévoit l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme ; subsidiairement, le règlement du plan local d'urbanisme prévoit également la possibilité de rejeter les eaux pluviales dans un collecteur unitaire si la voie en est pourvue, dispositif existant sur la maison individuelle à démolir sur le terrain d'assiette du projet, solution qui ne nécessiterait donc aucun branchement supplémentaire.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 septembre 2024, la commune de Bruges, représentée par Me Noel, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire à l'annulation du jugement en ce qu'il a jugé illégaux certains des motifs de l'arrêté litigieux et, en toute hypothèse, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SAS Nenistan Archi au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que le projet méconnaît les dispositions de l'article 3.3.2.1 du règlement de la zone UM8 du plan local d'urbanisme ; la société pétitionnaire n'a pas présenté de solution de gestion des eaux pluviales alors que le texte prévoit une obligation à cet égard pour les projets entrainant l'imperméabilisation d'une surface supérieure à 100 m2 ; le terrain d'assiette du projet n'est pas desservi par un réseau de collecte des eaux pluviales ; l'étude hydrologique fournie au soutien de la demande de permis de construire indique à tort que l'allée du Bocage est desservie par un réseau de collecte communautaire des eaux pluviales et que les eaux pluviales stockées sur le terrain pourront être restituées à un tel réseau ; la pente de 1% dont se prévaut la société pétitionnaire pour raccorder son terrain au réseau de collecte des eaux pluviales est techniquement insuffisante ; ainsi que l'a retenu à bon droit le tribunal, la commune n'a pas l'obligation d'étendre son réseau de collecte des eaux pluviales jusqu'au terrain d'assiette du projet ; il appartenait, le cas échéant, à la société pétitionnaire de proposer de prendre en charge le cout de l'extension de ce réseau sur le fondement des dispositions de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu que les autres motifs de l'arrêté du

22 mars 2021 étaient illégaux.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par la commune tendant à ce que la cour annule le jugement en ce qu'il a retenu l'illégalité de certains des motifs de l'arrêté litigieux, la commune n'ayant pas intérêt à critiquer les motifs du jugement qui, par son dispositif, fait intégralement droit à ses conclusions tendant au rejet de la demande présentée par la SAS Nenistan Archi.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Kolia Gallier Kerjean,

- les conclusions de M. Michaël Kauffmann, rapporteur public,

- et les observations de Me Franceschini représentant la société Nesnistan Archi et de Me Deyris, représentant la commune de Bruges.

Une note en délibéré et des pièces nouvelles présentées par la société Nenistan Archi ont été enregistrées le 12 décembre 2024.

Considérant ce qui suit :

1. La société Nenistan Archi a demandé au tribunal d'annuler l'arrêté du 22 mars 2021 par lequel le maire de Bruges a refusé de lui délivrer un permis de construire pour l'édification d'un ensemble de dix-neuf logements après démolition d'une maison individuelle sur la parcelle cadastrée section BI n° 24 située 3-5 allée du Bocage sur le territoire de cette commune. Elle relève appel du jugement du 5 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur la recevabilité des conclusions présentées par la commune :

2. Les appels formés contre les jugements des tribunaux administratifs ne peuvent tendre qu'à l'annulation ou à la réformation du dispositif du jugement attaqué. Par suite, n'est pas recevable, quels que soient les motifs retenus par les premiers juges, l'appel dirigé contre un jugement qui, par son dispositif, fait intégralement droit aux conclusions de la demande qu'avait présentée l'appelant en première instance.

3. Le jugement attaqué fait intégralement droit aux conclusions présentées par la commune de Bruges devant les premiers juges tendant au rejet des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 22 mars 2021 présentées par la société Nenistan Archi. Par suite, les conclusions à fin d'appel incident présentées par la commune, qui sont dirigées non contre le dispositif du jugement attaqué mais contre ses motifs, ne sont pas recevables.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 22 mars 2021 :

4. En premier lieu, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. La société requérante ne peut donc utilement soutenir que les premiers juges auraient commis une erreur de droit ou dénaturé l'un des moyens soulevés pour demander l'annulation du jugement attaqué.

