Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille :
- de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;
- d'annuler l'arrêté du 5 avril 2024 par lequel le préfet du Nord a décidé de le remettre aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile ;
- d'enjoindre au préfet du Nord, à titre principal, d'enregistrer sa demande d'asile en procédure normale ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation ;
- de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par un jugement n° 2403725 du 13 juin 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire de M. A... (article 1), a annulé l'arrêté du 5 avril 2024 (article 2), a enjoint au préfet du Nord de procéder au réexamen de la situation de M. A... (article 3), a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser au conseil de M. A..., Me Marion Vergnole, au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 (article 4) et a rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 5).
Procédures devant la cour :
I - Par une requête, enregistrée sous le n° 24DA01340 le 12 juillet 2024, le préfet du Nord, représenté par Me Nicolas Rannou, demande à la cour d'annuler le jugement du 13 juin 2024 en ses articles 2 à 4 et de rejeter la demande présentée en première instance par M. A....
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 : l'entretien individuel a été mené par un agent qualifié de la préfecture ; en tout état de cause, l'audience devant le tribunal est de nature à remédier à l'éventuelle défaillance au stade de l'entretien ;
- les moyens invoqués par M. A... en première instance et tirés de la violation de l'article 17 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013, des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2024, M. B... A..., représenté par Me Marion Vergnole, demande à la cour :
- de confirmer le jugement ;
- de rejeter la requête du préfet du Nord ;
- d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Nord d'enregistrer sa demande d'asile en procédure normale ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation ;
- de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté méconnaît les articles 5 et 35 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 et l'article 4.4 de la directive (UE) 2013/32 ;
- il méconnaît l'article 3.2 et 17 du règlement (UE) 604/2013 et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
M. A... a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 août 2024 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.
Par une ordonnance du 19 septembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 9 octobre 2024.
II - Par une requête, enregistrée sous le n° 24DA01747 le 28 août 2024, le préfet du Nord, représenté par Me Nicolas Rannou, demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du 13 juin 2024.
Il soutient que :
- les moyens qu'il invoque sont sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... en première instance ;
- c'est à tort que le tribunal a retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 : l'entretien individuel a été mené par un agent qualifié de la préfecture ; en tout état de cause, l'audience devant le tribunal est de nature à remédier à l'éventuelle défaillance au stade de l'entretien ;
- les moyens invoqués par M. A... en première instance et tirés de la violation de l'article 17 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013, des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2024, M. B... A..., représenté par Me Marion Vergnole, demande à la cour :
- de rejeter la requête en sursis à exécution du jugement ;
- de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il s'en rapporte à la sagesse de la cour s'agissant du moyen d'annulation retenu par le tribunal ;
- les autres moyens soulevés par le préfet du Nord ne sont pas fondés ;
- l'arrêté du 5 avril 2024 méconnaît les dispositions des articles 3.2 et 17 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013, les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 septembre 2024 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relatif à la création d'Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace du règlement (UE) n° 604/2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- la directive n° 2013/33/UE du 26 juin 2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Les rapports de Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure, ont été entendus au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant soudanais né le 23 février 2004, a déposé une demande d'asile auprès des services de la préfecture du Nord le 6 novembre 2023. A la suite de cette demande, le préfet du Nord, constatant que les empreintes de l'intéressé avaient été enregistrées dans la base dactyloscopique centrale de données informatisées du système Eurodac en Italie le 5 septembre 2023, a saisi les autorités italiennes le 22 novembre 2023, d'une demande de prise en charge de l'intéressé. L'Italie a donné son accord implicite à sa prise en charge. Par un arrêté du 5 avril 2024, le préfet du Nord a décidé de remettre M. A... aux autorités italiennes. Par les deux requêtes susvisées, qu'il convient de joindre, le préfet du Nord interjette appel et demande qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 2403725 du 13 juin 2024, en tant que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 5 avril 2024, lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de M. A... et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser au conseil de M. A..., au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Sur la requête n°24DA01340 :
En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :
S'agissant du moyen retenu par le tribunal administratif de Lille :
2. Aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Entretien individuel - 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) / 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'Etat membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ".
