Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. G... C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 21 mars 2018 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1804885 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 décembre 2018, M. G... C..., représenté par Me D...A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 21 mars 2018 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise afin de déterminer son état de santé.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Hervé Cassara, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., né le 2 août 1963, de nationalité guinéenne, a déclaré être entré en France le 8 février 2014. À la suite du rejet de sa demande d'asile par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 19 mars 2015, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 23 octobre 2015, il a obtenu, par un arrêté du 6 juin 2016, son admission provisoire au séjour pour une durée d'un an en raison de son état de santé sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 18 mai 2017, il a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour. Par un arrêté du 21 mars 2018, le préfet du Nord a refusé ce renouvellement, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. M. C... relève appel du jugement du 30 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, notamment, à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Contrairement à ce que soutient M.C..., il résulte des termes mêmes du jugement attaqué, notamment de ses visas qui mentionnent sa date d'enregistrement et l'analysent avec la requête, que le mémoire en réplique qu'il a adressé au tribunal administratif de Lille, enregistré le 12 juillet 2018 au greffe de ce tribunal, a bien été pris en compte par les premiers juges, lesquels n'avaient, au demeurant, pas à répondre à chacun des arguments avancés au soutien des moyens qu'il a soulevés. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué manque en fait et doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
4. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il puisse bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un accès effectif au traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
5. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer à M. C... le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade, le préfet du Nord s'est notamment fondé sur l'avis du 3 novembre 2017 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration précisant que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale, le défaut de cette prise en charge ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le préfet du Nord a également relevé dans l'arrêté attaqué que " rien ne permet de conclure qu'il ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il détient la nationalité ". Pour contester ces motifs, M. C... soutient que le défaut de prise en charge médicale de ces pathologies entraînerait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que ces affections nécessitent un suivi médical régulier en France qui ne pourrait être assuré en Guinée en raison de l'absence d'accès effectif aux traitements appropriés. Il s'appuie sur plusieurs certificats médicaux, en particulier ceux établis par le docteur I...J..., médecin psychiatre, le 16 mars 2016, et par le docteur E...F..., médecin généraliste, le 19 mars 2016. Toutefois, le premier certificat se borne à indiquer que M. C...est suivi sur le plan psychologique et qu'il présente un stress post-traumatique qui est décrit mais sans faire état, ni des conséquences d'une absence de prise en charge médicale sur son état de santé, ni de l'absence d'accès à un traitement adapté dans son pays d'origine. De même, le certificat du docteurF..., s'il indique que M. C... souffre d'hypertension artérielle, compliquée d'une cardiopathie hypertrophique, d'une dépression et d'un état de stress post-traumatique, d'une gastrite et d'une insuffisance veineuse du membre inférieur droit post-traumatique, et que son état de santé nécessite la prise d'un traitement médicamenteux qu'il détaille, il se borne à évoquer l'hypothèse que ce traitement serait " possiblement " non disponible dans son pays d'origine sans s'appuyer sur des éléments précis. S'il indique également que " l'état de stress post-traumatique n'est pas encore stabilisé " et qu' " un retour dans son pays d'origine est évidemment inenvisageable médicalement au vu des sévices subis, et l'interruption du suivi psychiatrique, du travail avec la psychologue et moi-même et du traitement médicamenteux serait catastrophique pour MonsieurC... ", il n'indique pas précisément en quoi l'absence de prise en charge médicale entraînerait pour M. C...des conséquences d'une exceptionnelle gravité, d'autant que le lien allégué entre l'état de santé du requérant et les événements traumatisants qu'il aurait vécus en Guinée ne ressort pas des pièces du dossier. M. C... produit également des certificats médicaux établis postérieurement à l'arrêté attaqué, à nouveau par le docteurF..., le 5 avril 2018, mais aussi par le docteur B...H..., rhumatologue, les 5 et 10 avril 2018, et le 29 mai 2018. Il en ressort, d'une part, que le docteur F... admet qu'il