La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2025 | FRANCE | N°23DA01803

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 07 mai 2025, 23DA01803


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par deux requêtes distinctes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 10 septembre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a interdit d'exercer les fonctions mentionnées à l'article L. 212-1 du code du sport pour une durée de six mois et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 23 mars 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a interdit d'exercer les mêmes fonctions pour une durée de trois ans.

r>
Par un jugement nos 2104934-2202149 du 21 juillet 2023, le tribunal administratif de R...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par deux requêtes distinctes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 10 septembre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a interdit d'exercer les fonctions mentionnées à l'article L. 212-1 du code du sport pour une durée de six mois et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 23 mars 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a interdit d'exercer les mêmes fonctions pour une durée de trois ans.

Par un jugement nos 2104934-2202149 du 21 juillet 2023, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 septembre 2023 et 17 février 2025, M. B..., représenté par Me Mekkaoui, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet de la Seine-Maritime des 10 septembre 2021 et 23 mars 2022 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le tribunal a retenu à tort la tardiveté de sa demande tendant l'annulation de l'arrêté du 10 septembre 2021 ;

- le tribunal a dénaturé son argumentation et commis une erreur de droit ;

En ce qui concerne l'arrêté du 10 septembre 2021 :

- il a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors que l'avis du conseil départemental de la jeunesse, des sports, de la vie associative n'a pas été recueilli en méconnaissance de l'article L. 212-13 du code du sport, alors que cette décision n'était pas justifiée par l'urgence, qu'il n'a pas été invité à présenter des observations avant l'édiction de la mesure d'interdiction d'exercice, en méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, que son droit de se taire n'a pas été respecté ;

- il est insuffisamment motivé ;

- il repose sur des faits qui ne sont pas matériellement établis ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation ;

En ce qui concerne l'arrêté du 23 mars 2022 :

- il est insuffisamment motivé ;

- il a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors qu'il n'a pas été édicté après une procédure contradictoire, en méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, que son droit de se taire n'a pas été respecté et que l'ensemble de son dossier, y compris les procès-verbaux des auditions réalisées lors de l'enquête diligentée par l'administration sur les faits qui ont fondé la décision, ne lui a pas été communiqué en méconnaissance des droits de la défense ;

- le principe d'impartialité a été méconnu, dès lors que l'enquête administrative a été menée sans audition de témoins à décharge, que le recueil des témoignages n'a pas été effectué dans les formes requises, que les signataires de la décision et de la lettre de notification ont siégé lors de la réunion du conseil départemental de la jeunesse, des sports, de la vie associative du 11 mars 2021, que des personnes ne figurant pas sur le procès-verbal de la réunion du conseil départemental de la jeunesse, des sports, de la vie associative du 11 mars 2021 y ont en réalité assisté ;

- il repose sur des faits qui ne sont pas matériellement établis ;

- il est entaché d'une erreur de qualification juridique, d'une erreur d'appréciation et disproportionné.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 7 mai 2024 et 5 mars 2025, la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête de M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du sport ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Delahaye, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Regnier, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. À la suite d'un signalement émis par la cellule nationale de traitement des signalements des violences sexuelles dans le sport du ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports portant sur un comportement inapproprié de M. B..., alors encadrant sportif bénévole de la section escalade de l'Association Sportive Rouen Université Club (ASRUC), à l'égard d'une licenciée mineure âgée de 14 ans, le préfet de la Seine-Maritime a, par un arrêté du 10 septembre 2021 pris en urgence sur le fondement des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 212-13 du code du sport, interdit à l'intéressé d'exercer les fonctions mentionnées à l'article L. 212-1 du même code pour une durée de six mois. Ce premier arrêté a été suivi d'une enquête administrative diligentée par les agents du service départemental à la jeunesse, à l'engagement et aux sports (SDJES) de la direction des services départementaux de l'éducation nationale à l'issue de laquelle, après avis favorable de la formation spécialisée du conseil départemental de la jeunesse, des sports et de la vie associative (CDJSVA) du 11 mars 2022, le préfet de la Seine-Maritime a, par un second arrêté du 23 mars 2022, interdit à M. B..., sur le fondement des dispositions du premier alinéa de l'article L. 212-13 du code du sport, d'exercer les mêmes fonctions pour une durée de trois ans. M. B... relève appel du jugement du 21 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses deux demandes tendant à l'annulation des deux arrêtés des 10 septembre 2021 et 23 mars 2022.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, lorsque l'administration oppose au destinataire de sa décision une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'action introduite devant un tribunal administratif, il lui incombe d'établir que ce destinataire en a reçu notification régulière. En cas de retour à l'administration du pli, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l'adresse de l'intéressé dès lors qu'il résulte des mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le préposé du service postal, conformément à la réglementation en vigueur, d'un avis d'instance prévenant le destinataire de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste. Compte tenu des modalités de présentation des plis recommandés prévues par la réglementation postale, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet "avis de réception" sur lequel a été apposée la date de vaine présentation du courrier et qui porte, sur l'enveloppe ou l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis.