3. S'il ne résulte ni des dispositions citées au point précédent ni d'aucun principe que devrait figurer sur le compte-rendu de l'entretien individuel la mention de l'identité de l'agent qui a mené l'entretien, il appartient à l'autorité administrative, en cas de contestation sur ce point, d'établir par tous moyens que l'entretien a, en application des dispositions précitées de l'article 5.5 du règlement du 26 juin 2013, été " mené par une personne qualifiée en vertu du droit national ". Si un agent de préfecture est affecté au service des étrangers ou si figure au dossier mention d'éléments de son parcours professionnel le rendant apte à mener l'entretien prévu à l'article 5 du règlement du 26 juin 2013, l'agent doit être regardé comme qualifié en vertu du droit national pour conduire cet entretien.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été reçu en entretien individuel le 6 novembre 2023 à la préfecture du Nord et qu'il a signé le résumé de cet entretien. Ce résumé, s'il comporte la signature de la personne ayant mené l'entretien, ne contient aucune mention de son identité, même sommaire par des initiales, permettant de l'identifier. Il est cependant revêtu, en bas de la dernière page, d'un cachet administratif portant les mentions " République française ", " préfet du Nord ", " D.I.I. Asile 2 ". A cet égard, l'administration fait valoir, pour la première fois en appel, que ce cachet administratif n'est pas le " cachet sommaire d'un service " mais un cachet individuel, répertorié dans un registre actualisé des tampons du contrôle interne de la fraude, et qu'il est dévolu à un agent de la préfecture affecté au sein du service des étrangers, précisément identifié, qui en dispose seul et qui le reçoit à sa prise de fonction. Dans ces conditions, le préfet du Nord doit être regardé comme rapportant la preuve que l'entretien a été mené par une " personne qualifiée en vertu du droit national " au sens de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013. Par suite, il est fondé à soutenir que c'est à tort que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille s'est fondée, pour annuler l'arrêté du 5 avril 2024 prononçant le transfert de M. A... aux autorités italiennes, sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement (UE) 604/2013.
5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... en première instance et en appel.
S'agissant des autres moyens :
Quant à la méconnaissance de l'article 4 de la directive 2013/32/UE et de l'article 35 du règlement (UE) 604/2013 :
6. D'une part, aux termes de l'article 35 du règlement (UE) 604/2013 : " 1. Chaque Etat membre notifie sans délai à la Commission les autorités chargées en particulier de l'exécution des obligations découlant du présent règlement et toute modification concernant ces autorités. (...) / 3. Les autorités visées au paragraphe 1 reçoivent la formation nécessaire en ce qui concerne l'application du présent règlement. / (...) ".
7. D'autre part, aux termes de l'article 1er de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale : " La présente directive a pour objet d'établir des procédures communes d'octroi et de retrait de la protection internationale en vertu de la directive 2011/95/UE ". Aux termes de l'article 4 de la même directive : " 1. Les Etats membres désignent pour toutes les procédures une autorité responsable de la détermination qui sera chargée de procéder à un examen approprié des demandes conformément à la présente directive. (...) / 2. Les Etats membres peuvent prévoir qu'une autorité autre que celle mentionnée au paragraphe 1 est responsable lorsqu'il s'agit : / a) de traiter les cas en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 (...). / 4. Lorsqu'une autorité est désignée conformément au paragraphe 2, les Etats membres veillent à ce que le personnel de cette autorité dispose des connaissances appropriées ou reçoive la formation nécessaire pour remplir ses obligations lors de la mise en œuvre de la présente directive (...) ".
8. Il ne ressort pas des écritures de première instance de M. A... que celui-ci ait articulé des moyens spécifiques tirés de la méconnaissance des dispositions précitées, qu'il se borne à retranscrire. En tout état de cause, l'intéressé ne fait état d'aucun élément de nature à faire naître un doute sur la formation appropriée dispensée à l'agent de préfecture qui a mené son entretien individuel. Il n'est donc pas établi que l'entretien se serait déroulé de façon irrégulière, en l'absence de formation suffisante de l'agent qui l'a interrogé. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 4.4 de la directive 2013/32/UE et de l'article 35 du règlement (UE) 604/2013, à les supposer effectivement invoqués, doivent donc être écartés.