ne " connaît pas la situation sanitaire dans le pays d'origine de M. C... G..., ni si l'offre d'accès aux soins dans son pays d'origine permettrait une prise en charge adaptée à l'ensemble des pathologies de M.C... " tout en précisant " qu'elle est assurée de façon optimale en France ". Il ressort en outre de ce certificat et de ceux du docteur H...que la maladie de Paget a été diagnostiquée chez M.C.... Toutefois, il ressort de ces éléments, ainsi que de ceux produits par le préfet du Nord devant les premiers juges, qu'il s'agit d'une maladie bénigne dont M. C...souffre depuis de nombreuses années bien qu'elle n'ait été diagnostiquée que tardivement et, là encore, les certificats médicaux produits, en particulier ceux établis par le docteur H..., ne précisent ni en quoi l'absence de prise en charge médicale de cette maladie entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour M.C..., ni quel traitement approprié ne serait pas disponible en Guinée, alors que le préfet du Nord a produit devant les premiers juges des éléments montrant que la plupart des médicaments cités par le docteur F...étaient effectivement disponibles en Guinée. Enfin, si M. C...produit également un rapport d'une organisation non gouvernementale du 14 octobre 2010 faisant état des difficultés de la médecine psychiatrique en Guinée, ce document, au demeurant ancien, n'est pas, compte tenu de son caractère général, de nature à démontrer que M. C...ne pourrait avoir effectivement accès aux soins que ses pathologies nécessitent. Il s'ensuit que les documents produits ne sont pas de nature à remettre en cause ni l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui a estimé que si l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale, le défaut de cette prise en charge ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni le motif également retenu par le préfet du Nord tiré de ce que M. C...peut bénéficier d'un traitement approprié en Guinée. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Nord aurait méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ". Si M. C... soutient que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est incompatible avec les soins qu'il doit recevoir en France et que son exécution entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, toutefois, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5, il ne ressort pas des pièces du dossier que tel serait le cas. Dès lors, le moyen doit être écarté.
7. En troisième lieu, il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que le préfet du Nord n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M.C..., alors que l'arrêté attaqué fait notamment expressément référence à son état de santé et aux certificats médicaux que l'intéressé lui avait adressés, aux conditions de son entrée en France, et à sa situation personnelle, familiale et professionnelle. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.
8. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que la famille de M.C..., qui ne se prévaut d'aucune attache particulière sur le territoire français, réside en Guinée, notamment son épouse, ses trois enfants, sa mère, ses quatre frères et soeurs, et il y a lui-même résidé au moins jusqu'à l'âge de cinquante ans. S'il allègue qu'il serait en rupture définitive avec sa mère et ses frères et soeurs, il ne l'établit pas. S'il fait, en outre, valoir qu'il serait inséré sur le plan professionnel en France dès lors qu'il bénéficie, depuis le 16 novembre 2016, d'un emploi d'agent non titulaire en contrat d'insertion en tant que couturier dans les services du centre communal d'action sociale de la commune de Dunkerque à raison de vingt-six heures de travail par semaine, cet élément n'est pas de nature, à lui seul, à démontrer une insertion professionnelle et sociale d'une particulière intensité à la date de l'arrêté attaqué. S'il produit aussi une convention du 4 février 2019 conclue avec une association pour des missions de bénévolat deux fois par semaine et de manière ponctuelle jusqu'au 31 décembre 2019, cet élément, au demeurant postérieur à l'arrêté attaqué, n'est pas non plus de nature à démontrer une insertion particulière sur le plan professionnel. S'il fait également état de ses difficultés financières, cette circonstance n'est pas de nature à constituer un motif exceptionnel pour une admission au séjour. Enfin, s'il fait état du traumatisme subi dans son pays d'origine en raison notamment d'une agression qu'il y aurait subie, il ne produit aucune pièce de nature à l'établir, alors, au demeurant, que tant l'OFPRA que la CNDA ont rejeté sa demande d'asile, ainsi qu'il a été dit au point 1. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté en litige ait porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. C... une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, et le préfet du Nord n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions litigieuses sur la situation personnelle de l'intéressé. Par suite, les moyens invoqués doivent être écartés.
9. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... C..., au ministre de l'intérieur et à Me D...A....
Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.
N°18DA02493 2