3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis de réception du service postal fixé sur l'enveloppe contenant l'arrêté du 10 septembre 2021, que ce pli a été présenté le 17 septembre 2021 à l'adresse de M. B... et que celui-ci en a été régulièrement avisé. L'intéressé s'est toutefois abstenu d'aller le retirer au bureau de poste dans le délai de 15 jours imparti pour ce faire. Par suite, la notification de l'arrêté du 10 septembre 2021, qui fait mention des voies et délais de recours, doit être réputée intervenue le 17 septembre 2021, date de présentation du pli. La circonstance que l'administration ait procédé à une seconde notification de cet arrêté le 22 octobre 2021, après que M. B... lui a indiqué ne pas avoir reçu la première notification, n'est pas de nature à avoir eu pour effet de proroger le délai de recours contentieux. A ce titre, si le bordereau de transmission contenu dans cette seconde notification indique à tort que le pli initialement notifié à l'intéressé a été " non avisé ", cette erreur de plume n'a pu en l'espèce à elle seule induire en erreur M. B... quant aux modalités de computation du délai de recours. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a fait droit à la fin de non-recevoir opposée en défense tirée de la tardiveté de sa requête, enregistrée le 17 décembre 2021 et dirigée contre l'arrêté du 10 septembre 2021.

4. En second lieu, eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux, les moyens tirés de ce que le tribunal administratif aurait dénaturé les écritures de l'appelant et entaché son jugement d'une erreur de droit sont sans incidence sur la régularité de celui-ci. Ils doivent, par suite, être écartés en tant qu'ils sont inopérants.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les dispositions applicables :

5. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 212-13 du code du sport : " L'autorité administrative peut, par arrêté motivé, prononcer à l'encontre de toute personne dont le maintien en activité constituerait un danger pour la santé et la sécurité physique ou morale des pratiquants l'interdiction d'exercer, à titre temporaire ou définitif, tout ou partie des fonctions mentionnées aux articles L. 212-1, L. 223-1 ou L. 322-7 ou d'intervenir auprès de mineurs au sein des établissements d'activités physiques et sportives mentionnés à l'article L. 322-1 / (...) / Cet arrêté est pris après avis d'une commission comprenant des représentants de l'Etat, du mouvement sportif et des différentes catégories de personnes intéressées. (...) ". Il résulte de ces dispositions que pour assurer la protection des pratiquants d'une activité physique ou sportive, l'autorité administrative peut interdire à une personne d'exercer, à titre rémunéré comme bénévole, une activité d'enseignement, d'animation ou d'encadrement d'une telle activité, une mission arbitrale, une activité de surveillance de baignade ou piscine ouverte au public, ou d'exploiter un établissement dans lequel sont pratiquées des activités physiques ou sportives, lorsque son maintien en activité constituerait un danger pour la santé et la sécurité physique ou morale des pratiquants. Une telle interdiction, à finalité préventive, constitue une mesure de police.

En ce qui concerne la légalité externe :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211 2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (...) ". Enfin, l'article L. 211-2 du même code dispose que : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ".

