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20/02/2020 | FRANCE | N°18LY01687

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 20 février 2020, 18LY01687


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... née B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'enjoindre à la commune de Pernand-Vergelesses de supprimer le talus qu'elle a réalisé en amont de la parcelle cadastrée AL 60 et de remettre les abords de cette parcelle en état d'accessibilité normale, sous une astreinte de 500 euros par jour de retard, de condamner la commune de Pernand-Vergelesses à lui verser une somme de 10 000 euros au titre du préjudice de jouissance subi et de mettre à la charge de la commune de Pernand-Vergele

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... née B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'enjoindre à la commune de Pernand-Vergelesses de supprimer le talus qu'elle a réalisé en amont de la parcelle cadastrée AL 60 et de remettre les abords de cette parcelle en état d'accessibilité normale, sous une astreinte de 500 euros par jour de retard, de condamner la commune de Pernand-Vergelesses à lui verser une somme de 10 000 euros au titre du préjudice de jouissance subi et de mettre à la charge de la commune de Pernand-Vergelesses une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Par un jugement n° 1603285 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 mai 2018, et un mémoire enregistré le 5 avril 2019, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1603285 du 8 mars 2018 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'enjoindre à la commune de Pernand-Vergelesses de supprimer le talus qu'elle a réalisé en amont de la parcelle cadastrée AL 60 et de remettre les abords de cette parcelle en état d'accessibilité normale, sous une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;

3°) de condamner la commune de Pernand-Vergelesses à lui verser une somme de 10 000 euros au titre du préjudice subi ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Pernand-Vergelesses une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable dès lors que les dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ne trouvent pas à s'appliquer en matière de dommages de travaux publics ;

- une canalisation des eaux pluviales mise en place par la commune de Pernand-Vergelesses se déverse sur sa parcelle, occasionnant des désordres sur celle-ci ; la responsabilité de la commune est engagée de ce fait ;

- si la commune a rebouché les saignées qu'elle avait creusées dans le talus et détourné la canalisation qu'elle avait installée pour diriger les eaux de pluie et de la source Corton vers sa parcelle, elle n'a pas supprimé l'aménagement consistant en la réalisation d'un talus en amont de la parcelle en question destiné à conduire les eaux pluviales du chemin rural vers cette parcelle ; cette parcelle ne pouvant être utilisée, il doit être enjoint à la commune de supprimer ce talus et de remettre en état d'accessibilité normale les abords de cette parcelle ;

- la responsabilité sans faute de la commune est engagée ; l'accès à sa parcelle étant remis en cause par les travaux effectués, elle a subi, du fait de ces travaux un préjudice de jouissance depuis plusieurs années ; ce préjudice est évalué à la somme de 10 000 euros ;

- la valeur de la parcelle est sans lien avec le préjudice qu'elle a subi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2018, la commune de Pernand-Vergelesses, représentée par la SCP Bergeret et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 29 octobre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 15 novembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. François-Xavier Pin, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Rozenn Caraës, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... est propriétaire, sur le territoire de la commune de Pernand-Vergelesses, de la parcelle cadastrée section AL n° 60 d'une superficie de 1 895 m², située au lieudit " en Charlemagne ", jouxtant sur toute sa longueur le chemin rural n°30 dit des Noirets. Se plaignant de dommages causés par le déversement des eaux pluviales sur sa parcelle à la suite de travaux de remise en état de ce chemin effectués par la commune en 2002, Mme D... a demandé au tribunal administratif de Dijon, d'une part, de condamner la commune de Pernand-Vergelesses à lui verser, outre les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 1 130,94 euros et mis à sa charge par une ordonnance du président du tribunal administratif de Dijon du 26 avril 2016, la somme de 10 000 euros au titre de la réparation du trouble de jouissance subi et, d'autre part, d'enjoindre à la commune de supprimer le talus qu'elle a réalisé en amont de la parcelle en cause et de remettre ses abords en état d'accessibilité normale. Mme D... relève appel du jugement du 8 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Sur la responsabilité de la commune de Pernand-Vergelesses :

2. Même en l'absence de faute, la collectivité maître de l'ouvrage ainsi que, le cas échéant, l'entrepreneur chargé des travaux sont responsables vis-à-vis des tiers des dommages causés à ceux-ci par l'exécution d'un travail public, à moins que ces dommages ne soient imputables à un cas de force majeure ou à une faute de la victime.

3. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert commis en référé par le tribunal administratif de Dijon et d'un constat d'huissier daté du 30 juillet 2015, que les travaux entrepris en 2002 par la commune de Pernand-Vergelesses sur le chemin rural bordant la parcelle de Mme D... ont eu en particulier pour objet de créer à cet endroit un talus et d'y installer une conduite canalisant les eaux pluviales ruisselant sur ce chemin ainsi que les eaux de la source de Corton et dont le débouché se trouve en direction de la parcelle de la requérante, provoquant, en conséquence, des inondations sur ce terrain. Il s'ensuit que les travaux ainsi effectués sur ce chemin rural en 2002 par la commune de Pernand-Vergelesses, qui constituent des travaux publics à l'égard desquels Mme D... a la qualité de tiers, sont à l'origine des désordres de rétention d'eau constatés sur cette parcelle. Il n'est pas contesté que des travaux de reprise, menés par la commune en 2016, qui ont consisté en la réalisation d'un talus en amont de la parcelle en cause visant à la protéger des ruissellements et en une déviation le long du chemin du débouché de la canalisation d'écoulement des eaux de pluie et de la source de Corton, ont permis de mettre fin aux désordres affectant la parcelle de Mme D.... Par suite, la responsabilité sans faute de la commune est engagée à l'égard de Mme D... à raison des dommages causés à sa parcelle entre 2002 et 2016.

