Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme A... et C... B... ont demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 24 mars 2022 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a délivré un permis de construire à la société TotalEnergies Renouvelables France en vue de la réalisation d'une centrale photovoltaïque au sol sur un terrain sis lieu-dit Chazan à Chambœuf.
Par un jugement n° 2201490 du 23 novembre 2023, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 janvier et 10 juillet 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. et Mme B..., représentés par Me Manhouli, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 23 novembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 mars 2022 du préfet de la Côte-d'Or portant permis de construire ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur demande devant le tribunal administratif n'était pas tardive compte tenu de l'absence d'affichage continu et complet du permis de construire contesté ;
- le permis de construire est entaché d'un vice de procédure, faute de consultation de la communauté de communes compétente en matière d'urbanisme ;
- le projet s'étend sur deux unités foncières de sorte que le pétitionnaire aurait dû solliciter deux permis de construire ;
- le permis de construire a été délivré en violation de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ;
- l'étude d'impact comporte des lacunes et des erreurs de nature à avoir influencé le public et la décision prise par l'administration ;
- le projet méconnaît le règlement de la zone A du plan local d'urbanisme, en particulier les articles A2, A 12, AU 6 et A 11 ;
- il méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire enregistré le 16 avril 2024, la société TotalEnergies Renouvelables France, représentée par Me Gelas, conclut à titre principal au rejet de la requête ou, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer sur la requête en attendant la régularisation du permis de construire contesté et, en tout état de cause, à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- M. et Mme B... ne justifient pas de leur intérêt à agir ;
- la demande de première instance était tardive ;
- subsidiairement, elle n'est pas fondée.
Par un mémoire enregistré le 4 juillet 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- la demande de première instance était tardive ;
- subsidiairement, elle n'est pas fondée.
Par ordonnance du 10 juin 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 10 juillet 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vinet, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,
- et les observations de Me Michaud, représentant M. et Mme B..., et D..., représentant la société TotalEnergies Renouvelables France.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 24 mars 2022, le préfet de la Côte-d'Or a accordé un permis de construire à la société TotalEnergies Renouvelables France en vue de la réalisation d'une centrale photovoltaïque au sol sur un terrain sis lieu-dit Chazan à Chambœuf. M. et Mme B... relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté comme tardive leur demande tendant à l'annulation de ce permis de construire.
2. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...). ". Aux termes de l'article A. 424-15 de ce code : " L'affichage sur le terrain du permis de construire, d'aménager ou de démolir explicite ou tacite ou l'affichage de la déclaration préalable, prévu par l'article R. 424-15, est assuré par les soins du bénéficiaire du permis ou du déclarant sur un panneau rectangulaire dont les dimensions sont supérieures à 80 centimètres. ". Aux termes de l'article A. 424-16 : " Le panneau prévu à l'article A. 424-15 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, le nom de l'architecte auteur du projet architectural, la date de délivrance, le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté. / Il indique également, en fonction de la nature du projet : / a) Si le projet prévoit des constructions, la surface de plancher autorisée ainsi que la hauteur de la ou des constructions, exprimée en mètres par rapport au sol naturel ; (...). ".
3. D'une part, la société TotalEnergies Renouvelables France a fait réaliser par huissier de justice quatre procès-verbaux de constat d'affichage, les 5 avril 2022, 3 mai 2022, 3 juin 2022 et 16 juin 2022, qui attestent tous de la présence d'un panneau positionné en bordure du terrain d'implantation du projet et le long de la voie publique, dont les mentions sont visibles et lisibles depuis cette voie. Des photographies sont intégrées à ces quatre procès-verbaux et confirment ces affirmations. S'il ressort de l'examen de ces photographies qu'au cours de la période d'affichage, l'implantation du panneau d'affichage a pu être déplacée de quelques mètres, cette seule circonstance ne suffit pas à établir, contrairement à ce qu'affirment M. et Mme B... sans produire le moindre élément, que l'affichage du permis de construire en litige a été interrompu. Il en va de même s'agissant de la circonstance, non établie au demeurant, que le panneau aurait été remplacé et pas seulement déplacé. Par suite, en indiquant, notamment dans le deuxième procès-verbal de constat, que le panneau est toujours en place, l'huissier de justice n'a pas procédé à une constatation erronée ni contradictoire. Si les requérants soutiennent encore que le premier procès-verbal de constat montre que le panneau n'est pas sur le terrain d'assiette, mais en bordure de la parcelle limitrophe, une telle circonstance, au demeurant non établie, n'est pas susceptible de rendre les délais de recours inopposables, dès lors que ce panneau est positionné à proximité immédiate du terrain d'assiette du projet, et visible depuis la voie publique. Aucune des suppositions formulées par M. et Mme B... ne permet de remettre en cause la continuité de l'affichage sur le terrain d'assiette du projet en litige, établie par les quatre procès-verbaux de constats dressés par huissier de justice déjà mentionnés, et confirmée par une attestation en ce sens du 17 juin 2022 du maire de Chambœuf.
