Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme G... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de la commune de Portes-en-Valdaine sur sa demande reçue le 10 décembre 2015 tendant à l'exécution des travaux de raccordement de sa propriété au réseau public d'eau potable et d'enjoindre au maire d'autoriser ce raccordement ou, subsidiairement, de prendre les dispositions nécessaires pour l'assurer en cas d'insuffisance du réseau, dans un délai d'un mois, à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Par un jugement n°s 1603154-1705686 du 11 juillet 2019, ce tribunal a annulé cette décision et a enjoint à la commune de Portes-en-Valdaine de statuer à nouveau sur la demande de Mme F... dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 28 août 2019, la commune de Portes-en-Valdaine, représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de Mme F... la somme de 3 000 euros au titre des frais du litige.
Elle soutient que :
- la décision contestée avait le caractère d'une décision purement confirmative de décisions implicites ou explicites antérieures et notamment de celles de 2001 et 2004, de sorte que la demande présentée au tribunal était irrecevable ;
- Mme F... connaissait donc les motifs de son refus constant avant même l'envoi de sa demande reçue le 10 décembre 2015.
La requête a été communiquée à Mme F... qui, bien qu'informée de l'obligation de ministère d'avocat, n'a pas produit de mémoire par avocat.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
- la décision du Conseil d'Etat du 26 janvier 2021, M. A... et Mme C..., n° 431494 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., pour la commune de Portes-en-Valdaine.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Portes-en-Valdaine (Drôme) relève appel du jugement du 11 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision implicite de rejet née du silence gardé par son maire sur la demande présentée par Mme F..., reçue le 10 décembre 2015, tendant à l'exécution des travaux de raccordement au réseau public d'eau potable de sa propriété située à l'extérieur du village, dans le secteur dit de la Citadelle.
2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 210-1 du code de l'environnement : " (...) chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d'accéder à l'eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous. ". Aux termes de l'article L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales : " Les communes sont compétentes en matière de distribution d'eau potable. Dans ce cadre, elles arrêtent un schéma de distribution d'eau potable déterminant les zones desservies par le réseau de distribution. (...) / Le schéma mentionné à l'alinéa précédent comprend notamment un descriptif détaillé des ouvrages de transport et de distribution d'eau potable. (...) ".
3. Aux termes de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme : " Les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4 ou L. 510-1, ne peuvent, nonobstant toutes clauses contractuelles contraires, être raccordés définitivement aux réseaux d'électricité, d'eau, de gaz ou de téléphone si leur construction ou leur transformation n'a pas été, selon le cas, autorisée ou agréée en vertu de ces dispositions ".
4. Il résulte des dispositions citées au point 2, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 30 décembre 2006 sur l'eau de laquelle elles sont issues, qu'il appartient aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale compétents de délimiter, dans le respect du principe d'égalité devant le service public, les zones de desserte dans lesquelles ils sont tenus, tant qu'ils n'en ont pas modifié les délimitations, de faire droit aux demandes de réalisation de travaux de raccordement, dans un délai raisonnable, pour toutes les propriétés qui ont fait l'objet des autorisations et agréments visés à l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme. Ce délai doit s'apprécier au regard, notamment, du coût et de la difficulté technique des travaux d'extension du réseau de distribution d'eau potable et des modalités envisageables de financement des travaux. En dehors des zones de desserte ou en l'absence de délimitation par le schéma de telles zones, la collectivité apprécie la suite à donner aux demandes d'exécution de travaux de raccordement, dans le respect du principe d'égalité devant le service public, en fonction, notamment, de leur coût, de l'intérêt public et des conditions d'accès à d'autres sources d'alimentation en eau potable.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
5. En premier lieu, Mme F..., qui a fait édifier en 1994 sur le territoire de la commune de Portes-en-Valdaine une maison d'habitation sur un terrain lui appartenant, justifie d'un intérêt pour agir à l'encontre de la décision litigieuse.
6. En deuxième lieu, eu égard aux dispositions des articles L. 112-6 et R. 112-5 du code des relations entre le public et l'administration, le délai de recours contentieux contre la décision implicite de rejet née du silence gardé par la commune sur la demande de raccordement de Mme F... réceptionnée le 15 décembre 2015 n'a pas couru ainsi que l'a jugé le tribunal, l'intéressée n'ayant pas été informée par la commune des conditions de naissance d'une décision implicite de rejet ainsi que des voies et délais de recours ouverts contre cette décision.
7. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que si Mme F... a demandé à plusieurs reprises entre 2001 et 2004 à la commune de Portes-en-Valdaine le raccordement de sa propriété au réseau public d'eau potable, la décision intervenue le 4 mai 2004 a été notifiée à une date incertaine et ne comportait pas l'indication des voies et délais de recours. En 2011, la commune de Portes-en-Valdaine a arrêté le schéma de distribution d'eau potable qui dessert le secteur du hameau de la Citadelle dans lequel est classée la propriété de Mme F.... L'intervention du schéma de distribution d'eau potable fait obstacle à ce que le nouveau refus implicite de rejet né du silence gardé par le maire de la commune de Portes-en-Valdaine sur la demande présentée par Mme F... tendant à l'exécution des travaux de raccordement au réseau public d'eau potable de sa propriété reçue le 10 décembre 2015 soit regardé comme confirmatif du refus opposé en 2004. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que la décision implicite contestée serait purement confirmative de décisions antérieures devenues définitives doit être écartée.
Sur le bien-fondé du jugement :
8. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Aux termes de l'article L. 232-4 du même code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués. ". En l'absence de communication des motifs dans le délai d'un mois la décision implicite se trouve entachée d'illégalité.
9. Il ressort des pièces du dossier que Mme F... a présenté par une lettre reçue le 10 mars 2016 une demande de communication des motifs de la décision implicite de rejet de sa demande de raccordement au réseau de distribution d'eau potable de la commune. La commune n'a pas communiqué les motifs dans le délai d'un mois prévu par les dispositions précitées de la décision implicite de rejet. Par suite, et alors que la décision du 4 mai 2004 évoquée au point 7 adressée antérieurement à cette décision ne saurait tenir lieu de motivation, la décision implicite de rejet est entachée d'illégalité.
10. Il résulte de ce qui précède que la commune de Portes-en-Valdaine n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision implicite de rejet née du silence gardé par son maire sur la demande présentée par Mme F... tendant à l'exécution des travaux de raccordement au réseau public d'eau potable de sa propriété. Sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre des frais du litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Portes-en-Valdaine est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Portes-en-Valdaine et à Mme G....
Délibéré après l'audience du 17 juin 2021, à laquelle siégeaient :
Mme B..., présidente,
Mme E..., assesseure la plus ancienne,
M. Rivière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 juin 2021.
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N° 19LY03350