Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 12 septembre 2024 par lesquelles la préfète du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2409208 du 19 septembre 2024, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
I - Par une requête enregistrée le 10 octobre 2024 sous le n° 24LY02888, M. A... B..., représenté par Me Zoccali, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2409208 du 19 septembre 2024 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler les décisions du 12 septembre 2024 par lesquelles la préfète du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur l'obligation de quitter le territoire :
- cette décision méconnait les stipulations du 4° de l'article 6 de l'accord franco-algérien en vertu duquel il remplit les conditions pour bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour de plein droit en sa qualité de parent d'un enfant français ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ainsi que du 3 de l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- cette décision est dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant.
La préfète du Rhône, régulièrement mise en cause, n'a pas produit.
Par une décision du 20 novembre 2024, M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
II - Par une requête enregistrée le 10 octobre 2024 sous le n° 24LY02891, M. A... B... représenté par Me Zoccali, demande à la cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 2409208 du 19 septembre 2024 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'exécution du jugement n° 2409208 du 19 septembre 2024 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon et, par suite, de la mesure d'éloignement forcée dont il fait l'objet, risque d'entrainer des conséquences difficilement réparables ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 12 septembre 2024 méconnait les stipulations du 4° de l'article 6 de l'accord franco-algérien en vertu duquel il remplit les conditions pour bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour de plein droit en sa qualité de parent d'un enfant français ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ainsi que du 3 de l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français prise à son encontre le 12 septembre 2024 est dépourvue de base légale et méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant.
La préfète du Rhône, régulièrement mise en cause, n'a pas produit.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, conclue à Rome le 4 novembre 1950 ;
- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 16 mai 1990, est entré en France en octobre 2018 selon ses déclarations. Par un arrêté du 12 septembre 2024, la préfète du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un jugement du 19 septembre 2024, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande tendant à l'annulation de ces décisions. M. B... relève appel de ce jugement et, par une requête séparée, demande qu'en soit ordonné le sursis à exécution. Ces requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, indépendamment de l'énumération donnée par l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable à la date de la décision attaquée, des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une telle mesure à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Lorsque la loi prescrit, ou qu'une convention internationale stipule, que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.
3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ; (...) ". Ces stipulations ne privent pas l'autorité compétente du pouvoir qui lui appartient de refuser à un ressortissant algérien la délivrance du certificat de résidence d'un an lorsque sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public.
4. D'une part, il est constant que M. B... est le père d'une enfant née le 19 juillet 2022, dont la mère est ressortissante française, et qu'il a reconnue après sa naissance. S'il soutient résider auprès de la mère et de l'enfant, les factures de la crèche adressées à " Mme B.../C... " et les factures d'abonnement à la fibre ou les documents médicaux au nom de M. B... mentionnant la même adresse n'attestent pas de façon suffisamment probante que l'intéressé vivait avec la mère de son enfant à la date de la décision contestée. En outre, cette dernière a déclaré, lors de l'interpellation de M. B... à son adresse, que l'intéressé était son ex compagnon et qu'elle souhaitait qu'il quitte les lieux. Les attestations établies postérieurement ne sont accompagnées d'aucun élément de nature à établir la vie commune à la date de la décision litigieuse. Par ailleurs, le requérant n'a produit aucun document de nature à démontrer qu'il subviendrait aux besoins de sa fille depuis sa naissance ou depuis au moins un an ou qu'il exercerait, même partiellement, l'autorité parentale.
5. D'autre part, il n'est pas contesté que M. B... a fait l'objet d'une précédente obligation de quitter le territoire français le 14 novembre 2018 qu'il n'a pas exécutée. Il ressort en outre des pièces du dossier qu'il a été condamné le 18 mars 2019 à six mois d'emprisonnement pour des faits de recel de bien provenant d'un vol, vol aggravé par deux circonstances et vol en réunion, peine assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans et qu'il a fait l'objet, le 10 avril 2019 puis le 4 janvier 2021, de nouvelles condamnations respectivement à deux puis neuf mois d'emprisonnement pour des faits de recel de bien provenant d'un vol et de vol aggravé par deux circonstances, en récidive. Il en ressort également qu'il faisait, lors de son interpellation, l'objet d'une fiche de recherche pour l'exécution d'une peine de prison de quatre mois. Dans ces conditions, la préfète du Rhône pouvait, sans commettre d'erreur d'appréciation, considérer que son comportement était constitutif d'une menace à l'ordre public.
6. Eu égard à ce qui a été précédemment exposé, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'il remplissait les conditions pour la délivrance d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement des stipulations du 4° de l'article 6 de l'accord franco-algérien.
7. En deuxième lieu, au regard des motifs exposés aux points 4 et 5 du présent arrêt, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ainsi que de celles du 3 de l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doivent également être écartés.
Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.
9. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 4 et 5 du présent arrêt, les moyens tirés de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans seraient contraires aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions tendant à ce que soit ordonné le sursis à exécution du jugement du 19 septembre 2024 :
11. Dès lors le présent arrêt se prononce sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement n° 2409208 du 19 septembre 2024 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon, les conclusions aux fins de sursis à exécution de ce jugement deviennent sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur les frais d'instance :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante, les sommes demandées par M. B... sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution présentées pour M. B....
Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 13 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025.
La rapporteure,
E. Vergnaud
Le président,
F. Pourny
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24LY02888-24LY02891