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06/02/2025 | FRANCE | N°23BX02533

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 6ème chambre, 06 février 2025, 23BX02533


Vu la procédure suivante :



Procédures contentieuses antérieures :



I°) La société civile immobilière (SCI) Immo Toulouse a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du directeur de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Midi-Pyrénées ayant implicitement refusé de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises cinq sociétés de droit étranger à l'adresse d'un local dont elle est propriétaire,

8 impasse Jean Prouvé à Aucamville

(Haute-Garonne), et d'enjoindre à l'URSSAF de procéder aux diligences nécessaires pour faire cesser ...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

I°) La société civile immobilière (SCI) Immo Toulouse a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du directeur de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Midi-Pyrénées ayant implicitement refusé de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises cinq sociétés de droit étranger à l'adresse d'un local dont elle est propriétaire,

8 impasse Jean Prouvé à Aucamville (Haute-Garonne), et d'enjoindre à l'URSSAF de procéder aux diligences nécessaires pour faire cesser cette inscription.

Par une ordonnance n° 2104148 du 18 octobre 2021, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté la requête comme présentée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

II°) M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du directeur de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Midi-Pyrénées ayant implicitement refusé de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises sept sociétés de droit étranger à l'adresse d'un local dont il est propriétaire, 8 rue d'Alsace à Mazamet (Tarn), et d'enjoindre à l'URSSAF de procéder aux diligences nécessaires pour faire cesser cette inscription.

Par une ordonnance n° 2104147 du 18 octobre 2021, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté la requête comme présentée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Procédures initiales devant la cour :

I°) Par une requête, enregistrée le 16 novembre 2021, la SCI Immo Toulouse, représentée par Me Thalamas, a demandé à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2104148 du 18 octobre 2021 du président de la

2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision du directeur de l'URSSAF Midi-Pyrénées ayant implicitement refusé de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises cinq sociétés au 8 impasse Jean Prouvé à Aucamville ;

3°) d'enjoindre à l'URSSAF de procéder aux diligences nécessaires pour faire cesser cette inscription ;

4°) de mettre à la charge de l'URSSAF une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative est compétente pour connaître de son recours ; la Cour de cassation a décliné la compétence de la juridiction judiciaire dans un litige similaire ;

- les motifs de la décision contestée ne lui ont pas été communiqués malgré sa demande ; la décision est ainsi affectée d'un défaut de motivation en méconnaissance de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la décision porte atteinte à son droit de propriété ; le bâtiment lui appartenant, qu'elle a donné à bail à une société commerciale, sert de domiciliation à d'autres sociétés qui lui sont inconnues, sans qu'elle ait été préalablement consultée ; le répertoire des entreprises étant en accès libre, cette inscription induit le risque d'une association de sa propriété à des sociétés de droit étranger ; cette atteinte à son droit de propriété n'est pas justifiée.

Par une ordonnance n° 21BX04226 du 7 décembre 2021, la présidente de la

2ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé l'ordonnance

n° 2104148 du 18 octobre 2021 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse et, statuant par la voie de l'évocation, a rejeté la demande présentée par la SCI Immo Toulouse devant le tribunal administratif de Toulouse et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II°) Par une requête enregistrée le 16 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Thalamas, a demandé à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2104147 du 18 octobre 2021 du président de la

2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision du directeur de l'URSSAF Midi-Pyrénées ayant implicitement refusé de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises sept sociétés au 8 rue d'Alsace à Mazamet ;

3°) d'enjoindre à l'URSSAF de procéder aux diligences nécessaires pour faire cesser cette inscription ;

4°) de mettre à la charge de l'URSSAF une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la juridiction administrative est compétente pour connaître de son recours ; la Cour de cassation a décliné la compétence de la juridiction judiciaire dans un litige similaire ;

- les motifs de la décision contestée ne lui ont pas été communiqués malgré sa demande ; la décision est ainsi affectée d'un défaut de motivation en méconnaissance de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la décision porte atteinte à son droit de propriété ; le bâtiment lui appartenant sert de domiciliation à des sociétés qui lui sont inconnues, sans qu'il ait été préalablement consulté ; le répertoire des entreprises étant en accès libre, cette inscription induit le risque d'une association de sa propriété à des sociétés de droit étranger ; cette atteinte à son droit de propriété n'est pas justifiée.

Par une ordonnance n° 21BX04227 du 7 décembre 2021, la présidente de la

2ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé l'ordonnance

n° 2104147 du 18 octobre 2021 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse et, statuant par la voie de l'évocation, a rejeté la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une décision n os 461138, 461139 du 4 octobre 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi de la SCI Immo Toulouse et d'un pourvoi de M. B..., après avoir joint les deux affaires, a annulé les ordonnances n° 21BX04226 et n° 21BX04227 du 7 décembre 2021 de la présidente de la 2ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux et a renvoyé les deux affaires devant la cour.

