Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 17 mai 2023 par lesquelles le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office.
Par un jugement n° 2305051 du 7 novembre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 décembre 2023 M. A... B..., représenté par Me Viallard-Valezy, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2305051 du 7 novembre 2023 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler les décisions du 17 mai 2023 par lesquelles le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'articles L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnait les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien dès lors que les soins dont il doit bénéficier ne sont pas disponibles en Algérie ;
- elle méconnait les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Le préfet de la Loire, régulièrement mis en cause, n'a pas produit.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 2 février 1980, est entré en France le 17 juillet 2022 sous couvert d'un visa touristique délivré par les autorités espagnoles. Le 17 octobre 2022, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par un arrêté du 17 mai 2023, le préfet de la Loire lui a opposé un refus assorti d'une obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit. Par un jugement du 7 novembre 2023, dont M. B... interjette appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) ".
3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dont il peut effectivement bénéficier dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires et des éventuelles mesures d'instruction qu'il peut toujours ordonner.
4. Pour refuser de délivrer à M. B... un titre de séjour sur le fondement des stipulations précitées, le préfet de la Loire s'est fondé sur l'avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration du 8 mars 2023 selon lequel si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut cependant, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Algérie, effectivement y bénéficier d'une prise en charge appropriée. Il ressort des pièces du dossier, notamment des certificats établis par un praticien hospitalier du service endocrinologie, diabète et maladies métaboliques du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne les 9 septembre 2022, 13 et 24 novembre 2023 que M. B... est atteint d'une insuffisance antéhypophysaire et post hypophysaire globale entrainant notamment une formation macro nodulaire hypophysaire qui a touché le chiasma optique, entrainant des troubles de la vision, qu'il est suivi au service d'endocrinologie depuis 2022 et que son état de santé nécessite un traitement médicamenteux adapté à base de Dostinex et un traitement hormonal à base de Levothyrox, d'Androtardyl et de Minrinmel. En se bornant à produire deux certificats médicaux algériens, rédigés en des termes généraux, faisant état de l'indisponibilité en Algérie du Minrinmel et de l'Androtardyl ainsi que de neurochirurgien qualifié pour sa prise en charge, l'intéressé ne remet pas utilement en cause l'appréciation du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration dès lors, d'une part, qu'il n'est pas établi qu'il ne pourrait se voir utilement prescrire d'autres médicaments distribués dans ce pays comportant les mêmes molécules que le Minrinmel ou l'Androtardyl ou ayant des effets équivalents et, d'autre part, à supposer même qu'aucun neurochirurgien qualifié ne soit disponible en Algérie, il n'est pas établi que son état de santé nécessite l'intervention d'un tel spécialiste. Par ailleurs, aucun des documents médicaux produits n'est de nature à remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'OFII ou à établir que M. B... ne pourrait bénéficier d'une prise en charge appropriée à son état de santé en Algérie. La circonstance selon laquelle sa famille serait originaire d'une région éloignée des principaux établissements de santé algériens ne permet pas d'établir qu'il serait dans l'impossibilité de s'y rendre pour les besoins du suivi de son état de santé, dont aucune des pièces produites n'établit en outre la fréquence. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Si M. B..., qui réside en France depuis moins d'un an à la date de la décision contestée et est célibataire et sans enfant à charge, fait valoir qu'il est pris en charge par ses trois frères résidant régulièrement en France et leurs épouses et que ses parents sont décédés, il n'établit cependant pas être isolé en Algérie où, selon les termes de l'attestation d'un de ses frères, résident son frère ainé et ses sœurs, pas plus qu'il n'établit être dans l'impossibilité de recevoir le soutien et l'assistance familiale nécessaire à son état de santé dans ce pays. Au demeurant, il ne produit aucune pièce de nature à établir que son état de santé, son état psychologique ou sa santé mentale impliquerait une absence totale d'autonomie au quotidien. Dans ces circonstances, le préfet de la Loire n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
7. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 4 et 6, dès lors notamment qu'il n'est pas établi que M. B... ne pourrait accéder aux soins nécessaires à la prise en charge de son état de santé en Algérie, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision contestée sur sa situation personnelle doivent également être écartés.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.
La rapporteure,
E. Vergnaud
Le président,
F. Pourny
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY03690