Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2023 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2302809 du 18 janvier 2024, le tribunal a annulé l'arrêté du 11 septembre 2023, a enjoint au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 19 février 2024, le préfet de la Côte-d'Or, représenté par Me Rannou, demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée devant le tribunal par M. A....
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a retenu que le refus de titre de séjour portait une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les autres moyens soulevés devant le tribunal par M. A... n'étaient pas plus fondés.
Par un mémoire enregistré le 14 mars 2025, M. A..., représenté par Me Grenier, conclut au rejet de la requête et qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à juste titre que le tribunal a estimé que le refus de titre portait atteinte à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le refus de titre est insuffisamment motivé ;
- son état civil n'est pas frauduleux ;
- le préfet a commis une erreur de droit en rejetant sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 423-22 sans examiner les conditions prévues par ce texte ;
- il y a méconnaissance de ces dispositions ;
- le refus de titre est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre ;
- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision de délai de départ volontaire et celle fixant le pays de renvoi sont illégales du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure,
- et les observations de Me Grenier pour M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., déclarant être né le 31 décembre 2002, de nationalité ivoirienne, est entré en France en juin 2018. Il a été pris en charge par le service d'aide sociale à l'enfance à compter du 5 juillet 2018. Il a sollicité le 18 décembre 2020 un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 11 septembre 2023, le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le préfet de la Côte-d'Or relève appel du jugement du 19 janvier 2024 par lequel tribunal administratif de Dijon a annulé, à la demande de M. A..., cet arrêté, lui a enjoint de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2. M. A..., présent en France depuis plus de cinq ans à la date de la décision litigieuse, a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance du département de la Côte-d'Or par décision du 23 juillet 2018. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport éducatif de la structure qui l'a accueilli que celui-ci a fait preuve de sérieux dans ses études et obtenu un certificat d'aptitude professionnelle (CAP) Cuisine en juillet 2021. Il a donné entière satisfaction à ses employeurs dans le cadre de son contrat d'apprentissage, signé en juillet 2019, qui a été prolongé en juillet 2021 afin de suivre une formation d'apprenti pâtissier. Son employeur a conclu avec lui un contrat à durée indéterminée à partir du 1er février 2022. Ainsi, à la date de la décision en litige, M. A... travaillait dans le même restaurant depuis plus de quatre ans et bénéficiait d'un contrat à durée indéterminée depuis dix-huit mois. Les rapports des services sociaux font état d'autonomie, d'un comportement sérieux et sociable et d'une bonne insertion. Il ressort également de ce rapport que M. A... n'a plus de contact avec sa mère et que son père, avec lequel il avait quitté la Côte-d'Ivoire, est décédé lors de leur voyage. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, le préfet de la Côte-d'Or a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de régulariser la situation de M. A... eu égard aux effets de sa décision sur sa situation personnelle.
3. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Côte-d'Or n'est pas fondé à sa plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal a annulé son arrêté du 11 septembre 2023, lui a enjoint de délivrer à M. A... un titre de séjour " vie privée et familiale " et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
4. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. A....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de la Côte-d'Or est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. B... A....
Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 20 mars 2025 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;
M. Chassagne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 avril 2025.
La rapporteure,
A. Duguit-LarcherLe président,
V-M. Picard
La greffière,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24LY00467
kc