Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :
1°) d'annuler la décision du 23 mars 2020 par laquelle le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme a refusé de la recruter ;
2°) d'enjoindre à ce dernier de réexaminer sa demande de recrutement ;
3°) de condamner le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme à lui verser la somme de 70 000 euros, outre intérêts au taux légal, capitalisés, en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de cette décision ;
Par jugement n° 2000755 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 25 août 2022, Mme A..., représenté par la société LKJ Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
2°) de faire droit à sa demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, sa demande était assortie de moyens ;
- elle a été employée pendant une durée excédant six ans sur des contrats à durée déterminée, de sorte que le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme aurait dû lui proposer un contrat à durée indéterminée en application de l'article 8 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 et de l'article 6 bis de la loi du 11 janvier 1984 ;
- son employeur a abusivement recouru à des contrats à durée déterminée et refusé de lui accorder ce contrat pour éviter de lui proposer un contrat à durée indéterminée, alors qu'au regard de son activité, l'intérêt du service commandait de recruter un agent titulaire ;
- l'employeur a commis une erreur manifeste en refusant de renouveler son contrat sans motif réel, pour un motif ne reposant pas sur l'intérêt du service ;
- la décision est entachée d'un détournement de pouvoir ;
- son employeur a méconnu le délai de prévenance prévu par l'article 38-1 du décret du 15 février 1988 ;
- le recours abusif à des CDD lui a causé un préjudice devant être indemnisé à hauteur de 20 000 euros couvrant les avantages auxquels elle aurait pu prétendre en cas de licenciement ;
- elle a subi un préjudice financier à hauteur de 40 000 euros ;
- elle a subi un préjudice moral à hauteur de 10 000 euros ;
Par mémoire enregistré le 6 janvier 2023, le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme, représenté par Me Roux, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 31 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 avril 2023 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bertrand Savouré, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Christine Psilakis, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... a été recrutée de façon discontinue par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme, sous contrats à durée déterminée, au cours de la période du 5 septembre 2011 au 12 juillet 2019, en vue d'être mise à disposition du département du Puy-de-Dôme pour exercer des remplacements d'adjoint technique dans des collèges. Par décision du 23 mars 2020, le président du centre de gestion a refusé de faire droit à sa demande de titularisation ou, à défaut, de renouvellement de dernier contrat. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'annulation de cette décision et la condamnation du centre de gestion à lui verser une somme de 70 000 euros en indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait des fautes qu'elle impute à cet établissement. Mme A... relève appel du jugement du 30 juin 2022 par lequel le tribunal a rejeté ses demandes.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Il ressort du dossier de première instance que les moyens invoqués devant le tribunal l'étaient exclusivement à l'appui de la démonstration de la responsabilité du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme. Par conséquent, les premiers juges ont pu régulièrement rejeter les conclusions d'excès de pouvoir comme dépourvues de moyens. La critique du motif d'irrecevabilité qu'a opposé le tribunal n'étant pas fondée, les conclusions en excès de pouvoir de la requête doivent être rejetée.
Sur les conclusions indemnitaires :
3. En premier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que Mme A... aurait dû se voir proposer un contrat à durée déterminée, par adoption des motifs des premiers juges tels qu'ils figurent aux point 12 et 13 du jugement.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, applicable aux centre de gestion de la fonction publique territoriale : " I- Les (...) établissements mentionnés à l'article 2 peuvent recruter temporairement des agents contractuels sur des emplois non permanents pour faire face à un besoin lié à : 1° Un accroissement temporaire d'activité, pour une durée maximale de douze mois, compte tenu, le cas échéant, du renouvellement du contrat, pendant une même période de dix-huit mois consécutifs (...) ". Aux termes de l'article 3-1 de la même loi : " (...) les emplois permanents des collectivités (...) peuvent être occupés par des agents contractuels pour assurer le remplacement temporaire de fonctionnaires (...) indisponibles en raison d'un détachement de courte durée, d'une disponibilité de courte durée (...), d'un détachement pour l'accomplissement d'un stage ou d'une période de scolarité préalable à la titularisation dans un corps ou un cadre d'emplois de fonctionnaires (...), d'un congé régulièrement octroyé (...) / Les contrats établis sur le fondement du premier alinéa sont conclus pour une durée déterminée et renouvelés, par décision expresse, dans la limite de la durée de l'absence du fonctionnaire ou de l'agent contractuel à remplacer (...) ".