7. D'une part, l'arrêté contesté du 23 mars 2022, pris au visa des dispositions de l'article L. 212-13 du code du sport, indique notamment que M. B..., alors âgé de 20 ans et en position d'adulte faisant autorité, a échangé par messagerie des propos à connotation sexuelle avec une pratiquante mineure de 15 ans, dont il ne pouvait ignorer le caractère inapproprié et qui ont donné lieu à une plainte de l'intéressée, et précise que M. B... n'a pas démontré, au cours de l'enquête et lors de son audition par la formation spécialisée du CDJSVA, avoir pleinement pris conscience de la gravité de ces agissements. Cet arrêté comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui le fondent permettant à M. B... d'en comprendre les motifs, sans que n'ait d'incidence à ce titre la circonstance qu'il n'était pas accompagné du rapport d'enquête administrative. Par suite, le moyen tiré du caractère insuffisant de sa motivation doit être écarté.

8. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. B... a été destinataire d'un courrier du 24 février 2022 l'informant de sa convocation à la séance de la formation spécialisée du CDJSVA prévue le 11 mars 2022, réunie en vue de rendre un avis sur l'opportunité du prononcé à son encontre d'une mesure d'interdiction d'exercice prévue à l'article L. 212-13 du code du sport, et qu'il lui était possible d'être accompagné de son conseil et de présenter un mémoire en défense. L'appelant ne conteste pas avoir reçu ce courrier en temps utile afin de présenter des observations écrites et il est constant que l'intéressé, qui avait déjà été entendu au cours de l'enquête administrative par les agents de la direction des services départementaux de l'éducation nationale de la Seine-Maritime, a été en mesure de présenter ses observations orales lors de cette séance où il était accompagné de son conseil. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté n'aurait pas été précédé de la procédure contradictoire prévue à l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté.

9. En deuxième lieu, dans le cas où une personne, informée de la possibilité d'obtenir communication de son dossier avant l'édiction d'une mesure susceptible de lui faire grief, se plaint de ne pas avoir été mis à même de demander communication ou de ne pas avoir obtenu communication d'une pièce ou d'un témoignage utile à sa défense, il appartient au juge d'apprécier, au vu de l'ensemble des éléments qui lui ont été communiqués, si celui-ci a été privé de la garantie d'assurer utilement sa défense. Il ressort des pièces du dossier que, alors même qu'elle n'y était pas tenue dans le cadre de l'édiction d'une mesure de police administrative, l'administration a, par la lettre précitée du 24 février 2022, informé M. B... de la possibilité de prendre connaissance de son dossier avant la séance de la formation spécialisée du CDJSVA du 11 mars 2022. Si l'intéressé soutient qu'il n'aurait pas reçu communication de l'intégralité des procès-verbaux des témoignages recueillis lors de l'enquête administrative, il ne justifie toutefois pas avoir sollicité la transmission de ces pièces, ni ne pas avoir été mis à même d'en solliciter la communication. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense doit être écarté.

10. En dernier lieu, aux termes de l'article 9 de la Déclaration de 1789 : " Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi ". Ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel par ses décisions n° 2023-1074 QPC du 8 décembre 2023, n° 2024-1097 QPC du 26 juin 2024 et n° 2024-1105 QPC du 4 octobre 2024, il résulte de ces dispositions le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser, dont découle le droit de se taire. Elles impliquent que la personne poursuivie ne puisse être entendue sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu'elle soit préalablement informée du droit qu'elle a de se taire. Ces exigences s'appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition. En l'espèce, dès lors que l'arrêté en litige ne constitue pas une sanction ayant le caractère de punition mais une mesure de police ainsi qu'il a été rappelé au point 5, M. B... ne peut utilement soutenir que l'arrêté contesté aurait été pris en méconnaissance de son droit de se taire.

En ce qui concerne la légalité interne :