4. Cependant, il résulte de l'instruction qu'à partir de l'année 2003, Mme D... a procédé à une excavation sur une profondeur de cinq mètres environ de la parcelle en cause engendrant une dénivellation brutale par rapport au niveau du chemin rural. Le décaissement ainsi opéré a eu pour effet, comme il est notamment relevé par l'expert, d'accroître le phénomène de rétention d'eau sur la parcelle en question. En procédant à de tels travaux, Mme D... a contribué pour partie à la survenue des désordres d'inondation affectant son terrain. Dans ces conditions, les premiers juges ont fait une exacte appréciation des circonstances de l'affaire en limitant la responsabilité de la commune de Pernand-Vergelesses à 80 % des conséquences dommageables desdites inondations.

Sur la réparation du préjudice invoqué :

5. Il résulte de l'instruction, en particulier de l'expertise et des photographies produites, que la parcelle cadastrée section AL n° 60 est à l'état de friche. Il n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté par Mme D... que cette parcelle n'a fait l'objet d'aucun entretien ou travaux depuis 2003, année au cours de laquelle le prélèvement de terre rappelé au point 4 a été effectué. Mme D... ne soutient ni même n'allègue qu'elle aurait été empêchée d'accéder à cette parcelle ou de l'entretenir entre 2003 et 2016 en raison des inondations causées par le déversement des eaux de ruissellement. Dans ces conditions, le trouble de jouissance allégué n'est pas démontré. Par suite, les conclusions indemnitaires présentées par Mme D... ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Lorsque le juge administratif statue sur un recours indemnitaire tendant à la réparation d'un préjudice imputable à un comportement fautif d'une personne publique et qu'il constate que ce comportement et ce préjudice perdurent à la date à laquelle il se prononce, il peut, en vertu de ses pouvoirs de pleine juridiction et lorsqu'il est saisi de conclusions en ce sens, enjoindre à la personne publique en cause de mettre fin à ce comportement ou d'en pallier les effets. Lorsqu'il met à la charge de la personne publique la réparation d'un préjudice grave et spécial imputable à la présence ou au fonctionnement d'un ouvrage public, il ne peut user d'un tel pouvoir d'injonction que si le requérant fait également état, à l'appui de ses conclusions à fin d'injonction, de ce que la poursuite de ce préjudice, ainsi réparé sur le terrain de la responsabilité sans faute du maître de l'ouvrage, trouve sa cause au moins pour partie dans une faute du propriétaire de l'ouvrage. Il peut alors enjoindre à la personne publique, dans cette seule mesure, de mettre fin à ce comportement fautif ou d'en pallier les effets.

7. Mme D... fait valoir que sa parcelle est inaccessible du fait de la réalisation en amont de celle-ci d'un talus et demande qu'il soit enjoint à la commune de le supprimer, ce talus ayant pour effet de diriger, selon elle, les eaux pluviales en direction de sa parcelle et de rétablir l'accès à ce terrain. Toutefois, la commune relève en défense, sans être contredite, que le talus en cause a, au cours des opérations d'expertise, été aplani afin de préserver un accès à la parcelle en amont de celle-ci. En tout état de cause, il résulte de l'instruction, notamment du constat d'huissier dressé le 6 juillet 2018, que la parcelle dont il s'agit dispose, à son extrémité ouest, d'un accès au chemin rural. En outre, il résulte de l'instruction que le talus mis en place en 2016 par la commune de Pernand-Vergelesses a permis de mettre un terme aux désordres d'inondation constatés sur la parcelle en cause en dirigeant désormais les eaux de pluie en direction du chemin rural et non plus sur cette parcelle. Dès lors, le préjudice dont se prévaut la requérante ne perdure plus à la date du présent arrêt. Il suit de là que Mme D... n'est pas fondée à demander qu'il soit enjoint à la commune de supprimer le talus ni de rétablir l'accès à sa parcelle.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Sur les frais d'expertise :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de maintenir à la charge de Mme D... les frais de l'expertise prescrite par le juge des référés du tribunal administratif de Dijon, taxés et liquidés à la somme de 1 130,94 euros par une ordonnance du président du tribunal administratif de Dijon du 26 avril 2016.

Sur les frais non compris dans les dépens :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune de Pernand-Vergelesses, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D... la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Pernand-Vergelesses au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Mme D... versera une somme de 1 500 euros à la commune de Pernand-Vergelesses au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les frais d'expertise sont laissés à la charge de Mme D....

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... née B... et à la commune de Pernand-Vergelesses.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Drouet, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 février 2020.

2

N° 18LY01687


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY01687
Date de la décision : 20/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-03-04 Travaux publics. Différentes catégories de dommages. Dommages créés par l'exécution des travaux publics.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme CARAËS
Avocat(s) : ADIDA et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-02-20;18ly01687 ?
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