Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'association Section de Rignat, Mme N... K... épouse F..., M. O... L..., Mme I... L..., M. J... B..., Mme P... C... épouse B..., M. M... D..., M. H... A... ainsi que Mme O... E... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération du 9 novembre 2020 par laquelle le conseil municipal de Bohas-Meyrat-Rignat a fixé le prix de vente des parcelles cadastrées 324 A 976 et 324 A 1593 à 310 000 euros et autorisé le maire à signer tous les documents relatifs à cette vente.
Par un jugement n° 2100284 du 31 mars 2022, le tribunal a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 25 mai 2022, l'association Section de Rignat, Mme F..., M. et Mme L..., M. et Mme B..., M. D..., M. A... et Mme E..., représentés par Me Riquier, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la délibération du 9 novembre 2020 du conseil municipal de Bohas-Meyriat-Rignat ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Q... la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il est insuffisamment motivé ;
- la délibération du 9 novembre 2020 est entachée d'un vice de procédure dès lors que la majorité des électeurs de la section n'ont pas donné leur accord concernant la vente des parcelles en cause, en méconnaissance de l'article L. 2411-16 du code général des collectivités territoriales ;
- la section de commune de Rignat a été automatiquement maintenue à la date de la fusion ; l'existence de cette section de commune est attestée par le versement de la taxe foncière ;
- la convention de fusion est illégale en ce qu'elle impose aux anciennes communes de Bohas et Rignat de demander la création de sections de commune pour conserver leurs biens propres.
Par un mémoire enregistré le 25 mai 2022, la commune de Q..., représentée par M. G..., demande à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de l'association Section de Rignat, Mme F..., M. et Mme L..., M. et Mme B..., M. D..., M. A... et Mme E..., la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors que l'association n'a pas d'intérêt lui donnant qualité pour agir et que les autres requérants personnes physiques ne démontrent pas leur intérêt à agir ;
- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
- l'ancienne commune de Rignat n'a jamais demandé son érection en section de commune, si bien qu'elle est demeurée simple commune associée, dépourvue de personnalité morale ;
- en l'absence de section de commune, la procédure suivie est régulière.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 70-1297 du 31 décembre 1970 ;
- la loi n°71-588 du 16 juillet 1971 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Evrard,
- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,
- et les observations de Me Gévaudan pour l'association Section de Rignat, Mme F..., M. et Mme L..., M. et Mme B..., M. D..., M. A... et Mme E... et de Me Leroy pour la commune de Bohas-Meyriat-Rignat.
Une note en délibéré a été produite le 11 avril 2024 pour l'association Section de Rignat, Mme F..., M. et Mme L..., M. et Mme B..., M. D..., M. A... et Mme E... et n'a pas été communiquée.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 28 décembre 1973, le préfet de l'Ain a prononcé la fusion des communes de Bohas, Meyriat et Rignat, qui ont pris le nom de Q... et conféré à l'ancienne commune de Rignat le statut de commune associée. Par une délibération du 13 décembre 2016, le conseil municipal de la commune de Q... a décidé de vendre les parcelles cadastrées 324 A 976 et 324 A 1593 situées sur le territoire de l'ancienne commune de Rignat et a autorisé le maire à entreprendre les démarches nécessaires à cette vente. Une proposition d'achat ayant été faite à la commune pour l'acquisition de l'immeuble, le conseil municipal de Q..., par une délibération du 9 novembre 2020, a décidé de fixer le prix de vente de ce bien à 310 000 euros et a autorisé le maire à signer tous les documents relatifs à cette vente. L'association Section de Rignat, Mme F..., M. et Mme L..., M. et Mme B..., M. D..., M. A... et Mme E... relèvent appel du jugement du 31 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette délibération.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements attaqués sont motivés. " Contrairement à ce que soutiennent les requérants, les premiers juges, en mentionnant que la création d'une section de commune n'était pas automatique, que les modalités de cette création pouvaient être déterminées par une convention de fusion, qu'en l'espèce, la convention annexée à l'arrêté de fusion du 28 décembre 1973 avait simplement envisagé cette possibilité sans être suivie d'une demande de création et qu'aucune autre pièce du dossier ne permettait de démontrer l'existence d'une telle demande, ont suffisamment précisé les raisons pour lesquelles ils ont estimé qu'il n'existait pas de section de commune de Rignat. Par suite, le jugement attaqué est suffisamment motivé.