5. En second lieu, aux termes de l'article 3.3.2.1 du règlement de la zone UM8 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole, relatif aux généralités concernant les eaux pluviales : " Tout terrain doit être aménagé avec des dispositifs permettant l'évacuation qualitative et quantitative des eaux pluviales. Ils doivent être adaptés à la topographie, à la nature du sous-sol et aux caractéristiques des constructions. / Sous réserve des autorisations réglementaires éventuellement nécessaires, les eaux pluviales doivent préférentiellement rejoindre directement le milieu naturel (par infiltration dans le sol ou rejet direct dans les eaux superficielles). / A défaut, les eaux pluviales peuvent être rejetées gravitairement, suivant le cas, et par ordre de préférence, au caniveau, au fossé, dans un collecteur d'eaux pluviales ou un collecteur unitaire si la voie en est pourvue. / Dans tous les cas, l'utilisation d'un système de pompage est proscrite à l'exception des pompes de reprise des rampes d'accès aux parkings souterrains. / Pour les constructions nouvelles et les extensions, dès lors que la surface imperméabilisée projetée est supérieure à 100 m², le projet présentera obligatoirement la solution retenue pour la gestion des eaux pluviales. Dans le cas d'un rejet final au caniveau, au fossé, dans un collecteur d'eaux pluviales ou un collecteur unitaire si la voie en est pourvue, le débit rejeté est plafonné à

3 l/s/ha. / D'un point de vue qualitatif, les caractéristiques des eaux pluviales doivent être compatibles avec le milieu récepteur. La mise en place d'ouvrages de prétraitement de type dégrilleurs, dessableurs ou déshuileurs peut être imposée pour certains usages autres que domestiques. Les techniques à mettre en œuvre doivent être conformes aux règles de l'art et à la réglementation en vigueur. / Les branchements au réseau collectif d'assainissement des eaux pluviales, dès lors qu'il existe, doivent être effectués conformément à la réglementation en vigueur ".

6. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'étude hydrogéologique pour l'assainissement des eaux pluviales fournie par la société pétitionnaire au soutien de sa demande de permis, qui est le seul élément relatif à la gestion des eaux pluviales, que le projet prévoit, faute de pouvoir envisager une infiltration des eaux pluviales dans le terrain d'assiette, un stockage des eaux de pluie dans un ouvrage de rétention avant leur restitution, à l'aide d'un ouvrage de régulation, dans le réseau de collecte communautaire des eaux pluviales. Toutefois, l'arrêté litigieux mentionne que cette étude hydrogéologique conclut à tort à l'existence d'un réseau communautaire de collecte des eaux pluviales au droit du terrain, la commune précisant que le réseau collectif d'évacuation des eaux pluviales est distant d'une vingtaine de mètres du terrain d'assiette du projet.

7. La société pétitionnaire, qui ne conteste plus sérieusement en appel que ce réseau collectif d'évacuation des eaux pluviales ne dessert pas le terrain d'assiette de son projet, soutient qu'à défaut pour la commune de procéder elle-même à l'extension du réseau nécessaire, elle pouvait prendre en charge le coût d'une telle opération selon les modalités prévues à l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme. Elle ne saurait toutefois reprocher utilement à la commune de ne pas avoir d'elle-même envisagé ces alternatives qui n'étaient pas présentées dans le dossier de la demande qui faisait état, à tort, de l'existence d'un réseau de collecte communautaire des eaux pluviales permettant de recueillir les eaux pluviales au droit du terrain d'assiette du projet.

8. Par ailleurs, la société pétitionnaire soutient que la collecte des eaux pluviales du terrain d'assiette du projet pourrait également être assurée par un collecteur unitaire dont elle indique qu'il desservirait le terrain concerné. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est desservi par un réseau de collecte des eaux usées auquel est raccordée la maison individuelle existante, aucun élément au dossier ne permet de retenir que ce réseau collecterait également les eaux pluviales. En outre, une telle solution de raccordement à un réseau unitaire n'ayant pas été présentée par la société pétitionnaire dans sa demande de permis, il n'appartenait pas à la commune de l'envisager d'office. Par suite, c'est à bon droit que la commune a retenu que le projet méconnaissait les dispositions précitées de l'article 3.3.2.1 du règlement de la zone UM8 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole, ainsi que l'ont retenu les premiers juges.

9. Il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée en toutes ses conclusions. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Nenistan Archi une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Bruges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Nenistan Archi est rejetée.

Article 2 : La société Nenistan Archi versera à la commune de Bruges la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Nenistan Archi et à la commune de Bruges.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,

Mme Kolia Gallier Kerjean, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2024.

La rapporteure,

Kolia Gallier KerjeanLa présidente,

Evelyne Balzamo

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23BX02283 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23BX02283
Date de la décision : 19/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : NOEL

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-19;23bx02283 ?
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