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31/05/2022 | FRANCE | N°20LY01411

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 31 mai 2022, 20LY01411


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... A..., Mme B... A... et Mme D... A... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 9 juin 2017 par lequel le maire de Passy a refusé de leur délivrer un permis de construire trois bâtiments comprenant trente-six logements.

Par un jugement n° 1706445 du 12 mars 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 mai 2020, un mémoire complémentaire enregistré le 7 août 2020, e

t des mémoires en réplique enregistrés les 19 juillet 2021 et 14 avril 2022, qui n'ont pas été ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... A..., Mme B... A... et Mme D... A... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 9 juin 2017 par lequel le maire de Passy a refusé de leur délivrer un permis de construire trois bâtiments comprenant trente-six logements.

Par un jugement n° 1706445 du 12 mars 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 mai 2020, un mémoire complémentaire enregistré le 7 août 2020, et des mémoires en réplique enregistrés les 19 juillet 2021 et 14 avril 2022, qui n'ont pas été communiqués, Mme C... A..., Mme B... A... et Mme D... A..., représentées en dernier lieu par Me Chesnay, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 mars 2020 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 9 juin 2017 et la décision de rejet de leur recours gracieux ;

3°) à titre subsidiaire de surseoir à statuer afin de régulariser leur demande en application des dispositions de l'article L. 600-5 ou de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

4°) de faire injonction au maire de Passy de leur délivrer le permis sollicité ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur demande dans un délai de deux mois ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Passy la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le maire de Passy s'est à tort senti en situation de compétence liée pour rejeter la demande ;

- le motif tiré de la méconnaissance de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme est illégal, alors au demeurant que le projet pouvait être accordé au bénéfice de la dérogation prévue au 4° de l'article L. 111-4 du même code ;

- le motif tiré de la méconnaissance de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme est illégal ;

- le motif tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme est illégal :

- elles sont fondées à exciper de l'illégalité de l'avis rendu par le préfet de la Haute-Savoie.

Par un mémoire enregistré le 18 juin 2021, la commune de Passy, représentée par la SCP Foussard-Froger, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge des requérantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.

Par un mémoire enregistré le 31 mars 2022, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 25 avril 2022, par une ordonnance en date du 1er avril 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Chesney pour les consorts A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 9 juin 2017, rendu après avis conforme du préfet de la Haute-Savoie, le maire de Passy a refusé de délivrer aux consorts A... le permis de construire qu'elles sollicitaient en vue de l'édification de trois bâtiments comprenant trente-six logements. Les intéressées relèvent appel du jugement du 12 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 174-1 du code de l'urbanisme : " Les plans d'occupation des sols qui n'ont pas été mis en forme de plan local d'urbanisme, en application du titre V du présent livre, au plus tard le 31 décembre 2015 sont caducs à compter de cette date, sous réserve des dispositions des articles L. 174-2 à L. 174-5. " L'article L. 174-3 dudit code dispose : " Lorsqu'une procédure de révision du plan d'occupation des sols a été engagée avant le 31 décembre 2015, cette procédure peut être menée à terme en application des articles L. 123-1 et suivants, dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, sous réserve d'être achevée au plus tard le 26 mars 2017 ou, dans les communes d'outre-mer, le 26 septembre 2018. Les dispositions du plan d'occupation des sols restent en vigueur jusqu'à l'approbation du plan local d'urbanisme et au plus tard jusqu'à cette dernière date. "

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme : " Lorsque le maire (...) est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu ; (...) ". Le dernier alinéa de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme dispose : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir ainsi que les déclarations préalables sur lesquelles il n'a pas été statué à la date du transfert de compétence restent soumises aux règles d'instruction et de compétence applicables à la date de leur dépôt. " Aux termes de l'article L. 422-6 dudit code : " En cas d'annulation par voie juridictionnelle ou d'abrogation d'une carte communale, d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, ou de constatation de leur illégalité par la juridiction administrative ou l'autorité compétente et lorsque cette décision n'a pas pour effet de remettre en vigueur un document d'urbanisme antérieur, le maire (...) recueille l'avis conforme du préfet sur les demandes de permis ou les déclarations préalables postérieures à cette annulation, à cette abrogation ou à cette constatation. "

