La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/02/2023 | FRANCE | N°21LY04253

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 09 février 2023, 21LY04253


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 3 décembre 2019 par laquelle le président du conseil départemental de la Loire lui a refusé la délivrance d'un agrément pour l'exercice de l'activité d'assistante familiale, ensemble la décision du 2 mars 2020 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2005060 du 26 octobre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée

le 22 décembre 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 22 février 2022, Mme C... B..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 3 décembre 2019 par laquelle le président du conseil départemental de la Loire lui a refusé la délivrance d'un agrément pour l'exercice de l'activité d'assistante familiale, ensemble la décision du 2 mars 2020 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2005060 du 26 octobre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 décembre 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 22 février 2022, Mme C... B..., représentée par Me Haziza, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2005060 du 26 octobre 2021 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler la décision du 3 décembre 2019 par laquelle le président du conseil départemental de la Loire lui a refusé la délivrance d'un agrément pour l'exercice de l'activité d'assistante familiale, ensemble la décision du 2 mars 2020 rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de la Loire de lui délivrer l'agrément sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou subsidiairement de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge du département de la Loire une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme B... soutient que :

- les décisions sont entachées d'incompétence ;

- la matérialité des faits n'est pas établie et les décisions sont entachées d'erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 avril 2022, le département de la Loire, représenté par la SELARL BLT droit public, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le département de la Loire soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 27 avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 mai 2022 à 16h30.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Stillmunkes, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,

- les observations de Me Haziza, représentant Mme B...,

- et les observations de Me Denizot, représentant le département de la Loire.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 3 décembre 2019, le président du conseil départemental de la Loire a refusé à Mme B... la délivrance d'un agrément pour l'exercice de l'activité d'assistante familiale. Par une décision du 2 mars 2020, il a rejeté le recours gracieux formé par Mme B... contre cette décision du 3 décembre 2019. Mme B... interjette appel du jugement du 26 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.

2. Aux termes de l'article L. 421-2 du code de l'action sociale et des familles : " L'assistant familial est la personne qui, moyennant rémunération, accueille habituellement et de façon permanente des mineurs et des jeunes majeurs de moins de vingt et un ans à son domicile. Son activité s'insère dans un dispositif de protection de l'enfance, un dispositif médico-social ou un service d'accueil familial thérapeutique (...) / L'assistant familial constitue, avec l'ensemble des personnes résidant à son domicile, une famille d'accueil ". Aux termes de l'article L. 421-3 du même code : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. / Un référentiel approuvé par décret en Conseil d'Etat fixe les critères d'agrément. / (...) / L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne (...) ". Aux termes de l'article R. 421-3 du même code : " Pour obtenir l'agrément d'assistant maternel ou d'assistant familial, le candidat doit : / 1° Présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif ; / (...) / 3° Disposer d'un logement ou, dans le cas d'un agrément pour l'exercice dans une maison d'assistants maternels, d'un local dédié dont l'état, les dimensions, les conditions d'accès et l'environnement permettent d'assurer le bien-être et la sécurité des mineurs, compte tenu du nombre d'enfants et des exigences fixées par le référentiel en annexe 4-8 pour un agrément d'assistant maternel ou par le référentiel en annexe 4-9 pour un agrément d'assistant familial ". L'annexe 4-9 du même code établit le référentiel fixant les critères de l'agrément des assistants familiaux.

3. En premier lieu, la décision du 3 décembre 2019 a été signée par Mme D..., sur le fondement de la délégation de signature prévue par l'article 6.2 de l'arrêté du 17 juillet 2019, régulièrement affiché. La décision de rejet du recours gracieux du 2 mars 2020 a pour sa part été signée par Mme A..., sur le fondement de la délégation de signature prévue par l'article 6.3 de l'arrêté du 14 février 2020, régulièrement affiché. Le moyen tiré de l'incompétence doit, en conséquence, être écarté.

4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B... a déposé une première demande d'agrément en mai 2016, qui a été rejetée le 22 juin 2017. Pour l'instruction de cette première procédure, un rapport d'entretien psychologique et un rapport de visite à domicile ont été établis. Mme B... a formé une seconde demande d'agrément en mai 2019, qui a été rejetée par les décisions contestées. Pour l'instruction de cette seconde procédure, un nouveau rapport de visite a été dressé conjointement par une psychologue et un travailleur social. Le recours gracieux formé par Mme B... a, enfin, donné lieu à un nouveau rapport d'entretien psychologique par un autre psychologue.

