Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2019, par lequel le maire de la commune de Porcieu-Amblagnieu a opposé un sursis à statuer à sa déclaration préalable de division des parcelles cadastrées section C nos ... en vue de construire, et la décision du 4 mars 2020, par laquelle le maire de la commune de Porcieu-Amblagnieu a rejeté son recours gracieux du 8 janvier 2020.
Par un jugement n° 2002384 du 29 juillet 2022, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 12 novembre 2019 et la décision du 4 mars 2020 et a enjoint au maire de Porcieu-Amblagnieu de réexaminer la déclaration préalable déposée par Mme A..., dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement.
Procédures devant la cour
I) Par une requête et un mémoire enregistrés les 28 septembre 2022 et 27 mars 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, sous le n° 22LY02859, la commune de Porcieu-Amblagnieu, représentée par Me Cognat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 juillet 2022 ;
2°) de rejeter la demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le lot détaché par la déclaration préalable n'est pas entouré de nombreuses constructions sur trois de ses côtés, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif ; il appartient à l'enveloppe urbaine dans laquelle le parti d'aménagement entend réduire de manière drastique les possibilités de réaliser des constructions ; le projet d'aménagement et de développement durables contient une orientation tendant à une urbanisation ciblée sur la densification d'un nombre limité de hameaux et de quartiers situés en dehors du bourg, dont ne fait pas partie le hameau de Marieu ;
- la décision de sursis à statuer est fondée sur le parti d'aménagement de la commune tendant à réduire les possibilités de construire sur certaines parties du territoire comme le hameau de Marieu, et non sur le fait que le projet préjudicierait à l'exploitation de l'espace agricole contigu sur des côtés ou favoriserait une extension ou une dispersion de l'urbanisation existante ;
- l'état d'avancement du projet de plan local d'urbanisme (PLU) est suffisant et, eu égard au parti d'aménagement retenu, le projet, qui permettrait la réalisation d'une construction sur le second rang du terrain et alors que ce nouveau lot n'est entouré que d'une construction sur un côté, est de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2022, Mme B... A..., représentée par Me Gallety, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune de Porcieu-Amblagnieu les dépens ainsi le versement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance en date du 6 mars 2023 la clôture de l'instruction a été fixée au 28 mars 2023.
II) Par une requête, enregistrée le 28 septembre 2022 sous le n° 22LY02860, la commune de Porcieu-Amblagnieu, représentée par Me Cognat, demande à la cour de prononcer le sursis à exécution de ce jugement du 29 juillet 2022 en application des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative et de mettre à la charge de Mme A... le versement de la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- compte tenu du jugement du 29 juillet 2022 du tribunal administratif de Grenoble qui a fait l'objet d'un appel, et des conséquences d'une éventuelle décision de non-opposition à déclaration préalable, il est nécessaire de solliciter un sursis à exécution de ce jugement ;
- il existe des moyens sérieux de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué ;
- l'exécution de la décision de première instance risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2022, Mme B... A..., représentée par Me Gallety, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune de Porcieu-Amblagnieu les dépens ainsi le versement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Burnichon, première conseillère,
- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,
- les observations de Me Cognat représentant la commune de Porcieu-Amblagnieu et de Me Barnouin représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A... a déposé le 4 octobre 2019 une déclaration préalable pour une division en vue de construire, complétée le 26 octobre 2019, sur un terrain cadastré ... situé ... sur le territoire de la commune de Porcieu-Amblagnieu. Par un arrêté du 12 novembre 2019, le maire de Porcieu-Amblagnieu a opposé un sursis à statuer à cette demande. Par un jugement du 29 juillet 2022, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté du 12 novembre 2019, ainsi que la décision du 4 mars 2020 rejetant le recours gracieux exercé par Mme A..., et a enjoint au maire de Porcieu-Amblagnieu de réexaminer cette déclaration préalable dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement. La commune de Porcieu-Amblagnieu relève appel de ce jugement, par la requête susvisée no 22LY02859. Par une autre requête, enregistrée sous le n° 22LY02860, la commune de Porcieu-Amblagnieu, demande à la cour, sur le fondement des dispositions des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, de prononcer le sursis à exécution de ce jugement du 29 juillet 2022.
2. Ces deux requêtes sont dirigées contre un même jugement et présentent à juger des questions communes. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.
Sur la légalité de l'arrêté du 12 novembre 2019 :
3. Aux termes de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente se prononce par arrêté sur la demande de permis ou, en cas d'opposition ou de prescriptions, sur la déclaration préalable. Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus aux articles L. 102-13, L. 153-11 et L. 311-2 du présent code et par l'article L. 331-6 du code de l'environnement. (...) ". Aux termes de l'article L. 153-11 du même code : " (...) L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable ".
4. Il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 29 juillet 2016, le conseil municipal de Porcieu-Amblagnieu a décidé de prescrire la révision du POS en vue de sa transformation en plan local d'urbanisme (PLU). Le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) a eu lieu lors du conseil municipal du 14 juin 2017. Deux autres débats complémentaires sur les orientations générales du PADD ont eu lieu lors des séances de ce conseil des 11 décembre 2017 et 12 novembre 2018. Le bilan de la concertation a été approuvé par une délibération du 22 juillet 2019, qui arrête également le projet de PLU. Ce dernier a été approuvé par délibération du 9 mars 2020.
