Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération du jury d'examen de l'université Lumière Lyon 2, qui l'a ajournée au master 2, mention " langues, littératures et civilisations étrangères et régionales ", spécialité " études arabes ", au titre de l'année universitaire 2019-2020.
Par un jugement n° 2105793 du 21 décembre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 mai 2024, Mme C... B... épouse D..., représentée par Me Zabad Bustani, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2105793 du 21 décembre 2023 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler la délibération du 2 décembre 2020 l'ajournant au master 2, mention " langues, littératures et civilisations étrangères et régionales ", spécialité " études arabes ", au titre de l'année universitaire 2019-2020, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre à l'université Lumière Lyon 2, à titre principal, de lui permettre de présenter son mémoire et sa soutenance sur la base d'un sujet défini dans des conditions réglementaires, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à venir ;
4°) de mettre à la charge de l'université Lumière Lyon 2 le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros TTC au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Mme B... soutient que :
* le jury de soutenance et d'examen était irrégulièrement composé, l'acte le nommant n'a pas fait l'objet de l'affichage requis par l'article 2 de la deuxième partie du règlement général de scolarité applicable aux masters et cet acte est entaché d'un vice d'incompétence de son auteur ;
* elle n'a pas été informée de la date de l'épreuve de soutenance dans les deux semaines la précédant, en méconnaissance de la charte des examens ;
* son directeur de recherche a modifié le sujet de son mémoire un mois avant l'épreuve de soutenance, en méconnaissance de l'article L. 613-1 du code de l'éducation qui prohibe les modifications des modalités d'examen en cours d'année ;
* le tribunal n'a pas pris en compte ses notes de licence et de master 1 qui attestent de son sérieux et de la qualité de son travail.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 septembre 2024, l'université Lumière Lyon 2, représentée par le cabinet Astério, agissant par Me Bracq, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la requérante d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'université Lumière Lyon 2 fait valoir que :
* La requête, qui ne comporte pas de moyens d'appel et ne satisfait ainsi pas aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, est irrecevable ;
* l'arrêté n° 2019-183 du 29 novembre 2019 de désignation du jury, signé du directeur général des services qui bénéficiait d'une délégation pour ce faire, a été publié le 4 décembre 2019 sur le site internet de l'université et affiché sur un panneau dédié au sein des locaux de l'UFR de langues ;
* les examinateurs, enseignants-chercheurs, de l'épreuve de soutenance du mémoire de recherche ne constituaient pas un jury au sens de l'article L. 613-1 du code de l'éducation et ne devaient donc pas faire l'objet d'une désignation par arrêté ;
* le délai de prévenance de deux semaines ne s'applique pas aux épreuves individuelles telle celle de soutenance du mémoire ; il existait un cas de force majeure permettant de s'affranchir de ce délai ; la requérante, qui ne devait subir que cette épreuve orale de soutenance, n'a pas manqué de temps pour la préparer, même convoquée dix jours, au lieu de deux semaines, auparavant ; la requérante ne pouvait pas, en l'espace de cinq jours manquant à ce délai, modifier son mémoire que l'épreuve, essentiellement, évalue, de telle sorte que l'irrespect du délai de convocation n'a pas exercé d'influence sur l'évaluation de l'épreuve ;
* la nature de l'épreuve n'a pas été modifiée, le sujet a été redéfini en raison des carences méthodologiques de la requérante et des travaux qu'elle avait adressés.