5. Le renouvellement de contrats à durée déterminée afin de faire face à un accroissement temporaire d'activité ou de pourvoir au remplacement temporaire d'agents indisponibles répond, en principe, à des raisons objectives au sens de l'accord cadre annexé à la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, y compris lorsque l'employeur est conduit à recourir à ces contrats de manière récurrente, voire permanente, et alors même que les besoins en personnel de remplacement pourraient être couverts par le recrutement d'agents sous contrats à durée indéterminée. Toutefois, si l'existence de telles raisons objectives exclut en principe que le renouvellement des contrats à durée déterminée soit regardé comme abusif, c'est sous réserve qu'un examen global des circonstances dans lesquelles les contrats ont été renouvelés ne révèle pas, eu égard notamment à la nature des fonctions exercées par l'agent, ainsi qu'au nombre et à la durée cumulée des contrats en cause, un abus.
6. Il est constant que les contrats signés par Mme A... l'ont été en application des dispositions soit de l'article 3, soit de l'article 3-1 précités, en vue de remplacer temporairement des agents indisponibles ou de faire face à des accroissements temporaires d'activité exécutés. Si Mme A... fait valoir qu'elle a conclu quarante-quatre contrats sur une période de huit ans, ses conditions d'emploi ne sauraient, dans les circonstances de l'espèce, être regardées comme abusives dès lors qu'elle a toujours été recrutée pour des besoins ponctuels, essentiellement sur des périodes courtes, seuls deux contrats ayant été conclus pour une durée supérieure à cinq mois et surtout, comme l'a relevé le tribunal, dans sept collèges différents.
7. En troisième lieu, si un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie pas d'un droit au renouvellement de son contrat, l'administration ne peut légalement décider de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service.
8. Il résulte de l'instruction qu'à l'issue du dernier contrat signé par Mme A..., le centre de gestion a cessé d'être sollicité en vue de remplacements par le département du Puy-de-Dôme, qui a fait le choix de procéder à des recrutements directs. Elle ne conteste d'ailleurs pas avoir refusé les propositions d'emploi que lui ont été directement adressées par cette collectivité. La décision de ne pas renouveler son contrat ne saurait, par conséquent, être regardée ni comme étrangère à l'intérêt du service ni comme entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 38-1 du décret n° 88-145 du 15 février 1988, dans sa version applicable au litige : " Lorsqu'un agent contractuel a été engagé pour une durée déterminée susceptible d'être renouvelée en application des dispositions législatives ou réglementaires qui lui sont applicables, l'autorité territoriale lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : - huit jours avant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée inférieure à six mois (...) ".
10. S'il résulte de l'instruction que le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme n'a pas respecté le délai de prévenance prévu par les dispositions précitées, Mme A... ne justifie pas que le non-respect de ce délai lui aurait causé un préjudice ou un trouble dans ses conditions d'existence en se bornant à évoquer ses difficultés à retrouver un emploi. Elle n'établit donc pas avoir subi un préjudice indemnisable causé par une faute du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme.
11. En cinquième lieu, le détournement de pouvoir n'est pas établi.
12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses conclusions indemnitaires.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme A.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le paiement des frais exposés par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme en application de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... et au centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2024, où siégeaient :
M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,
Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,
M. Bertrand Savouré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2024.
Le rapporteur,
B. SavouréLe président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
F. Faure
La République mande et ordonne au préfet du Puy-de-Dôme en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 22LY02602