Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 29 avril 2022 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou, à défaut, de réexaminer sa situation.
Par un jugement n° 2209341 du 27 avril 2023, le tribunal a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 18 septembre 2023, M. B..., représenté par Me Fréry, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;
2°) d'enjoindre à la préfète du Rhône, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou, à défaut, de réexaminer sa situation.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ; il est entaché d'erreurs sur la matérialité des faits ; il méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du même code ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.
En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 août 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
M. B... ayant été régulièrement avertie du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Chassagne, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant de la République de Côte d'Ivoire, né le 2 mai 1999 à Nofou Dimbokro, a déclaré être entré sur le territoire français début 2015. Le juge des enfants près le tribunal de grande instance de Lyon l'a provisoirement placé auprès du service de l'aide sociale à l'enfance de la métropole de Lyon, par une ordonnance du 23 avril 2015, puis définitivement à compter du 10 avril 2015 jusqu'au 30 juin 2016 par un jugement en assistance éducative du 4 juin 2015. Il a également bénéficié de l'ouverture d'une tutelle d'État confiée à la métropole, par décision du juge des tutelles des mineurs du même tribunal du 20 octobre 2015. M. B... a obtenu du préfet du Rhône un titre de séjour au regard de son état de santé valable du 7 janvier 2021 au 6 janvier 2022, dont il a demandé le renouvellement sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refusé par un arrêté du 29 avril 2022 lui faisant également obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et fixant le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, le refus de titre de séjour en litige analyse la situation personnelle de l'intéressé et mentionne les dispositions pertinentes sur lesquelles le préfet a entendu se fonder. Ainsi, et quand bien même comporte-t-il des erreurs ou approximations, il est motivé.
3. En deuxième lieu, il n'apparaît pas que la date d'entrée en France de l'intéressé retenue par le préfet, soit février 2015, serait différente de celle que M. B... a déclarée lors de sa demande de renouvellement de son titre de séjour, portée sur son récépissé. Par ailleurs, si l'ordonnance de placement provisoire du 23 avril 2015 vise une ordonnance de placement provisoire datée par erreur du 26 décembre 2014, à une date où l'intéressé n'était vraisemblablement pas sur le territoire, une telle circonstance ne pouvait justifier son placement auprès des services de l'aide sociale à l'enfance avant la date du 8 avril 2015, que le préfet, comme les services de la métropole de Lyon, a relevé et qui est corroboré par le jugement en assistance éducative du 4 juin 2015. En outre, l'intéressé ne saurait utilement se prévaloir de l'hospitalisation dont il a fait l'objet au centre hospitalier le Vinatier à compter du 10 janvier 2023, qui est postérieure à la décision contestée. Enfin, si le préfet a relevé par erreur que M. B... avait été présent en France en situation irrégulière, alors qu'il était mineur et n'était ainsi pas soumis à l'obligation de possession d'un titre de séjour, ou, en toute hypothèse, qu'il aurait renoncé à son statut d'étranger malade, il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait pris une décision différente si de tels éléments n'avait pas été retenus. Le moyen tiré de ce que le refus de titre de séjour contesté serait entaché d'erreurs sur la matérialité des faits doit donc, en toutes ses branches, être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...). ".
5. M. B..., qui se prévaut essentiellement de son état de santé à compter de la fin de l'année 2019, critique l'appréciation de sa situation par le préfet. Il apparaît toutefois que, en dépit de l'hospitalisation dont il avait fait l'objet à la date d'intervention de la décision contestée, son état de santé s'était amélioré, étant considéré comme stabilisé. Il ne justifiait donc d'aucune circonstance humanitaire ni d'aucun motif exceptionnel susceptible de lui ouvrir droit au bénéfice des dispositions de l'article L. 435-1, si bien que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions en prenant le refus de titre de séjour contesté.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
7. M. B... se prévaut de sa présence sur le territoire français et de sa prise en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance depuis plusieurs années, de la réussite de sa scolarité, de sa volonté d'insertion en France ainsi que de ses problèmes de santé depuis 2019. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que, comme indiqué précédemment, l'intéressé, arrivé en France durant l'année 2015 a été placé auprès de la métropole de Lyon en qualité de mineur isolé, a bénéficié de contrats dits de " jeune majeur ", et a pu obtenir notamment en 2017 un brevet d'études professionnelles " maintenance des produits et équipements industriels ", puis en 2018, le baccalauréat professionnel spécialité " maintenance des équipements industriels ", et exercer une activité professionnelle en qualité d'intérimaire pendant plusieurs mois en 2021 et en 2022, il n'apparaît cependant pas qu'il justifierait d'une insertion d'une particulière intensité sur les plans personnel ou professionnel. De plus, et comme il a été dit plus haut, son état de santé s'est stabilisé, sans qu'aucune atteinte à son droit à une vie privée puisse être caractérisée. En outre, l'intéressé demeure sur le territoire français célibataire et sans enfant, et n'apparaît pas dépourvu de toutes attaches en Côte d'Ivoire, où il a toujours vécu avant son entrée en France et y dispose notamment de liens familiaux. Ainsi, compte tenu de ces éléments, le refus de titre de séjour contesté n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Aucune méconnaissance des dispositions ci-dessus ne saurait être retenue.
8. En cinquième lieu, pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être exposés au point précédent, l'obligation de quitter le territoire contestée n'apparaît pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.
9. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour. Le moyen ne peut qu'être écarté.
10. Il résulte de ce qui précède, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 21 décembre 2023 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;
M. Chassagne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 janvier 2024.
Le rapporteur,
J. Chassagne
Le président,
V.-M. Picard La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY02992
kc