Par ordonnance du 5 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 5 décembre 2024.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mars 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
* le code de l'éducation ;
* la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
* le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
* le rapport de M. Gros, premier conseiller,
* les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,
* et les observations de Me Teston représentant l'université Lumière Lyon2.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue de l'année universitaire 2018-2019, Mme B... épouse D..., inscrite à l'université Lumière Lyon 2, lauréate du master 1 qui regroupe les semestres 1 et 2 du diplôme de master, a validé le semestre 3 de ce master mention " langues, littératures et civilisations étrangères et régionales ", spécialité " études arabes ". Réinscrite en 2019-2020, elle a été ajournée à l'examen du master 2, en raison de l'insuffisance de sa note obtenue à l'épreuve de soutenance de mémoire de recherche qui évalue le semestre 4. Par le jugement attaqué du 21 décembre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du jury prononçant cet ajournement.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 613-1 du code de l'éducation : " Seuls peuvent participer aux jurys et être présents aux délibérations des enseignants-chercheurs, des enseignants, des chercheurs ou, dans des conditions et selon des modalités prévues par voie réglementaire, des personnalités qualifiées ayant contribué aux enseignements, ou choisies, en raison de leurs compétences, sur proposition des personnels chargés de l'enseignement ". Aux termes de l'article 2 intitulé " le jury " de la partie II " les examens et les jurys " du règlement général de scolarité consacré au " master 2016-2020 " de l'université Lumière Lyon 2 : " Le Président du jury, son suppléant et les membres du jury sont nommés par arrêté du Président de l'université. L'arrêté fait l'objet d'un affichage avant le commencement des épreuves / Le jury de semestre est composé de son Président, du suppléant, d'au moins deux autres enseignants-chercheurs, enseignants ou chercheurs participant à la formation et d'une personnalité qualifiée issue du monde socioprofessionnel / Le jury de second semestre est présidé par le Président ou son suppléant, délibère sur le second semestre et proclame le résultat de l'année / Il se réunit une ou plusieurs fois dans le cadre de la session d'examen inscrite au calendrier universitaire / En Master 2, le jury statue sur les deux semestres en fin d'année universitaire et se réunit annuellement. Dans ce cas, les résultats ne sont publiés qu'après ce jury de fin d'année / Toutefois après avis de la DFVE [direction de la formation et de la vie étudiante], et stipulé dans les MCC [modalités de contrôle des connaissances], le jury peut être semestriel. Dans ce cas les résultats sont publiés à la fin de chaque semestre ". L'article 4 de ce règlement dispose que " La soutenance des mémoires et rapports de stage s'effectue devant au moins deux examinateurs. Une personnalité qualifiée issue du monde socioprofessionnel peut être désignée comme examinateur par le responsable du diplôme ".
3. D'une part, l'arrêté du 29 novembre 2019 a été pris par le directeur général des services de l'université, M. E... A.... Ce dernier bénéficiait à cet effet d'une délégation de signature que lui avait consentie la présidente de l'université, par un arrêté du 14 septembre 2018 publié sur le site internet de l'établissement le 24 septembre suivant. L'arrêté du 29 novembre 2019 a été affiché dans les locaux de l'unité de formation et de recherche (UFR) des langues, de décembre 2019 jusqu'après l'adoption des délibérations de l'ensemble des jurys de master 2019-2020 et a également fait l'objet d'une publication sur le site internet de l'université, dès le 4 décembre 2019. Ces mesures de publicité rendaient opposable la décision désignant le jury du diplôme de master 2 " LLCER études arabes " aux étudiants inscrits au sein de ce cursus. Par suite, le moyen tiré de la désignation irrégulière du jury du diplôme en litige doit être écarté.
4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que le jury du master 2 " LLCER [langues, littératures et civilisations étrangères et régionales] études arabes ", également jury des semestres 3 et 4, nommé par un arrêté du 29 novembre 2019, comprenait, outre son président et son vice-président, quatre enseignants-chercheurs et une personnalité qualifiée. La circonstance que l'un des deux examinateurs, enseignants-chercheurs, de l'épreuve de soutenance de mémoire du 25 novembre 2020, n'était pas membre du jury n'affecte pas la régularité de la délibération d'ajournement contestée, aucun principe général, en l'absence de texte spécial, ne s'opposant à ce qu'il soit fait appel à des examinateurs non membres du jury.
5. En deuxième lieu, l'article L. 613-1 du code de l'éducation dispose également que " Les aptitudes et l'acquisition des connaissances sont appréciées, soit par un contrôle continu et régulier, soit par un examen terminal, soit par ces deux modes de contrôle combinés. Les modalités de ce contrôle (...) doivent être arrêtées dans chaque établissement au plus tard à la fin du premier mois de l'année d'enseignement et elles ne peuvent être modifiées en cours d'année ".
