Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2022 par lequel le préfet du Rhône a refusé le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2208759 du 17 février 2023, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 29 mai 2023, M. B..., représenté par Me Fréry, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté du 28 janvier 2022, ou subsidiairement de renvoyer l'affaire au tribunal ;
2°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de renouveler son titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de le munir, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est, en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative, insuffisamment motivé ;
- le tribunal a commis une erreur de droit dans la réponse qu'il a apportée au moyen tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour ;
- le préfet ne pouvait refuser de renouveler son titre de séjour sans avoir saisi la commission du titre de séjour par application de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il statuait sur une demande de renouvellement de titre de séjour ;
- le préfet et le tribunal n'ont pas procédé à un examen particulier et effectif de sa situation ;
- le refus de renouvellement de son titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- l'obligation de quitter le territoire et la décision fixant le pays de destination méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire et refusant le renouvellement du titre de séjour prive de base légale la décision fixant le pays de destination.
La préfète du Rhône, à laquelle la requête a été communiquée, n'a pas présenté d'observations.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;
- et les observations de Me Fréry pour M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D..., ressortissant tchadien né le 18 octobre 1995, déclare être entré en France le 4 avril 2010. Il relève appel du jugement du 17 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 janvier 2022 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur la régularité du jugement :
2. Pour écarter les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal a retenu que M. B... ne justifiait pas d'une continuité de présence en France. Le tribunal, qui n'était pas tenu de mentionner chacune des pièces produites par l'intéressé pour justifier de sa présence en France, a suffisamment motivé son jugement. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative qui imposent que les jugements soient motivés, doit être écarté comme manquant en fait.
3. Les moyens tirés de ce que le tribunal aurait commis une erreur de droit dans la réponse qu'il a apportée au moyen tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour et qu'il n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. B... sont relatifs au bien-fondé du jugement et non à sa régularité.
Sur la légalité des décisions :
4. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de la situation de M. B... en décidant de refuser de lui délivrer un titre de séjour.
5. En deuxième lieu, M. B... est arrivé en France, selon ses déclarations, le 4 avril 2010, alors qu'il était âgé de quatorze ans. Il a été placé auprès de l'ASE lorsqu'il était mineur, a poursuivi sa scolarité en France et a obtenu un titre de séjour sur le fondement du 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur qui a été renouvelé jusqu'au 21 octobre 2015. Il s'est vu remettre, dans le cadre de l'instruction de sa demande de renouvellement de ce titre de séjour, un récépissé renouvelé jusqu'au 10 avril 2016. Les différents documents qu'il a produits pour justifier de sa présence en France concernent pour la plupart les années 2010 à 2015 puis la période courant de novembre 2021 à l'année 2023. Il s'est borné à produire, pour la période intermédiaire, des attestations d'hébergement peu précises pour les années 2018/2019 et 2020/2021 ainsi que des déclarations d'impôt pour les revenus de2019, 2020 et 2021 établies en 2022. Il ne justifie pas, ainsi que l'a retenu le préfet, de sa présence en France entre le 11 avril 2016 et le 30 octobre 2021, date à laquelle il a été interpellé par les services de police. Même si M. B... indique avoir quitté son pays alors qu'il était âgé de quatorze ans, que ses parents n'y résident plus et que son frère qui est de nationalité française réside en France, il est célibataire, sans enfant, et n'a pas d'emploi, de sorte qu'il ne démontre aucune intégration sociale. Le préfet a noté à cet égard qu'il ne justifiait pas du caractère réel et sérieux du suivi de la préparation de CAP de carrossier qu'il devait faire et n'avait pas plus justifié du suivi effectif de sa formation pour le certificat de qualification professionnelle de commis de cuisine qui a eu lieu entre avril 2013 et juin 2014. Ainsi, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Rhône n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : / 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles (...) L. 423-22 (...) à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; ".
7. S'il ressort des pièces du dossier que le préfet a examiné la demande de titre de séjour de M. B... comme une demande de renouvellement d'un titre de séjour prévu à l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, toutefois M. B... ne conteste pas que, pour les motifs exposés au point 5 tenant à la réalité et au sérieux de sa formation, il ne remplissait pas effectivement les conditions de délivrance d'un tel titre. Par suite, le moyen invoqué tiré de ce que, à défaut pour le préfet d'avoir saisi la commission du titre de séjour, la procédure suivie aurait été irrégulière doit être écarté.
8. En quatrième lieu, le seul fait que M. B... ait quitté son pays à l'âge de quatorze ans et ait été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance lors de son arrivée en France ne permet pas de démontrer qu'il risquerait, en cas de retour au Tchad, d'être exposé à des traitements inhumains et dégradants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales soulevé à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination doit être écarté.
9. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.
10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 19 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;
Mme Boffy, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2024.
La rapporteure,
A. Duguit-LarcherLe président,
V-M. Picard
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY01849
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