La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/04/2025 | FRANCE | N°24BX02442

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 03 avril 2025, 24BX02442


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 22 juillet 2024 par lequel le préfet de la Haute-Vienne l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours, l'a astreint à se présenter du lundi au vendredi à 9 heures au commissariat de police de Limoges et à ne pas sortir du territoire de la commune de Limoges sans autorisation de ses services.



Par un jugement n° 2401356 du 8 août 2024, la magistrate dési

gnée par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.



Procédure ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 22 juillet 2024 par lequel le préfet de la Haute-Vienne l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours, l'a astreint à se présenter du lundi au vendredi à 9 heures au commissariat de police de Limoges et à ne pas sortir du territoire de la commune de Limoges sans autorisation de ses services.

Par un jugement n° 2401356 du 8 août 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces enregistrées les 11 octobre 2024 et 20 février 2025, M. A..., représenté par Me Toulouse, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Limoges du 8 août 2024 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et une somme de 600 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure en ce qu'il se fonde sur un contrôle du séjour effectué, en méconnaissance des articles L. 812-1 et L. 812-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 78-2 du code de procédure pénale ;

- l'arrêté attaqué du 22 juillet 2024 est privé de base légale en ce que l'arrêté portant refus de séjour et prolongation de l'interdiction de retour du 4 décembre 2023 sur lequel il est fondé est lui-même illégal, dès lors qu'il a été signé par une autorité incompétente, qu'il est entaché d'une méconnaissance des articles L. 423-1, L. 423-7, L. 432-1 et L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que de l'article 6 de l'accord franco-algérien et du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'arrêté attaqué méconnait l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 février 2025, le préfet de la Haute-Vienne, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant,

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant algérien né le 9 avril 1985, a fait l'objet d'un arrêté du préfet de la Haute-Vienne en date du 22 juillet 2024 l'assignant à résidence sur le territoire de la commune de Limoges pour une durée de quarante-cinq jours, et l'astreignant à se présenter du lundi au vendredi à 9 heures au commissariat de police de Limoges et à ne pas sortir du territoire de la commune de Limoges sans autorisation de ses services. Par un jugement du 8 août 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par la présente requête, M. A... relève appel de ce jugement.

2. En premier lieu, M. A... ne peut utilement invoquer l'irrégularité de son contrôle d'identité en se prévalant des dispositions des articles L. 812-1 et L. 812-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et L. 78-2 du code de procédure pénale, dès lors que l'irrégularité de la procédure de contrôle est sans incidence sur la légalité de la décision portant assignation à résidence.

3. En deuxième lieu, si M. A... excipe de l'illégalité de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 4 décembre 2023 portant refus de séjour et prolongation de l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté d'assignation à résidence attaqué est fondé, non pas sur cet arrêté du 4 décembre 2023 qui n'a pas été assorti d'une obligation de quitter le territoire français, mais sur un précédent arrêté du 29 juin 2022 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai, interdiction de retour pour une durée de trois ans et fixation du pays de renvoi, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Limoges du 22 juillet 2022 et qui est devenu définitif. Dès lors que la mesure d'assignation à résidence en litige n'a pas été prise pour l'application de cet arrêté du 4 décembre 2023 et que celui-ci n'en constitue pas la base légale, l'exception d'illégalité soulevée ne peut qu'être écartée.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ".

5. Le préfet de la Haute-Vienne a, par l'arrêté contesté, assigné M. A... à résidence sur le territoire de la commune de Limoges pendant quarante-cinq jours avec obligation de se présenter du lundi au vendredi à 9 heures au commissariat de police afin de faire constater le respect de la mesure et interdiction de sortir du territoire de la commune de Limoges sans autorisation de ses services. Si M. A... fait état de ce qu'il est marié avec une ressortissante française depuis 2013, qu'ils habitent avec leurs deux enfants dans l'éducation et l'entretien desquels il s'investit au quotidien, enfin qu'il est bien inséré dans la société française, il n'apporte, ce faisant, aucun élément de nature à établir que la mesure d'assignation à résidence en cause serait incompatible avec sa vie privée et familiale ou porterait atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté portant assignation à résidence qu'il conteste porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'elle méconnaitrait les stipulations de l'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions liées aux frais de l'instance doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 avril 2025.

La rapporteure,

Béatrice Molina-AndréoLa présidente,

Evelyne BalzamoLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX02442


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24BX02442
Date de la décision : 03/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Béatrice MOLINA-ANDREO
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : CABINET AVOC'ARENES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-03;24bx02442 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award