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17/04/2025 | FRANCE | N°24LY01930

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 6ème chambre, 17 avril 2025, 24LY01930


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 2 juin 2024 par laquelle la préfète du Rhône l'a assigné à résidence dans le département du Rhône pour une durée de quarante-cinq jours.



Par un jugement n° 2405389 du 7 juin 2024, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.





Procédure devant la cour :



Par u

ne requête enregistrée le 8 juillet 2024, M. B... A..., représenté par Me Cayuela, demande à la cour :



1°) d'annuler le jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 2 juin 2024 par laquelle la préfète du Rhône l'a assigné à résidence dans le département du Rhône pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2405389 du 7 juin 2024, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 juillet 2024, M. B... A..., représenté par Me Cayuela, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2405389 du 7 juin 2024 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 2 juin 2024 par laquelle la préfète du Rhône l'a assigné à résidence dans le département du Rhône pour une durée de quarante-cinq jours ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A... soutient que :

- la décision est entachée d'erreurs de fait sur son lieu de naissance et sa nationalité ;

- subsidiairement, l'assignation à résidence ne pouvait être prise pour l'exécution d'une obligation de quitter le territoire français datant de plus d'un an et devenue caduque et c'est à tort que le tribunal a appliqué rétroactivement les dispositions de la loi du 26 janvier 2024 ;

- infiniment subsidiairement, la décision a été prise sans examen de sa situation, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La préfète du Rhône, régulièrement mise en cause, n'a pas produit.

Par décision du 11 septembre 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, modifiée, conclue à Rome le 4 novembre 1950 ;

- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Stillmunkes, président assesseur.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 27 décembre 1995, a fait l'objet d'une première obligation de quitter le territoire français le 28 février 2022, modifiée le 24 mars 2022 pour lui retirer le bénéfice d'un délai de départ volontaire et ayant donné lieu à une première assignation à résidence, puis d'une seconde obligation de quitter le territoire français sans délai le 16 avril 2023. Par une décision du 2 juin 2024, la préfète du Rhône l'a assigné à résidence dans le département du Rhône pour une durée de quarante-cinq jours, pour l'exécution de cette dernière mesure d'éloignement. M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de la décision d'assignation à résidence du 2 juin 2024. Par le jugement attaqué du 7 juin 2024, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

2. En premier lieu et d'une part, aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction antérieure à la loi susvisée du 26 janvier 2024 : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : / 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé (...) ".

3. D'autre part, aux termes du 2° du paragraphe VI de l'article 72 de la loi susvisée du 26 janvier 2024 : " 2° Au 1° de l'article L. 731-1, les mots : " d'un an " sont remplacés par les mots : " de trois ans " ". Enfin, aux termes de l'article 86 de la même loi, relatif à son régime transitoire : " (...) / IV. - L'article 72, à l'exception du 2° du VI, l'article 73, le I de l'article 74, les 6° à 10° de l'article 75, l'article 76 et les 2°, 8° et 11° du II de l'article 80 entrent en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d'Etat, et au plus tard le premier jour du septième mois suivant celui de la publication de la présente loi (...) ".

4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le législateur n'a pas entendu reporter l'entrée en vigueur de l'article L. 731-1, 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue du 2° du paragraphe VI de l'article 72 de la loi susvisée du 26 janvier 2024. Cette entrée en vigueur est dès lors intervenue, conformément aux dispositions générales de l'article 2 du code civil, le lendemain de la publication de cette loi au journal officiel, survenue le 27 janvier 2024, soit une entrée en vigueur le 28 janvier 2024.

5. Compte tenu de ce qui vient d'être exposé aux points qui précédent, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la préfète du Rhône ne pouvait, le 2 juin 2024, prendre une mesure d'assignation à résidence pour l'exécution d'une obligation de quitter le territoire français prise le 16 avril 2023, soit moins de trois ans auparavant.

6. En deuxième lieu, la préfète du Rhône a, dans les visas de son arrêté, indiqué que M. A... est " né à Betna (Algérie) " et qu'il est " de nationalité algérienne ". D'une part, si dans un paragraphe ultérieur, la préfète du Rhône a indiqué que " M. A... B... déclare être titulaire d'un passeport tunisien ", cette circonstance, qui ne caractérise pas une erreur sur la nationalité du requérant mais une simple erreur de plume, sans incidence sur le sens de la décision, n'est pas de nature à entacher la décision d'illégalité. D'autre part, si le requérant soutient que la préfète du Rhône a commis une erreur sur son lieu de naissance, il ressort des pièces algériennes d'état-civil qu'il produit que la commune de Barika où il est né est située dans la wilaya de Batna et il ressort du procès-verbal d'interpellation du 1er juin 2024 ainsi que du procès-verbal d'audition du 2 juin 2024 qu'il a lui-même itérativement indiqué être né à Batna. La mention de la wilaya comme lieu de naissance au lieu de la commune est par ailleurs sans incidence possible sur le régime d'assignation à résidence. Ainsi, en reprenant le nom de la wilaya que l'intéressé a lui-même indiqué, au lieu du nom de la commune, la préfète du Rhône n'a pas entaché sa décision d'une erreur matérielle de nature à l'entacher d'illégalité.

7. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de l'analyse de la situation de M. A... faite par la préfète du Rhône dans son arrêté, qu'elle n'a pas omis d'examiner cette situation, sans que les erreurs sans portée utile mentionnées au point précédent permettent à elles seules de caractériser un défaut d'examen.

8. En quatrième lieu, l'obligation de quitter le territoire français sans délai du 16 avril 2023 relève que M. A... serait entré irrégulièrement en février 2022 et qu'il n'établit aucune attache significative sur le territoire français. Il résulte des procès-verbaux cités au point 6 qu'il a été interpelé le 1er juin 2024 en flagrant délit de vol, avec deux complices dont l'un au moins était armé et qu'il a fourni une fausse identité. Il résulte des informations produites en défense en première instance qu'il est par ailleurs connu pour des faits antérieurs de vol en réunion et de dégradation du bien d'autrui en réunion. M. A... se borne à produire un acte de reconnaissance anticipée d'enfant daté du 8 août 2023 et un acte de naissance du 14 décembre 2023, sans aucun élément probant sur une éventuelle relation avec la mère ou le cas échéant avec l'enfant à la date de la décision. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, en assignant M. A... à résidence dans le département du Rhône pour les besoins de l'exécution de la mesure d'éloignement précitée, et en lui faisant obligation de présentation uniquement deux fois par semaine, les lundis et jeudis, la préfète du Rhône n'a ni méconnu le droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale tel qu'il est garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entaché sa décision d'erreur d'appréciation dans la mise en œuvre des dispositions précitées de l'article L. 731-1, 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 31 mars 2025, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

M. Gros, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 avril 2025.

Le rapporteur,

H. Stillmunkes

Le président,

F. Pourny

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY01930


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY01930
Date de la décision : 17/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Henri STILLMUNKES
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : CAYUELA

Origine de la décision
Date de l'import : 27/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-17;24ly01930 ?
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