6. Le second semestre du master 2 " LLCER études arabes ", était évalué par une épreuve ponctuelle terminale consistant en la soutenance d'un mémoire de recherche. Cette modalité de contrôle n'a pas été modifiée en cours d'année. Ensuite, il ressort des pièces du dossier que Mme B... devait rédiger un mémoire dont le sujet était intitulé " édition critique et traduction d'un épisode inédit du roman de Baybars selon la recension damascène ". Or, s'abstenant de suivre la méthodologie que lui avait à cette fin indiquée son directeur de recherche, elle a rendu des écrits ne correspondant pas au sujet qui avait été déterminé d'un commun accord entre elle-même et cet enseignant. Ce dernier a alors proposé, au profit de la requérante, d'adapter au contenu du mémoire produit le libellé du sujet, que Mme B... elle-même, le 15 novembre 2020, a renommé " un regard sur les traits généraux du Roman de Baybars selon la recension damascène ". Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'une modalité de l'examen, c'est-à-dire le sujet de son mémoire, aurait été modifiée par son directeur de recherche en cours d'année, un mois avant l'épreuve de soutenance du mémoire qui s'est déroulée le 25 novembre 2020. Le moyen tiré de l'irrégularité de l'épreuve au regard des dispositions visées ci-dessus de l'article L. 613-1 du code de l'éducation doit par conséquent être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes du paragraphe " 1. Convocation des candidat.es aux examens " de la charte des examens annexée au règlement intérieur de l'université lumière Lyon 2 : " La convocation aux épreuves des examens sera réalisée par voie d'affichage, et tout autre moyen de communication. Elle comporte l'indication de la date, de l'heure et du lieu de chaque épreuve. Une convocation individuelle sera adressée par courrier postal et/ou par mail aux étudiant.es dispensé.es d'assiduité. / Le délai entre l'affichage (tenant lieu de convocation) et l'examen ne pourra en aucun cas être inférieur à deux semaines, sauf en cas de force majeure. / Un calendrier des épreuves devra être publié dans un délai de quinze jours avant le début du déroulement des examens terminaux, sauf en cas de force majeure ".
8. Il ressort des pièces du dossier que l'enseignant directeur de recherche de la requérante l'a convoquée, par courriel 15 novembre 2020, à l'épreuve de soutenance dont il a fixé la date au 25 novembre à 16 heures, soit dans un délai inférieur à celui prévu par la charte des examens. Toutefois, à la date de cette convocation, Mme B... venait d'adresser à cet enseignant la version définitive de son mémoire de recherche, qu'elle devait désormais soutenir, et ne devait se consacrer qu'à la préparation de la présentation, limitée à 15 minutes, de sa " problématique ", sa " démarche ", ses " résultats " et " les principaux obstacles " " rencontrés ", qui serait suivie d'un " échange avec le jury qui [lui] fera part de ses appréciations et posera des questions sur [son] travail ". Cette épreuve de soutenance, à laquelle elle se préparait nécessairement par la rédaction de son mémoire, était, pour ce qui la concerne, l'unique épreuve de la session d'examen 2020. La note de 4 sur 20 qu'elle a obtenue à cette épreuve sanctionne essentiellement son travail écrit, qui est le mémoire, estimé " inabouti et très mal structuré ", " [ressemblant] davantage à une ébauche de projet ", qui " ne répond pas encore, dans sa forme actuelle, aux exigences d'un mémoire universitaire de niveau M2 ". Dans ces conditions, la restriction à 10 jours du délai de prévenance, bien que constitutive d'un vice de procédure, n'a pas privé la requérante d'une garantie et n'a pas eu d'influence sur l'évaluation de l'épreuve. Un tel vice n'est donc pas de nature à entacher d'illégalité la délibération attaquée.
9. En dernier lieu, les résultats à ses examens de licence et de master 1 dont se prévaut la requérante sont sans influence sur la légalité de la délibération attaquée et il n'appartient pas au juge administratif de contrôler les appréciations portées par un jury sur la valeur des prestations d'un candidat à un examen.
10. Il résulte de tout ce qui précède, sans besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction doivent, en conséquence, être également rejetées.
Sur les frais de l'instance :
11. L'université Lumière Lyon 2 n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions formées à son encontre par Mme B... sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'université Lumière Lyon 2 présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... épouse D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'université Lumière Lyon 2 présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... épouse D... et à l'université Lumière Lyon 2.
Copie en sera adressée au recteur de la région académique Auvergne-Rhône-Alpes, recteur de l'académie de Lyon.
Délibéré après l'audience du 13 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
M. Gros, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025.
Le rapporteur,
B. Gros
Le président,
F. Pourny
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
2
N° 24LY01465