Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 17 septembre 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier d'Ardèche Méridionale a prononcé sa suspension de fonctions, ensemble la décision du 26 octobre 2021 portant rejet de son recours gracieux, d'enjoindre au directeur de lui verser sa rémunération et de reconstituer sa situation administrative à compter du 6 octobre 2021, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, enfin de condamner le centre hospitalier d'Ardèche Méridionale à lui verser une indemnité de 15 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis.
Par une ordonnance n° 2109610 du 20 mars 2023, le président de la huitième chambre du tribunal administratif de Lyon a pris acte du désistement de la requérante.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 21 mai 2023, Mme A..., représentée par Me Guyon, demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du tribunal administratif de Lyon du 20 mars 2023 ;
2°) d'annuler la décision de suspension du 17 septembre 2021 ;
3°) à titre subsidiaire, d'abroger la décision du 17 septembre 2021 et de procéder à un réexamen de sa situation ;
4°) d'enjoindre au centre hospitalier d'Ardèche Méridionale de la rétablir dans ses fonctions, de procéder à sa réintégration et au versement de sa rémunération, y compris de manière rétroactive, sous astreinte de 400 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Ardèche Méridionale une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle n'a pas été informée par son précédent conseil de l'existence du courrier adressé par le tribunal en application de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative ;
- sa requête conservait son objet et le tribunal ne pouvait pas qualifier juridiquement la " perte de conservation d'intérêt " de la requête dans le cadre du dossier qui lui était soumis dès lors qu'elle était en droit d'obtenir un jugement par un tribunal indépendant et impartial pour entendre sa cause par laquelle elle contestait la mesure de suspension sans rémunération dont elle faisait l'objet ;
- l'ordonnance attaquée méconnaît les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision en litige est entachée d'incompétence ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle n'a pas été informée sur ses droits à congés ;
- elle constitue une sanction disciplinaire qui est entachée d'irrégularité, dès lors notamment qu'elle n'a pas été précédée d'un avis du conseil de discipline et a été prise en méconnaissance du principe du contradictoire ;
- il s'agit également d'une sanction disciplinaire déguisée ;
- la mesure est disproportionnée ;
- elle est entachée d'une erreur de fait ;
- la décision contestée, qui a pour objet de prononcer une interdiction d'exercice ainsi qu'une suspension de fonction, est de nature à porter atteinte à l'organisation du service public hospitalier ;
- elle méconnaît les principes d'égalité et de non-discrimination ;
- elle est contraire à l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est contraire à l'article 2 de cette même convention ;
- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle porte atteinte au droit à la santé énoncé à l'article 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, et aux principes à valeur constitutionnelle d'égalité, de précaution, de respect de l'intégrité physique et du corps humain ;
- elle méconnaît le droit au respect du secret médical ;
- il y a lieu d'abroger la décision de suspension dès lors qu'elle est devenue illégale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2024, le centre hospitalier d'Ardèche Méridionale, représenté par Me Bracq, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-l du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens présentés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Lordonné, rapporteure publique,
- et les observations de Me Teston, représentant le centre hospitalier d'Ardèche Méridionale.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A..., agent titulaire de la fonction publique hospitalière, exerçant l'emploi d'aide-soignante, a fait l'objet d'une décision du 17 septembre 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier d'Ardèche Méridionale a prononcé sa suspension de fonctions, sans traitement à compter du même jour, au motif qu'elle ne justifiait pas de sa vaccination contre la covid-19 ou d'une contre-indication à cette vaccination. Elle a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler cette décision, ensemble la décision du 26 octobre 2021 portant rejet de son recours gracieux. Par lettre du 14 février 2023 dont son conseil a accusé réception le 16 février 2023, le tribunal a demandé à Mme A..., sur le fondement des dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative, de confirmer expressément le maintien de ses conclusions dans le délai d'un mois. Par une ordonnance du 20 mars 2023 dont Mme A... relève appel, le président de la 8ème chambre du tribunal a donné acte du désistement de la requête en l'absence de réponse à l'expiration du délai qui lui a été fixé.
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative : " Lorsque l'état du dossier permet de s'interroger sur l'intérêt que la requête conserve pour son auteur, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction, peut inviter le requérant à confirmer expressément le maintien de ses conclusions. La demande qui lui est adressée mentionne que, à défaut de réception de cette confirmation à l'expiration du délai fixé, qui ne peut être inférieur à un mois, il sera réputé s'être désisté de l'ensemble de ses conclusions ". Aux termes de l'article R. 611-8-2 du même code : " Toute juridiction peut adresser par le moyen de l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1, à une partie ou à un mandataire qui y est inscrit, toutes les communications et notifications prévues par le présent livre pour tout dossier. / (...) La partie est réputée avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception du courrier, à l'issue de ce délai (...) "
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que par un mémoire en défense enregistré le 8 février 2023, le centre hospitalier d'Ardèche Méridionale a conclu, dans le dernier état de ses écritures devant le tribunal, à ce que celui-ci constate que la requête avait perdu son objet dès lors que la décision que Mme A... contestait avait été retirée par une décision du 21 novembre 2022, produite à l'appui de ce mémoire en défense. Dans ces conditions, l'état du dossier, à la date de l'ordonnance attaquée, permettait de s'interroger sur l'intérêt que la requête conservait pour son auteur, et le premier juge a fait une juste application des dispositions de l'article R. 612-5-1. La circonstance que Mme A... n'aurait pas été informée par son précédent conseil de l'existence du courrier envoyé par le tribunal est sans incidence sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...) ". L'article 13 de cette même convention protège le droit à un recours effectif.
5. Les dispositions précitées de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative visent, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, à permettre au juge de s'assurer, avant qu'il statue, qu'une demande dont il est saisi conserve un intérêt pour son auteur. Eu égard à l'objectif qu'elles poursuivent et aux garanties dont leur mise en œuvre est entourée, ces dispositions ne sont pas incompatibles avec les stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En se bornant à soutenir qu'elle a été privée d'un recours contre une décision emportant de graves conséquences sur sa situation, Mme A... ne démontre pas que son droit à un procès équitable ou à un recours effectif aurait été méconnu. Le moyen tiré de ce que l'ordonnance attaquée méconnaîtrait les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Lyon a donné acte du désistement des conclusions de sa requête. L'ensemble de ses conclusions à fin d'annulation et d'injonction doit donc être rejeté.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du centre hospitalier d'Ardèche Méridionale, qui n'est pas la partie perdante, au titre des frais exposés par Mme A... à l'occasion du présent litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière la somme que le centre hospitalier demande au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier d'Ardèche Méridionale tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., au centre hospitalier d'Ardèche Méridionale.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 septembre 2024.
La rapporteure,
Emilie FelmyLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Michèle Daval
La République mande et ordonne au préfet de l'Ardèche en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY01730