Procédure devant la cour après renvoi du Conseil d'Etat :

Par des mémoires enregistrés le 18 janvier 2024 et le 18 juillet 2024 sous le n° 23BX02533, la SCI Immo Toulouse, représentée par Me Thalamas, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2104148 du 18 octobre 2021 du président de la

2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision emportant domiciliation d'office de sociétés de droit étranger ainsi que la décision du directeur de l'URSSAF Midi-Pyrénées ayant implicitement refusé de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises cinq sociétés au 8 impasse Jean Prouvé à Aucamville ;

3°) d'enjoindre à l'URSSAF de procéder aux diligences nécessaires pour faire cesser cette inscription ;

4°) de mettre à la charge de l'URSSAF une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative est compétente pour connaître de son recours ; dans une affaire similaire, la Cour de cassation a retenu que la juridiction judiciaire était incompétente pour statuer sur cette action ;

- les motifs de la décision contestée ne lui ont pas été communiqués malgré sa demande ; la décision est ainsi affectée d'un défaut de motivation en méconnaissance de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la décision porte atteinte à son droit de propriété ; le bâtiment lui appartenant, qu'elle a donné à bail à une société commerciale, sert de domiciliation à d'autres sociétés qui lui sont inconnues, sans qu'elle ait été préalablement consultée ; le répertoire des entreprises étant en accès libre, cette inscription induit le risque d'une association de sa propriété à des sociétés de droit étranger ; cette atteinte à son droit de propriété n'est pas justifiée ;

- ces domiciliations d'office sont entachées d'une erreur de fait et d'une erreur de droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juillet 2024, le directeur de l'URSSAF Midi- Pyrénées, représenté par Me Lefrançois, conclut à l'annulation de l'ordonnance du tribunal administratif de Toulouse n° 2104148 du 18 octobre 2021, au rejet de la demande de la SCI Immo Toulouse et à ce que soit mis à la charge de cette dernière, les dépens et une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la décision de domiciliation en litige ne lui cause aucun préjudice et n'a aucune incidence sur son droit de propriété ; la domiciliation de la société est obligatoire et constitue un préalable indispensable avant l'immatriculation ; l'URSSAF a été dans l'obligation d'immatriculer ces sociétés, l'article R.123-220 et suivants du code de commerce impliquant l'inscription obligatoire au répertoire des entreprises des personnes morales qui exercent une activité en France quelle que soit leur nationalité ;

- ces sociétés domiciliées d'office sont des sous-traitantes de la société Transports Logistique Internationale Groupage Affrètement qui a pris à bail le bien appartenant à la société requérante ; cette domiciliation d'office ne s'est pas faite au hasard et ne relève pas d'une erreur de fait.

Par un mémoire, enregistré le 18 janvier 2024, M. B..., représenté par Me Thalamas, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 18 octobre 2021 n° 2104147 du président de la

2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision emportant domiciliation d'office de sociétés de droit étranger ainsi que la décision du directeur de l'URSSAF Midi-Pyrénées ayant implicitement refusé de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises sept sociétés au 8 rue d'Alsace à Mazamet ;

3°) d'enjoindre à l'URSSAF de procéder aux diligences nécessaires pour faire cesser cette inscription ;

4°) de mettre à la charge de l'URSSAF une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la juridiction administrative est compétente pour connaître de son recours ; dans une affaire similaire, la Cour de cassation a retenu que la juridiction judiciaire était incompétente pour statuer sur cette action ;

- les motifs de la décision contestée ne lui ont pas été communiqués malgré sa demande ; la décision est ainsi affectée d'un défaut de motivation en méconnaissance de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la décision porte atteinte à son droit de propriété ; le bâtiment lui appartenant sert de domiciliation à des sociétés qui lui sont inconnues, sans qu'il ait été préalablement consulté ni qu'il ait donné son accord ; le répertoire des entreprises étant en accès libre, cette inscription induit le risque d'une association de sa propriété à des sociétés de droit étranger ; cette atteinte à son droit de propriété n'est pas justifiée ; ces sociétés semblent être en délicatesse avec l'URSSAF et son image risque d'être associée à ces sociétés ;

- ces domiciliations d'office sont entachées d'une erreur de fait et d'une erreur de droit.