11. En premier lieu, la circonstance que certaines personnes n'auraient pas été invitées à témoigner au cours de l'enquête administrative n'est pas de nature à entacher de partialité l'arrêté contesté alors qu'il était loisible à M. B..., qui a été auditionné, de produire les témoignages qui lui semblaient pertinents et utiles à sa défense. De même, est sans incidence à ce titre la circonstance que les personnes auditionnées lors l'enquête administrative n'auraient pas été formellement informées de la portée de leurs déclarations, ni qu'elles n'auraient pas indiqué les liens qu'elles entretenaient avec la personne ayant mis en cause le comportement de l'appelant ou signé de procès-verbal. Si M. B... fait en outre valoir que lors de sa séance du 11 mars 2022, la formation spécialisée du CSJSVA comprenait notamment la secrétaire générale de la préfecture, signataire de l'arrêté attaqué et un membre du service départemental à la jeunesse à l'engagement et au sport, signataire de la lettre de notification de cet arrêté, l'article 5 de l'arrêté du 21 janvier 2022 portant création, composition et fonctionnement du conseil départemental de la jeunesse, des sports et de la vie associative de la Seine-Maritime, régulièrement publié et librement accessible et dont l'appelant ne conteste pas la légalité, prévoit que la présidence de la formation spécialisée est assurée par le préfet ou son représentant, ainsi que la présence d'un agent du service départemental à la jeunesse, à l'engagement et au sport. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que ces deux personnes, ou d'autres membres de la formation spécialisée du CSJSVA, auraient fait preuve d'une animosité personnelle à l'égard du requérant ou qu'ils seraient personnellement intéressés. Enfin, si M. B... soutient, sans plus de précisions, que des personnes non autorisées auraient assisté à cette séance, il ne remet pas en cause utilement la teneur du procès-verbal de cette séance dont la teneur fait foi jusqu'à preuve du contraire. Par suite, le moyen tiré du manquement au principe d'impartialité doit être écarté en toutes ses branches.

12. En deuxième lieu, si les faits constatés par le juge pénal et qui commandent nécessairement le dispositif d'un jugement ayant acquis force de chose jugée s'imposent à l'administration comme au juge administratif, la même autorité ne saurait s'attacher aux motifs d'un jugement de relaxe tirés de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ou de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité. Il appartient, dans ce cas, à l'autorité administrative d'apprécier si les mêmes faits sont suffisamment établis et, dans l'affirmative, s'ils justifient l'application d'une mesure de police administrative.

13. En l'espèce, d'une part, si M. B... fait valoir que les faits qui lui sont reprochés ont donné lieu à un jugement de relaxe, il ressort de nombreuses pièces du dossier, et notamment de la retranscription des échanges sur un réseau social produits à l'instance par l'intéressé lui-même, que celui-ci, alors âgé de 20 ans et en position d'autorité en tant qu'encadrant de l'ASRUC, a échangé, entre les mois de mars et juillet 2021 de très nombreux messages à connotation explicitement sexuelle avec l'une des pratiquantes de la même association alors âgée de 14 ans, échanges dont il ne pouvait ignorer le caractère inapproprié et prohibé. Par suite, la matérialité des faits reprochés à M. B... est établie.

14. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les faits reprochés à M. B... sont manifestement incompatibles avec les fonctions d'encadrant sportif, lesquelles imposent une nécessaire distance à l'égard de pratiquants mineurs y compris lorsqu'elles sont exercées à titre bénévole. La circonstance que la jeune mineure en cause aurait consenti à ces échanges ou qu'elle aurait été elle-même à l'initiative de certains d'entre eux n'est pas de nature à minimiser la gravité des agissements reprochés à l'intéressé, à qui il appartenait d'y mettre un terme. Il ressort également des pièces du dossier, et notamment du compte-rendu de l'audition de M. B... par la formation spécialisée du CDJSVA, que ce dernier n'a pas pleinement pris conscience de la gravité et du caractère inapproprié de ses agissements, qui lui avaient été pourtant été signalés par l'un des encadrants salariés. Par suite, en estimant que le maintien en activité de M. B... représentait un danger pour la santé et la sécurité physique et morale des pratiquants et en décidant en conséquence de lui interdire d'exercer les fonctions mentionnées à l'article L. 212-1 du code du sport pour une durée de trois ans, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 212-13 du même code.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés au litige :

16. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. B... doivent dès lors être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 8 avril 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,

- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mai 2025.

Le président-rapporteur,

Signé : L. DelahayeLe président de chambre,

Signé : B. Chevaldonnet

La greffière,

Signé : A.-S. Villette

La République mande et ordonne à la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

2

N°23DA01803


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA01803
Date de la décision : 07/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chevaldonnet
Rapporteur ?: M. Laurent Delahaye
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : DUBREIL-MEKKAOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-07;23da01803 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award