Quant à la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles 3.2 et 17 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 :
9. D'une part, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) 2. Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ".
10. D'autre part, aux termes de l'article 17 du même règlement (UE) : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'Etat membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'Etat membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". La faculté laissée à chaque État membre, par l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 précité, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans ce règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.
11. Enfin, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt du 16 février 2017, affaire n° C-578/16 PPU, " l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être interprété en ce sens que, même en l'absence de raisons sérieuses de croire à l'existence de défaillance systémiques dans l'État membre responsable de l'examen de la demande d'asile, le transfert d'un demandeur d'asile dans le cadre du règlement n° 604/2013 ne peut être opéré que dans des conditions excluant que ce transfert entraîne un risque réel et avéré que l'intéressé subisse des traitements inhumains ou dégradants, au sens de cet article ". Dans une affaire n° 29217/12 du 4 novembre 2014, Tarakhel c/ Suisse, la Cour européenne des droits de l'homme a relevé que les capacités d'accueil de l'Italie étaient alors localement défaillantes, sans qu'il s'agisse pour autant d'une défaillance systémique. La Cour a considéré que cette situation n'empêchait pas l'adoption de décisions de transfert, mais obligeait le pays qui envisageait une procédure de remise, lorsqu'elle porte sur une personne particulièrement vulnérable, de s'assurer au préalable, avant toute exécution matérielle, auprès des autorités italiennes qu'à leur arrivée en Italie, les personnes concernées seront notamment accueillies dans des structures et dans des conditions adaptées à leur situation familiale et à leur état de santé.
12. Si l'Italie est un Etat membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartient à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités de ce pays répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile.
13. En se bornant à faire référence à une demande de la commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe auprès du gouvernement italien de veiller au respect des droits des demandeurs d'asile et à un rapport de l'association Cimade de 2022 évoquant des risques de renvoi par ricochet d'Italie vers le Soudan, M. A... n'établit ni qu'il serait dans une situation de vulnérabilité particulière, ni que sa demande d'asile ne serait pas examinée en Italie dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ou qu'il serait susceptible de subir personnellement des traitements inhumains. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions des articles 3.2 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 doivent être écartés.
Quant aux moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation :
14. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ".
15. Il ressort des pièces du dossier que si M. A... allègue être présent en France avec deux membres de sa famille, il n'en justifie pas, pas plus que de l'ancienneté et de la continuité de son séjour sur le territoire et de la stabilité et de l'intensité de ses attaches personnelles ou familiales. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
En ce qui concerne les frais de la première instance :
16. Partie perdante dans la première instance, M. A... ne peut voir accueillies ses conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
17. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 5 avril 2024, lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de M. A... et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser au conseil de l'intéressé, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
En ce qui concerne les conclusions présentées par M. A... en appel :
18. En premier lieu, compte tenu du rejet de sa demande d'annulation de l'arrêté du 5 avril 2024, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence.
19. En second lieu, partie perdante dans l'instance, M. A... ne peut voir accueillies ses conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Sur la requête n°24DA01747 :
20. Le présent arrêt statuant sur la requête en annulation présentée contre le jugement n°2403725 du 13 juin 2024 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille, la requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement devient sans objet.
21. Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. A... présentée en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 13 juin 2024 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille est annulé en ses articles 2 à 4.
Article 2 : Les demandes présentées par M. B... A... en première instance sont rejetées.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fins de sursis à exécution de la requête n° 24DA01747 du préfet du Nord.
Article 4 : Les conclusions présentées par M. A... à fin d'injonction dans la requête n° 24DA01340 et celles présentées par lui en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 dans les deux instances d'appel sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Marion Vergnole.
Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience publique du 14 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- M. Vincent Thulard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2024.
La présidente-rapporteure,
Signé : I. LegrandLa présidente de la 1ère chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°24DA01340, 24DA01747 2