4. D'autre part, il ressort des procès-verbaux de constat que le panneau d'affichage en cause comportait les mentions exigées par les dispositions précitées du code de l'urbanisme, étant précisé que la surface des panneaux photovoltaïques n'avait pas à y figurer, ceux-ci ne présentant pas de surface de plancher telle que définie par l'article L. 111-14 du code de l'urbanisme, c'est-à-dire une surface close et couverte. L'autocollant de l'huissier, qui vise à montrer que les photographies ont été prises par lui, ne cache aucune mention obligatoire, peu important, dès lors, le point de savoir si cet autocollant a été ou non systématiquement retiré après les prises de vues. Par ailleurs, si la superficie du terrain, soit 578 375 m², lisible sur le panneau affiché le 5 avril 2022, l'était plus difficilement le 16 juin 2022, l'examen de la photographie intégrée au procès-verbal de constat dressé à cette dernière date montre que seul le deuxième chiffre était devenu moins net mais restait néanmoins lisible, ce qui, en tout état de cause, n'empêchait pas les lecteurs d'avoir une idée suffisamment précise de la dimension du terrain, supérieure à 500 000 m², et ne pouvait dès lors les induire en erreur sur l'importance et la consistance du projet. Il ressort enfin des photographies incluses dans les procès-verbaux de constat d'affichage, malgré leur résolution insuffisante pour y lire l'entièreté du texte, qu'est affiché sur le panneau, sur son bord inférieur, le permis de construire délivré à la société TotalEnergies Renouvelables France, qui comporte quatre pages et deux articles, comme celui délivré à la pétitionnaire, et dont la mise en page est également identique. Les seuls doutes émis par M. et Mme B... sur le point de savoir si le permis de construire affiché correspond effectivement à celui délivré à la société TotalEnergies Renouvelables France ne suffisent pas à remettre en cause la matérialité de cet élément. Le rapprochement entre l'intitulé " centrale photovoltaïque au sol " figurant sur le permis de construire affiché sur le panneau, et les mentions figurant sur le panneau, c'est-à-dire notamment la surface du terrain, à savoir plus de 500 000 m², et des constructions annoncées pour 132 m² de surface au sol sur 3 mètres de haut, suffisaient à mettre les tiers à même d'apprécier l'importance et la consistance du projet. Il suit de là que le délai de recours contre le permis de construire l'autorisant a couru à compter du 5 avril 2022. Dès lors, la demande de M. et Mme B..., enregistrée le 9 juin 2022 au greffe du tribunal administratif, était tardive.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt pour agir, que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leur requête doit être rejetée dans toutes ses conclusions.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme B... la somme de 2 000 euros à verser à la société TotalEnergies Renouvelables France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme B... verseront 2 000 euros à la société TotalEnergies Renouvelables France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et C... B..., à la société TotalEnergies Renouvelables France et à la ministre du logement et de la rénovation urbaine.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Michel, présidente de chambre,
Mme Vinet, présidente-assesseure,
Mme Soubié, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2024.
La rapporteure,
C. Vinet La présidente,
C. Michel
La greffière,
F. Bossoutrot
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, à la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation et à la ministre du logement et de la rénovation urbaine en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 24LY00188
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