Par une ordonnance du 17 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au

17 août 2024 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, et notamment son Préambule ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de commerce ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caroline Gaillard,

- les conclusions de M. Anthony Duplan, rapporteur public,

- et les observations de Me Thalamas, représentant la SCI Immo Toulouse et

M. B....

Considérant ce qui suit :

1 . D'une part, la société civile immobilière (SCI) Immo Toulouse a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le refus implicite du directeur de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Midi-Pyrénées de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises cinq sociétés de droit étranger en les domiciliant au 8 impasse Jean Prouvé à Aucamville (Haute-Garonne), soit à l'adresse du bâtiment dont elle est propriétaire et qu'elle donne en location par bail commercial à la société Transports Logistique Internationale Groupage Affrètement (LIGA), et d'enjoindre à l'URSSAF de procéder aux diligences nécessaires pour faire cesser cette inscription. Elle a relevé appel de l'ordonnance n° 2104148 du 18 octobre 2021 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, sur le fondement des dispositions du 2° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

2. D'autre part, M. B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le refus implicite du directeur de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocation familiales (URSSAF) Midi-Pyrénées de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises sept sociétés de droit étranger en les domiciliant au 8 rue d'Alsace à Mazamet (Tarn), soit à l'adresse du bâtiment dont il est propriétaire et qu'il donne en location par bail commercial à la société Trans Inter Sud-Ouest de Fret (TISOF), et d'enjoindre à l'URSSAF de procéder aux diligences nécessaires pour faire cesser cette inscription. Il a relevé appel de l'ordonnance n° 2104147 du 18 octobre 2021 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, sur le fondement des dispositions du 2° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

3. Par deux ordonnances n° 21BX04226 et n° 21BX04227 du 7 décembre 2021, la présidente de la 2ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé les ordonnances n° 2104147 et 2104148 du 18 octobre 2021 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse puis, statuant par la voie de l'évocation, a rejeté les demandes présentées par la SCI Immo Toulouse et par M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse en faisant application du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Par une décision nos 461138, 461139 du 4 octobre 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi de la SCI Immo Toulouse et d'un pourvoi de

M. B..., après avoir joint les deux affaires, a annulé pour irrégularité les ordonnances n° 21BX04226 et n° 21BX04227 du 7 décembre 2021 de la présidente de la 2ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux et a renvoyé les deux affaires, qu'il y a lieu de joindre, devant la cour.

Sur la régularité des ordonnances n° 2104147 et n° 2104148 du 18 octobre 2021 :

4. Aux termes de l'article R. 123-220 du code de commerce, dans sa rédaction applicable à la date des décisions attaquées : " L'Institut national de la statistique et des études économiques est chargé de tenir un répertoire national des personnes physiques exerçant de manière indépendante une profession non salariée, des personnes morales de droit public ou de droit privé, des institutions et services de l'Etat et des collectivités territoriales, ainsi que de leurs établissements, lorsqu'ils relèvent du registre du commerce et des sociétés, du répertoire des métiers ou qu'ils emploient du personnel salarié, sont soumis à des obligations fiscales ou bénéficient de transferts financiers publics ". Aux termes de l'article R. 123-222 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Sont portés au répertoire les renseignements d'identification suivants : (...) 2° Pour chaque établissement, sa dénomination usuelle, son adresse, et si nécessaire la date et l'origine de sa création (...) ". Aux termes de l'article A. 123-81 de ce code, dans sa rédaction alors applicable : " Sont habilités à demander l'inscription au répertoire (...) 3° Les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocation familiales (...) ".

5. Le refus du directeur d'une union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises, prévu à l'article R. 123-220 du code de commerce, une société de droit étranger constitue un acte administratif susceptible d'être déféré à la juridiction administrative.

6. Ainsi qu'il a été dit aux points 1 et 2, par les deux ordonnances attaquées

n° 2104147 et n° 2104148 du 18 octobre 2021, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître les demandes de M. B... et de la SCI Immo Toulouse tendant, pour la première, à l'annulation de la décision du directeur de l'URSSAF Midi-Pyrénées ayant implicitement refusé de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises sept sociétés de droit étranger à l'adresse d'un local dont il est propriétaire à Mazamet et, pour la seconde, à l'annulation de la décision du même directeur ayant implicitement refusé de retirer sa décision d'inscrire au répertoire des entreprises cinq sociétés de droit étranger à l'adresse d'un local dont elle est propriétaire à Aucamville.

7. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 qu'il appartient à la juridiction administrative de connaître des demandes présentées par la SCI Immo Toulouse et par

M. B.... L'une et l'autre sont dès lors fondés à demander l'annulation des ordonnances les concernant, du 18 octobre 2021, par lesquelles le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

8. Il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes d'annulation présentées par la SCI Immo Toulouse et par M. B..., devant le tribunal administratif de Toulouse.