4. Il ressort des pièces du dossier que, suite à l'annulation du plan local d'urbanisme adopté le 27 juin 2013 par jugement du 26 mars 2015 du tribunal administratif de Grenoble, le plan d'occupation des sols approuvé en 1980 a été remis en vigueur. Le conseil municipal de Passy ayant prescrit l'élaboration d'un nouveau plan local d'urbanisme par délibération du 26 novembre 2015, le plan d'occupation des sols est demeuré applicable en vertu des dispositions citées au point 2 jusqu'au 26 mars 2017, avant de devenir caduc. Dans ces conditions, le maire de Passy, qui a rendu sa décision postérieurement à cette date, devait saisir pour avis conforme le préfet de la Haute-Savoie, en application des dispositions de l'article L. 442-5 du code de l'urbanisme. A cet égard, les requérantes ne peuvent faire valoir que devaient s'appliquer les règles de compétence à la date du dépôt de leur demande, en février 2017, dès lors que ne s'appliquent ni les dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme citées au point précédent, la compétence du maire de Passy ne résultant pas d'un transfert de compétence, ni les dispositions de l'article L. 442-6 dès lors que l'absence de document d'urbanisme sur le territoire de la commune résulte en l'espèce de la caducité du plan d'occupation des sols remis en vigueur à compter de l'annulation du plan local d'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de ce que la demande de permis de construire n'aurait pas dû être soumise à un avis conforme du préfet de la Haute-Savoie et de ce que le maire de Passy se serait par suite à tort senti en situation de compétence liée pour rejeter la demande doit être écarté.

5. En second lieu, le maire de Passy a refusé de délivrer le permis de construire sollicité au motif que, ainsi que l'avait estimé le préfet de la Haute-Savoie dans son avis du 27 mars 2017, le projet méconnaît l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme, qu'il méconnaît le principe d'urbanisation limitée posé à l'article L. 111-3 du même code, et enfin que l'implantation d'un des bâtiments méconnaît l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme.

6. Aux termes de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme : " L'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de

constructions traditionnelles ou d'habitations existants (...) ". Ces dispositions régissent

entièrement la situation des communes classées en zone de montagne pour l'application de la

règle de constructibilité limitée, qu'elles soient ou non dotées de plan d'urbanisme, à l'exclusion

des dispositions prévues à l'article L. 111-3 régissant la situation des communes non dotées d'un

plan d'occupation des sols ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu.

7. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet, assez vaste et largement arboré, même s'il comporte également une petite construction, se situe entre deux routes départementales, au nord et au sud. Les trois bâtiments d'habitation projetés doivent s'implanter à près de 200 mètres des constructions situées à l'est, sans que les requérantes puissent utilement se prévaloir de la délivrance d'un permis d'aménager sur les terrains séparant l'unité foncière du projet de ces constructions, dès lors qu'aucune construction n'avait été édifiée à la date du refus en litige. Les requérantes font valoir également la présence, au sud de la route départementale située en aval du terrain, de plusieurs constructions. Si ces bâtiments, implantés le long de la voie et rattachés à un ensemble de constructions plus densément bâties font partie d'un groupe de constructions existantes, au sens des dispositions citées au point précédent, les bâtiments projetés, compte tenu de leur implantation en amont de la route, sur un secteur dépourvu de constructions à proximité, ainsi qu'il a été dit, et de la forte pente des terrains ne peuvent être regardés comme se rattachant à ce groupe de constructions, ni comme se situant en continuité de ce dernier. Par suite, et sans qu'aient d'incidence les classements antérieurs et futurs des terrains en litige dans les différents documents d'urbanisme de la commune, le préfet de la Haute-Savoie, dans son avis rendu le 27 mars 2017, et le maire de Passy, dans la décision en litige, ont pu légalement refuser pour ce motif de délivrer le permis de construire sollicité.

8. Il résulte de l'instruction que le maire de Passy aurait pris la même décision en se fondant sur le seul motif tiré de la méconnaissance de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme, qui pouvait légalement le fonder.

9. Si les requérantes sollicitent l'application des dispositions de l'article L. 600-5 ou de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de telles dispositions permettent la régularisation des autorisations d'urbanisme délivrées, et ne trouvent pas à s'appliquer pour un litige relatif au refus de délivrance d'un permis de construire.

10. Il résulte de ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction doivent également être rejetées.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Passy, qui n'est pas partie perdante, verse aux requérantes la somme qu'elles demandent au titre des frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Passy au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête des consorts A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Passy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., pour les requérantes, à la commune de Passy et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme Christine Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2022.

Le rapporteur,

Thierry BesseLa présidente,

Danièle Déal

La greffière,

Fabienne Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui les concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY01411


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01411
Date de la décision : 31/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : CHESNEY

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-05-31;20ly01411 ?
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