Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision de la commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) du conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) en date du 4 mars 2022 rejetant son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 6 octobre 2021 de la commission locale d'agrément et de contrôle Nord (CLAC) lui refusant le renouvellement de sa carte professionnelle d'agent privé de sécurité.
Par un jugement n° 2201676 du 13 juillet 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 septembre 2023, M. A..., représenté par Me Fillieux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision de la CNAC en date du 4 mars 2022 ;
3°) d'enjoindre au CNAPS de lui délivrer la carte professionnelle sollicitée dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge du CNAPS le versement à son conseil, désigné au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ou, subsidiairement, au titre du seul article L. 761-1 du même code.
Il soutient que :
- le jugement contesté est entaché d'erreurs d'appréciation ;
- la décision attaquée a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'est pas établi que l'agent ayant consulté le traitement des antécédents judiciaires (TAJ) au cours de l'enquête administrative ait été spécialement et individuellement habilité à cet effet ;
- elle est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que les faits lui étant reprochés ne peuvent être regardés comme étant incompatibles avec l'exercice des fonctions d'agent privé de sécurité ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juin 2024, le CNAPS, représenté par Me Cano, conclut au rejet de la requête d'appel de M. A... et à ce qu'une somme 500 euros soit mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 novembre 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code de procédure pénale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Toutias, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Regnier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Hau, représentant le CNAPS.
Considérant ce qui suit :
1. Le 6 juillet 2021, M. A... a sollicité la délivrance d'une carte professionnelle d'agent privé de sécurité. Par une délibération du 6 octobre 2021, la commission locale d'agrément et de contrôle (CLAC) Nord du conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) a refusé de faire droit à sa demande. Par une délibération du 4 mars 2022, la commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) du CNAPS a rejeté son recours administratif préalable obligatoire et confirmé le refus opposé à sa demande de délivrance d'une carte professionnelle. M. A... relève appel du jugement du 13 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière délibération.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. La circonstance que les premiers juges auraient commis des erreurs d'appréciation en ce qui concerne les moyens dont ils étaient saisis entacherait seulement le bien-fondé de leur jugement et non la régularité de celui-ci. Il s'ensuit qu'à supposer même que M. A... ait entendu contester le jugement attaqué pour un tel motif, son moyen doit être écarté. Il appartient en tout état de cause à la cour, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur le bien-fondé des moyens dirigés contre la décision attaquée et repris en appel par M. A....
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure : " Nul ne peut être employé ou affecté pour participer à une activité mentionnée à l'article L. 611 1 : / 1° S'il a fait l'objet d'une condamnation à une peine correctionnelle ou à une peine criminelle inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire (...), pour des motifs incompatibles avec l'exercice des fonctions ; / 2° S'il résulte de l'enquête administrative, ayant le cas échéant donné lieu à consultation, par des agents du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l'Etat territorialement compétent et individuellement désignés, des traitements de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales relevant des dispositions de l'article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification, que son comportement ou ses agissements sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat et sont incompatibles avec l'exercice des fonctions susmentionnées ; / (...) / Le respect de ces conditions est attesté par la détention d'une carte professionnelle délivrée selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat. / La carte professionnelle peut être retirée lorsque son titulaire cesse de remplir l'une des conditions prévues aux 1°, 2°, 3°, 4° et 5° du présent article. (...) / (...) ".
4. En premier lieu, dès lors que les dispositions citées ci-dessus du 2° de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure prévoient la possibilité que certains traitements automatisés de données à caractère personnel, notamment le traitement d'antécédents judiciaires (TAJ) défini aux articles R. 40-23 à R. 40-34 du code de procédure pénale, soient consultés au cours de l'enquête conduite par l'administration dans le cadre de ses pouvoirs de police, préalablement à la délivrance ou au renouvellement d'une carte professionnelle nécessaire à l'exercice d'une activité de sécurité privée, la circonstance que l'agent ayant procédé à cette consultation n'aurait pas été, en application de ces mêmes dispositions, individuellement désigné et régulièrement habilité à cette fin par le représentant de l'Etat territorialement compétent, si elle est susceptible de donner lieu aux procédures de contrôle de l'accès à ces traitements, n'est pas, par elle-même, de nature à entacher d'irrégularité la décision prise sur la demande de délivrance ou de renouvellement de la carte professionnelle. Le moyen tiré de ce que la délibération attaquée aurait été prise au terme d'une consultation irrégulière du TAJ faute d'habilitation spéciale et individuelle de l'agent ayant procédé à cette consultation doit, dès lors, être écarté.
5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... a détenu une carte professionnelle d'agent privé de sécurité entre 2011 et 2016. A ce titre, il ne pouvait ignorer que l'exercice de ces fonctions impose un strict respect des lois et règlements en vigueur. Toutefois, l'intéressé a commis, le 8 juin 2018, des faits de conduite de véhicule sous l'empire d'un état alcoolique, le taux d'alcoolémie retenu de 0,75 milligramme par litre d'air expiré étant près de deux fois supérieur au taux maximal toléré. Il a pour ce motif fait l'objet, par ordonnance pénale du 14 septembre 2018 du tribunal de grande instance de Lille, d'une condamnation à une amende d'un montant de 500 euros et à la suspension de son permis de conduire pour une durée de six mois, condamnation qui a été inscrite au bulletin n° 2 de son casier judiciaire et qui le demeurait à la date à laquelle il a sollicité la délivrance d'une nouvelle carte professionnelle d'agent privé de sécurité. L'intéressé s'est à nouveau fait défavorablement connaître pour des faits de circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance, commis à Roubaix le 2 décembre 2020. A cet égard, les seuls éléments qu'ils apportent ne suffisent pas à établir que le véhicule litigieux ne lui appartenait pas et à infirmer les mentions du rapport d'enquête administrative, issues des traitements consultés, selon lesquelles la procédure a été " relevée par amende forfaitaire délictuelle ". La gravité et la réitération, dans les trois années précédant sa demande, des infractions routières dont M. A... s'avère être coutumier, révèlent un comportement incompatible avec l'exercice des fonctions d'agent privé de sécurité. La CNAC n'a dès lors pas commis d'erreur d'appréciation en se fondant sur ce motif pour refuser de lui délivrer une nouvelle carte professionnelle en application des 1° et 2° de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure. Il s'ensuit que le moyen soulevé en ce sens par M. A... doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 4 mars 2022 de la CNAC ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CNAPS, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. A... et Me Fillieux au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme demandée par le CNAPS au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du CNAPS présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Fillieux et au conseil national des activités privées de sécurité.
Délibéré après l'audience publique du 22 octobre 2024 à laquelle siégeaient :
- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,
- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,
- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 novembre 2024.
Le rapporteur,
Signé : G. ToutiasLe président de chambre,
Signé : B. Chevaldonnet
La greffière,
Signé : A-S. Villette
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
par délégation,
La greffière
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N°23DA01771