Sur la légalité des décisions du directeur de l'URSSAF Midi-Pyrénées :

9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ". Aux termes de l'article L. 211-2 du même code : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / 2° Infligent une sanction ; / 3° Subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; /

4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; / 5° Opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ; / 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire ". Aux termes de l'article L. 211-3 de ce code : " Doivent également être motivées les décisions administratives individuelles qui dérogent aux règles générales fixées par la loi ou le règlement ".

10. S'il résulte des dispositions précitées que le silence gardé sur une demande de communication des motifs d'une décision implicite de rejet est susceptible d'entacher cette décision d'illégalité, c'est à la condition toutefois qu'elle soit intervenue dans un cas où une décision expresse aurait dû être motivée. Or, ni les dispositions des articles L. 211-2 et

L. 211-3 du code des relations entre le public et l'administration, ni aucune autre disposition ni aucun principe n'imposaient la motivation des décisions en litige de refus de retrait d'une décision d'inscription de sociétés au répertoire des entreprises. Par suite, le moyen invoqué par les requérants, tiré de ce que les décisions contestées seraient illégales faute de réponse à leur demande de communication de leurs motifs, est inopérant.

11. En deuxième lieu, si la SCI Immo Toulouse et M. B... soutiennent que l'inscription d'office des sociétés étrangères au répertoire national ne repose sur aucune réalité factuelle, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'arrêt du 2 décembre 2020 par lequel la Cour de cassation a déclaré les juridictions de l'ordre judiciaire incompétentes pour connaître des litiges initiés par les sociétés donneuses d'ordres, que la demande d'inscription de l'URSSAF repose sur l'information donnée par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement selon laquelle ces sociétés de droit lituanien et letton, non déclarées en France, opéraient leur activité depuis les sièges sociaux de leurs sociétés françaises donneuses d'ordres, les sociétés Trans Inter Sud-Ouest de fret (TISOF) et Transports logistique internationale groupage affrètement (LIGA) et qu'elles disposaient ainsi à tout le moins d'établissements situés à ces adresses. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.

12. En troisième lieu, la SCI Immo Toulouse et M. B... persistent à contester les décisions d'inscription d'office de sociétés étrangères en faisant valoir qu'elles portent atteinte à leur droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, par l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par l'article 544 du code civil. Toutefois, d'une part, l'article R. 123-231 du code de commerce prévoit qu'aucun effet juridique ne s'attache à l'identification ou à la non-identification d'une personne inscrite au répertoire qui demeure soumise à toute obligation législative, réglementaire ou contractuelle afférente à l'exercice de son activité. D'autre part, alors que la domiciliation accompagne nécessairement en vertu de l'article R. 123-222 du code de commerce l'immatriculation d'une société, qui est obligatoire en application des dispositions du code de commerce pour toutes les entreprises étrangères qui exercent une activité en France, elle n'emporte, en tant que telle, aucune atteinte au droit de propriété. Par suite, et alors même que la SCI Immo Toulouse et M. B... n'auraient pas donné leur accord à la domiciliation des entreprises lettone et lituanienne à l'adresse des immeubles dont ils sont respectivement propriétaires, le moyen tiré d'une atteinte à leur droit de propriété doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que les demandes de la SCI Immo Toulouse et de M. B... à fin d'annulation des décisions du directeur de l'URSSAF Midi-Pyrénées doivent être rejetées. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ne peuvent également qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'URSSAF Midi-Pyrénées, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent la SCI Immo Toulouse et

M. B... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la SCI Immo Toulouse et de

M. B... une somme de 750 euros chacun à verser à l'URSSAF Midi-Pyrénées sur le fondement des mêmes dispositions. En l'absence de dépens, les conclusions tendant à leur paiement, présentées par ce dernier, ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Les ordonnances n° 2104147 et n° 2104148 du 18 octobre 2021 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse sont annulées.

Article 2 : Les demandes présentées par M. B... et par la SCI Immo Toulouse devant le tribunal administratif de Toulouse et leurs conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : La SCI Immo Toulouse et M. B... verseront chacun une somme de 750 euros à l'URSSAF Midi-Pyrénées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de l'URSSAF Midi-Pyrénées est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la société civile immobilière Immo Toulouse et à l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocation familiales Midi-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 16 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Karine Butéri, présidente,

M. Stéphane Guéguein, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 février 2025.

La rapporteure,

Caroline Gaillard La présidente,

Karine Butéri

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23BX02533


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX02533
Date de la décision : 06/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUTERI
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : T & L AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-06;23bx02533 ?
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