5. La décision du 3 décembre 2019 relève tout d'abord des insuffisances dans les capacités d'accueil individualisé et sécurisant des jeunes susceptibles d'être confiés. Il est constant que la requérante, qui a quatre enfants nés respectivement en février 2000, décembre 2000, novembre 2003 et février 2008, travaille à domicile dans le cadre d'une exploitation agricole gérée par son époux. De façon similaire, les différents rapports relèvent un manque d'individualisation des différents enfants et une difficulté à concilier de multiples activités avec le suivi individualisé de nombreux enfants. Le rapport de visite de 2019 relève ainsi, par exemple, l'oubli d'une enfant accueillie qu'il fallait aller chercher, ou encore l'oubli du prénom d'une autre enfant accueillie et présente lors de la visite. Les rapports relèvent également une prise en compte insuffisante de la dimension psycho-affective de l'accueil.

6. La décision du 3 décembre 2019 relève également une insuffisance dans les capacités d'analyse et de recul critique. De façon similaire, les différents rapports relèvent l'absence de réflexion construite sur les particularités des enfants susceptibles d'être confiés à une assistante familiale, sur les attendus spécifiques de cette activité et sur les conditions concrètes dans lesquelles l'accueil d'un ou plusieurs enfants pourrait être organisé. Ils relèvent qu'aucune anticipation n'est faite sur différentes difficultés possibles, ni sur l'éventuelle nécessité d'une prise en charge individualisée.

7. La décision du 3 décembre 2019 relève enfin des dangers dans les conditions matérielles d'accueil. La première procédure a conduit à constater un logement, rattaché à une exploitation agricole, qui est vétuste et en cours de réfection. Ont en particulier été relevés des dangers tenant à la hauteur de plusieurs fenêtres et fenestrons, à un escalier sans rampe, à l'absence de justification de l'entretien et du ramonage d'une chaudière à fuel, à une piscine hors sol non sécurisée, à l'accès possible aux bâtiments agricoles et à l'accès non sécurisé à la route. La seconde procédure a conduit à constater qu'un incendie est survenu au rez-de-chaussée et a affecté également le premier étage. Les dangers liés à l'accès aux bâtiments de la ferme, aux matériels, à la route et à la piscine, qui est notée comme hors d'âge, sont à nouveau relevés, de même que les risques tenant à l'absence de sécurisation de plusieurs fenêtres. Le ramonage n'est pas justifié.

8. La décision du 2 mars 2020 relève en outre des fragilités personnelles, liées à l'histoire de la requérante, dont les rapports précités précisent effectivement la nature. Les mêmes rapports relèvent l'absence de distance critique et de réévaluation de cette histoire, qui porte un risque potentiel de déstabilisation personnelle et de mauvaise adaptation à la situation propre de chaque enfant accueilli, ce qui rejoint le premier motif de la décision du 3 décembre 2019.

9. Il ne ressort dès lors pas des pièces du dossier que les décisions contestées se fonderaient sur des éléments matériellement inexacts.

10. En troisième lieu, il est vrai que la requérante justifie d'une expérience positive dans l'accueil de jeunes qui lui sont confiés, de façon limitée et non durable, par les services de la protection judiciaire de la jeunesse ou en parrainage avec une association. Toutefois, eu égard à l'ensemble des éléments d'insuffisance et de risque qui ont été relevés et remettent en cause ses capacités à organiser un accueil habituel et permanent d'enfants ayant des histoires difficiles et nécessitant chacun une prise en compte de ses besoins particuliers, dans un cadre exempt de tout risque, le président du conseil départemental n'a pas en l'espèce commis d'erreur d'appréciation en refusant le bénéfice d'un agrément pour l'exercice de l'activité d'assistante familiale.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions présentées par le département de la Loire sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées pour le département de la Loire sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au département de la Loire.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

Mme Bentéjac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2023.

Le rapporteur,

H. Stillmunkes

Le président,

F. Pourny La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au préfet de la Loire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY04253


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY04253
Date de la décision : 09/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

04-02-02-02-01 Aide sociale. - Différentes formes d'aide sociale. - Aide sociale à l'enfance. - Placement des mineurs. - Placement familial.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Henri STILLMUNKES
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SCP BLT DROIT PUBLIC

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-02-09;21ly04253 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award