Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SARL Jalousies a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner la commune de Montbard au paiement d'une indemnité totale de 194 482,54 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de sa carence à agir, dans le cadre de la procédure de fermeture administrative du bâtiment dans lequel elle exploitait un fonds de commerce, auprès des propriétaires de cet immeuble, ainsi que de sa carence dans l'exercice des pouvoirs de police des immeubles menaçant ruine.
Par un jugement n° 1903551 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 novembre 2021 et le 12 décembre 2022, la SARL Jalousies, représenté par Me Rothdiener, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 septembre 2021 ;
2°) de condamner la commune de Montbard au paiement d'une indemnité totale de 194 482,54 euros en réparation de ses préjudices ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Montbard une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune a commis des fautes en n'informant pas, en ne mettant pas en demeure et en ne notifiant pas l'arrêté de fermeture administrative au propriétaire bailleur de l'immeuble ;
- la commune a commis une faute en raison de l'inaction du maire dans la mise en œuvre de ses pouvoirs de police des édifices menaçant ruine auprès des propriétaires de l'immeuble ;
- la commune a commis une faute en raison de l'inaction du maire dans la mise en œuvre de la procédure de fermeture administrative vis-à-vis des propriétaires ;
- elle a subi un préjudice de 50 000 euros lié à l'impossibilité de valoriser et de céder les frais d'acquisition de son fonds de commerce et de son stock, un préjudice de 139 482,54 euros au titre de son manque à gagner et un préjudice de 5 000 euros au titre de son préjudice moral.
Par des mémoires enregistrés le 28 septembre 2022 et le 12 janvier 2023, la commune de Montbard, représentée par Me Lambert, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SARL Jalousies au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la SARL Jalousies ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 13 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 31 janvier 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vinet, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Conesa-Terrade, rapporteure publique,
- et les observations de Me Lambert, représentant la commune de Montbard.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Jalousies exploitait, depuis le 16 juillet 2010, une activité de vente de prêt-à-porter dans un immeuble, propriété indivise des consorts A..., situé place Gambetta à Montbard (Côte-d'Or). Après une mise en demeure du 18 mars 2015 d'exécuter certains travaux, notifiée à la SARL Jalousie, le maire de la commune de Montbard, par arrêté du 10 avril 2015, a ordonné la fermeture administrative de cet établissement recevant du public. La société Jalousies a saisi le tribunal administratif de Dijon d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Montbard à lui verser une indemnité en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de la carence de l'autorité municipale à agir auprès des propriétaires de l'immeuble dans lequel elle exploite son fonds de commerce, dans le cadre de la mise en œuvre de la procédure de fermeture administrative, ainsi que du fait de la carence du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police des immeubles menaçant ruine. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
2. En premier lieu, à l'appui de ses conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice que la commune de Montbard lui aurait causé du fait de la procédure de fermeture administrative de l'établissement qu'elle exploitait, la requérante soulève les mêmes moyens qu'en première instance, tirés de ce que la commune aurait dû informer, mettre en demeure et notifier l'arrêté de fermeture administrative aux propriétaires bailleurs de l'immeuble plutôt, et de ce que la commune a commis une faute du fait de l'inaction du maire dans la mise en œuvre de la procédure de fermeture administrative vis-à-vis desdits propriétaires. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté de fermeture administrative mentionné au point 1 ci-dessus : " I. - Le maire, par un arrêté de péril pris à l'issue d'une procédure contradictoire dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'Etat, met le propriétaire de l'immeuble menaçant ruine, et le cas échéant les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 511-1-1, en demeure de faire dans un délai déterminé, selon le cas, les réparations nécessaires pour mettre fin durablement au péril ou les travaux de démolition, ainsi que, s'il y a lieu, de prendre les mesures indispensables pour préserver les bâtiments contigus. / (...) Si l'état du bâtiment, ou d'une de ses parties, ne permet pas de garantir la sécurité des occupants, le maire peut assortir l'arrêté de péril d'une interdiction d'habiter et d'utiliser les lieux qui peut être temporaire ou définitive. Les dispositions des articles L. 521-1 à L. 521-4 sont alors applicables. / (...) IV. ' Lorsque l'arrêté de péril n'a pas été exécuté dans le délai fixé, le maire met en demeure le propriétaire d'y procéder dans un délai qu'il fixe et qui ne peut être inférieur à un mois. (...) V. ' A défaut de réalisation des travaux dans le délai imparti, le maire, par décision motivée, fait procéder d'office à leur exécution. Il peut également faire procéder à la démolition prescrite, sur ordonnance du juge statuant en la forme des référés, rendue à sa demande. ".
4. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment du rapport d'expertise judiciaire et de l'avis de la commission de sécurité, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que l'immeuble dans lequel la SARL Jalousies exploitait son fonds de commerce aurait été dans un état de ruine faisant obstacle à ce que la SARL Jalousies se conforme aux mesures qui lui avaient été prescrites par le maire, en tant qu'exploitante, au titre de la police des établissements recevant du public, ni que le maire de la commune de Montbard aurait dû prendre un arrêté de péril imminent plutôt que de décider la fermeture administrative de l'établissement. La circonstance que l'état de l'immeuble nécessitait des travaux incombant en principe au propriétaire des murs du fonds de commerce exploité par la SARL Jalousies et non à cette dernière pouvait amener celle-ci, si elle s'y estimait fondée, à faire usage des voies de droit correspondantes devant le juge judiciaire, mais ne révèle aucune carence du maire, qui a assuré la sécurité du public en prenant la mesure de fermeture administrative critiquée, dans l'exercice de ses pouvoirs de police. Les préjudices dont la requérante se prévaut étant uniquement liés à la mesure de fermeture administrative prise par le maire de la commune de Montbard, dont le caractère fautif n'est pas démontré et le lien allégué avec ses préjudices étant, en tout état de cause, indirect, elle n'est pas fondée à soutenir que le maire aurait dû prendre un arrêté de péril imminent et que son abstention à ce faire serait fautive et lui aurait causé des préjudices indemnisables en lien avec la faute alléguée.
5. Il résulte de ce qui précède que la SARL Jalousies n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Jalousies la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Montbard dans l'instance et non compris dans les dépens en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Montbard, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse quelque somme que ce soit à la SARL Jalousies au titre des frais liés à l'instance.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Jalousies est rejetée.
Article 2 : La SARL Jalousies versera la somme de 1 500 euros à la commune de Montbard au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Société Jalousies et à la commune de Montbard.
Délibéré après l'audience du 19 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente,
Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,
Mme Claire Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 octobre 2023.
La rapporteure,
C. Vinet
La présidente,
M. B...La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY03593