Sur la légalité de la délibération du 9 novembre 2020 :
3. D'une part, aux termes de l'article 123-3 du code de l'administration communale, alors en vigueur, repris à l'article L. 2411-1 du code général des collectivités territoriales : " I. - Constitue une section de commune toute partie d'une commune possédant à titre permanent et exclusif des biens ou des droits distincts de ceux de la commune ". Aux termes de l'article L. 2411-16 du code général des collectivités territoriales : " Lorsque la commission syndicale n'est pas constituée, le changement d'usage ou la vente de tout ou partie des biens de la section est décidé par le conseil municipal statuant à la majorité absolue des suffrages exprimés, après accord de la majorité des électeurs de la section convoqués par le maire dans les six mois de la transmission de la délibération du conseil municipal. "
4. D'autre part, aux termes de l'article 34 de la loi du 31 décembre 1970 sur la gestion municipale et les libertés communales : " L'acte de fusion peut également prévoir que sera opéré une nouvelle dévolution de tout ou partie des biens ou des droits distincts de ceux de la nouvelle commune ". Et aux termes de l'article 7 de la loi du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de communes dans sa version applicable à la date de la fusion des communes de Bohas, Meyriat et Rignat : " Les conseils municipaux des communes désirant fusionner peuvent décider de procéder soit à une fusion simple, soit à une fusion comportant la création d'une ou plusieurs communes associées. / (...) La création d'une commune associée entraîne de plein droit le sectionnement électoral prévu par l'article L. 255-1 du code électoral, ainsi que l'institution d'un maire-délégué et la création d'une commission consultative et d'une annexe à la mairie prévues par l'article 9 de la présente loi. Les autres modalités de la fusion peuvent être déterminées par une convention qui fait l'objet d'une ratification par les conseils municipaux intéressés. / L'arrêté préfectoral prononçant la fusion en détermine la date et en complète, en tant que de besoin, les modalités. "
5. Enfin, aux termes de l'article 9 de la convention conclue par les anciennes communes de Bohas, Meyriat et Rignat et annexée à l'arrêté du préfet de l'Ain du 28 décembre 1973 : " Les anciennes communes de Bohas et Rignat conserveront tous leurs biens privés en demandant la création de sections de commune ".
6. Les requérants soutiennent que, dès lors que l'ancienne commune de Rignat était propriétaire des parcelles en litige, qui constituaient son bien propre, la fusion de cette ancienne commune avec celles de Bohas et Meyriat a nécessairement donné lieu à la création d'une section de commune de Rignat, en application de l'article 6 du décret 22 janvier 1959 relatif aux chefs-lieux et aux limites territoriales des communes, lequel prévoyait que : " Dans le cas où une commune réunie à une autre commune possède des biens autres que ceux visés à l'alinéa 3 du présent article, elle devient une section de la commune à laquelle elle est réunie ". Ils font valoir qu'en omettant de consulter les membres de la section, le conseil municipal de Q... a entaché la délibération en litige d'irrégularité.
7. Toutefois, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l'article 6 du décret du 22 janvier 1959 portant sur les conditions des " réunions ou distractions de communes ", lesquelles ont nécessairement été abrogées par les dispositions de la loi du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de communes et désormais codifiées aux articles L. 2113-1 et suivants du code général des collectivités territoriales. Alors que la convention annexée à l'arrêté du préfet de l'Ain du 28 décembre 1973, qui a défini les modalités de fusion sans méconnaître l'article 7 de la loi du 16 juillet 1971, a subordonné l'érection d'une section de commune à la demande des anciennes communes de Bohas et Rignat, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'ancienne commune de Rignat ait demandé à un quelconque moment à être érigée en tant que section de la commune de Q.... Enfin, ni la circonstance qu'un avis de taxes foncières a été adressé, à la suite d'une erreur des services fiscaux, à la " section de Rignat, mairie de Rignat à Bohas-Meyriat-Rignat ", alors d'ailleurs qu'il est constant que le paiement de ces taxes a été assuré par la commune de Q..., ni celle que le préfet de l'Ain a retiré, le 28 septembre 2018, son arrêté du 21 août 2018 prévoyant le transfert de la propriété des biens de la section du hameau de Rignat à la commune de Q..., ne sauraient démontrer l'existence d'une section de commune de Rignat, qui n'a jamais été érigée. Dans ces conditions, en l'absence de toute section de commune de Rignat, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la délibération du 9 novembre 2020 a été adoptée dans des conditions irrégulières.
8. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la commune de Q..., l'association Section de Rignat, Mme F..., M. et Mme L..., M. et Mme B..., M. D..., M. A... et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.
Sur les frais liés à l'instance :
9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. "
10. Les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Q..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par l'association Section de Rignat, Mme F..., M. et Mme L..., M. et Mme B..., M. D..., M. A... et Mme E.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ces derniers la somme globale de 1500 euros à verser à la commune de Bohas-Meyriat-Rignat en application de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association Section de Rignat, Mme F..., M. et Mme L..., M. et Mme B..., M. D..., M. A... et Mme E... est rejetée.
Article 2 : L'association Section de Rignat, Mme F..., M. et Mme L..., M. et Mme B..., M. D..., M. A... et Mme E... verseront à la commune de Bohas-Meyriat-Rignat la somme globale de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E..., représentante unique des requérants, et à la commune de Q....
Délibéré après l'audience du 11 avril 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Evrard, présidente de la formation de jugement,
Mme Psilakis, première conseillère,
Mme Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mai 2024.
La rapporteure,
A. EvrardL'assesseure la plus ancienne,
C. Psilakis
La greffière
F. Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 22LY01635
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