5. La commune de Porcieu-Amblagnieu, dont la population totale s'élève à 1 790 habitants, regroupe douze hameaux différents, dont celui de Marieu dans lequel se situe le projet en litige. Le rapport de présentation du PLU soumis à l'enquête publique relève la dispersion de l'habitat et le développement de l'urbanisation linéaire et les difficultés en résultant, ainsi que le choix de la commune de ne plus admettre désormais qu'une densification des tissus urbains dans des secteurs bâtis spécifiquement identifiés par le PADD. Il exclut plus particulièrement de cette volonté de densification des secteurs identifiés dans le cadre du diagnostic typomorphologique comme étant linéaires et se caractérisant par la faiblesse de l'armature viaire et des espaces collectifs, en citant, notamment, le hameau de Marieu, relevant plus particulièrement à cet égard l'effet déstructurant des extensions pavillonnaires notamment le long de la rue du Gros Buis et le fait qu'une densification ne ferait qu'accentuer ce phénomène, d'autant plus que les maisons ont souvent été implantées sur de grands jardins offrant des possibilités de divisions parcellaires. Ce même rapport précise que cet objectif est retranscrit par un classement en zone UH des parcelles en cause, qui, s'il autorise l'évolution du bâti existant, interdit la réalisation de constructions d'habitation nouvelles, en cohérence avec l'orientation du PADD de stopper les développements urbains en dehors du bourg et des secteurs fléchés par ce dernier document. Cette zone UH, dans laquelle s'inscrit le terrain d'assiette du projet en litige, englobe ainsi les secteurs urbains linéaires qui ne sont pas considérés comme un prolongement d'un centre villageois ou urbain, et le PADD prévoit une urbanisation ciblée sur la densification d'un nombre limité de hameaux et de quartiers situés en dehors du bourg en précisant qu'en dehors de ces secteurs, " seul sera admis un confortement des noyaux anciens des hameaux, dans le respect de leur morphologie bâtie, à l'exclusion de toute extension urbaine. Ainsi, les processus de développement en cours (notamment à Conilieu, Disimieu, Marieu et Turnoud) ne seront pas poursuivis, de manière à ne pas aggraver les dysfonctionnements constatés : urbanisation linéaire, mitage des espaces agricoles et naturels, manque d'équipements (...) ". Par ailleurs, à Marieu, présenté comme un hameau " agricole " par les documents précités, la zone UH est également cohérente avec l'orientation du PADD de ne pas rapprocher l'habitat des exploitations agricoles de ce hameau.
6. Le projet en litige porte sur le détachement d'un lot à bâtir sur la partie arrière d'un terrain situé dans le hameau de Marieu, en zone UH, et supportant, le long de la route du Gros Buis, une maison d'habitation. Le lot arrière à créer jouxte une vaste zone agricole au nord-est et ne peut être regardé comme s'insérant dans un tissu bâti existant dont il constituerait une dent creuse, étant relevé à cet égard que les constructions présentes sur les parcelles contigües ... sont, quant à elles, implantées le long de la route. Dans ces conditions, compte tenu du parti d'urbanisme de restructuration de l'habitat retenu par la commune de Porcieu-Amblagnieu, de faible taille et supportant un habitat dispersé composé de nombreux hameaux, ainsi que des objectifs précis du PADD concernant le hameau de Marieu, le maire, en opposant un sursis à statuer à la demande de Mme A... au motif qu'elle était de nature à compromettre l'exécution du futur PLU, n'a pas, alors même que le projet en litige n'impliquerait que la construction d'une maison individuelle, entaché sa décision d'une erreur d'appréciation. C'est par suite à tort que les premiers juges se sont fondés sur la méconnaissance par le maire de Porcieu-Ambagnieu des dispositions de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme pour annuler l'arrêté en litige et le rejet du recours gracieux.
7. Aucun autre moyen n'ayant été invoqué par Mme A... à l'appui de sa demande devant le tribunal, dont la cour se trouverait saisie par l'effet dévolutif de l'appel, la commune de Porcieu-Amblagnieu est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué et à soutenir que c'est à tort que, par ce dernier, le tribunal a fait droit à la demande de l'intéressée.
Sur la requête n° 22LY02860 :
8. Le présent arrêt ayant statué sur la requête de la commune de Porcieu-Amblagnieu tendant à l'annulation du jugement du 29 juillet 2022 du tribunal administratif de Grenoble, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 22LY02860 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution.
Sur les frais d'instance :
9. La commune de Porcieu-Amblagnieu n'étant pas partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à sa charge la somme que demande Mme A... à ce titre. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Porcieu-Amblagnieu sur ce même fondement. Les conclusions présentées par Mme A... sur le fondement de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées, aucun frais de cette nature n'ayant été exposé.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2002384 du 29 juillet 2022 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées par Mme A... devant le tribunal administratif de Grenoble sont rejetées.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 22LY02860 aux fins de sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 juillet 2022.
Article 4 : Les conclusions des parties tendant à la mise en œuvre des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761- 1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Porcieu-Amblagnieu et à Mme B... A....
Délibéré après l'audience du 25 avril 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,
Mme Camille Vinet, présidente assesseure,
Mme Claire Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2023.
La rapporteure,
C. Burnichon La présidente,
M. C...
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
Nos 22LY02859-22LY02860 2