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17/10/2024 | FRANCE | N°24LY00171

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 6ème chambre, 17 octobre 2024, 24LY00171


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 17 février 2023 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2306251 du 21 décembre 2023, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions p

récitées.





Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 18 janvier 2024, le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 17 février 2023 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2306251 du 21 décembre 2023, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions précitées.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 janvier 2024, le préfet de l'Isère demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2306251 du 21 décembre 2023 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de rejeter la demande de M. A....

Le préfet de l'Isère soutient que :

- le jugement n'est pas suffisamment motivé sur la preuve de la durée de présence ;

- la présence continue d'au moins dix ans n'est pas établie, en particulier pour les années 2013 à 2015, mais également pour les autres années ;

- le moyen tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour est inopérant ;

- les autres moyens invoqués par M. A... dans sa demande ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 août 2024, M. B... A..., représenté par Me Alampi, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, cette somme devant être versée à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 en cas d'obtention du bénéficie de l'aide juridictionnelle.

M. A... soutient que :

- c'est à juste titre que le tribunal a jugé que sa résidence habituelle en France depuis au moins 10 ans était établie ;

- subsidiairement, le refus de séjour n'est pas motivé, il est entaché d'incompétence, il est entaché de vice de procédure en l'absence de consultation de la commission du titre de séjour, il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et il est entaché d'erreur de droit en l'absence d'examen de sa situation ;

- l'obligation de quitter le territoire français a été édictée en méconnaissance de son droit d'être entendu, elle n'est pas motivée, elle est entachée d'incompétence, elle est entachée de vice de procédure en l'absence de consultation de la commission du titre de séjour, elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et elle est entachée d'erreur de droit en l'absence d'examen de sa situation ;

- la fixation du pays de renvoi est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par ordonnance du 8 juillet 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 5 septembre 2024 à 16h30.

Par une décision du 28 août 2024, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, modifiée, conclue à Rome le 4 novembre 1950 ;

- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Stillmunkes, président assesseur.

Deux notes en délibéré, présentées pour M. A..., ont été enregistrées le 30 septembre 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 23 octobre 1988, a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation des décisions du 17 février 2023 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination. Par le jugement attaqué du 21 décembre 2023, le tribunal a fait droit à cette demande. Le préfet de l'Isère interjette appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Contrairement à ce que soutient le préfet de l'Isère, le tribunal, qui a indiqué les motifs de droit et de fait qui fondent l'annulation qu'il a prononcée, a ainsi régulièrement motivé le jugement, alors même qu'il n'a pas énuméré toutes les pièces dont il a déduit que M. A... devait être regardé comme établissant une présence habituelle depuis au moins dix ans, mais en a résumé la nature et les caractéristiques.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco algérien susvisé : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ".

4. S'agissant des années 2013 à 2015, spécialement discutées par le préfet de l'Isère, il ressort des pièces du dossier que M. A... a produit de nombreuses quittances de loyer de bailleurs sociaux mentionnant la même adresse à Paris en 2013 et 2014, puis une autre adresse à Grenoble pour plusieurs périodes de l'année à partir de 2015, son père ayant déclaré l'avoir également hébergé et une association l'ayant par ailleurs domicilié, ainsi que, respectivement, pour l'année 2013, un relevé d'identité bancaire, une facture d'abonnement téléphonique et une facture d'achat avec livraison, mentionnant tous la même adresse, outre une ordonnance délivrée au terme d'une consultation médicale, pour l'année 2014, un courrier relatif à un autre abonnement téléphonique et une facture d'achat avec livraison, mentionnant tous la même adresse, outre une ordonnance délivrée au terme d'une consultation médicale et, pour l'année 2015, un avis d'imposition, une ordonnance d'un ophtalmologiste de Grenoble, un courrier du centre communal d'action sociale et une attestation d'une association. Dans sa décision, le préfet a par ailleurs indiqué que M. A... lui a fourni des pièces sur l'aide médicale d'Etat. Par leur nombre, leur nature et leur répartition sur les trois années en cause, l'ensemble de ces pièces sont de nature à établir en l'espèce une résidence habituelle entre 2013 et 2015. Pour la période postérieure, soit les années courant de 2016 à février 2023, date de la décision de refus de séjour, M. A... a produit les avis d'imposition établis pour chacune des années ainsi que, pour chacune des années en cause, des pièces de nature différente relatives à des périodes distinctes de chaque année, dont le cumul et la cohérence permettent d'établir en l'espèce de façon suffisamment probante une résidence habituelle en France maintenue durant au moins 10 ans à la date de la décision de refus de séjour. Le préfet de l'Isère n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler ses décisions, le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur la méconnaissance des stipulations précitées du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien.

Sur les frais de l'instance :

5. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de l'Isère est rejetée.

Article 2: Le surplus des conclusions de M. B... A... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

M. Gros, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.

Le rapporteur,

H. Stillmunkes

Le président,

F. Pourny

La greffière,

B. Berger

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 24LY00171


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY00171
Date de la décision : 17/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Henri STILLMUNKES
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : ALAMPI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-17;24ly00171 ?
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